p. 190 « Le caractère de dualité de l’organisation [le Parti Ittihad] était constamment maintenu d’une manière précise… Son caractère secret était élaboré et exploré par une organisation séparée. Le corps entier ressemblait exactement à un iceberg comportant une partie visible et une partie invisible »
p.210 « Talat était également conscient de la capacité de la partie secrète de l’Ittihad à glisser facilement dans des entreprises illégales »
p. 182 « L’Ittihad était une clique exerçant un pouvoir de monopole, qui donnait les ordres derrière les rideaux (her şeyi perde arkasından hükmeden)… Le grand Empire était entre les mains de ces huit individus… opérant secrètement et d’une manière organisée derrière un mystérieux rideau… Une oligarchie secrète qui avait recours aux armes à chaque fois qu’elle ne pouvait pas faire taire les idées… »
p. 54 - Déjà dès 1906, les fondateurs de l’Ittihad exprimèrent leur réticence ou leurs réserves quant à l’adhésion parmi eux de non-Musulmans et de non-Turcs malgré l’article 6 de leurs statuts autorisant de telles adhésions.
p. 156 - « Contrairement à son règlement qui stipulait la promotion de l’unité des divers éléments dans le système ottoman, l’Ittihad refusait que les non-Turcs deviennent membres de son Comité Central. Son secret avait pour but de couvrir le décalage entre son programme [théorique] d’ottomanisation et son application [pratique] d’un programme de turquisation. En outre, la pratique du secret était probablement due au modus operandi d’une organisation qui ne reculait pas devant le meurtre de gens afin d’atteindre ses buts politiques » (siyasal amaçlarına ulaşmak için adam öldürmekten kaçınnmıyan).
p. 275 « La mission de l’Organisation Spéciale était fourchue : aussi bien l’interne que l’externe. Elle devait s’adapter aux exigences de la guerre, but pour lequel des brigands et des chefs de brigands furent assurés. L’esprit qui prédominait était celui qui s’était développé dans les Balkans à la poursuite des brigands… La Direction de l’Organisation Spéciale fut dévolue, après nombre de discussions, ni à Enver, ni à Talat, mais au Comité Central ».
p. 244 « Les directives pour l’opération de l’Organisation Spéciale étaient élaborées au Comité Central »
pp. 216-218. Les secrets de l’Organisation Spéciale avaient besoin d’être protégés. « Talat insistait pour le maintien de l’Ittihadisme dans la période d’après-guerre par une organisation secrète » (p. 217) Le résultat en fut le réengagement des dirigeants de l’ex-Organisation Spéciale.
p. 258 « L’Organisation Spéciale avait pour objectif de fonctionner comme instrument pour la réalisation des politiques interne et externe de l’Etat Ottoman.
Elle a été créée par le Comité Central de l’Ittihad. Les dirigeants ittihadistes étaient choisis conjointement par Talat et le Comité Central… Des brigands étaient attachés à l’Organisation ».
p. 102 - « L’Organisation Spéciale a été créée et renforcée par Enver Paşa pour contrecarrer les mouvements séparatistes qui envahissaient le pays. Le but principal de l’organisation était la consolidation de l’unité politique ».
p. 18 . E. Kuscubasi « C’est un fait que l’Organisation Spéciale a rendu des services que les forces à la disposition du gouvernement et l’ensemble des lois et de l’ordre ne pouvaient absolument pas rendre. Les mesures prises pour ces services s’appliquaient aux zones à l’intérieur des frontières de l’Empire Ottoman où des races et des nationalités non-turques et non-musulmanes constituaient la majoritédes populations de ces zones, et qui étaient toujours suspectes, au sujet de leurs frontières et de leur loyauté, aux autorités centrales. Ces services étaient tellement tenus au grand “secret” que même les ministres du Cabinet n’étaient pas au courant… Le plan de l’Organisation impliquait de prendre des mesures en vertu desquelles les dommages des legs du passé que l’Etat Ottoman avait porté sur les épaules comme un fardeau et l’héritage des siècles pouvaient être réduits au minimum. Quand j’y pense aujourd’hui, je trouve moi aussi que ce plan était excessivement courageux » (aşırı cesaretı).
