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Bibliothèque d'IMPRESCRIPTIBLE d'articles parus dans la presse américaine


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Louise Kiffer | Héléna Démirdjian | Gilbert Béguian

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La Turquie condamne ses chefs militaires - 13 juillet 1919
Une million d'Arméniens tués ou exilés - 15 Décembre 1915
Une femme décrit les meurtres de masse des Arméniens - 12 Décembre 1915
Il se peut que le Pape fasse de nouveau appel au Kaiser - 9 Décembre 1915
La position héroïque des Arméniens dans  les montagnes - 27 Novembre 1915
Démentis à propos des accusations en Arménie - 17 Novembre 1915
L'hôpital Lady Paget devrait rester en activité -17 novembre 1915
Appel de l'Église pour l'Arménie - 14 novembre 1915
Le Révérend F.H. Leslie du Michigan tué à Urfa - 12 Novembre 1915
L'aide aux Arméniens bloqués par les Turcs 1er Novembre 1915
Vaisseaux de guerre turcs à Varna - 1er Novembre 1915
Protestation d'Enseignants de la Langue Allemande Contre les Massacres d'Arméniens - Novembre 1915
Les Turcs à l'origine de la mort d'Américains - 3Novembre 1915
Club des femmes philatélistes - 30 Octobre 1915
Des Turcs s'opposent aux Allemands - 30 Octobre 1915
Des espions turcs dans un hôtel - 29 Octobre 1915
La lumière qui pourrait s'éteindre en Turquie.- 28 Octobre 1915
Tous les Arméniens de la ville de Kerasunt massacrés - 26 Octobre 1915
On ne peut défendre les Arméniens - 25 Octobre 1915
L'Allemagne dit ne pas pouvoir arrêter les Turcs - 23 Octobre 1915
Il ne reste à présent en Turquie que 200 000 Arméniens - 22 Octobre 1915
Les Autorités Ottomanes Portent des Accusations Formelles d'Attentats Répétés - 22 Octobre 1915
Les Juifs allemands aident les Turcs - 22 Octobre 1915
Les Arméniens remercient le Pape - 21 Octobre 1915
Projet de corps arménien pour combattre pour les Alliés - 19 Octobre 1915
 
Les Arméniens vus par les Turcs 18 Octobre 1915
Des manifestants par milliers protestent contre les massacres - 18 Octobre 1915
Les dirigeants arméniens répondent à Djelal Bey - 17 Octobre 1915
Seule l'Allemagne peut sauver les Arméniens - 16 Octobre 1915
Des étudiants Envoient un Message de Gratitude au Consul Américain - 16 Octobre 1915
Nous ne pouvons rien faire de plus - 16 Octobre 1915

Une importante réunion se tiendra au "Century Theater" - 15 Octobre 1915
Un responsable turc nie les atrocités - 15 Octobre 1915
L'extermination est justifié - 13 Octobre 1915
Les massacres reprennent - 13 Octobre 1915
Épargnez les Arméniens demande le Pape au Sultan - 11 Octobre 1915
L'appel pour les Arméniens - 10 Octobre 1915
Il défend la répression des Arméniens - 10 Octobre 1915
Chérif Pacha dénonce les atrocités - 10 Octobre 1915
Les demandes de l'Allemagne pour l'Arménie ne servent à rien- 10 octobre 1915
Lamentation turque sur les Arméniens - 10 Octobre 1915
Envoi de 100.000 $ pour secourir les refugiés arméniens - 9 Octobre 1915
Un espoir pour les Arméniens 9 Octobre 1915
Pourquoi nous tenons à aider les Arméniens 9 Octobre 1915
800.000 Arméniens dénombrés comme victime 7 octobre 1915
Un Allemand dirigeait les Turcs à Van - 6 octobre 1915
Morgenthau porte secours - 6 octobre 1915

Une nouvelle série d'agressions turques - 4 Octobre 1915
Le Gouvernement lance un appel pour l'Arménie- 4 Octobre 1915
Récit des horreurs commises en Arménie - 4 Octobre 1915
Des Turcs reprennent les attaques contre ,les chrétiens - 4 Octobre 1915
Demander l'aide de Bernstorff pour empêcher les massacres -1 octobre 1915
Fonctionnaires Arméniens massacré par les Turcs - 30 septembre 1915
Des femmes arméniennes mises aux enchères - 29 septembre 1915
Le dépeuplement de l'Arménie - 27 Septembre 1915
Selon le Comité sur les Atrocités, 500.000 Victimes les ont d'ores et déjà subies - 27 Septembre 1915
C'est la faute des Arméniens eux-mêmes, dit à présent Bernstorff - 27 septembre 1915
Les récits sur les horreurs subies par les Arméniens, confirmés. 27 septembre 1915
Pas de secours pour les Arméniens, seul notre Gouvernement peut leur venir en aide - 27 Septembre 1915
Un appel du Conseil des Missions Étrangères - 25 Septembre 1915
600.000 Arméniens déportés en exil - 25 Septembre 1915
L'Arménie menacée d'extinction - 25 Septembre 1915
500 000 Arméniens auraient péris - 24 Septembre 1915
Sauvetage de 5.000 Arméniens - 23 Septembre 1915
Bryce nous demande d'aider l'Arménie - 21 Septembre 1915
Le Conseil de Mission relate les horreurs turques - 17 Septembre 1915
La mort de l'Arménie - 17 Septembre 1915
Réponse à Morgenthau par pendaisons d'Arméniens - 16 Septembre 1915
Un triumvirat autocratique - 14 Septembre 1915
 Des chrétiens retenus à Tabriz - 10 Septembre 1915
1 500 000 Arméniens meurent de faim- 5 Septembre 1915
Les Turcs massacrent les Arméniens d'Ismid - 3 septembre 1915
La Vie de Tous les Chrétiens de Constantinople est Menacée, d'après Galli - 30 Août 1915
Enver préparerait un massacre - 30 Août 1915
Les Turcs vident les villes d'Arménie - 27 Août 1915
Concession turque aux Arméniens - 25 Août 1915
Des Arméniens meurent emprisonnés dans des camps - 21 Août 1915
Mille Arméniens brûlés - 20 Août 1915
Les Arméniens déplacés dans le désert pour y périr - 18 Août 1915
Arméniens en fuite devant les Turcs - 11 Août 1915
Des Réfugiés décrivent le sort de ceux qui sont entre les mains des Turcs - 11 Août 1915
Les Massacres sont plus importants que sous Abdul Hamid, selon un reportage londonien - 6 Août 1915
Femmes et enfants abattus - 4 Août 1915
Massacres systématique des Arméniens par les turcs - 29 juillet 1915222
Combats Féroces à la Suite du Refus de Quitter la Côte pour l'Intérieur - 23 juillet 1915
Forte pression sur les Turcs en Arménie turque - 13 juillet 1915
Les Turcs expulsent les chrétiens de leur pays. 12 juillet 1915
WILSON rassuré sur le sort de l'" ARMENIAN " - 2 juillet 1915
Les Russes avancent au Sud du Caucase - 28 juin 1915
Les Turcs à nouveau opérationnels dans le Caucase - 21 Juin 1915
Citation de Mazzini - Guérilla en Arménie - 18 juin 1915
Pillages à Constantinople - 17 Juin 1915
Les Russes sauvent les Arméniens - 25 mai 1915
Les Alliés puniront les Turcs qui assassinent - 24 Mai 1915
6000 Arméniens tués - Atrocités turques et kurdes à Van – semblables à celles de 1895 - 18 mai 1915
L'armée turque en déroute poursuivie par les Russes - 6 mai 1915
Dans l'attente de l'expulsion des Kurdes - 2 mai 1915
Les Kurdes reprennent les massacres - 1 mai 1915
Les Turcs derrières les récents massacres kurdes - 29 avril 1915
Intervention de Morgenthau - Grand désarroi exprimé sur le traitement des Arméniens - 29 avril 1915
Intervention de Morgenthau - 29 avril 1915
Appel à la Turquie d’arrêter les massacres - 29 avril 1915
Les Kurdes attaquent encore plus d'Arméniens - 26 avril 1915
La Turquie interdit la Croix Rouge - 29 avril 1915
Les Kurdes dégoutent les Turcs - 18 avril 1915
Nouvelles promesses de la Turquie - 30 mars 1915
L'armée turque maintenant attendu à Ourmhia - 30 mars 1915
Les Turcs continuent de massacrer à Ourmiah - 27 mars 1915
Pologne, Serbie, Arménie - 25 mars 1915
Les Turcs renouvellent les massacres - 22 mars 1915
La plaine parsemée de corps d'Arméniens - 20 mars 1915
Déroute des Turcs en Arménie - 17 mars 1915
La Russie avance Asie - 2 mars 1915
Massacres par les Turcs dans les villes du Caucase 23 février 1915
Comment l'empire turc devrait être reconstitué après la guerre.24 janvier 1915
100.000 Arméniens dans le besoin - 21 janvier 1915
Les réfugiés arméniens se comptent par milliers - 15 janvier 1915
Des chrétiens en grand péril - 13 janvier 1915
Les Turcs auraient conseillé aux chrétiens de fuir. 11 janvier 1915.
Venus d'Amérique pour combattre.- 8 janvier 1915
Les Russes vainqueur en Arménie - 23 décembre 1914
Des Chrétiens pendus dans la ville - 14 décembre 1914
La Turquie nie avoir battu en retraite - 1 décembre 1914
Un Mouilleur de mine torpillé - 27 novembre 1914
Défaite des Turcs en Arménie - 25 novembre 1914
L'Avance Russe en Arménie ralentie – Villages désertés - 22 novembre 1914
Arrivée d'une réfugiée âgée de 100 ans - 21 Novembre 1914
Les Russes vainqueurs en Arménie perse - 20 novembre 1914
Les Russes mettent les Kurdes en déroute - 15 novembre 1914
Des Arméniens turcs en révolte armée - 13 Novembre 1914
Le sort des turcs est scellé dit Lloyd George - 11 Novembre 1914
Impatients de combattre les Turcs - 31 octobre 1914
Désordre en Turquie - Chrétiens et Kurdes Résistent à la Mobilisation – 4 septembre 1914.
Les musulmans menacent de faire la guerre aux chrétiens - 31 octobre 1914
A Erzeroum les fanatiques tuent les chrétiens - 29 novembre 1914
Les Arméniens en situation critique - 26 Mars 1913
Le Désordre Jeune Turc en Arménie - juillet 1913 THE LITERARY DIGEST - 5 janvier 1913
L'Arménie en Danger. Janvier 1913 - Traduction d'un article de la nièce du premier ministre UK Gladstone,

LA TURQUIE CONDAMNE SES CHEFS DE GUERRE
Une Cour Martiale Condamne à Mort Enver Pacha, Talaat Bey, et Djemal Pacha
TOUS LES TROIS SONT EN FUITE
Djavid Bey et Alusa Metssa Ecopent de Quinze Ans de Travaux Forcés Pour leur Participation à la Guerre
Publié le 13juillet 1919

CONSTANTINOPLE, 11 juillet. —
Enver Pacha, Talaat Bey et Djemel Pacha, les dirigeants du gouvernement turc pendant la guerre, ont été condamnés à mort aujourd'hui par une cour martiale turque chargée de juger leur conduite pendant la période de guerre.
Enver et ses deux dirigeants associés du gouvernement Jeunes Turcs se sont enfuis de Turquie il y a plusieurs mois, et on ignore où ils se trouvent.
Djavid Bey, l'ancien ministre des finances et Alussa Mussa Kiazim, ancien Sheikh-ul-Islam, ont été condamnés à quinze ans de travaux forcés.
La cour martiale a acquitté Rifaat Bey, ancien président du sénat, et Hachim Bey, ancien ministre des Postes et du Télégraphe.

Henry Morgenthau, ambassadeur américain à Constantinople, et sir Louis Mallet, l'ambassadeur britannique à la même capitale, n'ont laissé planer aucun doute dans leurs dépêches, livres, articles et entrevues, sur la culpabilité des dirigeants Jeunes Turcs dont les jugements viennent juste d'être prononcés par une cour martiale turque, ordonnée par le nouveau Grand Vizir Damad Ferid Pacha et convoquée par Ahmed Abouk Pacha, le Ministre de la guerre.

C'est le point final d'une longue série de poursuites entreprises par les dirigeants du nouveau régime, afin que le peuple turc réponde de sa participation à la guerre et des atrocités commises contre les Arméniens, les Grecs et les Syriens, ainsi que des déportations qu'ils ont subies. Le point d'orgue a été atteint en pratique le 12 avril, lorsque Kemal Bey, ancien Ministre de l'alimentation et Gouverneur de Diyarbékir, a été en fait exécuté sur la place Bayazid de Stamboul.
Pour ce qui concerne la présente instance, les sentences ne seront pas exécutées aussi sommairement. Enver, Talaat et Djemal se sont enfuis en Allemagne quelques jours avant

Le Sultan Mohammed VI avait dépêché son envoyé personnel, à fin du mois d'octobre, auprès du vice-amiral britannique Calthrop, pour annoncer la capitulation de la Turquie. Par la suite, en mars, Djavid Bey s'était lui aussi enfui lorsqu'il est devenu évident que la falsification opérée par lui sur les comptes du trésor et que son projet de réformes financières n'avaient pas convaincu la Commission Interalliée.

La plupart du temps au cours de la guerre, Talaat Bey était Grand Vizir et Ministre de l'intérieur et Enver Ministre de la guerre, tandis que Djemal était Gouverneur Militaire de la Syrie, position à laquelle il accéda, comme Ministre de la marine, après avoir placé la flotte sous le commandement d'un amiral allemand.

Enver était un pro-allemand enthousiaste, un élève du général von der Goltz, dont les exercices proposés à l'armée turque entre 1910 et 1912 ne l'ont pas empêchée en cette année 1912 d'être défaite par les Serbes, les Grecs et les Bulgares. Dans un rapport du Foreign Office britannique, le 20 novembre 1914, sir Louis Mallet déclarait que l'arrivée au pouvoir d'Enver et la domination de l'Allemagne datait de la dernière semaine de juillet. Dans la tourmente de la campagne de Gallipoli, un an plus tard, Enver, dans une entrevue, déclara sans aucune honte que la Turquie serait secourue à l'automne suivant par l'Allemagne par le nord – ce qui se produisit en fait lorsque la Bulgarie rejoignit les empires centraux. Dans des entrevues avec l'ambassadeur mentionné, non seulement Enver, mais Talaat et Djemal avec lui, justifiaient les massacres des Arméniens parce qu'ils gênaient.

Comme gouverneur militaire de Syrie, le rôle de Djemal a été déterminant dans la mise en œuvre des massacres contre la Ligue de Beyrouth pour la Réforme, prétendant d'abord d'être en sympathie pour leur programme et les trahissant ensuite, après avoir obtenu la liste de ses membres. En Arménie, comme agent spécial de Talaat, il déclencha les atrocités des Kurdes contre la population.

Même après que Tewfik soit devenu Ministre des finances le 17 mars, Djavid Bey se mêlait encore des affaires du Trésor. Il montra dans ses registres qu'il avait vraiment trompé l'Allemagne et que si les puissances alliées et associées prêtaient à la Turquie 500 000 000 de dollars-or, il leur aurait remis une reconnaissance de dette de 850 000 000 de dollars, une somme qu'ils n'auraient aucun mal à récupérer étant vainqueurs, dégageant de ce fait un profit de 350 000 000 $. Lorsqu'ils rejetèrent cette offre et que les experts commencèrent à auditer ses comptes, il disparut. Selon les ambassadeurs, Djavid n'était pas ouvertement germanophile.

Mussa Kiazim, qui comme Djavid, a été condamné à quinze ans, est un Kurde de la circonscription de Kharpout et un protégé de Enver. Il a été élevé à la fonction de Sheikh-ul-Islam après la mystérieuse disparition de Haïri Bey, qui était à cette fonction de chef religieux du pays lorsque la guerre a été déclarée. Dès 1913, Mussa Kiazim, comme assistant au Sheikh, était connu pour ses sympathies avec l'Allemagne, qui s'opposait à l'anglophilie de Haïri.

Bien avant que la cour n'ait acquitté Rifaat Bey et Hachim Bey, ces hommes étaient considérés comme des outils dans les mains des dirigeants Jeunes Turcs plus puissants – le soi-disant Comité Union et Progrès.



 

UN MILLION D’ ARMÉNIENS TUÉS OU EXILÉS – Politique d’extermination
Le Comité de secours américain dit que le nombre de victimes des Turcs augmente progressivement
D'avantages d’atrocités sont citées confirmant l’accusation que la Turquie agit délibérément
Publié le 15 Décembre 1915

15 décembre 1915
Dans une déclaration reçue hier des bureaux du Comité américain de secours arménien et syrien, de la 75ème avenue, de nouvelles atrocités commises par les Turcs envers les Chrétiens arméniens, ont été précisées, et une preuve supplémentaire a été fournie en confirmation de l’accusation de Lord Bryce, que les massacres résultent d’un plan délibéré du gouvernement turc pour « se débarrasser de la Question arménienne ».

 Le Professeur Samuel T. Dutton, Secrétaire du Comité, écrit : 

« Conformément à toutes les preuves que le Comité américain a reçues, il est probable qu’en vérité, sur les deux millions d’Arméniens vivant en Turquie il y a un an, au moins un million ont été tués ou convertis de force à l’Islam, ou obligés de fuir ce pays, ou sont morts sur la route de l’exil, ou sont maintenant sur la route vers les déserts du nord de l’Arabie, ou y sont déjà arrivés.

 Le nombre des victimes est en augmentation constante. Il est certain qu’il ne peut y avoir un plus grand besoin d’aide dans l’immédiat, même en ces temps troublés, que le besoin désespéré des réfugiés arméniens. Le Comité américain a déjà fait beaucoup en rassemblant et en envoyant des fonds, de même que le Comité anglais, mais il y a toujours un besoin tragique de contributions généreuses.

Toutes les contributions doivent être adressées à Charles R. Crane, Trésorier, 75me Avenue. »

Walter H. Mallory, Secrétaire administratif du Comité américain, dit que le Comité est en contact étroit avec le Comité du Lord Maire de Londres  et que « des rapports authentiques quotidiens signalent des atrocités presque incroyables ».

Dans la déclaration rendue publique, il y avait un extrait d’une lettre reçue par le Comité américain , en provenance du Comité anglais, qui disait : « Le Comité sait qu’il y a encore 180 000 réfugiés dans le Caucase, en plus des 30 000 qui y sont morts, et 70 000 qui sont retournés dans diverses parties de Turquie et de Perse. »

 Une grande partie de la déclaration est accompagnée d’une lettre reçue par le Comité américain, en provenance d’un missionnaire en poste à Konia. En particulier, la lettre dit : « Peu après la grande déportation qui a précédé l’arrivée du nouveau Vali, Miss C ; et moi-même sommes partis à Kachin Han, la première gare de chemin de fer vers Eregli. Juste pour suivre la foule, car une grande partie avait été emmenée à pied dans l’espoir de monter dans le train plus tard. Hachin Han est à environ trois heures d’ici en chariot, et même si près de Konia, nous avons trouvé environ cent personnes, assises ou couchées autour de la gare, complètement affligées. Elles étaient là depuis trois jours ; la plupart avaient fini de manger toutes les provisions qu’elles avaient, et paraissaient hagardes et extrêmement amaigries, véritables victimes de famine, telles qu’on les voit sur les images de scènes en Inde.

« Le train de Konia est arrivé pendant que nous étions là, et le plus grand nombre de personnes se sont traînées jusqu’aux wagons en essayant d’y monter, mais ont été repoussées par les gendarmes, soit parce qu’elles n’avaient pas de billet, soit parce qu’il n’y avait plus de place ; aussi les pauvres gens furent-ils forcés de retourner autour de la gare. »


UNE FEMME DÉCRIT LES MEURTRES DE MASSE DES ARMÉNIENS
Un missionnaire allemand dit que les Turcs ont proclamé leur but : l’extermination
Le travail des démons à Harpout
« Que votre Christ vous vienne en aide ! » Le Cri de torture a continué Dr.Knapp, une victime.
Publié le 12 Décembre 1915

12 décembre 1915
Le Comité américain pour le secours arménien et syrien, au 70, cinquième avenue, a annoncé la réception hier d’une dépêche du Consul américain à Tiflis, dans laquelle il disait qu’il y avait plus de 180 000 Arméniens dans la ‘situation la plus pitoyable’ dans différentes provinces sous sa direction immédiate. Parmi ceux-ci, 110 000 sont dans la province d’Ervian, 20 000 à Elisavethol, 201 000 à Kars et 50 000 Tiflis.

