Claude Mutafian / CCAF

90 ans après
Le génocide des Arméniens

1915-17. Le génocide parfait

C'est à l’aube du 24 avril 1915 que fut déclenché le génocide, avec l’arrestation des élites arméniennes de Constantinople. Le processus se poursuivit les jours suivants. En un mois, plus de mille intellectuels furent déportés en Anatolie et massacrés en route, dont des députés du parlement comme Krikor Zohrab, ami intime de Talaat. La nation s’en trouva décapitée. Le 24 avril 1915 reste la date commémorative du génocide des Arméniens.

Partout en Asie Mineure orientale le processus obéit à un schéma inflexible. On extorquait des aveux aux notables avant de les liquider hors de l’agglomération. Suivait l’ordre général de déportation. Les hommes valides étaient séparés du groupe et fusillés à quelques kilomètres de là. Dans les régions éloignées, la tuerie avait même lieu sur place.

 

Axes de déportation des populations arméniennes et camps de concentration en 1915-1916

Carte des déportations des Arméniens lors du génocide

[cliquer sur la carte pour l'agrandir]

Ces massacres se faisaient sous le couvert d’une déportation « provisoire » : officiellement, il fallait éloigner la population civile des zones proches du front. Les axes avaient été soigneusement planifiés, avec Alep pour plaque tournante. Un faible pourcentage des déportés y parvenait, vu les ravages causés par les maladies, la faim, la soif auxquels s’ajoutaient les perpétuels sévices, rapts, viols, attaques de bandes armées et tueries. En trois mois, le gros du travail était fait, et fin juillet 1915 il ne r'ait quasiment aucun Arménien, sur plus d’un million, dans l’' de l’Asie Mineure. A l’Ouest, en particulier en Cilicie, le prétexte de la proximité du front ne pouvait plus être invoqué ; peu importait. Les survivants étaient envoyés dans les déserts de Syrie ou de Mésopotamie.

En Syrie, le charnier de Deir Zor symbolise le calvaire d’un peuple. En juin-juillet 1916 Talaat ordonna d’achever les derniers Arméniens. à la fin de 1916, seuls survivaient ceux de Constantinople et de Smyrne, de rares îlots épargnés et les quelques dizaines de milliers de personnes qui avaient suivi l’armée russe dans sa retraite.

 

Des Arméniens sauvés à Moussa Dagh Le sauvetage des Arméniens du Moussa Dagh par un croiseur français

 

Lorsqu’il fut connu que déportation signifiait massacre, les actes de résistance se multiplièrent. Le plus célèbre est celui des Quarante jours du Moussa Dagh, immortalisé par le roman de Franz Werfel. En été 1915, sur cette montagne de Moïse de la côte septentrionale syrienne, une population de 4 000 Arméniens, par familles entières, résista plus d’un mois et demi au siège de l’armée turque. Elle fut sauvée par l’arrivée inespérée d’une escadre française qui aperçut le drapeau sur lequel était inscrit en grosses lettres un message en anglais : « Chrétiens en péril : au secours ».

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