Lettre du 7 novembre 1916 de M. Aristide Briand, Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangère, à M. Louis Martin, sénateur du Var.
Il s'agit d'une réponse à cette lettre de Louis Martin
Ainsi que vous le déclarez dans la lettre que vous avez bien voulu m'adresser au sujet de la situation des Arméniens, la France, oubliant ses propres épreuves, a partagé l'émotion douloureuse des nations civilisées devant l'horreur des atrocités commises contre les Arméniens. Elle a détourné un moment ses pensées des crimes perpétrés sur son territoire contre la population civile pour adresser l'hommage de sa pitié à ces autres martyrs du droit et de la justice. Le Gouvernement de la République a tenu dans les circonstances solennelles à flétrir les crimes des Jeunes-Turcs et à livrer au jugement de la conscience humaine leur monstrueux projet d'extermination de toute une race, coupable à leurs yeux d'avoir aimé le progrès et la civilisation. Les représentants de la France auprès des Puissances neutres ont été mis en possession de tous les documents qui devaient leur permettre de faire connaître autour d'eux les événements survenus. Pour l'honneur de l'humanité, nous devons conserver l'espoir que les protestations indignées que certaines de ces Puissances ont déjà fait entendre à Constantinople contribueront à soustraire la Nation Arménienne à de nouveaux attentats.
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Le Gouvernement de la République a déjà pris soin de faire notifier officiellement à la Sublime-Porte que les Puissances Alliées tiendront personnellement responsables des crimes commis tous les membres du Gouvernement Ottoman, ainsi que ceux de ses agents qui se trouveraient impliqués dans les massacres. Quand l'heure aura sonné des réparations légitimes, il ne mettra pas en oubli les douloureuses épreuves de la Nation Arménienne et, d'accord avec ses alliés, il prendra les mesures nécessaires pour lui assurer une vie de paix et de progrès.
Aristide Briand.
Reproduit d'après : Basmadjian K.J., Histoire Morderne des Arméniens, Paris, J. Gamber, 1922 (p. 220-221)
Cette même lettre a été publiée dans la brochure du pasteur suisse A. Krafft-Bonnard, L'Heure de l'Arménie (1922)