Le comité a annoncé également qu’il devait recevoir très bientôt une dépêche du Dr. Wilson, le chef de la Commission envoyé à Tiflis. Les détails des scènes de massacres parviennent au Comité tous les jours. Ils proviennent d’officiels, de missionnaires, et d’autres personnes bien connues de ses membres. L’un, d’une missionnaire allemande, qui demeure non loin de la frontière du Caucase, et reçu au cours de trois derniers jours, et bien que non destiné à la publication, donne un tableau approfondi du sort terrible des Arméniens.

« Vers la mi-avril, écrit-elle, nous avons appris de grandes perturbations. Nous avons entendu les déclarations faites à la fois par des Turcs et des Arméniens, et comme ces rapports coïncident à tous points de vue, il est tout à fait certain qu’ils contiennent une vérité, c’est-à-dire que le gouvernement de Turquie a donné des ordres aux Arméniens de livrer leurs armes, que les Arméniens ont refusé, affirmant qu’ils en avaient besoin en cas de nécessité. Cela a causé un massacre habituel. Tous les villages habités par les Arméniens ont été incendiés.»

Il semble que le Dr. Knapp ait été assassiné :

Début juin, nous avons appris que toute la population arménienne de Bitlis avait été supprimée. C’est à ce moment-là que nous avons reçu la nouvelle que le Dr. Knapp, le missionnaire américain, avait été blessé dans une maison arménienne, et que le gouvernement turc l’avait envoyé à Diarbekir. Dès la première nuit à Diarbekir, il est mort, et le gouvernement a expliqué que sa mort était due à une indigestion, ce à quoi personne ne croit. Lorsqu’il n’est plus resté personne à massacrer à Bitlis, l’attention s’est dirigée sur Mouch. Jusqu’à ce jour, de cruautés ont été commises, mais pas trop publiquement. Maintenant, ils ont commencé à abattre les gens sans motif, ils les battent à mort, parce qu’ils éprouvent du plaisir à le faire.

« A Mouch même, qui est une grande ville, il n’y a que 25 000 Arméniens ; chaque village comprend environ 500 maisons, et plus aucun Arménien n’est visible ici maintenant, à part quelques femmes.
« Début juillet, la première semaine du mois, 20 000 soldats sont venus de Constantinople à Harpout et Mouch, avec des munitions et onze fusils, et ont assiégé Mouch. En fait, la ville avait été encerclée depuis la mi-juin. A ce moment-là, le Mutasserif donna l’ordre aux deux missionnaires allemands de quitter la ville et de se rendre à Harpout. Nous l’avons supplié de nous laisser ici, car nous avions à notre charge tous les orphelins et les malades, mais il se mit en colère et nous menaça de nous chasser de force si nous ne suivions pas ses instructions. Comme nous n’étions pas en forme tous les deux, nous eûmes la permission de rester à Mouch. Cette permission me fut accordée à condition que je quitterais Mouch en emmenant nos orphelins avec nous ; mais lorsque je demandai l’assurance de leur sécurité, la réponse fut : « Vous pouvez les emmener, mais étant Arméniens, il se peut qu’on leur coupe la tête sur la route ».

Le 10 juillet, Mouch fut bombardé pendant plusieurs heures, le motif invoqué était que quelques Arméniens avaient essayé de s’enfuir. J’ai été voir le Mutasserif, et lui demandai de protéger nos maisons, et sa réponse fut : ‘Il vaudrait mieux pour vous de rester au lieu de partir, comme ordonné. Les fusils sont là pour en finir avec Mouch. Mettez-vous à l’abri avec les Turcs. Cela naturellement n’était pas possible, car nous ne pouvions pas abandonner nos charges. Un nouvel ordre nous parvint le lendemain, prévenant les Arméniens qu’ils allaient être expulsés, et qu’on leur donnait trois jours pour être prêts. On leur dit de s’enregistrer au bureau du gouvernement avant de partir. Les familles pouvaient rester, mais leurs propriétés et leur argent leur seraient confisqués.

« Les Arméniens étaient incapables de partir, car ils n’avaient pas d’argent pour payer le voyage, et ils préféraient mourir chez eux plutôt que d’être séparés et d’endurer la mort lente sur la route. Comme il a été dit précédemment, trois jours étaient donnés aux Arméniens pour s’en aller ; mais deux heures s’étaient à peine écoulées, que les soldats entrèrent par effraction dans les maisons, arrêtèrent tout le monde et les jetèrent en prison. Les canons se mirent à tirer, empêchant ainsi les gens de se faire enregistrer au bureau du gouvernement. Nous avons tous dû nous réfugier à la cave de crainte que notre orphelinat soit touché.

« Je suis allé voir le Muttasserif et l’ai supplié d’avoir pitié au moins des enfants, mais en vain, il me répliqua que les enfants doivent périr avec leur nation. Tous nos malades et orphelins furent ôtés de l’hôpital et de l’orphelinat. Ainsi Mouch fut incendié de cette façon monstrueuse. Chaque officier se vantait du nombre de personnes qu’il avait personnellement massacrées, débarrassant ainsi la Turquie de la race arménienne. Nous avons quitté Harpout ; Harpout était devenu le cimetière des Arméniens.

« Maintenant, que votre Christ vienne à votre secours ! »

A Harpout et à Mezre, les gens ont subi de terribles tortures, telles que sourcils arrachés ; seins coupés, ongles arrachés, pieds coupés, ou fers cloués dessous, comme on fait pour les chevaux. Les soldats criaient ensuite : « Maintenant, que votre Christ vienne à votre secours ! »

Début juillet, 2000 soldats arméniens reçurent l’ordre de se rendre à Alep pour construire des routes. Les habitants de Harput furent terrifiés en entendant cela, et la panique saisit la ville. Le Vali appela le missionnaire allemand, Mr.Eheman, et le pria de calmer les gens, répétant encore et encore qu’aucun mal ne serait fait à ces soldats. Mr. Eheman fit confiance au Vali, et tranquillisa les gens. Mais à peine les soldats furent-ils partislamentations turques sur les expulsions des Arméniensés et jetés dans une caverne. Très peu parvinrent à s’échapper, et nous ont fait leur rapport.
Il était inutile de protester auprès du Vali. Le Consul américain de Harpout protesta plusieurs fois, mais le Vali a traité ses dires de « paroles en l’air » de la manière la plus effrontée.

« Vers le début du mois d’avril, en présence du Major Lange et plusieurs autres officiels, tels que les consuls américain et allemand , Ekran Bey dit tout à fait ouvertement que leur intention était d’exterminer la race arménienne. Tous des détails montrent que les massacres étaient planifiés. Il est très dangereux maintenant pour tous les missionnaires de rester à l’intérieur du pays, les officiels montrent leur haine trop ouvertement, et nous ont souvent dit qu’ils ne voyaient pas la nécessité de notre présence. »

Le Comité américain a déjà envoyé plus de 100 000 dollars à l’Ambassadeur Morgenthau, et beaucoup plus est nécessaire pour alléger les conditions terribles des Arméniens restants.
Les contributions pour leur secours doivent être adressées à Charles R. Crane,
70 Fifth Avenue, New York. »


Il se peut que le Pape fasse de nouveau appel au Kaiser
9 décembre 1915 –
T.P. O’Connor apprend qu’il va être appelé à faire quelque chose pour sauver les Arméniens.
Le Comité britannique a résolu de travailler en dépit des terribles événements qui ont arrêté son œuvre en Arménie.

Londres, le 20 novembre. -
« T.P. O’Connor est bien connu pour ses activités, il est l’ami des Arméniens depuis longtemps, et il a fait une déclaration aujourd’hui, relatif aux récents massacres, et au débat à la Chambre des Lords. Il a dit :

« S’il n’y avait pas 250 000 réfugiés nécessitant de l’aide, un abri et de la nourriture, et si je devais céder à mon humeur,  je me sentirais trop plein de désespoir au sujet de l’Arménie, pour dire un mot de plus sur ce sujet’.

Il y a trois ou quatre ans, quand il semblait impossible de soulever de nouveau la question arménienne, nous avons formé avec des amis le Comité arménien ; et pendant deux ans,  tout a paru aller en notre faveur.

Après des négociations pendant deux ans, nous avons enfin réussi à concevoir un schéma pour la réforme en Arménie, pour lequel nous avons obtenu l’accord de tous les gouvernements européens, et deux inspecteurs généraux furent désignés pour entreprendre ces réformes d’une façon réaliste, juste avant que la guerre ne soit déclarée. Et aujourd’hui, la conséquence est le massacre des Arméniens, le plus hideux et le plus cruel qui se soit jamais produit. Vous reconnaitrez que j’aie quelque motif d’être abattu.

Cependant, le Comité arménien britannique a résolu de continuer ce travail, et il a été immensément encouragé par l’information de la grande vague de sympathie, et d’horreur, venue d’Amérique, et la création d’un Comité américain arménien, et l’aide magnifique envoyée d’Amérique aux réfugiés de Russie et d’Egypte.

Nous nous sommes adressés au Foreign Office Britannique, pour la possibilité  de soulever un débat à la Chambre des Lords, et Lord Robert Cecil, qui est le meilleur sous-secrétaire du Foreign Office, a soutenu immédiatement ma demande, et le résultat fut le débat de mardi dernier.

Ce fut un bref débat, mais l’un des plus exaltants auxquels j’aie jamais assisté.

Il avait été lancé par Aneurim Williams qui est le Président de notre Comité.

Je l’ai suivi ; ensuite il y a eu un petit discours de Lord Robert Cecil. Cela fera sans doute plaisir au Comité américain arménien d’apprendre que leur travail a complété largement nos documents. Le matin du débat une brochure avait été distribuée sur l’Arménie, écrite par Arnold Toynbee, un homme de lettres brillant, à tous les membres de la Chambre. J’ai été surpris de découvrir que parmi la masse de littérature à cette époque, cette brochure avait été lue par la majorité de la Chambre, et son histoire épouvantable avait ému tout le monde. Mais il faut reconnaître que la plupart des documents de la brochure avaient été fournis par le rapport du Comité américain arménien. Je pourrais aller plus loin, et dire que la masse de tous les discours était due à l’Amérique plus qu’à toute autre nation, et que nous devrions considérer avec le plus grand espoir la prévention d’autres massacres et l’aide à ceux qui ont échappé aux massacres.

Il y avait toutefois une légère différence d’opinion à propos d’une requête non officielle faite par moi, et la réponse officielle de Lord Robert Cecil sur la manière dont l’Amérique pourrait apporter la meilleure aide. Je me permettais de suggérer que le gouvernement britannique pourrait faire appel au Président Wilson et au Gouvernement américain en vue de prendre une action officielle.

Lord Robert Cecil, cependant, fit remarquer qu’il était impossible au Gouvernement britannique de dicter ou même de suggérer aux gouvernements des pays neutres indépendants, ce qu’était leur devoir. ‘C’est, dit-il, à chaque gouvernement, de fixer exactement ce qu’il devrait faire vis-à-vis des gouvernements étrangers.’

J’ai pourtant proposé une seconde action que nous devrions faire : lancer un appel fort à la sympathie et au soutien du peuple généreux et humain des Etats Unis eux-mêmes, pour aller au secours des Arméniens opprimés, et Lord Robert, cordialement, accepta cette suggestion.

Nous considérons aussi avec espoir l’intervention du Pape. Lord Robert Cecil a pu informer la Chambre que l’humanité était reconnaissante envers le Pape pour les mesures qu’il avait déjà prises, et il me semble que le Pape va être conduit à faire un appel direct au Kaiser allemand, en plus de l’appel qu’il a déjà lancé au Sultan.

Une autre de nos demandes au Gouvernement était que les armées britanniques et leurs vaisseaux puissent, là où c’est possible, faire de leur mieux pour sauver les Arméniens ayant réussi à échapper aux massacres, comme ont fait les navires français dans le cas des 4000 réfugiés qu’ils avait pu débarquer en Egypte, et j’ai l’impression que des instructions à ce sujet ont déjà été données, et avec quelques bons résultats.

 Finalement, je voudrais suggérer que les Comités américain et britannique restent en contact permanent l’un avec l’autre, si nécessaire par dépêche. Moi-même et d’autres avons déjà échangé une correspondance avec Mr. Osca Straus et Mr. Samuel Dutton, et je suis sûr qu’en travaillant ensemble nous pourrons faire quelque chose, spécialement pour les réfugiés.

L’argent nous arrive en quantité considérable, surtout après toutes les autres appels à la générosité du peuple britannique, et nous avons déjà pu envoyer au Catholicos arménien environ 8 000 ou 10 000 £ et nous en enverrons davantage dès que l’argent arrivera ».


LA POSITION HÉROIQUE DES ARMÉNIENS DANS LES MONTAGNES .
Hommes, femmes et enfants ont combattu avec des couteaux, des faux et des pierres.
Les femmes qui avaient planté des couteaux sur les Turcs, se sont ensuite suicidées.
Rapport reçu de Bryce
Samedi 27 novembre 1915

Londres le 26 novembre – Le Vicomte Bryce a rendu publics ce soir les détails des massacres arméniens suivants, lesquels, écrit-il dans une lettre jointe, ‘surpassent en horreur, si cela était possible, ce qui a été publié jusqu’à ce jour’.
‘Je sens’, continue-t-il dans sa lettre, ‘que de tels crimes devraient être exposés au plus haut point, et que la charité des autres nations va, plus que jamais, aller vers les malheureux réfugiés, quand elles sauront ce que nos amis et compatriotes ont souffert.’

Décrivant la dernière position arménienne dans la région montagneuse de Samsun, un rapport de Lord Bryce dit :

« Les guerriers survivants se sont trouvés encerclés dans des quartiers clos par 30 000 Turcs et Kurdes. Puis ont suivi les luttes pour la vie, héroïques et désespérées, qui ont toujours été la fierté des montagnards.
Hommes, femmes et enfants ont combattu avec des couteaux, des faux et des pierres, et tout autre objet qu’ils ont pu trouver. Ils ont poussé des blocs de pierre du haut des pentes, tuant une partie de leurs ennemis. Dans les effroyables combats au corps-à-corps, les femmes enfonçaient des couteaux dans la gorge des Turcs.

« Pour chaque guerrier tombé, plusieurs jeunes femmes, en danger de tomber aux mains des Turcs, se jetaient du haut des rochers, quelques-unes avec leurs enfants dans les bras ».

La lettre de Lord Bryce

Lord Bryce écrit que les détails confirment et amplifient l’histoire épouvantable des déportations lors desquelles les Arméniens du nord et de l’est de l’Anatolie ont été conduits à la mort avec une cruauté abominable.
La première partie de la preuve, dit-il, a été reçue par le Comité d’Enquête des Etats Unis, et le seconde partie vient d’un Arménien de Tiflis, qui en a été informé par les réfugiés rescapés des régions où ces événements se sont produits.

« Les souffrances des paysans et des montagnards des régions de Van, Mouch et Samsoun, dit Lord Bryce, semblent avoir été encore plus terribles que celles des gens de la paisible ville décrites dans la première partie de ce rapport. Chacune de ces preuves augmente l’horreur de l’histoire, et confirme l’effroyable certitude de sa vérité.

« Ces atrocités ne sont pas des produits de l’imagination. La plupart sont attestées par plusieurs témoignages concomitants. Elles sont toutes conservées, la preuve est tout à fait évidente, et quelques-unes sont les plus terribles. A cette phase actuelle des événements, le monde civilisé est impuissant pour intervenir, mais nous devons garder ces crimes indicibles constamment en mémoire pour le jour où ils seront connus. »

LES NOUVELLES PREUVES -

Après avoir donné en partie les preuves reçues des Etats Unis, Lord Bryce dit que les extraits suivants ont été émis par son correspondant à Tiflis :

«Vers la fin du mois de mai, Djevdet Bey, le gouverneur militaire, fut renvoyé de Van. Djevdet s’enfuit vers le sud et entra à Séirt avec environ 8000 soldats qu’il appela « Bataillons de Bouchers ». Il fit massacrer la plupart des Chrétiens de Séirt, massacre dont on ne connaît aucun détail.
On a apprit cependant de source sûre qu’il a ordonné à ses soldats de brûler sur les places publiques, l’évêque arménien, le Vartabed (archimandrite, ndt) et l’évêque chaldéen, Addai Shér.

« Le 25 juin les Turcs encerclèrent la ville de Bitlis, et coupèrent toutes les communications avec les villageois arméniens des alentours. La plupart des hommes bien portants furent séparés de leur femme par des visites à domicile, et emmenés.

Au cours des jours suivants les hommes arrêtés furent abattus hors de la ville et enterrés dans de profondes tranchées creusées par les victimes elles-mêmes. Les jeunes femmes et les enfants furent distribués parmi la foule.
Le reste, le lot inutile, fut conduit vers le sud et l’on pense qu’ils ont été noyés dans le Tigre.

« Toute tentative de résistance, si brave soit-elle, fut réprimée par les troupes régulières. De nombreux Arméniens, après avoir brûlé leurs dernières cartouches, prirent du poison par familles entières, ou se suicidèrent chez eux afin de ne pas tomber entre les mains des Turcs.

Arméniens torturés à mort.

C’est l’usage que les Turcs disposent d’environ 15 000 Arméniens à Bitlis.
A Mouch, début juillet, les autorités exigèrent des Arméniens leurs armes, et une forte somme en rançon, des notables de la ville. Les personnalités du village furent soumis à des tortures révoltantes. Leurs ongles, et les ongles des orteils arrachés de force ; les dents extirpées ; et dans certains cas, les nez étaient taillés au couteau, et les victimes laissées pour mortes après une longue et choquante agonie.

« Les parentes des victimes qui étaient rescapées furent violées en public devant les yeux de leurs hommes mutilés. Les cris stridents et les hurlements à la mort des victimes remplissaient l’air ; mais n’émouvaient pas la brute turque.

« Dans la ville même de Mouch, les Arméniens, sous la direction de Gotoyan et d’autres, s’enfermèrent dans les églises et les maisons en pierre, et luttèrent pendant quatre jours en auto-défense, mais l’artillerie turque, dirigée par des officiers allemands, mit rapidement fin aux positions arméniennes, et tous les dirigeants arméniens et leurs hommes furent tués dans le combat.

« Quand le silence et la mort régnèrent sur les ruines des églises et des maisons, le reste de la foule musulmane se précipita sur les femmes et les enfants, les sortit de la ville et les fit rentrer dans de vastes camps, qui avaient déjà été préparés pour les femmes et les enfants.

Les femmes et enfants brûlés.

Les scènes épouvantables qui suivirent peuvent sembler incroyables, néanmons ces rapports ont été confirmés sans aucun doute. Le moyen le plus rapide pour se débarrasser des femmes et des enfants dans les différents camps, fut l'incendie. On mit le feu aux abris de bois d’Alijan, Mograkom, Khasjogh et autres villages arméniens, et ces femmes et enfants absolument impuissants furent brûlés vifs.

« De nombreuses femmes devinrent folles et jetèrent leurs enfants au loin. Quelques-unes s’agenouillèrent et prièrent parmi les flammes qui brûlaient leur corps. D’autres hurlaient au secours, mais aucune aide ne leur parvint de nulle part, et les exécutants, que cette sauvagerie inouïe n’émouvait pas, saisissaient les enfants par une jambe et les lançaient dans le feu, criant aux
femmes en train de brûler : ‘Voici vos lions’.

« Des prisonniers turcs, qui furent apparemment témoins de ces scènes, furent horrifiés et rendus fous au souvenir de ce spectacle. L’odeur de la chair brûlée, dirent-ils, est restée dans l’air pendant de longs jours ».
 


