INUTILE AUX IGNORANTS
Ce récit de voyage de Manuel Mirakhorian à travers les hayapnag kavarner («provinces habitées par les Arméniens») décrit avec justesse la vie du paysan arménien confronté au contexte politique des années précédant les massacres hamidiens de 1895-1898 et le génocide perpétré par les Turcs en 1915. l'ouvrage fait référence au livre du médecin personnel des sultans, Amirdovlat Amassiatsi, «Inutile aux ignorants.»
CRAINTES
La crainte qui hante le texte de Mirakhorian, c'est la perte de l'identité du peuple arménien, décrit comme ancien et qu'il souhaite voir retrouver sa riche culture grâce à une alphabétisation et une éducation fondées sur la modernité. Mais peu à peu dévoré par ceux qui occupent son territoire historique et devenu minoritaire dans un monde musulman, l'Arménien est de plus en plus relégué au statut de dhimi («citoyen de seconde classe») subissant en permanence une ségrégation politique et sociale par le biais d'impôts divers et multiples.
UN VISIONNAIRE
À ses yeux, la nécessité pour les Arméniens de redécouvrir leur histoire devait les conduire à recouvrer leur dignité culturelle pour mieux s'imposer au sein même des structures de l'État turc.
Mal accepté par l'aile conservatrice de l'Église dont il déplore le manque de stratégie politique, Mirakhorian agacera quelques laïcs qui verront en lui un donneur de leçons par trop visionnaire et indépendant. Il n'appartient à aucune chapelle, n'épargnant ni l'Église ni les amira et encore moins les intellectuels qu'il accuse de manier seulement de belles paroles.
Pour tous ceux férus d'histoire ou simples esprits curieux, le périple de Mirakhorian constitue le témoignage de première main d'un enseignant qui se donnerait pour mission d'informer son lecteur aussi bien sur l'encadrement des écoles arméniennes que sur les conditions de vie du peuple arménien dans les hayapnag kavarner à la fin du XIXe avant sa disparition programmée qui mettait fin à deux mille cinq cents ans de présence arménienne.
Se le procurer :