P. 36 « L’Organisation Spéciale, un organe secret, devait devenir l’édifice fondamental destiné à assurer la sécurité interne et externe de l’Etat Ottoman… Pour ce but, elle a formé ses propres cadres, ses uniformes, son trésor, ses chiffres, devenant un état dans l’Etat… En assumant les devoirs qui dépassaient les limites normales, elle a acquis une personnalité morale. A la poursuite de ses trois principaux objectifs, c’est-à-dire : unifier la Turquie (muhtelif unsurlarin birligi) l’Union Islamique et le Pan-Turquisme, l’Organisation a mis en œuvre les politiques intérieures et extérieures de l’Etat, en accomplissant les tâches les plus importantes et en même temps les plus dangereuses » .
P. 78 « J’avais assumé mes devoirs [dans des opérations qui tournaient autour] de l’histoire intérieure [des déportations arméniennes]" (Ermeni tehciriyle alâkadar… hadiselerin iç yüzünde vazife almiş bir insan olarak) »
p. 63. Déclaration de la Cour Martiale, le juge président interrogeant le Colonel Cevad, ex-gouverneur militaire (muhafiz) d’Istanbul : « Le Ministre de la Guerre nous a informé oralement qu’il y avait deux sortes d’Organisation Spéciale. L’un était gérée par le Bureau de la Guerre, l’autre était attachée au Parti Ittihad. Le texte écrit de cette information va suivre ».
p. 88. Témoignage du membre du Comité Central Yusuf Riza : « La seconde catégorie d’Organisation Spéciale a été créée pour mettre en œuvre les déportations dans certaines provinces, régions et quartiers car la gendarmerie dans ces localités ne dispose pas de forces suffisantes pour les appliquer ».
p. 90. Le juge président interrogeant le dirigeant de l’Ittihad Küçük Talat (Müskara) : « Votre collègue Riza a attesté qu’étant donné l’insuffisance des forces de gendarmerie dans certaines provinces l’affaire de la déportation exigeait la création d’une nouvelle Organisation Spéciale qui fût différente de celle qui appartenait au Ministère de la Guerre »..
p. 124. Je Juge président interrogeant de nouveau Yusuf Riza : « L’autre jour, vous avez déclaré qu’il y avait une autre Organisation Spéciale distincte de celle identifiée par le Ministère de la Guerre ».
p. 203. Témoignage de l’ex-Ministre des Travaux Publics, le Général Çürüksulu Mahmoud Paşa : « Il n’y a pas de transcriptions de ceci car aucun enregistrement n’a été fait [ lors des réunions du Conseil du Cabinet] »
p. 347. Témoignage de l’ex-Ministre de l’Education et chef ittihadiste Ahmed Sükrü en réponse à une question sur les décisions relatives à l’intervention de la Turquie dans la guerre aux côtés de l’Allemagne Impériale : « Selon le degré d’importance de l’affaire, des décisions peuvent être prise hors d’enregistrement, c’est-à-dire, verbalement ou par écrit… la décision parvenant au Conseil de Cabinet était communiquée par le Grand Vizir et oralement au Ministre des Affaires Etrangères, ou par écrit, de la façon qu’ils le voulaient ».