DÉMENTIS À PROPOS DES ACCUSATIONS EN ARMÉNIE



Lord Robert Cecil Dit que les Agents Britanniques n'ont pas incité à la Révolte


17 Novembre 1915

LONDRES, 16 novembre. – Au cours d'une conversation à la Chambre des Communes cette nuit sur les massacres d'Arméniens, Lord Robert Cecil, Sous-secrétaire d'état pour les Affaires étrangères, a réfuté les accusations émanant des États-Unis selon lesquelles des agents britanniques auraient poussé les Arméniens à se révolter, et qu'en conséquence, la Grande-Bretagne serait responsable des massacres.
" Il n'y a pas eu de provocation quelle qu'elle soit ", a dit lord Robert. " Les massacres étaient prémédités, avec l' intention de la part de leurs instigateurs, les membres du comité Union et Progrès, non de punir les insurgés, mais d'exterminer la race arménienne ".
Saisi d'une invitation à promettre que le gouvernement engagera les ressources de l'armée et de la marine pour le sauvetage des Arméniens, lord Robert a refusé
 


L'HÔPITAL LADY PAGET DEVRAIT RESTER EN ACTIVITÉ

William Prickett, spécialiste de Rhodes, qui l'a secondée, arrive à Londres

 IL A VU DES SCÈNES DE PANIQUE À DEDEAGAT

 Effets du Tout Récent Débarquement Allié auquel on vient d'assister à Salonique   

17 Novembre 1915

 Câble Spécial au NEW YORK TIMES. LONDRES, 16 novembre . – William Prickett, Princeton, 1915, et titulaire de la chaire de Rhodes au Trinity College d'Oxford, vient d'arriver en Angleterre venant de Serbie, où il a été détaché pendant quatre mois à l'Hôpital Lady Paget.

  M. Prickett qui avait quitté la Serbie le 12 octobre, persuadé, comme l'étaient la majorité des gens en Serbie, que la peur bulgare avait cessé, s'est rendu à Constantinople porteur de lettres pour l'ambassadeur américain Morgenthau.       

" L'ambassadeur Morgenthau, investi de la charge des affaires de dix nations, est tout à fait surmené, mais il est en bonne forme et on le tient généralement pour la personne la plus populaire de Constantinople. Il m'a fait visiter, en compagnie d'un autre de ses amis, deux des hôpitaux où se trouvent des Turcs blessés. M. Morgenthau avait fait envoyer, la veille, des centaines de fleurs à ces hôpitaux, et les blessés, apprenant qui les avait envoyées, s'en étaient réjouis. La suite des hôpitaux français et anglais a été prise par la Croix rouge américaine.

" Le charbon à Constantinople coûte à présent presque 3 dollars la tonne; on dit que l'alimentation est vendue deux à trois fois son prix normal, et il y a une pénurie des médicaments les plus courants. Le blocus russe à l'entrée du Bosphore n'est pas efficace en totalité et il a été rapporté que quatre cargos charbonniers ont atteint Constantinople venu de la côte turque de la Mer Noire.

Il est dit des massacres d'Arméniens qu'ils ont été dus au vouloir des Turcs de s'approprier les biens des Arméniens, qui constituent la classe la plus riche en Turquie. Le prétexte turc est qu'ils étaient déloyaux. On dit des Arméniens blessés dans l'armée turque qu'ils sont renvoyés chez eux, où ils ne font qu'apprendre que leur famille a été massacrée.

" Il a fallu cinq journées pour faire le voyage depuis Salonique jusqu'à Hatoniki, au cours duquel nous n'avons trouvé à acheter que du pain. Les vitres des trains avaient été enduites de blanc, en sorte que de jour comme de nuit, nous n'avons rien pu voir. Le débarquement français et anglais à Salonique étaient en cours lorsque nous y sommes arrivés. À Salonique, au cours de l'opération de débarquement, j'ai vu au moins un officier bulgare, et on m'a rapporté que le fils du Kaiser en route pour Athènes, était passé à Salonique. Le consul bulgare à Salonique a dit que les Bulgares craignaient que la Grèce n'entre dans la guerre.

" J'ai entendu dire à Constantinople et à Salonique que la Turquie avait accepté de donner en deuxième concession tous les territoires jusqu'à la ligne Enos-Media, y compris, naturellement, la ville d'Andrinople ". 


APPEL DE L'ÉGLISE POUR L'ARMÉNIE



Pétition de Anglican and Eastern Union au Président Wilson


14 novembre 1915

L'Anglican and Eastern Orthodox Churches Union [Union des Églises Anglicane et Orthodoxes Orientales] et les organisations de membres résidents aux États- Unis des églises orientales orthodoxes russe, grecque et syrienne, ont adressé une pétition au Président au nom des Arméniens.

La pétition insiste pour qu'il communique au gouvernement allemand, allié de la Turquie, une demande ferme pour que cesse la destruction, par centaines de milliers, de Chrétiens arméniens.

" Nous pensons avec conviction ", écrit la pétition, " que, par la présentation des profondes inquiétudes du peuple américain et des préjudices qui sont portés dans le pays à l'encontre de l'Allemagne par l'absence de tout effort de sa part pour empêcher l'extermination délibérée d'un peuple chrétien par son allié turc, le gouvernement impérial [l'Allemagne], obtiendra du gouvernement ottoman qu'il donne des ordres pour mettre fin à cette persécution et à ce massacre ".

La pétition demande également que les écoles des missions américaines soient protégées, et que des moyens de transport soient envoyés pour déplacer autant d'Arméniens que possible vers les pays chrétiens.
 


UN MISSIONNAIRE EMPOISONNÉ



Le Révérend F.H. Leslie du Michigan tué à Urfa


Publié le 13 Novembre 1915


BOSTON, 12 novembre. – La mort par empoisonnement du Révérend Francis H. Leslie de Northport, Mitch., missionnaire à Urfa, Turquie asiatique, a été annoncée aujourd'hui par le Conseil d'Administration Américain des Missions étrangères. L'Ambassadeur Morgenthau à Constantinople, qui avait informé de sa mort le Département d'état à Washington, a fait savoir qu'il engageait une enquête approfondie pour en déterminer la responsabilité, et qu'en attendant les résultats de cette enquête, il n'avait aucune opinion arrêtée sur cette affaire.
Les informations de l'Ambassadeur étaient basées sur un télégramme du Consul à Alep. M. Leslie, qui avait représenté 300 réfugiés Britanniques, Français, Italiens et Russes internés à Urfa, était en contact étroit avec le Consul.
Il avait été désigné agent consulaire par les États-Unis pour faciliter sa gestion des dotations mensuelles adressées aux personnes internées, mais le gouvernement turc avait refusé de reconnaître cette nomination, d'après le Révérend James A. Barton, secrétaire du Conseil Américain.
M. Leslie avait été le seul missionnaire à Urfa, qui est un poste éloigné du Nord de la Mésopotamie, à la frontière arabe, depuis 1912. Le poste comportait une importante unité de production industrielle, employant plusieurs milliers de personnes.


LES TURCS A L'ORIGINE DE LA MORT D'AMÉRICAINS


Cinq Missionnaires Succombent, Choqués par le Spectacle des Horreurs Arméniennes,
Écrit le Compte-rendu


Publié le 3 novembre 1915

La tension et le choc des tragédies que la guerre a provoquées en Turquie au cours de l'année écoulée sont à l'origine de la mort de cinq des missionnaires américains effectuant leur mission dans l'Empire ottoman depuis le premier mai de l'an passé, période au cours de laquelle les Turcs ont mené campagne contre les Arméniens, selon le rapport annuel du Révérant Dr James L. Barton, secrétaire pour l'étranger du Conseil des Administrateurs des Missions étrangères rendu public hier ici même.
Les missionnaires dont la mort est attribuée à la terrible situation en Turque où Mrs Mary E. Barnum est morte le 9 mai à Kharpout, après cinquante-six années de service en Turquie ; Mrs Charlotte E. Ely est morte à Bitlis, le 11 juillet après quarante-sept ans de service ininterrompu ; le Révérend George P. Knapp, est mort à Diyarbakir, le 10 août après vingt-cinq ans de service à Kharpout et à Bitlis ; Mrs Martha W. Reynolds, épouse du Dr George C. Reynolds, est morte le 27 août des blessures reçues lors d'une attaque au cours du voyage de Van à Tiflis en Russie, et Mrs Elizabeth Ussher, morte de la fièvre typhoïde à Van, le 14 juillet, après seize ans de service.
Le rapport donne des détails sur les effets de la guerre. Parmi les centaines de milliers d'Arméniens et d'autres Chrétiens qui sont morts en Turquie, déclare le Dr Barton, se trouvaient " des professeurs et enseignants de nos écoles, des pasteurs et des prêtres, des élèves, ceux de beaucoup d'autres écoles. Tous, " ajoute-t-il, " sont misérablement morts chez eux, ou sont morts des agressions qu'ils ont subies sur les routes du nord de l'Arabie et d'ailleurs, vers où ils avaient été déportés massivement ".
" Jamais, dans toute l'histoire, probablement, " continue le Dr Barton, " deux cents missionnaires n'ont traversé des épreuves aussi terribles que celles subies en Turquie par nos missionnaires dans les neuf à dix mois écoulés, et ce n'est pas fini ".
Se référant au traitement que les autorités font subir aux Arméniens, le Dr Barton dit que lorsqu'il se trouvait à Kharpout, transformé en centre militaire, plusieurs édifices parmi ceux de l'Euphrates College avaient été réquisitionnés par les autorités militaires turques. Un grand dortoir n'en faisait pas partie et le Consul américain avait scellé la porte avec le sceau officiel des États-Unis d'Amérique.
" Ce sceau ", ajoute le Dr Barton, " a été ostensiblement brisé par le Kaïmakan de Kharpout, et en conséquence, depuis mars, l'université a complètement cessé son activité. Le gouvernement s'était rapidement approprié les édifices de la mission à Afion et à Kara Hissar et il en avait été de même pour les établissements scolaires à Adabazar.
" Vis à vis des Américains, les fonctionnaires ont supposé que le décret d'abrogation des capitulations avait placé tous les étrangers sous le contrôle des officiels locaux. En conséquence, leur établissement, tout comme leur propre personnel, ont fait l'objet de contrôles réitérés, leur communication avec les consuls des États-Unis ou même avec l'Ambassadeur a souvent été interdite, leurs mouvements considérablement entravés; à Diyarbékir, le Dr et Mme Smith ont même été arrêtés et conduits à la frontière par la cour martiale. Aucune accusation particulière n'a été invoquée. Plusieurs missionnaires ont subi des brèves périodes d'emprisonnement ".


VAISSEAUX DE GUERRE TURCS À VARNA



 

Le Goeben et le Breslau et des Lance-torpilles  Mouillent dans le Port Bulgare

 
Publié le 1er novembre 1915

     PARIS. 31 octobre.- Dans une dépêche envoyée à l'Agence Havas depuis Bucarest, datée de samedi, on lit :

     " On annonce que les croiseurs Goeben et Breslau, sous pavillon allemand, et deux lanceurs de torpilles turcs sont arrivés à Varna hier. Un sous marin arrivé à Varna en pièces détachées est en cours d'assemblage à l'arsenal de Varna ".

     Le Breslau et le Goeben, qui avaient été transférés à la Turquie peu après le commencement de la guerre, et respectivement baptisés Midullu et Sultan Selim, étaient mentionnés dans une dépêche datée de Copenhague samedi soir comme ayant participé à une attaque par des bâtiments de guerre turcs contre une escadrille russe dans la Mer Noire.            


L'AIDE AUX ARMÉNIENS BLOQUÉE PAR LES TURCS
Les Efforts Pour Envoyer des Denrées Alimentaires aux Réfugiés sont Entravés, Selon le Comité Américain
LE NOMBRE DE VICTIMES PORTÉ À 1 000 000
Une Étude précise montre que 55 000 Personnes Ont Été Tuées dans le Seul Vilayet de Van

Publié le 1er novembre 1915

Le Comité Américain sur les Atrocités Arméniennes, dont sont membres le Cardinal Gibbons, Cleveland, H. Dodge, l'Évêque David H. Greer, Oscar S. Strauss, le Professeur Samuel T. Dutton, Charles S. Crane, et beaucoup d'autres personnes éminentes, a publié hier une déclaration dans laquelle il est dit que selon des rapports authentiques venus de Turquie, que la guerre d'extermination engagée par les Turcs contre les Arméniens était si terrible que lorsque tous ces faits seront connus, le monde réalisera que ce qui s'est passé aura été " la plus grande, la plus pathétique, et la plus arbitraire tragédie de l'histoire ".

Les efforts pour faire parvenir des denrées alimentaires aux Arméniens déportés de force aux endroits éloignés de l'empire ont été bloqués par les autorités turques, rapporte le comité, les officiels turcs ayant déclaré qu' " elles souhaitaient que rien ne soit fait qui prolonge leur vie ".

Dans son communiqué, le Comité a rendu public un rapport reçu d'un représentant officiel des puissances neutres, qui relatant les conditions de l'un des camps arméniens a dit :

" J'ai visité leur campement et un spectacle plus pitoyable est impossible à imaginer. Ils sont tous, presque sans exception, en loques, affamés et malades. Cela n'est pas surprenant, ayant été sur les routes pendant près de deux mois, sans vêtements pour se changer, sans la possibilité de prendre un bain, sans abri et avec très peu à manger. Je les ai regardés une fois alors qu'on leur a donné à manger. Des animaux sauvages ne pourraient être pire. Ils se sont rués sur les gardes qui portaient à manger et les gardes les ont fait reculer en les frappant à coups de bâton, suffisamment fort quelquefois pour les tuer. A les voir, on peut difficilement croire que ce sont des êtres humains. Lorsqu'on traverse le camp, les femmes présentent leur enfant en vous demandant de les prendre avec vous. En fait, les Turcs se sont servis, les prenant ces enfants comme esclaves ou pire. Il y a très peu d'hommes parmi eux, étant donné que pour la plupart, ils ont été tués sur la route. Des femmes et des enfants ont eux aussi été tués. Le mouvement, dans son ensemble, semble être le massacre le plus organisé dans les moindres détails et le plus efficace que ce pays n'ait jamais vu ".

" Ils sont concordants ", ajoute le comité se référant aux rapports, " s'agissant des méthodes et des façons de procéder, de la minutie et de la cruauté du travail de destruction, et du but avoué du plan pour exterminer la nation arménienne. Le fait que le gouvernement central, à Constantinople; refuse de permettre aux Arméniens qu'ils quittent le pays est une preuve de plus que leur objectif est l'extermination.
" Les Turcs ne nient pas les atrocités mais soutiennent que ce sont des mesures militaires pour se protéger contre la possible attaque d'une race qui est déloyale.
" Il est impossible d'évaluer le nombre de ceux qui sont morts jusqu'à présent. Une étude précise, dans le vilayet de Van a réuni les noms de 55 000 personnes qui ont été tuées. D'autres ont réussi à en réchapper en s'enfuyant en Perse et en Russie. Un témoin oculaire qui a récemment fait une longue marche à travers l'Asie mineure a vu 50 000 réfugiés démunis, aveuglés, sans aide aucune, affamés, campant au bord de la route dans une région presque désertique, sans aucune ressource alimentaire. Ce n'est sans doute pas une estimation excessive de dire qu'un million des deux millions d'Arméniens en Turquie au début de la guerre sont morts ou dans des harems musulmans, ou convertis par force à l'Islam, ou font partie du voyage vers les déserts et la mort ".

Le comité dit avoir transféré 106 000 dollars à l'Ambassadeur Morgenthau à Constantinople dont 100 000 pour secourir les Arméniens en Turquie et le reste pour ceux d'entre eux qui se sont réfugiés en Égypte. Le bureau du Comité, dont M. Crane est le trésorier se trouve 70, Cinquième Avenue.

 

Le mensonge des "déportations" opposé par les négationnistes turcs butte dans cet article sur la réalité : l'objectif des autorités turques qui interdisent le passage de denrées alimentaires destinées à ces gens qui meurent de faim, c'est l'extermination. GB


Protestation d'Enseignants de la Langue Allemande Contre les Massacres d'Arméniens

NYT Current History
Novembre 1915

Cette lettre adressée au Ministère allemand des Affaires étrangères a été écrite et signée par les enseignants du Lycée allemand d' Alep, Turquie, et elle a été transmise au Gouvernement britannique par les services de censure du courrier. L'une des copies de cette lettre a été trouvée dans un courrier envoyé le 7 [1er] juillet par l'un des signataires, le Dr Edward Graetner de Bâle en Suisse,  à un distingué théologien allemand depuis un pays neutre. Elle est reprise ici, avec la lettre privée du Dr Graetner, comme document de confirmation des comptes-rendus actuels des atrocités commises par les Turcs contre les Arméniens Chrétiens en Turquie.

Alep, 8 octobre 1915

Nous vous prions humblement de rendre compte au Ministère des Affaires étrangères de ce qui suit :

Nous pensons de notre devoir d'attirer l'attention du Ministère des Affaires étrangères sur le fait que notre travail d'enseignants, la constitution d'une base pour la civilisation, et l'instillation du respect aux populations indigènes sera dorénavant impossible s'il n'est pas possible au Gouvernement allemand de mettre un terme aux brutalités infligées aux femmes et enfants déportés d'Arméniens assassinés.

Face aux horribles scènes qui se déroulent chaque jour à proximité de notre établissement, devant nos yeux mêmes, notre travail d'enseignant est tombé à un point qui est une insulte à tous les sentiments humains. Comment des maîtres peuvent-ils lire les histoires telles " Blanche-Neige et les Sept Nains " à nos élèves Arméniens, comment peut-on en venir aux déclinaisons et à la conjugaison, lorsque dans les cours, de l'autre côté de la rue et en face de notre établissement scolaire, la mort fait sa moisson parmi les compatriotes de nos élèves mourant de faim?

Les filles, les garçons, et les femmes, tous pratiquement dénudés, gisent sur le sol, poussant leurs derniers gémissements au milieu des mourants et près des cercueils déjà sortis pour eux.

Quarante à cinquante personnes réduites à l'état de squelette sont tout ce qui reste des 2 000 à 3 000 solides femmes des campagnes conduites ici depuis la Haute Arménie. Celles qui sont attrayantes sont décimées par le vice de leurs geôliers, tandis que celles qui sont laides sont persécutées, battues, mortes de faim, et de soif. Même ceux près des points d'eau ne sont pas autorisés à boire. Il est interdit aux Européens de leur distribuer du pain. Plus de cent cadavres sont sortis d'Alep chaque jour.

Tout cela se déroule sous les yeux d'officiers turcs de haut rang. Quarante à cinquante personnes réduites à l'état de squelettes sont étendues, empilées dans un jardin près de notre école.

Ils ont pratiquement perdu l'esprit, et ont oublié comment manger. Si quelqu'un leur donne du pain, ils le repoussent de côté avec indifférence. Ils poussent des faibles gémissements et attendent la mort.

Ta-a-lim el alman ( le culte des Allemands) est responsable de cela, déclarent les autochtones.

Cela restera comme une tâche terrible sur l'honneur de l'Allemagne parmi les générations à venir.

Les habitants les plus éduqués d'Alep maintiennent que les Allemands n'approuvent pas vraiment ces agressions. Le peuple allemand, lui aussi, est peut-être ignorant de ces événements. Comment, autrement, la presse allemande, habituellement attachée à la vérité, pourrait-elle évoquer le traitement humain d'Arméniens accusés de haute trahison? Mais il se peut aussi que les mains du Gouvernement allemand soient liées par certains contrats. Non – lorsqu'il est question de milliers de femmes et enfants sans défense conduits à une mort certaine par les privations, les mots " opportun " et " kompetenzvertage " ne peuvent plus avoir aucun sens.  Tout être humain cultivé est compétent pour intervenir, et c'est en fait, son devoir sacré de le faire. Notre estime en les générations à venir est en jeu. Les Turcs et les Arabes les plus raffinés hochent la tête avec tristesse lorsqu'ils voient des soldats brutaux conduire les convois à travers la ville de femmes en état de grossesse très avancée, qu'ils frappent avec des gourdins, ces pauvres êtres étant tout juste capables de se traîner encore.