Témoignage de l’ex-Grand Vizir Said Halim Paşa :
pp. 290-291. Parlant des massacres arméniens : « J’ai entendu parler de cette tragédie quand tout était terminé, exactement comme tout le reste… Il faut vous adresser au Ministre de la Guerre pour l’explication que vous cherchez ».
p. 295 Parlant des atrocités perpétrées contre les Arméniens et les Arabes : « Oui, je n’ai eu aucune connaissance de ces quelques méfaits » .
pp. 325.326. « Les rapports des commissions qui ont été envoyés à l’intérieur pour enquêter sur les mauvais traitements [contre les déportés] m’ont été dissimulés pendant des mois. Il était évident que le Ministre de l’Intérieur était déterminé à ne pas divulguer leurs contenus, et à les cacher par des excuses obligatoires ».
p. 1490. « La structure de l’Organisation Spéciale restait nécessairement secrète… Ses rangs comprenaient les officiers très précieux du personnel de l’armée, et des commandants âgés et expérimentés. Dans le secteur civil, ils attiraient des personnages sélects et renommés, identifiés dans les domaines des arts, de la littérature et de la religion. Les membres des “Turkish Hearths” (Foyers turcs - Türk ocaklari), le centre du pouvoir, de la force et de la volonté du nationalisme turc, furent enrôlés comme unités de cadre dans les rangs de l’Organisation Spéciale. Les opérations de l’Organisation Spéciale ne pouvaient pas être incorporées dans les archives de la littérature ou celles de l’Etat, puisque l’organisation était un organisme entièrement secret. Il était impliqué dans des actions de nature de faits accomplis, et qui étaient le résultat de décisions individuelles et personnelles. » (sahsi ve ferdi kararlar).
pp. 34-35 : « L’Ittihad a gouverné la Turquie en temps de guerre, largement en secret pour que même le Parti ignore les décisions du Conseil ».
p. 89. « Pour nous, la nature et les organisateurs des déportations sont toujours restés un secret. Toutes les questions sur ce sujet recevaient constamment de vagues réponses… De toute façon, même un homme d’acier n’aurait pu suffire à atteindre une si terrible décision qui, cependant était clairement nécessaire à la cause du pays ».
[ L’auteur était un Ittihadiste proéminent, et éditeur de Tanin, le porte parole de l’Ittihad, selon les instructions de son Secrétaire Général, Midhat Sükrü].
p. 1114. « Les préparations requises pour la liquidation des éléments chrétiens furent tenues secrètes, même des ministres ».
p. 484. « En réalité, les décisions les plus importantes furent prises en secret par deux ou trois personnes. Il est, par conséquent, naturel qu’elles n’apparaissent pas dans les transcriptions du Conseil du Cabinet. Cependant, dans les cas d’extrême importance, ou quand il paraissait désirable d’impliquer la responsabilité de certaines personnes, des rapports écrits furent conservés sur les décisions respectives du Conseil du Cabinet ».
[Il est remarquable de souligner à ce sujet que le chef de l’Organisation Spéciale Esref Kuskubasi, ait exprimé son indignation à la nouvelle de l’assassinat à Rome, par un « vengeur » arménien, du Grand Vizir Said Halim, déclarant ce dernier totalement innocent, d’autant plus que la nature réelle des mesures du programme anti-arménien n’était connue que par deux ou trois ministres, selon Kuscubasi, qui déclara :
« C’est un crime singulier et injuste de faire de lui un martyr, l’accusant de complicité dans les crimes associés aux déportations arméniennes. En tant qu’homme profondément impliqué dans cette affaire, je rejette fermement cette fausse accusation ».
De la page 78 de Kutay Cemal (1962) Birinci Dünya Harbinde Teskilat-i Mahsusa
(L’Organisation Spéciale pendant la Première Guerre Mondiale) Istanbul : Ercan 318 p]
p. 140, 143-4. Quand il rendit visite au Ministre de l’Intérieurchez lui pour quelque affaire urgente, l’Ambassadeur américain fut surpris de voir que Talat traitait des affaires officielles par un appareil télégraphique installé dans sa maison. Ce fait fut vérifié dans les mémoires de l’épouse de Talat, qui furent publiées dans le journal turc Hürriyet. Le numéro du 21 décembre 1982 contient cette confirmation.