Il y a en outre, les hécatombes effroyables d'êtres humains comme on peut le voir dans le décret joint de Djemal Pacha.

C'est la preuve qu'en certains lieux, on craint la lumière, mais les gens n'ont pas encore la volonté de mettre fin à ces scènes, qui sont dégradantes pour l'humanité.

Nous savons que le Ministère des Affaires étrangères a déjà reçu par d'autres sources la description de la situation locale. Dans la mesure cependant, où le processus de déportation  n'a été amélioré en aucune manière, nous pensons qu'il est de notre devoir, plus que jamais, de soumettre ce rapport à votre lecture.   

Par-dessus tout, nous mesurons tout le danger auquel le prestige de l'Allemagne est exposé ici.

Directeur Huber
Dr Niepage
Dr Graetner
M. Spieler

Dans sa lettre personnelle, le Dr Graetner donne plus de détails sur les faits dont il a été témoin:

Je vais vous en dire plus sur le sort des Arméniens; cette fois-ci, la question n'était pas celle des massacres traditionnels, il s'agissait de rien de plus ou de moins que la complète extermination des Arméniens en Turquie. Ce fait, les officiels turcs de Talaat Bey l'ont admis, cyniquement mais avec quelque embarras tout de même, devant le consul allemand. Le gouvernement avait fait savoir de prime abord qu'il voulait seulement dégager la zone de guerre et installer les migrants dans d'autres lieux d'habitation.

Ils ont commencé par déloger de leurs retranchements les plus farouches des montagnards. Ils l'ont fait avec l'aide des services de sécurité de l'Empire turc, celles de leur propre chefs Église, des missionnaires américains et de l'un des consuls d'Allemagne. Par la suite, les expulsions ont commencé partout, y compris dans les régions où la guerre ne se déroulera jamais. La façon dont se sont passées ces expulsions est démontrée par le fait que sur les 18 000 personnes chassées de Kharpout et Sivas, seulement 350 ont atteint Alep, et onze seulement sur les 1 900 d'Erzéroum. Une fois arrivés à à Alep, les plus démunis sont loin de voir la fin de leurs problèmes. Ceux qui n'étaient pas morts ici (les cimetières sont pleins) avaient été conduits de nuit dans les steppes syriennes, vers Zor sur l'Euphrate. Là, un petit pourcentage d'entre eux ont continué de survivre, avant de mourir de faim.

Je déclare tout cela en tant que témoin direct. Je me trouvais là-bas en octobre de l'an passé et j'ai vu de mes propres yeux plusieurs cadavres d'Arméniens flottant sur l'Euphrate ou étendus dans la steppe.

Les Allemands, avec de louables exceptions, étaient les témoins tout à fait imperturbables de ces choses, s'en tenait à l'excuse suivante:

" C'est que nous avons besoin des Turcs, voyez-vous! ".

Je sais comme étant un fait, en outre, qu'on a interdit à un employé de l'Association Allemande du Coton et à l'un des employés du train de Bagdad d'aider les Arméniens. Des officiers allemands ont eux aussi formulé des plaintes dénonçant la sympathie manifestée par leur consul envers les Arméniens, et un enseignant allemand, bien qu'étant le plus compétent, n'a pas été engagé dans une école de l'Association Turco-allemande parce que sa femme est Arménienne. Ils craignent que les Turcs prennent cela pour une offense. Les Turcs manifestent moins d'égards.

" La question est une affaire intérieure turque; nous ne devons pas nous en mêler ! ", voilà ce qu'on entend dire constamment par les gens. Lorsqu'il était question cependant, de persuader les Arméniens de se rendre, ils s'en sont vraiment mêlés !

Les Arméniens d'Urfa, voyant le sort qui s'était abattu sur leurs compatriotes d'autres régions, ont refusé de quitter leur ville et ont résisté. Cette fois, pas moins que le conte Wolf von Wolfskehl ordonna que la ville soit bombardée, et après la reddition de 1 000 hommes arméniens il n'a pas eu le pouvoir d'éviter qu'ils soient massacrés.


CLUBS DES FEMMES PHILATÉLISTES DE LA VILLE

 Résolution de Miss Helen Boswell, d'Indore, Après une Discussion Animée

UNE PROTESTATION EN FAVEUR DES ARMÉNIENS MISE AUX DÉBATS 

Refus De Délégués d'Agir à Propos des Atrocités Turques – La Convention divisée sur le Vote

 

30 octobre, 1915 

La Position de la Fédération Reste la Neutralité.

Une deuxième tumulte se produisit lorsque Miss Amy Fay, en tant que représentante de la Société Philarmonique des Femmes, présenta à la Fédération une résolution protestant contre les atrocités turques subies par les Arméniens et enjoignant à l'organisation de faire tout en son pouvoir pour obtenir l'intervention du Gouvernement des États-Unis.

Il y eut des cris de " Nous sommes neutres ! " au cours de la lecture du texte de la résolution, et plusieurs femmes se sont levées en criant que la démarche n'était pas admissible. L'opposition avait pris de l'ampleur, et à la fin, une motion sur l'examen de la résolution fut mise aux voix.

Quelques 1 800 femmes étaient présentes lorsque Mme Eugénie J. Grant déclara ouverte la convention. Au moment où la convention commença ses travaux la salle était pleine et dans la confusion, à la porte, nombreuses étaient celles qui s'efforçaient d'y entrer. La convention prit acte de la présence de 381 déléguées et 186 suppléantes, représentant 245 clubs. Dix sept nouveaux clubs ayant été admis dans la fédération, le plus important étant le National Opera Club of America, dont fait partie Mme la Présidente, et qui compte 800 membres […].


DES TURCS S'OPPOSENT AUX ALLEMANDS

 À Constantinople, les Mouvements Hostiles seraient de plus en plus Nombreux


30 octobre, 1915

 PARIS, 29 octobre. – Selon des nouvelles venues de Constantinople de sources bien informées, le mouvement antiallemand augmente de jour en jour, et Ahmed Riza, chef du Parti Jeune Turc, qui souhaitait interpeller le gouvernement sur les raisons de l'entrée en guerre de la Turquie, n'a pas été autorisé à le faire. Le gouvernement a  interdit aux sénateurs et aux députés de discuter la politique étrangère turque.

 Des nouvelles sont parvenues, faisant état de récents massacres d'Arméniens dans la région d'Ourfa.

 

LONDRES, samedi 30 octobre. – Une dépêche de l'agence Reuters d'Athènes fait état d'un prochain retrait du décret sur la confiscation des biens des belligérants, suite à la menace des puissances de l'Entente de confisquer les biens allemands dans les pays belligérants.

 

AMSTERDAM, 29 octobre. – Hakki Pacha, l'ambassadeur turc en Allemagne, déclare dans un entretien publié dans un journal allemand, que le " fiasco " des puissances de l'Entente à Salonique a montré la folie de la tentative de cette opération militaire avec 50 000 à 100 000 hommes. Si le champ de bataille devait être étendu à la Syrie, a-t-il ajouté, la Turquie serait prête à y envoyer les troupes nécessaires, en particulier parce que désormais, les munitions peuvent être acheminées vers Constantinople par le Danube.     


DES ESPIONS TURCS DANS UN HOTEL
Observaient un Arménien, mais le Détective de l'Hôtel les a Chassés

Publié le 29 octobre 1915

Une recherche d'espions turcs avait été commencée hier à midi au Waldorf-Astoria par le détective de l'hôtel John Dillon lorsqu'on lui a rapporté que quatre personnes d'allure suspectes étaient passées plus d'une fois près d'une table à laquelle Vahan Cardashain, jusqu'à récemment Commissaire turc de l'exposition Canada-Pacific, dînait en compagnie de plusieurs amis. M. Cardashain, un sujet arménien de Turquie, a cessé d'être commissaire peu après qu'une lettre qu'il avait écrite à William Jennings Bryan en confirmation des atrocités arméniennes ait été transmise à l'Ambassadeur von Bernstorff.
L'ex-commissaire tardait un peu à arriver au déjeuner, et ses amis étaient quelque peu anxieux. Lorsqu'il arriva finalement, ils lui firent part de leurs craintes, mais cela fit plutôt sourire M. Cardashain. Cependant, lorsque les quatre étrangers passèrent plusieurs fois devant la table de M. Cardashain, le regard menaçant, le détective de l'hôtel fut appelé. Aussitôt qu'il est apparu, les suspects se sont éloignés en prenant la cinquième avenue. M. Cardashain a pris un train pour Washington.

Où l'on voit que Taalat n'hésite pas, pour la réussite du Génocide, à s'occuper des Arméniens en pays étrangers, quelques mois seulement après l'avoir déclenché. Il avait donc envoyé ses agents jusqu'aux USA pour surveiller l'activité des patriotes arméniens en Amérique, les forcer au silence par la menace, voire peut-être les assassiner, pour les empêcher de témoigner…
Une preuve s'il en fallait contre la thèse négationniste selon laquelle les massacres et les crimes n'étaient pas organisés par le gouvernement turc.GB




LA LUMIERE QUI POURRAIT S'ÉTEINDRE EN TURQUIE
Ce que les Arméniens Ont Fait Pour Soutenir la Chrétienté et la Civilisation Occidentale dans la Famille du Prophète
Publié le 28 octobre 1915


Par ARSHAG MAHDESIAN
Éditeur et Publiciste Arménien

À l'Éditeur du New York Times:

L'éminent et acharné défenseur des atrocités turques, Zia Mufty-Zadé, dans l'incohérence de ses propos pour atténuer et justifier le comportement criminel du Gouvernement ottoman, demande: " Où est l'Arménie? "
Il pense que parce que l'Arménie est divisée entre trois puissances – Russie, Perse et Turquie- elle n'existe plus. Mais la Pologne est elle aussi divisée en trois puissances. Demandons-nous : " Où est la Pologne? "
Les provinces d'Alep, Adana, Trébizonde, Erzeroum, Van, Bitlis, Diyarbekir, Mamouret-ul-Aziz et Sivas, habitées d'Arméniens, constituent l'Arménie en Turquie. Le Gouvernement turc lui-même a reconnu l'existence de l' Arménie au cours de la guerre russo-turque. Lorsque les armées furent détruites le Sultan et ses conseillers réalisèrent que le vainqueur, la Russie, pourraient demander l'annexion d'Erzeroum, Diyarbekir et Sivas. Ils s'empressèrent de demander aux Arméniens de réclamer, pour les provinces habitées par eux, l'autonomie politique sous suzeraineté ottomane.
L'arrivée de l'escadron britannique devant Constantinople, cependant, encouragea la Turquie à changer d'idée, et au cours des négociations à San Stefano, ils refusèrent d'accepter le texte proposé par le plénipotentiaire de la Russie en faveur de l'autonomie administrative arménienne. Finalement, la phrase " autonomie administrative  " de l'Article XVI du traité de San Stefano fut remplacée par " réformes et améliorations " que la Russie garantirait par l'occupation du territoire turc. Au congrès de Berlin, suite aux efforts de la Grande Bretagne, la clause concernant l'occupation russe fut éliminée et l'Article XVI du traité de San Stefano fut substitué par l'Article LXI du traité de Berlin. Les négociations diplomatiques qui ont résulté en les Articles XVI du traité de San Stefano et LXI du traité de Berlin sont une reconnaissance irréfutable de l'existence de l'Arménie dans l'empire turc.
L'existence d'une nation, outre son indépendance politique, est indiquée par ses activités citoyennes. La population de l'Empire ottoman est estimée à 32 000 000, dont 1 100 000 sont arméniens. Et cependant, les Arméniens ont 785 établissements d'enseignement, avec plus de 82 000 élèves, tandis que les Turcs peuvent tout juste avancer 150 écoles recevant seulement 17 000 lèves.
Pour donner une idée de la puissance économique de Arméniens dans l'Empire turc, Marcel Leart rapporte le fait que des 168 importateurs de Sivas, qui comporte la plus faible population arménienne des six provinces arméniennes, 141 sont des Arméniens, 18 des Turcs et 12 des Grecs.
De 150 exportateurs, 127 sont des Arméniens, et 23 des Turcs.
Sur 37 banquiers et financiers, 32 sont des Arméniens et seulement 5 des Turcs.
Des 9 800 commerçants et artisans, 6 800 sont des Arméniens et seulement 2 550 sont des Turcs, les autres se répartissant sur diverses autres nationalités.
La même chose est vraie pour l'industrie locale. Des 153 usines et minoteries, 130 appartiennent à des Arméniens, 20 à des Turcs, et 3, ateliers du tapis, à des étrangers ou compagnies mixtes. Le personnel de tous ces établissements est exclusivement arménien,. Le nombre d'employés est d'environ 17 000 dont 14 000 sont des Arméniens, 3 500 des Turcs et 200 Grecs et autres.
Les Turcs appartiennent à la race touranienne d'Asie Centrale. Avec leur apparition en Syrie, Mésopotamie, Byzance, Arabie, Égypte Arménie et Grèce, la civilisation a régulièrement cédé la place. Victor Hugo a admirablement décrit cette influence néfaste des Turcs dans les termes qui suivent: " Les Turcs ont passé là, tout est ruine et deuil ". Le Turc n'a aucun lien, aucune consanguinité avec les Arabes, et n'a aucune paternité sur la civilisation. Il est méprisé du fond du cœur par les Arabes qui chantent :
Trois choses ne sont que l'œuvre du mal…
La sauterelle, la vermine et le Turc.
Entourés de toutes parts par les hordes destructrices turques, les Arméniens ont été les représentants de la civilisation occidentale, d'abord par leur religion chrétienne, ensuite par leur culture. Alors que les Turcs fournissent les criminels dans l'Empire ottoman, les Arméniens fournissent les médecins, les artisans, et les érudits. C'est un architecte arménien, Sinan, qui a conçu et construit la célèbre mosquée d'Andrinople et la Mosquée de Soliman à Constantinople, et ce sont des architectes arméniens, les Balian, qui ont construit les palais de Cheragan, de Beyler-bey, et de Dolma Bahche, " qui peut être pris ", selon Théophile Gautier, " pour un palais vénitien, en plus riche, plus vaste et plus hautement orné – transporté depuis le Grand Canal sur les rives du Bosphore ".
Même l'introduction de l'imprimerie turque et du théâtre turc ont été faites par les Arméniens, et ce sont deux distingués Arméniens, Odian et Servicen, qui collaborèrent avec Midhat Pacha pour élaborer la Constitution turque. Les Turcs n'auraient pas une grammaire de leur propre langage s'il n'y avait pas eu les philologues arméniens. On doit rendre hommage à Sherif Pacha, distingué Turc exilé à Paris, lorsqu'il déclare, comme il l'a fait dans les colonnes du THE TIMES du 10 octobre, que :
"  S'il est une race qui a été associée de près aux Turcs par sa fidélité, par ses services au pays, par les hommes d'état et fonctionnaires de talent qu'il a donnés, par l'intelligence qu'il a montré dans tous les domaines – le commerce, l'industrie, la science et les arts - c'est certainement la [race] arménienne ".
En outre, l'Arménie en Turquie, donne de la force aux Turcs. Les deux paragraphes qui suivent, extraites de la lettre qu'un Turc a envoyée à son fils dans ce pays, en attestent :
" Je te retourne le chèque que tu m'as envoyé, parce que nous ne pouvons pas l'encaisser, il n'y a plus de raya ici…Les temps sont mauvais mon fils, le raya était tout pour nous…Je te dis que lorsque l'hiver sera là, ce sera notre tour de mourir de faim, parce que, comme tu sais, nous vivons tous sur les récoltes du raya ".
Au vu de ces faits, ne pourrait-on pas demander à Zia Mufty, " C'est où, la Turquie? "


Comme le mois précédent, le dix-sept septembre 1915, sous la plume de Vincent Yardum, le New York Times ouvre largement ses colonnes à un citoyen Américain, Arménien d'origine. Cette fois, rappelant l'apport arménien à l'empire ottoman, c'est le sauvetage d'une nation sur ses terres (qui ne s'appelait pas encore autrement qu'ARMÉNIE) que le journaliste demande à son pays. GB


TOUS LES ARMÉNIENS DE LA VILLE DE KERASUNT MASSACRÉS
Les Turcs Balaient la Totalité de la Population dans une Ville de la Mer Noire.
Publié le 26 Octobre 1915

LONDRES, mardi 26 octobre. -- Une dépêche d'Odessa au Daily Mail écrit :
" Les Turcs ont massacré la totalité de la population arménienne de Kerasunt sur la Mer Noire. "

Kerasunt est un port de mer en Turquie asiatique, à environ 110 km à l'ouest de Trébizonde. Il est situé sur un promontoire rocheux, avec une large baie du côté est. Les hauteurs environnantes sont recouverts d'une végétation luxuriante. La population de Kerasunt est d'environ 24 000.

Une dépêche. Quelques lignes dans un journal New Yorkais mais un drame terrible.
GB


ON NE PEUT DÉFENDRE LES ARMÉNIENS
L'Homme d'état Turc dit que le Gouvernement n'a pas de Gendarmes à l'Intérieur
Publié le 25 Octobre 1915

BERLIN, 24 octobre, (via Londres.) — Le correspondant du Tageblatt, Emil Ludwig, envoie le récit d'une entrevue qu'il a eue avec Halil Bey, Président de la Chambre des Députés, au sujet des Arméniens. Halil Bey a déclaré:

" Ce sont des traîtres. Vous avez en tête certains excès et bévues, mais, croyez-moi, le Gouvernement n'en est pas responsable, et les regrette aussi sincèrement que quiconque. Mais nous n'avons plus de gendarmes à l'intérieur. Tout le monde est sous les armes comme soldat. Ainsi, il en résulte que nous n'avons pas été partout capables de contenir la rage des Mahométans contre ces traîtres à leur pays. Le Gouvernement lui-même ne fera que garder les Arméniens si loin du théâtre de la guerre qu'ils ne pourront pas conspirer avec l'ennemi ".

Halil Bey a relevé, dit le correspondant, que les Arméniens se sont ralliés aux Russes par milliers lorsque ces derniers avaient pris la route de Van, ajoutant :
" Défendrez-vous de telles choses ? "
 

Commentaires -  Qu'est-ce qu'il pouvait dire, le Président de la Chambre des Députés turc en octobre 1915 ? Il dit ici ce que les négationnistes du Génocide des Arméniens disent encore: tous les hommes valides étaient mobilisés pour défendre le pays, dans la guerre que d'ailleurs, les Turcs eux-mêmes avaient déclenchée. Mais si tous les hommes valides portaient l'uniforme, qui donc massacrait les Arméniens par centaines de milliers ? Les femmes turques ? les vieillards ? L'élu du peuple turc ne fait que mentir : quelques semaines seulement avant cette entrevue, dans les colonnes du même journal, le New York Times du 3 septembre, il est fait état de massacres de la population Arménienne à Izmit, à 90 km d'Istanbul, soit à environ 1 500 kilomètres du front…
GB


L'ALLEMAGNE DIT NE PAS POUVOIR ARRÊTER LES TURCS
Représentations faites sur les Massacres Arméniens, Mais  Trouvé les Dirigeants Indifférents
Publié le  23 octobre 1915

 

WASHIINGTON, 22 octobre — Des notes confidentielles reçues aujourd'hui par le Département d'Etat disent que le gouvernement allemand a fait officiellement des efforts pour mettre fin aux atrocités rapportées dont seraient victimes les Arméniens en Turquie, mais que les responsables politiques on apparemment montré un manque d'intérêt envers de telles démarches.

Des représentations avaient été faites par les États-Unis par l'intermédiaire de leur Ambassadeur Morgenthau à Constantinople il y a quelques temps, avertissant la Turquie que la continuelle persécution des Arméniens mettrait fin à l'amitié du peuple américain. Un certain nombre de dépêches sur le sujet ont été reçues de M. Morgenthau, mais aucune réponse claire de la part du Gouvernement Ottoman n'a été annoncée.



LES JUIFS ALLEMANDS AIDENT LES TURCS

Envoi de Deux Wagons de Fournitures Hospitalières à Constantinople

 
Publié le 22 octobre 1915

    

     BERLIN, 21 octobre  (Par radiotélégraphe envoyé à Sayville, N.Y.).- Des paroisses juives d'Allemagne ont envoyé à Constantinople deux wagons remplis de fournitures hospitalières pour l'armée turque. Herr Nossig, le délégué juif, a été reçu en audience par le Sultan, l'héritier au trône, le Ministre de la Guerre Enver Pacha et par d'autres représentants du gouvernement turc.

     Les officiels turcs ont exprimé leur satisfaction pour le comportement de la population juive et donné des assurances sur  l'amitié du gouvernement envers ce peuple. À Constantinople, une union Musulmane-Israélite avait été fondée pour la promotion de la solidarité entre Juifs et Turcs. Les gouvernements turc, allemand et austro-hongrois ont échangé leurs vues dans le but de parvenir à un accord concernant l'amélioration de la condition des Juifs dans l'est.


IL NE RESTE A PRÉSENT EN TURQUIE QUE 200 000 ARMÉNIENS
Plus de 1 000 000 Tués, Réduits en Esclavage ou Exilés Selon un Journal de Tiflis
Publié le  22 octobre 1915

TIFLIS, Transcaucasie, 19 octobre (via Petrograd et Londres, 21 octobre).
 Selon une l'estimation du journal arménien Mshak, des 1 200 000 Arméniens vivant en Turquie avant la guerre il ne reste pas plus de 200.000. Cet effectif restant, dit Mshak, pourrait disparaître avant la fin de la guerre, du fait de la
politique turque d'extermination.
Les chiffres de Mshak sont fondés sur l'estimation du Patriarche Arménien de Constantinople selon qui 850 000 Arméniens ont été tués ou réduits à l'esclavage en plus des 200 000 Arméniens dont on pense qu'ils ont fui en
Russie.


LES ARMÉNIENS ACCUSÉS DE FAIRE DU TORT AUX TURCS
Les Autorités Ottomanes Portent des Accusations Formelles d'Attentats Répétés
LE LONG DE LA FRONTIÈRE CAUCASIENNE
Les Troupes Russes Associées à des Civils Grecs et Arméniens sont les Auteurs
Spécial au New York Times
Publié le  22 octobre 1915

 WASHINGTON, 21 octobre. — A la suite des accusations venues du monde entier de traitement barbare des Chrétiens d'Arménie, le Gouvernement turc nous a communiqué des accusations dans l'autre sens, selon lesquelles des actes barbares ont été commis contre des Musulmans par les troupes russes le long de la frontière caucasienne, aidés par des membres de la population grecque et arménienne de cette région.

La contre-accusation est adressée par le Gouvernement turc à son ambassade de Washington. Elle a pris la forme d'une communication qui a été remise au Secrétaire Lansing aujourd'hui par Abdul Hak Hussein Bey, premier secrétaire et chargé d'affaires de l'ambassade depuis le 4 octobre 1914, lorsqu'il a pris ses fonctions lors du retour de l'ambassadeur A. Rustem Bey en Turquie.

Après avoir remis la communication au secrétaire Lansing, le chargé turc en a remis un résumé à la presse.

Après avoir dit qu'il n'avait pas eu la possibilité d'examiner le document, le Secrétaire Lansing n'a pas fait d'autres commentaires sur la communication. On ne s'attend à aucune action du Département d'État pour l'instant. On pense que la communication sera classée pour une référence future.

Le résumé remis par Hussein Bey dit :

"L'ambassade ottomane vient juste de recevoir un rapport du quartier général ottoman concernant les actes de barbarie commises par les troupes russes, assistées par les populations grecques et arméniennes, contre les Musulmans habitant le long de la frontière du Caucase. Ces actes atroces, commis sous les yeux des autorités russes dans les circonscriptions de Tavashguerd, Pensguerd, Olti et Ardanuche ont été établis après une enquête approfondie de Seifullah Effendi, un membre d'Erzeroum du Parlement ottoman. Quelques uns des cas les plus typiques sont relatés ci-dessous, en omettant cependant certains détails qui ne peuvent être imprimés en raison de leur horreur indescriptible.
" Une bande de Russes et d'Arméniens s'était introduite dans la maison de Murad Bey, un riche villageois de Kirechud bien connu pour ses actes charitables envers tous les habitants, quelle que soit leur race ou leur croyance, avec visiblement l'intention d'agresser sa vieille épouse. Murad Bey, réalisant l'impossibilité de la préserver du déshonneur, l'a tuée avec son propre fusil, et il a été par la suite abattu par les agresseurs. La rage de ces derniers a ensuite été dirigée contre la belle-fille de Murad Bey; dont le fils, Suleyman, suivant l'exemple de son père, a été tué lui aussi.
" Les coupables se sont rendus après cela au village d'Izensur, et pour éviter la répétition de tels actes, ont commencé par enfermer dans une grange la population de sexe masculin et ont ensuite agressé les femmes. Les Musulmans des villages environnants, ayant été prévenus du danger, se sont précipités sur les lieux, mais trop tard pour porter secours aux femmes; parmi elles deux filles de 13 ans sont mortes de honte et de torture.
" Des femmes musulmanes qui avaient trouvé refuge dans le village de Parishur ont été agressées par des Grecs et des Arméniens, et certaines d'entre elles ont été soumises au pire traitement. La plupart d'entre elles, cependant, préférant la mort à la honte, se sont jetées d'une colline haute de 200 mètres dans un précipice rocheux, où elles ont toutes péri.
" Un grand nombre de femmes musulmanes d'Ardanuche, qui s'étaient enfuies à Tavashguerd ont du endurer le même sort.
Alors qu'elles étaient laissées à moitié mortes, leurs agresseurs russes, arméniens et grecs ont porté la cruauté au point de percer de leurs baïonnettes les joues des enfants afin de les empêcher de s'allaiter au sein de leurs mères. C'est ainsi que les mères et les enfants périrent d'une mort lente et terrible sous les yeux de leurs persécuteurs.
" L'épouse et la fille d'Ibrahim Alias Ibo ont été emmenées par des Grecs et des Arméniens du village de Mokdjalar à celui de Pertek, dans la circonscription d'Olti, et ont été agressées. Deux Musulmans, se précipitant pour leur venir en aide, ont sauvé la jeune fille. La mère est morte après avoir reçu vingt et une blessures. La jeune fille est morte deux mois plus tard des conséquences du choc qu'elle avait subi.
" Des Arméniens et des Grecs, servant de guides pour les troupes dans l'attaque du village d'Erghenes, ont agressé avec une cruauté inouïe la femme de l'Imam Oglou Osman Agha, sous les yeux de son mari impuissant. Ce dernier a ensuite été tué et son corps coupé en morceaux.
" Zebra, la femme de Mouhib Oglou Mohammed Ali, aussi du village d'Erghanes, âgée de 18 ans , a été torturée par les mêmes malfaiteurs pendant trois jours, après quoi elle a été tuée et son corps horriblement mutilé.
" Les Arméniens du village de Dauzaute ont décapité une certaine personne nommée Chérif, et quatre autres Musulmans qui avaient trouvé refuge dans ce village.
" Un Grec, nommé Yani, a tué en pleine rue et devant un attroupement nombreux, Garib Agha du village de Karnavas, dans la circonscription de Tavaarguerd , qui s'était réfugié dans le village d'Azort, dans le district de Tortum. Les Arméniens qui avaient assisté à cette scène ont tout de suite rejoint Yani et traîné vingt cinq Musulmans hors de leur maison où ils s'étaient cachés. Conduits dans la rue, ces infortunés ont été rassemblés et tués jusqu'au dernier, après avoir subi d'horribles tortures rappelant le Moyen Âge. Leur corps, coupés en morceaux, ont été ensuite exhibés à tous les coins de rues.
" Les mêmes tueurs de sont dirigés vers le village de Djihan, et là ils se sont attaqués à cinq hommes âgés. Des septuagénaires. Ceux-ci ont d'abord été couverts de blessures, et arrosés ensuite de kérosène et brûlés vifs.
" Ces quelques événements pourraient être multipliés, mais ils sont suffisants à montrer l'esprit barbare avec lequel les Russes, aidés d'Arméniens et de Grecs, font la guerre dans le Caucase. "


LES ARMÉNIENS REMERCIENT LE PAPE
Le Patriarche Exprime Sa Gratitude pour la Requête de Benoît XV au Sultan
Par Câble Spécial au New York Times
Publié le 21 octobre 1915

ROME, 21 octobre. — La nouvelle faisant état des remerciements du Patriarche des Arméniens au Pape pour son intervention en faveur des Arméniens en Turquie a été reçue avec une grande satisfaction, dans la mesure où on pensait ici que le Patriarche aurait gardé le silence si la remontrance du Pape adressée au Sultan n'avait eu aucun effet.
L'agitation en faveur des Arméniens n'a pas cessé cependant, les gens ici ayant trop d'expérience envers les promesses turques pour croire que le danger des attentats soit écarté.
Le projet d'un chef arménien d'organiser un corps de ses compatriotes de tous les pays pour combattre les Turcs a été reçu ici avec enthousiasme, et il n'aura pas de difficulté à réunir des volontaires parmi les Arméniens en Italie.


PROJET DE CORPS ARMÉNIEN POUR COMBATTRE POUR LES ALLIÉS
L'Officier Russe Propose d'Accueillir les Recrues de Beaucoup de Pays, y Compris d'Amérique
Publié le 19 Octobre 1915

LONDRES, 18 octobre. — Une dépêche à la Reuter's Telegram Company reçue de Petrograd annonce:
" Le Capitaine Torcom prévoit de constituer un corps de volontaires parmi les Arméniens résidant actuellement dans les Balkans, en Égypte, en Italie, France, Grande-Bretagne et aux États-Unis pour combattre dans les rangs des Alliés contre la Turquie.
" Dans un appel dans ce sens, le Capitaine Torcom dit que les Arméniens n'ont pas été en mesure d'empêcher le massacre des Arméniens en Asie Mineure par les Turcs, mais que ceux qui vivent dans les autres pays peuvent aider au combat contre la Turquie et que les puissances alliées ne leur refuseront pas l'honneur de se joindre à la guerre contre leurs oppresseurs.
" Le projet du Capitaine Torcom prévoit la formation d'un maximum de 30 bataillons et un minimum de 10 bataillons. Le Capitaine Torcom a été blessé dans le récent combat en Galicie, mais est à présent sur le point de quitter l'hôpital pour se rendre à Londres pour mettre son projet à exécution. "


LES ARMÉNIENS VUS PAR LES TURCS
Ils Trahissent leurs Gouvernants, se Réfugient dans les Missions Chrétiennes et Doivent être Traités comme des Dangereux Rebelles
Publié le 18 octobre 1915

Commentaires

Par ZIA MUFTY-ZADE BEY
New York, 15 octobre 1915,
A l'éditeur du New York Times:

La campagne menée par un petit nombre de personnes essayant d'entraîner l'opinion publique américaine vis-à-vis des soi-disant massacres d'Arméniens a récemment pris une telle proportion que je me considère obligé de mettre en avant quelques considérations. Je le fais avec regret, dans la mesure ou avant tout, j'ai des scrupules à exposer au regard d'étrangers les imperfections de quelques uns parmi notre peuple, et ensuite, je suis d'avis que dans la vie publique, comme dans la vie privée, chacun ne devrait s'occuper que de ses affaires.

Quoi qu'il en soit, je voudrais poser une question à ceux qui emploient librement le terme " Arménie " mentionné même dans les communiqués officiels de la Société de la Croix Rouge et dans d'autres institutions. L'Arménie, c'est où ? S'ils entendent par ce terme les provinces et autres villes accueillant un certain nombre d'Arméniens, l'Arménie doit ensuite inclure non seulement tous les territoires inclus entre l'Inde et la Grèce mais aussi New York City, où résident un grand nombre d'Arméniens. Mais le problème est que dans aucun de ces territoires la population arménienne n'a de majorité légitime. Tout comme à New York, où sont représentées beaucoup d'autres nationalités, dans les territoires mentionnés dans ce qui précède, il y a des millions de Perses, de Russes, de Turcs, de Kurdes, d'Arabes, de Syriens, de Bulgares, etc.

S'ils entendent par Arménie le territoire contigu à la frontière russe, où les implantations arméniennes sont plus denses, alors le terme devrait inclure également toutes les provinces russes du Caucase, où ladite population est plus dense. Bien sûr, cela ne doit pas être oublié, parce qu'une résurrection de l'Arménie, priverait de quelques provinces le " Petit Père " russe dont la pureté, la largeur des idées, l'amour de la liberté et de l'égalité des droits ont allié la Russie aux puissances occidentales, championnes des petites nationalités !

La vérité de la chose est qu'il n'y a aucune Arménie constituée, et que les Arméniens de Turquie ne sont que des citoyens ottomans, comme il y a des citoyens russes en Russie et des citoyens américains aux États-Unis et qu'on attend d'eux qu'ils respectent les lois qui ont cours dans ces pays.

Voyons à présent les caractéristiques nationales des Arméniens. Il convient de dire que partout où ils se sont installés, que ce soit en Turquie, en Asie, en Europe ou en Amérique, ils constituent un élément turbulent dont les rapports avec les affaires ont largement contribué à donner une réputation douteuse à tous les Orientaux. Ainsi, loin d'être la race calme et paisible qu'on décrit pour aggraver le traitement auquel les Turcs les soumettent, on admet généralement que la majorité d'entre eux forme un élément indésirable pour quiconque vient à leur contact, n'importe où dans le monde.

Avant de porter un jugement définitif sur les actes du gouvernement ottoman, dans cette triste occurrence, jugement qui, pour employer les propres mots de M. Lansing, " mettrait en danger les sentiments amicaux entre les peuples des deux pays ", je veux que le public américain se souvienne des photographies largement publiées dans quelques journaux en Amérique et de nombreux autres en Europe. L'une des dernières éditions de The Outlook les reproduit à nouveau. Ces photos montrent des " Volontaires arméniens dans des tranchées et tirant sur les troupes ottomanes ". Je voudrais que le public américain considère ce qu'ils penseraient s'ils voyaient des " Arméniens dans des tranchées tirant sur les troupes américaines ", si une partie des Arméniens américains avaient choisi cette ligne de conduite à une époque où l'Amérique était en guerre avec une puissance étrangère.

Les rapports, remis au parlement britannique et cités comme ayant été initiés à Tiflis, une ville russe, tout comme les rapports donnés par la Commission d'Enquêtes présidées par Lord Bryce, sont pour le moins grossièrement exagérés. Le parti pris des rapports faits par nos ennemis qui ont un intérêt vital à nous décrire sous un mauvais jour est tellement évident qu'il n'y a nul besoin de s'y attarder davantage. L'exactitude des enquêtes rapportées par la Commission Lord Bryce peut très bien être mise en doute lorsqu'on cesse de penser que ladite commission a enquêté sur des actes supposés commis à une distance de plusieurs milliers de miles à l'intérieur d'un pays en guerre, et donc en des lieux qu'il est matériellement impossible d'atteindre.

Les seuls rapports qui pourraient donner une base permettant de les considérer comme valables sont ceux rédigés par les missionnaires américains qui sont récemment revenus dans ce pays.

De ce point de vue, pour ne citer que la seule déclaration de l'un des plus récents témoins oculaires, je reprends les mots du Dr Yarow, membre du Conseil Américain des Missions Étrangères, tels qu'ils sont repris dans l'édition du New York Times du 8 octobre. Le Dr Yarow dit: " Pendant vingt-sept jours, 1 300 Arméniens déterminés ont tenu Van contre 5 000 Turcs et Kurdes ".

A présent, notez bien ce que je vous dis : Van est une ville ottomane, et donc, les actes de ces Arméniens déterminés ne sont rien d'autre qu'un acte de rébellion déclaré qui devait être traitée comme il convient par la force légale organisée. Assez singulièrement, le Dr Yarow transforme en crime le fait que les Turcs étaient commandés par un officier allemand et recourrait à un obusier pour étouffer la rébellion, comme si on pouvait attendre d'un gouvernement institutionnalisé qu'il agisse différemment pour écraser la révolte d'un certain nombre de ses citoyens " déterminés ". Assez singulièrement, le Dr Yarow transforme en crime le fait que les Turcs aient délibérément tiré sur les immeubles de la mission sur lequel flottaient cinq drapeaux américains et un drapeau de la Croix-Rouge " en protection " (sic), bien que selon sa propre confession il admet le recours illégal auxdits drapeaux en avouant le soutien effectif que lui-même et ses collègues de la mission apportaient aux Arméniens rebelles, lorsqu'il dit : " Et pendant le siège, il NOUS fallait non seulement combattre les Turcs mais presque toutes les maladies connues en même temps ", montrant ainsi manifestement que leur premier et principal objectif était de " combattre les Turcs ", admettant ainsi manifestement l'emploi du drapeau américain à mauvais escient. Est-il surprenant que dans ces conditions, les Turcs aient ouvert délibérément le feu sur les immeubles de la mission? Je me risquerais à dire que si les missionnaires américains à Van ou en toute autre région de la Turquie, au lieu de " combattre les Turcs ", s'étaient contentés de prêcher, enseigner l'amour fraternel et les principes généraux chrétiens, tâche pour laquelle je présume, ils ont été envoyés en Turquie par le Conseil Américain, les propriétés des missions dans l'Empire ottoman auraient été préservés et exempts de toute attaque.

S'il y a eu un quelconque crime commis sur des femmes ou des enfants nous sommes les premiers à les déplorer profondément et sincèrement, mais avec ma connaissance du pays et des gens je me considère en position de nier l'existence d'un mouvement général concerté impliquant des massacres et des atrocités. Si des femmes et des enfants ont été tués dans la bataille je répète que je le déplore mais je veux insister sur le fait que de tels accidents apparaissent inévitablement tous les jours même sur les champs de bataille occidentaux, où les nations supposées civilisées sont en guerre. On doit par conséquent considérer cela comme le mal inévitable de la guerre.

S'agissant de l'expulsion " en masse " et le convoyage des Arméniens de ces lieux de l'Empire ottoman qui sont, ou qui pourraient être sous la menace de l'invasion étrangère, je vois la justification de cet acte du Gouvernement ottoman dans l'aide que les Arméniens ont donnée aux Russes. Il est bien de remarquer que ne serait-ce qu'à Van et ses environs, où la révolte interne des Arméniens est devenu effective, les Russes sont parvenus à envahir le territoire. On conçoit par conséquent, d'un gouvernement légalement constitué, trompé par un certain élément de la population, qu'il prenne nécessairement des mesures sévères pour empêcher la répétition de trahisons similaires, et les conséquences qu'elles auraient en tout autre lieu du pays, en concentrant, en un endroit facile à contrôler, tous les membres d'un élément à ce point turbulent.

Bien sûr une expulsion à une échelle à ce point grande crée inévitablement des souffrances, des maladies et même des actions immorales. Cela est encore une fois mis en évidence par les effets que les réfugiés belges ont rapportés en Angleterre, en Hollande et dans d'autres pays. Il est des plus regrettable que de telles souffrances soient tombées sur les épaules d'une race incluse dans la famille ottomane elle aussi, mais les Arméniens n'ont à s'en prendre qu'à eux-mêmes.  ZIA MUFTY-ZADE BEY
 

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Au mois d'octobre 1915, les témoignages, les reportages, les prises de position, les appels sur ce qui se passe en Arménie affluent au New York Times. Ils sont à ce point convergents que le quotidien new-yorkais a demandé au consul turc de donner le point de vue du gouvernement turc et n'a pas hésité à le publier le 15 octobre. Quelques jours plus tard, le New York Times ouvre ses colonnes au Mufty Zia, auteur d'un livre Speaking about Turks, et cité encore de nos jours dans un site négationniste d'Internet. On y voit que le mensonge, le recours à des termes ambigus qui constituent l'essentiel de l'argumentation turque, datent de 1915. Le Mufty emploie le terme  soi-disant (so-called) là où le consul parle de  fabrication. D'après lui, les USA feraient mieux de s'occuper de leurs affaires. Pour lui, l'Arménie, ce pays peuplé d'Arméniens n'existe pas ; ces sujets chrétiens représentaient une menace pour la Turquie en guerre, une guerre dans laquelle elle est entrée délibérément.

La légitime défense des Arméniens de Van, le 20 avril 1915, pour répondre et à la confiscation des armes organisé par le gouverneur turc et aux massacres qui ont suivi (l'ambassadeur Morgenthau consacrera à ces événements héroïques un chapitre entier de ses mémoires), est qualifiée de rébellion et même de révolution. Les faits repris dans le Livre Bleu de Lord Bryce sont grossièrement exagérés. Les témoignages des missionnaires américains sont suspects parce qu'issus de Chrétiens.

Revenant sur la menace que selon lui, les femmes, les enfants, les vieillards faisaient peser sur une Turquie envahie par la Russie, le Mufty recourt aux guillemets pour contester que ces déportations soient organisées " en masse ".

Il y a tout de même un argument qu'on n'entend plus aujourd'hui, peut-être parce qu'au fond, c'est celui des Turcs. C'est un jugement sans appel, le même que les nazis reprendront à l'égard des Juifs pour justifier la Shoah. Au détour d'une phrase, le Mufty Zia écrit : on admet généralement que la majorité d'entre eux forme un élément indésirable pour quiconque vient à leur contact, n'importe où dans le monde. Il ne suffisait pas dès lors, de déporter les Arméniens où que ce soit, puisqu'ils constituaient, où qu'ils soient, un élément indésirable. Il fallait les exterminer.

GB


DES MANIFESTANTS PAR MILLIERS PROTESTENT CONTRE LES MASSACRES D'ARMÉNIENS

Un Seul Homme et Une Seule Femme Se Déclarent en Désaccord Avec la Dénonciation des Massacres

LES TURCS ONT TUÉ 500 000
________

Des Preuves, Détenues par le Département d'État, Montrent qu'un Quart de Million de Femmes ont été Violées.
Publié le 18 octobre 1915

L'audience nombreuse qui s'était réunie au Century Theatre, Central Park West et Soixante Deuxième rue, hier après midi, avait à peine acclamé son approbation d'une résolution déplorant les atrocités commises contre les Arméniens par les Turcs, qu'un homme disant s'appeler Brown, se leva et demanda qu'on lui donne le droit de discuter les résolutions.
Une femme, qui disait s'appeler Mme Brooks, hurla son encouragement au fauteur de trouble et demanda qu'il soit entendu. Il a été éjecté de force hors du théâtre, mais il était de retour quelques minutes plus tard, demandant à s'exprimer.
La réunion, organisée pour condamner les atrocités commises en Arménie, avait lieu sous les auspices d'un comité d'Américains en vue et d'Arméniens bien connus. Hamilton Holt, éditeur de The Independant présidait, et les intervenants étaient le Révérend James L. Barton del'American Board of Commissioners for Foreign Missions [ Conseil Américain des Commissionnaires pour les Missions à l'Étranger], le Rabin Stephen S. Wise, le Révérend Père John J. Wynne, de la Société de Jésus, éditeur de la Catholic Encyclopedia, W. Bourke Cockran, le Docteur Ernest Yarrow, de Van en Turquie, et le Révérend Docteur William J. Haven.
Le texte des résolutions adoptées est le suivant :
Attendu, Le monde civilisé a été choqué par les massacres et les déportations en série des Arméniens dans l'empire turc; et
Attendu, Ces crimes et outrages commis sur un peuple industrieux, économe et pacifique, ne trouvent aucune justification ni au regard du droit ni à celui de l'humanité, et
Attendu, Ces Arméniens qui survivent sont dans un grand besoin de secours et de soins, par ces motifs et dès à présent
Décidons, En tant que citoyens américains, d'élever la plus solennelle protestation contre ces actes cruels et inhumains et faisons appel à tous les officiels et aux autres personnes ayant une influence dans l'Empire turc, afin que cessent ces atteintes et que soit apportée toute leur aide à l'Ambassadeur américain et à ceux qui pourraient sauver et rapatrier un peuple qui, par son histoire et ses réalisations, a constitué un actif pour l'empire.
Décidons, En Outre, Que la guerre, quels que soient les lieux où elle se déroule, et quelles que soient les nations qui y sont engagées, ne saurait justifier les traitements inhumains de personnes innocentes. Le massacre d'hommes non combattants, les tortures, les mutilations et les outrages sur les femmes et les enfants, ont donné aux plus beaux endroits de la terre des allures d'enfer. Au nom du Dieu des Nations et de notre humanité communes, nous en appelons aux nations en guerre pour que cessent ces crimes contre la civilisation et la morale.

Le Père Wynne ayant proposé les résolutions et M. Holt les présentaient pour approbation lorsque Brown s'est dressé, rouge d'excitation.
Plusieurs personnes ont empoigné le fauteur de trouble et l'ont conduit dans l'allée. Mme Brooks a alors demandé que l'homme soit entendu, avant de suivre ceux qui l'éjectaient.
L'audience était debout, tout comme ceux qui se trouvaient sur la scène; parmi eux se trouvaient Mgr Lavelle, qui représentait le Cardinal Farley, Charles R. Crane de Chicago, le Révérend Docteur H/P/ Mendes, le Professeur William W. Rockwell; le Professeur Samuel P. Dutton, et une vingtaine d'autres personnes en vue.
Dénonçant avec colère ceux qui le poussaient vers la sortie et luttant tout au long du chemin, l'homme a été sorti de force du théâtre.
" Cette réunion ", a dit M. Holt dans son entrée en matière, " a été organisée afin de déplorer la plus grande hécatombe connue de l'histoire. Les massacres qui sont perpétrés en ce moment en Turquie sont les plus atroces de l'histoire du monde, et si on veut y mettre fin, il faut persuader l'Allemagne chrétienne de l'exiger, car elle seule est en mesure de sauver les Arméniens. Il se peut que l'appel ne soit pas écouté à Constantinople, mais il peut être entendu à Berlin ".
Le Docteur Barton a été le premier intervenant. " Nous sommes ici ", a-t-il dit, " pour considérer des faits qui écrasent les Arméniens de l'empire turc, des faits qu'il nous est impossible d'ignorer ".
Faisant référence au rapport écrit par l'Armenian Atrocities Committee [Commission sur les Atrocités Arméniennes], le Docteur Barton a dit que les révélations qu'il comporte étaient issues pour la plupart des documents officiels du Département d'État à Washington.
' La commission ", a-t-il dit, " a tenu à ne prendre en considération que des faits; elle s'est rendue pour cela à Washington et a examiné les rapports officiels au Département d'État. On nous demande pourquoi les noms des personnes qui ont rédigé les rapports ne sont pas mentionnés. La raison est évidente. L'une des règles de la Turquie est la rétorsion. L'un de nos consuls a demandé que son nom ne soit pas indiqué parce que si son nom était connu, il devrait quitter son poste ".
Le Docteur Barton détient une grande masse de documents, copies de rapports officiels destinés au Département d'État. Des extraits ont été lus décrivant des tortures terribles, qui se sont terminées, dans des milliers de cas, par la mort.
Le Docteur Barton a lu la déclaration d'un Arménien bien connu, diplômé d'une université américaine, qui vient d'arriver dans ce pays. Elle traite du sort de 1 215 hommes. Ces hommes ont été d'abord réunis pour être ensuite séparés par groupes de vingt-cinq pour être, " par ordre du Gouvernement, tous brutalement abattus ". Les exécutants, a-t-il dit, étaient des gendarmes turcs et des assassins et autres malfaiteurs libérés des prisons pour aider dans les tueries d'Arméniens.
" La récompense de ces meurtriers ", disait la déclaration, " était l'argent et objets de valeur trouvés sur les corps de leurs victimes. L'un de ces hommes se vantait d'en avoir tué cinquante en une nuit et d'en avoir tiré 150 livres en monnaie turque pour sa nuit de travail ".
Bourke Cockran a dit avoir été informé qu'entre 500 000 et 800 000 Arméniens ont été massacrés et que 250 000 femmes et filles ont été outragées. Le problème de l'Arménie, a dit M. Cockran, est le problème de Cuba de 1898 aggravé un million de fois.
Le dernier intervenant fut le Rabin Wise. Il était présent, non comme un opposant à la Turquie, ni comme champion de l'Arménie, mais pour protester contre les traitements inhumains, qu'ils soient commis par les Allemands contre les Belges, par les Russes contre les Juifs, ou par les Turcs contre les Arméniens. Il a dit que l'Allemagne et l'Autriche pourraient faire en sorte qu'il soit mis fin aux atrocités arméniennes, et que si elles ne le faisaient pas, ces nations pourraient bien s'apercevoir que " certaines victoires sont plus désastreuses qu'une défaite ".
" Si ces outrages se poursuivaient , a-t-il dit, " les Allemands s'aliéneraient la bonne volonté de ceux qui sont encore neutres. S'ils voulaient se réhabiliter, il devraient demander aux Turcs : '  plus aucune goutte de sang ne doit être versée '  ".
A toutes les places se trouvait une pétition à signer à l'emplacement prévu, pétition adressée au Kaiser et au peuple d'Allemagne, les implorant d'employer leurs bons offices pour mettre fin aux atrocités en Arménie.


LES DIRIGEANTS ARMÉNIENS RÉPONDENT À DJELAL BEY

Qualifient les Dénégations sur les Atrocités d'être un Amas d'Inexactitudes
EXPLIQUENT LES COMBATS DE VAN
Disent que les Chrétiens Agissaient en Etat de Légitime Défense – Manifestation aujourd'hui au Century Theatre
Publié le 17 octobre 1915

 Le Dr M. Simbad Gabriel, Président de l'Armenian General Progressive Association [Association Arménienne pour le Progrès Général], la principale organisation arménienne aux États-Unis, et Arshag D. Mahdesian de la Society of Armenians in America [Société des Arméniens d'Amérique], ont donné les réponses hier à la déclaration faite la semaine passée à THE TIMES par Djelal Munif Bey, le Consul général turc à New York, qui qualifiait de fabrication le rapport fat par l'American Committee on Armenian Atrocities [Comité Américain sur les Atrocités Arméniennes], et ajoutait quelles qu'aient été les mesures que les Turcs ont été forcés de prendre contre les Arméniens, elles étaient dues aux activités hostiles de ces derniers.
M. Mahdesian a dit que la déclaration du Consul général était un amas d'inexactitudes, et consistait en une tentative faible de la part de Djelal Bey pour démontrer la culpabilité de ses compatriotes dans les plus terribles atrocités commises contre une race entière de personnes au cours des siècles.
" Une déclaration qui est faite par Djelal Bey ", a dit M. Mahdesian, " et qu'il sait être inexacte, c'est lorsqu'il en réfère à une visite à Van de Noel Buxton, membre du Parlement, tendant à faire croire au lecteur que M. Buxton a rendu visite à Van après que la guerre actuelle n'ait été déclenchée, et qu'il avait, selon lui, tenté de pousser à la révolution contre le gouvernement turc. Cette visite qu'il décrit finement comme une justification de ce qui s'est passé, a eu lieu au début de l'année 1914, des mois avant que la guerre n'ait commencé, et personne ne le sait mieux que Djelal Bey. Bien évidemment, M. Buxton n'a jamais essayé de provoquer une quelconque révolution avant la guerre, pendant la guerre ni à aucun autre moment.

Pourquoi les noms n'ont pas été dévoilés au public
" Là encore, Djelal Bey demande pourquoi le comité, auquel participent des hommes tels que l'évêque Greer, le cardinal Gibbons, le Rabin Wise, Oscar S. Straus, et Cleveland H. Dodge, n'a pas donné les noms des personnes qui leur ont rapporté les atrocités que les Turcs font actuellement subir contre les Arméniens dans l'empire ottoman. Eh bien, je vais le lui dire. C'est parce que le comité savait que s'il l'avait fait, Djelal Bey aurait câblés tous ces noms à la Turquie, et que cela signifierait la mort et la torture pour toutes les personnes nommées.
Tout aussi " horribles ", que soient les révélations faites dans le rapport du Comité sur les Atrocités, elles sont loin de révéler toutes les horreurs de la situation actuelle. Il n'a pas mentionné, par exemple, les mutilations faites aux jeunes filles, les dépeçages opérés sur leur corps, et l'exposition sur les marchés des restes de leur pauvre corps portant sur leurs membres et leur torse la mention " bir metallik " la livre. Un metallik, c'est un cent aux USA, C'est l'une des choses les plus effrayantes à laquelle ils ont recouru pour terrifier les personnes arméniennes, et cela s'est passé à Harput, à Hadjim, à Maliltleh et en d'autres endroits. Cette information nous parvient de sources absolument crédibles.
" Et en plus, ce rapport n'a pas mentionné que l'ordre turc de bombarder le " sale quartier arménien " de Van était signé du nom allemand d'un officier et que le bombardement était dirigé principalement contre les quartiers arméniens et contre les locaux des missionnaires américains, alors que pendant ces bombardements, cinq drapeaux américains étaient criblés par les tirs dirigés par l'officier portant un nom allemand ".
Le Dr Gabriel, qui était l'un des délégués ottomans au congrès international de la Croix Rouge tenu à Washington en 1912 a dit :
" Il semblerait que les Turcs aient seulement ' tué ' les Grecs, Maronites, Bulgares, Arméniens, sans les avoir jamais massacrés. Les Turcs les ont tués lorsqu'ils se sont rebellés contre le pouvoir turc. Les Arméniens de Van, dit le consul turc, se sont dressés les armes à la main contre les autorités turques, et en conséquence, ils n'ont pu être considérés autrement que comme des rebelles, et on ne pouvait attendre les troupes turques, après la reprise de la ville, qu'elles traitent ces révolutionnaires avec des gants.
" Tel est l'argument du consul. Cela vaudrait d'être entendu s'il ne s'agissait pas d'une distorsion de la vérité pour les besoins de sa cause. La vérité, c'est que les Turcs avaient déjà instauré à nouveau le règne de la terreur et du massacre dans la province de Van, et que Van avait été contrainte à la légitime défense, du fait de la survenance d' "événements marquants " qui l'ont décidée à y recourir. Les Arméniens d'autres villes et villages qui, croyant aux engagements des autorités turques de ne leur faire subir aucune violence avaient remis leurs armes, avaient été traîtreusement passés au fil de l'épée. Les habitants de Van, alertés par le sort des habitants de ces autres villes, refusèrent de remettre leurs armes, sans commettre aucun acte révolutionnaire jusqu'à ce que les Turcs ne les aient attaqués et pilonné leurs quartiers, n'épargnant même pas les habitations de missionnaires américains.
" Si quelques Arméniens dans une ville comme Trébizonde faisaient partie d' " éléments suspects ", on aurait pu les déplacer " à l'intérieur du pays ", dans des provinces comme celles de Sivas et Harpout, situées à l'intérieur de l'Asie Mineure, mais alors pourquoi les 10 000 Arméniens de Trébizonde auraient-ils dû être chassés de leur maison, et pourquoi aurait-t-il fallu, hommes, femmes et enfants, les jeter par-dessus bord dans la Mer Noire? Le consul italien a été témoin de cette inimaginable sauvagerie. Qui a le front de le nier ? L'Ambassadeur Morgenthau a télégraphié depuis Constantinople que la majorité des Arméniens en Turquie ont été tués. L'Ambassadeur dirait-il cela s'il n'en était pas certain de ce fait ?
" Majorité, qu'est-ce que cela veut dire ? Au moins 800 000. C'est le nombre qui est mentionné dans les derniers rapports, et c'est un nombre très conservatif. Tout porte à penser que le nombre de victimes est au-delà de un million. "
Des délégations de plus d'un millier d'églises et d'organisations religieuses assisteront à la grande manifestation qui se déroulera aujourd'hui au Century Theatre pour protester contre le massacre des Arméniens par les Turcs. Elles représenteront toutes les confessions.
Il a été annoncé hier que le cardinal Farley avait officiellement désigné Mgr Lavelle, recteur de la cathédrale Saint Patrick, pour le représenter à la manifestation. Quelques uns parmi ceux qui prendront la parole sont des missionnaires et des voyageurs qui viennent juste d'arriver des lieux où se produisent ces massacres. D'autres orateurs prendront la parole, W. Bourke Cockran, le Rabin Stephen, S. Wise et le Dr James L. Barton de Boston. Hamilton Holt présidera.
Les portes du théâtre seront ouvertes à 3 heures. L'entrée sera libre.
 

Commentaires -
 Van c'est une réaction de légitime défense (qui démontre la préméditation des turcs qui avaient massacré les Arméniens des villages de la province de Van, mais aussi dans la province de Kharpout,
- Trébizonde, c'est un pur massacre des femmes des enfants et des vieillards sous les yeux du consul italien,
- On y dénombre une des premières fois le nombre de victimes comme dépassant probablement le million...
et c'est un article structuré et convaincant.
G B.


SEULE L'ALLEMAGNE PEUT SAUVER LES ARMÉNIENS
Lord Bryce Déclare que les Opinions des Pays Neutres Pourraient la Forcer à Agir
Publié le 16 octobre 1915

LONDRES, 15 octobre – " Il n'y a qu'une seule puissance qui puisse mettre fin aux atrocités arméniennes, et c'est l'Allemagne ", a déclaré le Vicomte Bryce dans une réunion qui a eu lieu aujourd'hui à la Mansion House, pour soutenir le fond du Lord Maire créé pour soutenir les Arméniens qui souffrent. Il a déclaré que le seul remède est la pression que l'opinion mondiale, en particulier dans les pays neutres, pourrait faire sur l'Allemagne pour la forcer à agir.

Lord Bryce, qui a proposé une résolution condamnant les atrocités qui sont rapportées, a rendu hommage à l'intelligence et à la volonté de progrès des Arméniens qui, a-t-il dit, étaient très supérieurs aux Mahométans; il a déclaré que l'origine du problème n'était pas le fanatisme religieux mais l'extermination délibérée d'un peuple jalousé par les Turcs.

Les horreurs des massacres vont au-delà de toute persécution connue dans l'histoire, a déclaré l'orateur. Des femmes et des enfants, a-t-il dit, ont été conduits par le fouet à travers les déserts arabes par les Turcs, qui étaient devenus fous; et à Trébizonde, ils ont transporté leurs victimes sur la mer dans des bateaux et les ont noyés. " Des femmes, dont beaucoup d'entre elles étaient tout aussi hautement civilisées que nous le sommes ", a-t-il affirmé, " ont été vendues, en état d'esclavage; où elles ont été ensuite islamisées. Il a déclaré contraire à la vérité, l'excuse donnée par les Allemands aux Turcs, selon laquelle les Arméniens se seraient rebellés, disant que les Arméniens étaient tranquilles et inoffensifs jusqu'à ce qu'ils aient été forcés de se défendre eux-mêmes.

Soutenant la résolution, le Cardinal Bourne a dit que les preuves étaient si fortes que même les Allemands ne pouvaient pas nier les massacres. Les pays neutres, a-t-il dit, devraient suivre l'exemple du Pape Benoît, qui a émis personnellement une protestation et une requête au Sultan.

Sir Edwin Pears, qui a été bâtonnier du barreau britannique de Constantinople, a apparemment surpris l'auditoire lorsqu'il a dit que les persécutions n'étaient pas inscrites dans la foi musulmane et que les massacres étaient déplorés par une masse de Turcs.

T.P. O'Connor a fait état du travail des Américains, qui ont créé un fonds, et a aussi rendu hommage aux initiatives prises dans le même sens par le Lord Maire.
 


LES ARMÉNIENS REMERCIENT WILSON
Des étudiants Envoient un Message de Gratitude au Consul Américain
Publié le 16 Octobre 1915

PETROGRAD, 16 octobre .—John A. Ray, Consul américain à Odessa, d'après une dépêche reçue de cette ville, a reçu aujourd'hui la visite d'une délégation d'étudiants arméniens de l'université d'Odessa, qui lui ont demandé de transmettre au président Wilson la gratitude des Arméniens pour la défense de leur cause en Turquie par le gouvernement américain.


NOUS NE POUVONS RIEN FAIRE DE PLUS
Position du Département d'État Quant aux Actions pour l'Arménie

Publié le 16 octobre 1915

WASHINGTON, 15 octobre – Le Gouvernement des États Unis a fait tout ce qu'il a pu, officiellement, pour porter secours aux Arméniens en Turquie, selon l'opinion des personnalités officielles du Département d'État. Ils ont dit au Représentant John J. Eagan du New Jersey aujourd'hui que, au-delà des représentations informelles au Gouvernement turc par l'intermédiaire de l'Ambassadeur Morgenthau, insistant sur les effets néfastes dans l'opinion publique aux États Unis du traitement des Arméniens, il n'y a rien qui puisse être fait.

 Le Représentant Eagan avait demandé, relativement aux conditions dont les Arméniens sont victimes, quelle était la position des États Unis sur ce point.
 




UN RESPONSABLE TURC NIE LES ATROCITÉS
Le Consul Général Local Qualifie les Récits de Crimes sur les Arméniens de Fabrication

MAIS IL ADMET QUE DES TRAITEMENTS SÉVÈRES ONT LIEU

Djelal Bey Dit Qu'un Complot Révolutionnaire Était en Préparation à Van et que des Suspects Devaient Être Déplacés
Publié le 15 octobre 1915

 

Commentaires -
The New York Times reproduit la réponse du consul général de Turquie aux États Unis à qui le quotidien avait ouvert ses lignes pour des explications.
Nous sommes le 15 octobre 1915, et ce membre de l'exécutif turc campe l'argumentation officielle qui sera reprise jusqu'à aujourd'hui par les gouvernements successifs et les chantres officiels de la tolérance ottomane, par Recep Erdogan, par Yusuf Halacoglu, Egemen Bagis et autres Bernard Lewis, Gilles Veinstein et Dogu Perincek.
Peu importent les anachronismes et les mensonges, l'essentiel est d'affirmer en laissant aux victimes la charge de prouver qu'ils le sont.
C'est ainsi que le rapport des missionnaires américains est une fabrication; que tous les Arméniens ont du sang sur les mains; que tous, femmes, enfants et vieux sont des rebelles, voire des révolutionnaires poussées par les pays de l'Entente, ou des informateurs potentiels en temps de guerre qu'il convient de déplacer loin du théâtre des opérations ; que le Livre Bleu de Lord Bryce, même s'il corrobore (!) celui des missionnaires, ne peut s'apparenter à un rapport sur des atrocités; que ces missionnaires prennent une part active à la guerre contre les Turcs…
Pour finir, et même si ces atrocités ne sont qu'une fabrication, les Arméniens ne doivent s'en prendre qu'à eux-mêmes s'ils les ont subies. Une simple expression de la fameuse subtilité de la diplomatie ottomane?
GB

Djelal Munif Bey, le Consul général à New York, dans une déclaration officielle au journal THE TIMES hier, a déclaré que le rapport rendu public dimanche passé par l'American Committee on Armenian Atrocities [Comité Américain sur les Atrocités Arméniennes], qui affirmait que jamais, dans le millénaire qui vient de s'écouler, aucun peuple n'avait subi d'agression aussi terrible que celle que les Turcs sont en train de faire subir aux Arméniens, est une fabrication. Le rapport décrivait les atrocités comme étant officiellement une sanction décidée à Constantinople, et déclarait que la situation était celle d'une tentative d'élimination d'une race entière.
Parmi les hommes qui ont signé le rapport se trouvaient l'évêque David H. Greer, Cleveland H. Dodge, Oscar S. Straus, le rabbin Stephen S. Wise, le révérend Dr James L. Barton, William Sloane, le professeur Samuel P. Dutton, Charles R. Crane, et Arthur Curtiss James. Le cardinal Gibbons, après que le rapport ait été émis, a accepté d'être membre du comité.

Le comité, dans une préface du rapport, a déclaré se porter garant de sa véracité et a ajouté que " ce mouvement contre les Arméniens constituait un volet d'une action concertée contre tous les non-Turcs et les missionnaires et éléments progressistes, y compris les Sionistes ".
THE TIMES a demandé hier à Djelal Bey, représentant turc le plus haut placé à New York, si comme représentant du gouvernement ottoman, il avait une réponse à apporter aux accusations portées par l'Armenian Atrocities Committee.

Il a par la suite dicté la déclaration qui suit :

" Les quotidiens ont récemment publié des rapports approfondis de massacres à grande échelle d'Arméniens en Turquie, certains allant jusqu'à déclarer que 800 000 Arméniens avaient été massacrés par tous les moyens concevables et imaginables.

" THE NEW YORK TIMES, dans son numéro du 4 octobre, a publié un rapport émis par le " Committee on Armenian Atrocities " autoproclamé et qui était signé de quelques noms, dont celui d'Américains de renom. Le rapport comporte des accusations d'assassinats à grande échelle de femmes et d'enfants par les Turcs, fondant ses affirmations issues de quelques missionnaires nouvellement arrivés en Turquie, et d'autres rapports supposés reçus de diverses sources en Turquie, mais dont les auteurs ne sont pas révélés; en d'autres termes, les rapports qui ne sont pas ou ne peuvent pas être réputés, même corroborés par Lord Bryce, de rapports d'atrocités qualifiés.

" Ces accusations grossières contre le gouvernement turc et la nation ont été communiquées à la presse sans que la moindre tentative n'ait été faite pour vérifier à quel point elles sont vraies.

" A présent, ce qui s'est passé : Lorsque la guerre a éclaté l'an passé, même avant que la Turquie l'ai rejointe dans le camp de l'Allemagne et de l'Autriche-Hongrie, les Arméniens en Turquie, qui rêvaient d'une Arménie indépendante, étaient convaincus, comme beaucoup d'autres, que l'Allemagne et son allié allaient être balayés de l'Europe en six semaines; en conséquence, la Turquie serait divisée entre les Alliés de ma Triple Entente, et une Arménie indépendante créée sur ce qui était précédemment provinces turques. Les Arméniens voyaient déjà cela comme une situation réglée d'avance et ont donné libre cours à leurs sentiments.

" Une visite secrète rendue par les frères Buxton, Président du comité des Balkans à Londres, aux dirigeants des comités révolutionnaires à Van, ville principale de la province turque du même nom. Il arrivait venant de Tiflis, dans le Caucase, où il avait eu des conférences avec les comités arméniens de Russie, et discuté de plans pour une action concertée avec ceux de Turquie contre le gouvernement turc. Ces comités révolutionnaires sont ensuite devenus actifs, et armés par les Russes, aidèrent ceux-ci à prendre Van, qui n'est pas très éloignée de la frontière russe.

" Immédiatement après, sous les auspices des Russes, un gouvernement autonome arménien a été créé à Van, et un homme nommé ' Aram ' en assuma les fonctions – les journaux de New-York ont publié, il y a quelques temps, un appel adressé à l'Amérique pour une aide financière signé du nom de ce rebelle, (qui signait lui-même comme ' Gouverneur de Van ') et celle de l'évêque arménien de Van.
" Pour le dire brièvement, les Arméniens de cette section de l'empire avait pris les armes contre l'autorité turque, en faveur du pire ennemi de la Turquie, et en conséquence, ne pouvaient être considérés autrement que comme des rebelles. Bien sûr, à un tel moment, dès lors qu'il s'agissait d'une question de vie ou de mort pour l'Empire turc, on ne peut pas attendre des troupes turques, en toute bonne foi, après qu'elles aient capturé Van à nouveau et en aient éjecté les Russes, qu'ils traitent ces révolutionnaires en prenant des gants, en particulier s'ils avaient eu recours à une résistance armée. Tous ceux parmi eux qui ont été tués faisaient partie de ces éléments rebelles capturés avec du sang sur les mains ou avaient commis des actes de traîtrise contre le gouvernement turc, et non les femmes ou les enfants, comme quelques uns de ces rapports fabriqués voudraient le faire croire aux Américains.

" En outre, afin d'empêcher que des informations précieuses ne soient divulguées aux réseaux ennemis, le gouvernement turc considéra qu'il était impératif de déplacer à l'intérieur du pays ceux des éléments suspects qui pourraient mettre en péril l'empire entier.

" Il se peut qu'il y ait eu des cas où des personnes inoffensives aient partagé le sort des coupables, et je ne suis pas avec les derniers qui déplorent ces navrantes occurrences. Malheureusement, en temps de guerre, un tel discernement est tout à fait impossible, et le coupable n'est pas seul à souffrir de la sanction pour les actes qu'il a commis, mais aussi l'innocent qu'il entraîne avec lui.

" Tout déplorables que soient ces événements atroces, en dernier lieu, tout ce qu'on peut dire est que les Arméniens ne peuvent en blâmer qu'eux-mêmes.

" Je ne pense pas que ce moment soit opportun pour discuter des motivations sous-jacentes des associations de missionnaires qui se montrent maintenant aussi âprement antiturques et annoncent pour dimanche prochain, dans les quotidiens newyorkais, une manifestation pour dénoncer le gouvernement et le peuple turcs. Apparemment;, ces mêmes associations dont le siège est 70, Cinquième avenue, sont également à l'origine du rapport mentionné plus haut publié dans le NEW YORK TIMES du 4 octobre. Mais leurs motivations sont connues de nous et pourraient être mises en lumière dans un futur pas très éloigné ".

Le Consul général a été prié de développer la dernière partie de sa déclaration, dans laquelle il affirme que les motivations de l'homme qui " est à l'origine " du Rapport sur les Atrocités Arméniennes étaient connues par les Turcs et "pourraient être mises en lumière dans un futur pas très éloigné ".
" Pour l'instant, il ne m'importe aucunement de dire quoi que ce soit de plus sur ce point ", a-t-il répondu.

Mémoires d'Henry Morgenthau :
http://www.imprescriptible.fr/documents/morgenthau
http://net.lib.byu.edu/estu/wwi/comment/morgenthau/MorgenTC.htm

 


Plaider la cause des Arméniens
UNE IMPORTANTE RÉUNION SE TIENDRA AU "CENTURY THEAtER"

15 Octobre 1915

Le Comité de la '70 Fifth avenue' des atrocités commises envers les Arméniens, a annoncé hier, par son secrétaire, le Professeur Samuel T. Dutton, qu'une importante réunion se tiendra au 'Century Theater' dimanche prochain l'après-midi, où la situation en Turquie sera discutée. Ce sera sous les auspices du Comité et de l'Organisation connue comme "Armenian Sympathizers' qui a dans ses listes les noms de plus de 20 000 personnes. Le Révérend D. James L. Baton de Boston, Ex-Président de Euphrates College ; Le Rabin Stephen S. Wise, et plusieurs Arméniens éminents vont prendre la parole. Plusieurs missionnaires récemment rentrés de Turquie sont attendus pour être présidents, et vont raconter leurs expériences en Arménie.

La réunion prévue principalement, ne fera aucune déclaration de la part des comités concernant une protestation au nom du peuple américain contre ce qui semble être une politique gouvernementale de la  part de la Turquie pour exterminer la totalité de la population non-musulmane de Turquie.

Le second but de la réunion publique est d'intéresser le public à la nécessité de lever des fonds pour les besoins des activités de l'Ambassade à Constantinople. Ce fut un soutien de tout cœur de notre Ambassadeur en Turquie, Henry Morgenthau, qui a déjà reçu 100 000 dollars du Comité américain.

Il a été annoncé hier que le Cardinal Gibbons de Baltimore avait accepté de faire partie du Comité, qui compte parmi ses membres le Bishop Greer, le Dr. Barton, Cleveland H. Dodge, Osca S. Strauss et autres personnalités.

Le Comité va proposer des tickets d'admission, qui peuvent être obtenus auprès du Prof. Dutton, au 70 Fifth Av. ou au siège des 'Armenian Sympathizers' au 175 Fifth Avenue.


LES PROTESTATIONS ARMÉNIENNES MISES À LA CHARGE DES ALLIÉS
Les Allemands disent que ce sont les Fausses Informations de l'Entente qui ont Provoqué les Doléances de l'Amérique
L'EXTERMINATION EST JUSTIFIÉE

Publié le 13 Octobre 1915

 Un Journaliste dans le Vossische Zeitung Ironise sur les Informations
de Massacre de 800 000 Chrétiens Massacrés par les Musulmans.

De notre Correspondant Particulier
Câble Spécial à THE NEW YORK TIMES 

  BERLIN, 12 octobre.- Les développements de la question arménienne entre la Turquie et l'Amérique sont suivis ici avec un intérêt croissant, pas seulement dans les cercles officiels, mais aussi dans les discussions publiques.

  On pense dans certains milieux que les protestations américaines adressées à la Turquie visent en réalité l'Allemagne, se produisant justement au moment où l'armée du Général von Mackensen a engagé une offensive en Serbie. On a tendance à considérer les protestations arméniennes comme une hypocrisie, tandis que de nombreux Allemands sont convaincus qu'elles sont le résultat d'une manœuvre des alliés pour entraîner l'Amérique dans le conflit mondial. L'opinion des Allemands en général est exprimée par George Bernhard dans le Vossische Zeitung qui écrit: 

  " En Amérique, les sentiments de l'ensemble des philanthropes se portent tout à coup sur les Arméniens. Le gouvernement turc, à la suite de certains événements, depuis que la guerre a éclaté dans la région frontalière du Caucase, a eu recours à des mesures rigoureuses contre les Arméniens. Plus de la moitié des Arméniens, en gros, vivent en Turquie, et le reste en Russie. Une vielle hostilité existe entre les Turcs et les Arméniens. Il est tout simplement naturel que ces derniers rêvent d'une victoire de la Russie.

  " Partout où cela se produisait, les dirigeants de la politique turque ont décidé de rendre les Arméniens inoffensifs par le processus d'éviction et éviter ensuite le processus qui avait concerné les Autrichiens dans les régions ruthéniennes de Galicie à une grande échelle.

  " Je n'entrerai pas du tout dans le débat  concernant les atrocités. On peut supposer sans risque de se tromper que les hommes d'état responsables de Turquie n'ont pas demandé que des atrocités se produisent.

  " Il est tout à fait possible qu'en exécutant les ordres de l'éviction certaines choses se soient produites qui peuvent être considérées dans le monde civilisé avec les plus profonds regrets. Il est certain que les rumeurs qui ont cours en Amérique que 800 000 ou plus encore d'Arméniens aient été massacrés sont des mensonges, mais il est tout aussi certain que ces mensonges sont faites sciemment en Angleterre dans le but de provoquer des nouvelles frictions entre les États Unis et la Turquie et par conséquent entre les États Unis et l'Allemagne.

  " Que signifie cette indignation relative à ces questions? La quadruple Entente ne doit pas croire que cette dernière manœuvre, qui porte le sceau du désespoir,  puisse provoquer aucun désagrément à l'Allemagne. Nous avons parcouru un long chemin pour satisfaire les Américains dans les affaires arabes. Jusqu'à quel point ils le sont, n'ayant pas reçu pour l'instant le rapport officiel de l'Ambassadeur, nous l'ignorons de façon authentique.

  " Si, contrairement à ce que nous espérons, tel n'était pas le cas, le contenu de la lettre de l'Ambassadeur von Bernstorff's au Secrétaire Lansing le prouve, comme l'a écrit Reuters dans un câble, que nous avons considérablement dépassé la limite que beaucoup d'Allemands considèrent supportable, dans notre compromis.

  " Je tiens à réserver mon jugement définitif, mais quoiqu'il en soit, il faut simplement déclarer aujourd'hui que les affaires arabe et du Lusitania sont du domaine qui concerne le Peuple américain et le Président américain.

  " La question arménienne relève d'une discussion purement théorique d'humanité. Nous sommes engagés actuellement dans des combats qui mettent en jeu notre existence même. Le sens politique des hommes d'état d'Amérique doit leur dire à quel point la situation particulière aujourd'hui est différente de ce qu'elle était il y a deux mois. La Quadruple Entente  n'aura pas plus de succès avec les boules puantes de l'hypocrisie et la calomnie qu'elle lance aujourd'hui qu'elle n'en a eu jusqu'à présent avec ses armes honorables sur les champs de bataille de l'Europe de l'ouest. "

 LONDRES, 12 octobre. - Toute l'information en possession du Gouvernement britannique, relative aux massacres et aux déportations des Arméniens en Turquie, a été rendue publique dans le discours que le Marquis de Crewe  a fait récemment à la Chambre des Lords, a annoncé Sir Edward Grey à la Chambre des Communes cet après-midi.

  " On ne peut ressentir qu'horreur et indignation à ce propos " a ajouté le Secrétaire du Foreign Office.      

Commentaires -

Selon le " Vossische Zeitung ", il ne s'agit pas de déportation, encore moins de massacres, mais d' " éviction ".  Il oublie de dire que les Turcs " évincent " de ses terres un peuple qui s'y trouvait depuis la nuit des temps.  Et les Arméniens doivent leurs épreuves au sentiment " humain " qu'ils éprouvent pour l'ennemi russe! Pour le quotidien berlinois, les témoignages de missionnaires américains, ceux de l'Ambassadeur américain, ceux du consul italien de Trébizonde, ne sont que " rumeurs ", " mensonges ",  " calomnies ", et "hypocrisie ".

Aux considérations politiciennes et aux affirmations creuses du journaliste d'opinion allemand, le  NEW YORK TIMES fait répondre le ministre des Affaires étrangères britannique, par son discours au Parlement britannique.

 GB


LES MASSACRES REPRENNENT, RAPPORTE MORGENTHAU
Nouvelles agressions sur les Arméniens à la Suite de la Prise de Position de la Bulgarie en Faveur de la Turquie
Publié le 13 Octobre 1915

 

Washington, 12 octobre 1915.- Les massacres arméniens en Turquie asiatique ont repris avec vigueur depuis l'entrée de fait de la Bulgarie dans la guerre comme alliée de la Turquie. Cette information est parvenue au Département d'état aujourd'hui de l'Ambassadeur Morgenthau, qui a déclaré que la majorité des Arméniens en Turquie d'Asie ont été tués.

Bien que des démarches aient été faites par ce gouvernement, il y a quelques jours, mettant la Turquie en garde contre plus d'atrocités contre les Arméniens, ce qui lui ferait perdre la sympathie du peuple américain, aucune réponse n'a été reçue.
Des démarches précédentes avaient abouti à deux concessions, la promesse que ceux des Arméniens qui souhaitaient quitter le pays seraient autorisés à le faire sans entraves, et en outre, que les Arméniens protestants seraient épargnés. L'information qui nous arrive dans ce pays cependant, indiquent que ces mesures n'ont pas été strictement suivies. Dans certaines milieux, on soutient qu' " elles ont été écartées dès le lendemain ".
Bien que 100 000 dollars de souscriptions privées aient été mis à la disposition de l'Ambassadeur Morgenthau, pour les distribuer parmi les réfugiés arméniens déplacés à présent dans des villes du désert, aucune mesure n'a été prise pour accueillir des gens dans ce pays, comme on l'avait initialement envisagé, à part l'envoi d'amis ou de parents vers eux. Ces Arméniens qui en ont réchappé sont à présent rassemblés entre les rivières Tigre et Euphrate.

LES TURCS REDOUTENT LES ARMÉNIENS
Un Américain Attribue en Grande Partie le Massacre à la Peur d'un Soulèvement

La peur que les Arméniens ne se soulèvent contre eux est la principale raison pour laquelle les Turcs massacrent leurs voisins chrétiens, selon la lettre présentée hier par le Comité Américain sur les Atrocités contre les Arméniens, envoyée par le professeur américain d'une université en Turquie.

Le professeur dit que lors de la dernière semaine d'avril, le professeur d'arménien de son université a été arrêté et emprisonné en même temps que vingt-cinq autres personnalités arméniennes importantes. I a été par la suite transféré à Sivas, où il est mort le 26 juin. Beaucoup des personnalités importantes et fortes de la ville, parmi lesquels les professeurs Hagopian et Manasdjian ont été emmenés dans les casernes des soldats jusqu'à ce que leur nombre atteigne 1 215.

" Ces 1 215 Arméniens ", écrit le professeur, ont été ligotés par groupes de cinq ou six hommes et emmenés dans la nuit sous la garde de la gendarmerie par ordre de gouvernement. A un endroit distant de trois heures de la ville, sur une route isolée menant à Zileh, tous ces hommes ont été brutalement massacrés par la gendarmerie et par des hommes appelés chétés. Les chétés sont des meurtriers relâchés des prisons expressément dans le but d'exécuter des Arméniens ".

L'auteur décrit également la déportation à grande échelle, en juillet, de 12 000 personnes de ces " quartiers de la ville les plus proches de nos administrations ", et de quelle façon, dans un lieu éloigné de la ville, les hommes et les garçons ont été séparés des femmes et des filles, et comment la plupart d'entre eux, sinon tous, les hommes ont été abattus, et les femmes et les filles emmenées et soustraits à la garde et pris par les Turcs en leur possession pour leurs harems ou mourir au bord des routes ".
" Un fonctionnaire du gouvernement ", poursuit l'auteur, " a déclaré que la destination des exilés devait être Mossoul, une ville distante de près de 900 ou 1 000 km des régions désertiques de Mésopotamie. Ces mêmes officiels nous ont déclaré qu'il était pratiquement impossible que des gens puissent jamais atteindre ce lieu.

" La ville de Samsun a été de la même façon vidée de sa population arménienne, ainsi qu'Amasia, Vezir Kopru, Chorun et toutes les autre villes et villages du voisinage de Marsovan.

" A la fin d'août, le long de la voie ferrée anatolienne, d'Ankara à Constantinople, j'ai vu 50 000 Arméniens éparpillés dans les champs et les gares le long de la route, sans aucun ravitaillement ni aucun moyen de se Mettre à l'abri. Rien qu'à Merkedjie, le chef e gare nous a dit qu'il y avait 30 000 exilés. Beaucoup était affaiblis par la faim, d'autres presque morts ".
L'auteur dit que le gouvernement turc avait l'intention d'exterminer les Arméniens.

 

Commentaire -

Deux articles parus dans le même numéro qui démontrent la volonté du gouvernement turc d'exterminer les Arméniens, cette volonté délibérée de l'état turc que les négationnistes nient jusqu'à ce jour.

Et leur mauvaise foi est évidente: autoriser certains Arméniens à quitter la Turquie, en épargner d'autres (les Arméniens Protestants), ne se conçoit que si les autres, ceux qui restent ou ceux d'entre eux dont la confession est- différente, sont condamnés à disparaître. En d'autres termes, si l'exception ce sont les Protestants et ceux qui s'en vont, la règle c'est la mort pour tous les autres.

Le second article décrit le sort des Arméniens de Constantinople: ils sont arrêtés et exécutés par ordre du gouvernement. La " déportation " des Arméniens organisée par le gouvernement couvre en fait un mode opératoire spécifique : on arrête les Arméniens, puis on met les hommes et les garçons d'un côté, les femmes avec leurs enfants et les filles de l'autre. Pour finir, on massacre les uns et on accompagne les autres soit pour se les approprier, soit pour les " exiler " dans les déserts de Mésopotamie qu'il est pratiquement impossible d'atteindre.

A en croire les négationnistes, la volonté d'exterminer les Arméniens n'est pas prouvée. Ils affirment que seule la déportation avait été décidée. Comment se fait-il qu'ils n'en ont jamais montré la preuve ?

GB



ÉPARGNEZ LES ARMÉNIENS DEMANDE LE PAPE AU SULTAN
A la Suite du Rapport de Constantinople, Benoît XV écrit à la Porte
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LES ALLEMANDS NE SUPPORTENT PAS LE BLAME
La Gazette de Cologne dit que l'Angleterre essaie de Détourner l'Attention de " l'invasion de la Grèce "
Publié le 11 octobre 1915

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ROME 10 octobre. – Monseigneur Dolci, Délégué apostolique à Constantinople, ayant fait un rapport au Saint Siège sur les souffrances des Arméniens, le Pape Benoît a écrit une lettre de sa main au sultan de Turquie, intercédant pour le peuple infortuné.

BERLIN, le 10 0ctobre (par radio à Tuckerton, New Jersey)
" La Gazette de Cologne se réfère aux accusations de Lord Cromer et du Marquis de Crewe à la Chambre des Lords, disant que les diplomates consulaires allemands ont encouragé la population turque à attaquer les Arméniens " écrit " Overseas New Agency "
" Le journal affirme que le but de ces assertions infondées est facile à comprendre.
L’Angleterre souhaite détourner l’attention des neutres de la violation de la neutralité grecque, et puisque la question belge n’est plus assez nouvelle, elle se tourne vers de nouvelles accusations. ".

 


LES DEMANDES POUR L'ARMÉNIE PAR L'ALLEMAGNE NE SERVENT À RIEN
L'Ambassadeur d'Allemagne ne Peut Empêcher la Répression qu'à Constantinople
AUCUN EFFET À ATTENDRE POUR LES PROVINCES

Rendus Furieux par les Désertions de Soldats Chrétiens en Faveur des Alliés, les Turcs ne Mettront pas Fin à Leurs Actes
Publié le 10 octobre 1915

CONSTANTINOPLE, 20 septembre, (correspondance de The Associated Press) –
Ayant supprimé toute nouvelle sur le sujet, le Gouvernement turc est parvenu à jeter un voile opaque sur ses actes à l'encontre de tous les Arméniens. On ne peut rien obtenir de précis à Constantinople sur le sort de ce peuple dans les provinces, mais il est bien connu que des mesures rigoureuses dans la capitale ottomane n'ont pas été entreprises grâce aux objections du Gouvernement allemand.

S'agissant de l'affaire arménienne, trois notes différentes ont été présentées au Gouvernement ottoman par l'Ambassadeur allemand par intérim, le Prince Hohenlohe-Langenburg. Si The Associated Press est bien informée, ces notes n'auront aucun effet en profondeur, parce que dans les conditions actuelles, le Gouvernement allemand était forcé de n' intervenir qu'avec retenue. La Turquie est toujours une alliée de l'Allemagne et les Arméniens semblent avoir diminué considérablement la bonne volonté du Gouvernement et du peuple allemands, ayant ouvert une controverse avec les puissances de l'Entente. Beaucoup d'entre eux ont rejoint les forces russes près de Van, et à Zeitoun et Dort Jul, ils se sont révoltés contre les autorités turques. Les trois notes qui s'y réfèrent ne sont rien d'autre que des incidents officiels émaillant des semaines d'efforts pour persuader le Gouvernement turc d'approcher l'affaire arménienne de façon plus raisonnable et humaine. L'une des notes attirait l'attention sur la grande injustice qui fait subir à tous les Arméniens la conséquence des actes de peu d'entre eux. Le Gouvernement turc, cependant, semble être resté inflexible.

Comme il a déjà été dit, il a été impossible d'obtenir des informations détaillées. Les officiels turcs ont soit refusé de discuter de la situation, soit en ont imputé la faute aux Arméniens; ces derniers, pour leur part, ont refusé d'en parler soit par peur d'être eux-mêmes persécutés, soit en ont rejeté toute la responsabilité sur les Turcs. De nombreuses déclarations irréconciliables en ont résulté, allant, de la part des officiels turcs, de l'affirmation absurde que les Arméniens étaient bien traités, jusqu'à la déclaration qu'à Zeitoun, Dort Jul et ailleurs, 50 000 Arméniens avaient été massacrés.

Que les Turcs aient été coupables dans de nombreux cas, de sévérité inutile, et aient permis dans quelques cas des actes de violence barbares, y compris des assassinats et des viols, semble bien établi. Dans le camp adverse, les Arméniens dans le pays de Van ont été accusés d'excès similaires contre la population turque, et les Turcs, ayant le pouvoir de leur côté, leur ont rendu la monnaie de leur pièce, dit-on dans les cercles de Constantinople bien informés.

On ne peut pas dire que sur ce point, les actes du Gouvernement turc aient obtenu l'approbation des classes évoluées de la capitale, qui, en majeure partie, sont favorables à une politique de conciliation, et dont certaines vont jusqu'à soutenir la création d'un état arménien séparé en Asie Mineure sous l'autorité du Gouvernement impérial ottoman. Entre temps, l'attitude du Gouvernement ottoman, soit qu'il nie totalement que les Arméniens soient persécutés soit qu'il donne à ses actes une base et un caractère manifestement fictifs, ne peut avoir qu'un résultat : démontrer qu'il est à la fois honteux et effrayé que la vérité soit connue. Les nombreuses tentatives faites par le correspondant The Associated Press pour mettre un peu de lumière sur la situation des Arméniens n'ont eu aucun résultat, parce que les officiels turcs refusent de parler et parce que la censure ne permettrait pas que des dépêches sur ce sujet soient librement passées.

Quoiqu'il en soit, il faut dire que les Arméniens ne sont pas sans reproches. Dépossédés de tous les facteurs liés à leurs ambitions nationales, l'attitude des Arméniens envers les Turcs et le Gouvernement ottoman a incité des mesures constantes de répression. Les révoltes de Zeitoun, de Dort Jul, et de Van, et les désertions en masse des soldats arméniens vers les Alliés de la péninsule de Gallipoli, et vers les Russes dans le Caucase, ont rendu le cœur du Turc dur comme la pierre, envers les Arméniens, et il demande maintenant vengeance sur les coupables comme sur les innocents.

Constantinople a eu droit pendant des semaines à la récolte quotidienne de rumeurs arméniennes. L'une des plus intéressantes d'entre elles est que même le Cheik-ul-Islam a protesté contre les excès dont les Arméniens ont souffert. Il est possible que cela soit vrai, parce que le Cheikh-ul-Islam est un homme de modération et de tendances très progressives.

On dit à Constantinople que le Gouvernement allemand a pendant un temps, même au début de la guerre, prêté une attention particulière aux Arméniens. Les Allemands craignaient dès le démarrage des hostilités entre la Turquie et l'Entente que les Arméniens feraient une tentative pour ré-établir leur indépendance par la force.

Des Arméniens de premier plan avaient été informés que l'intérêt de l'Allemagne dans ce processus serait soutenu, et même s'accroîtrait, si une attitude raisonnable était observée pendant la guerre. Pendant un temps, l'influence des hommes qui avaient été approchés pour la diffusion de cette promesse eut le résultat recherché. Mais en janvier et février dernier, plus spécialement en mars et en avril, lorsque les Alliés attaquèrent vraiment les Dardanelles, les services de ces intermédiaires n'eurent plus d'effet. Des compte-rendu exagérés sur les victoires de l'Entente enflammèrent l'imagination des Arméniens, et en beaucoup d'endroits, ils battirent le rappel de la révolte.

Ce qui s'est passé ensuite est encore un chapitre non écrit. Aucun journal n'a l'autorisation de visiter les circonscriptions affectées., et les rapports venus de ces lieux sont tous douteux. Cependant, on ne peut voir dans la réticence du Gouvernement turc un bon signe, sachant en particulier ce que le Gouvernement allemand a été obligé de faire.
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" … ma colère contre les bouchers et mon immense pitié pour les victimes… une extermination unique dans les annales de l'histoire "
(Mehmet Chérif Pacha) :

L'HOMME D'ÉTAT TURC DÉNONCE LES ATROCITÉS
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Cherif Pacha Dit que les Jeunes Turcs ont depuis longtemps le Projet d'Exterminer les Arméniens.
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Un arrêt des Jeunes Turcs, ou Comité Union et Progrès, qui pendant des années ont comploté pour exterminer le peuple arménien, est mentionné dans une récente lettre de Mehmet Cherif Pacha à l'éditeur du Journal de Genève. Cet éminent exilé a dû s'enfuir de sa terre natale, ayant fait sécession du parti actuellement au pouvoir en Turquie, et ses avis méritent d'être pris en considération. Même ses ennemis – et il est évident qu'il en a de formidables, lorsqu'on se souvient de la tentative presque réussie d'attentat à sa vie, organisée par des agents de la police turque il y a presque deux ans à Paris – doivent admettre qu'il est placé idéalement pour observer la politique des Jeunes Turcs : le régime d'Abdul Hamid une fois renversé, et après leur prise de pouvoir, il tenait une position de premier rang dans les réunions du comité. Dès qu'il fut convaincu que leurs dirigeants n'avaient aucune intention de mettre en application le programme de réformes auquel ils s'étaient engagés, il avait quitté le Comité Union et Progrès. Il est le fils de Saïd Pacha, ex conseiller en chef d'Abdul Hamid et Premier grand vizir du temps de la nouvelle Constitution. Son épouse est la princesse Emanine, fille du prince Halim, et il est le beau-frère du prince Saïd Halim, l'actuel Grand vizir. Lui-même a été un temps Ambassadeur de Turquie en Suède.

Après avoir décrit les atrocités commises contre les Arméniens par ce présent régime, et qui dépassent selon lui la sauvagerie de Gengis Khan et de Tamerlan, Chérif Pacha continue :

" Il est certain que l'état d'esprit des Unionistes a été gardé secret envers le monde civilisé avant que le parti de l'Allemagne n'ait été pris par eux ouvertement; mais pendant plus de six ans, je les ai dénoncés dans le Mecheroutiete (son journal, publié d'abord à Constantinople puis à Paris) et dans divers journaux et revues, prévenant la France et l'Angleterre du complot, contre elles et contre certaines nationalités à l'intérieur des frontières ottomanes, notamment les Arméniens, qui était en cours de préparation.

" S'il est une race qui a été proche des Turcs par sa fidélité, par ses services au pays, par les hommes d'état et les fonctionnaires de talent qu'elle a fournis, par l'intelligence qu'elle a montré dans tous les domaines, commerce, industrie, science, et les arts – c'est certainement les Arméniens.

Cherif Pasha énumère ensuite quelques une des contributions que les Arméniens ont apporté à la civilisation turque, dont font partie l'imprimerie et le théâtre, et rend hommage à Odian Effendi, pour avoir ébauché, en collaboration avec Midhat Pacha, la Constitution ottomane, et insiste sur leurs grandes qualités d'agitateurs contre les despotismes de la Turquie et de la Perse – qualités, on le suspecte, qui ne les a pas beaucoup servis auprès des " réformateurs " autocratiques du régime Jeune Turc. Et il poursuit :

" Hélas ! à la pensée qu'un peuple aussi doué, qui a servi de terreau pour la rénovation de l'Empire ottoman, est sur le point de disparaître de l'histoire – non pas réduit à l'esclavage comme l'ont été les Juifs et les Assyriens, mais annihilés – même le cœur le plus sec doit saigner : et je veux, par l'intermédiaire de votre estimable journal, exprimer à cette race qui est assassinée ma colère contre les bouchers et mon immense pitié pour les victimes.

“ Ayant rempli ce pieux devoir, je ferais quelques exceptions se rapportant non pas à la malheureuse nation arménienne, mais individuellement à certains Arméniens et groupe propagandistes qui ont au cours des six années passées se sont si maladroitement constitués défenseurs et partisans de ce Comité Union et Progrès, l'auteur de leurs souffrances actuelles. Combien de fois les ai-je avertis de la mauvaise foi des unionistes, de la perversité de ces sombres personnalités que je suis le seul à connaître aussi bien ! En outre, le massacre d'Adana, dont l'Union a donné l'ordre, aurait dû les informer de la réalité des choses. Quelques eux parmi eux, par la mauvaise évaluation de leur intérêt, ou d'autres influencés par une alliance politique maléfique – comme ce pauvre député de Constantinople Zohrab Effendi qui a payé ses erreurs sur l'échafaud – tous les dirigeants politiques arméniens, ou à peu près, en s'identifiant eux-mêmes aux fortunes politiques de l'Union, ont compromis leur cause nationale en voulant la servir.

" Si au lieu de s'être engagés eux-mêmes sous la bannière de cette association néfaste et traîtresse, ils s'étaient rangés ouvertement aux côtés des vrais libéraux qui avaient depuis longtemps prévenu des dangers de leur situation, souvent au péril de leur vie, ils n'auraient pas seulement été fidèles à leurs principes, mais ils auraient aussi épargné à leurs frères infortunés les persécutions qu'ils ont subies avant la guerre, et à leur nation dans son ensemble la perspective d'une extermination unique dans les annales de l'histoire ".

ref sherif Pacha
http://turquie-culture.fr/pages/histoire/anecdotes-recits.../la-premiere-guerre-balkanique-1913-vue-par-le-general-cherif-pacha.html
 


L'APPEL POUR LES ARMÉNIENS DANS SON INTÉGRALITÉ
Requête à l'Amérique pour son Aide sous Forme d'une Lettre à Aneurin Williams, Membre du Parlement
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LE SEUL ESPOIR EST L'ALLEMAGNE
Seul ce Pays Peut Mettre Fin aux Atrocités des Turcs – Il pourrait Tenir Compte de la Protestation Américaine
Publié le 10 Octobre 1915

Une Correspondance Spéciale du New York Times

LONDRES, 20 septembre.- L'appel à l'Amérique du Vicomte Bryce pour essayer d'arrêter le massacre des Arméniens par les Turcs, dont des extraits ont été télégraphiés aujourd'hui aux États-Unis pour publication, a pris la forme d'une lettre à Aneurin Williams, publiciste, auteur et membre du Parlement. Le texte dans son intégralité est celui qui suit.

18 septembre 1915

Cher Monsieur Williams,
Vous avez raison de penser que le monde civilisé, et celui d'Amérique en particulier, doit connaître les horreurs qui se déroulent en Turquie asiatique, au cours des quelques mois qui précèdent, parce que s'il reste une possibilité pour arrêter la main destructrice du gouvernement turc, c'est l'expression de l'opinion des nations neutres, et en particulier le jugement de l'humaine Amérique.
Peu de temps après que la guerre entre la Turquie et les Alliés ait éclaté, le gouvernement turc a conçu, et a depuis engagé avec une cruauté implacable, le plan pour extirper la chrétienté en anéantissant la race arménienne. Les Arméniens, paisibles paysans et artisans des provinces de l'est de Turquie, étaient restés calmes. Ils ne s'étaient pas rebellés. Ils étaient sans armes. Beaucoup d'entre eux servaient dans l'armée turque. Mais ils étaient chrétiens, et le gouvernement pensait sans doute qu'ils n'éprouvaient pas de la sympathie avec les dirigeants qui les oppressaient et les volaient depuis des générations, et qui, en 1895-96, avaient massacrés plusieurs centaines de milliers d'entre eux sans provocation.
Les massacres de cette année sont cependant très au-delà de ceux de 1895-96. Les compte-rendu qui sont à présent parvenus en Europe de l'ouest, compte-rendu issus de sources diverses mais se confirmant les uns les autres, et qui, empreints de vérité, ne peuvent être mis en doute – prouvent que dans toute l'Asie Mineure de l'est et du nord, et en Arménie, la population chrétienne, dans sa totalité est délibérément exterminée. Les hommes en âge d'être mobilisés dans l'armée ont été tués. Les femmes les plus jeunes ont été enlevées et destinées aux harems turcs, obligées de devenir musulmanes et soumises, quelquefois avec leurs enfants, eux aussi convertis de force, virtuellement à l'esclavage.
Le reste des habitants, vieillards, femmes et enfants, ont été arrachés de leur maison et conduits de force, en convois sous la garde de soldats turcs, une garde largement composée de criminels libérés, dans des lieux insalubres d'Asie Mineure pour certains, ou dans les déserts entre la Syrie et l' Euphrate pour les autres. Beaucoup meurent ou sont assassinés sur la route : tous périssent tôt ou tard. De crainte que certains d'entre eux, s'ils en réchappaient, essayent de regagner leur foyer, des Musulmans ont été amenés d'autres lieux pour occuper les maisons et les fermes dont les Chrétiens ont été expulsés.
Aucun préjudice plus grand ne peut être fait au pays que la destruction de la partie la plus intelligente et industrieuse de sa population, mais de cela, les hommes inconscient et impitoyables qui contrôlent actuellement la Turquie n'en ont cure. A Trébizonde, où les Arméniens qui comptaient plus de 10 000 personnes vivaient paisiblement avec leurs voisins musulmans, des ordres sont venus de Constantinople d'arrêter tous les Arméniens. Beaucoup de ces bons voisins ont essayé de les cacher ou de les protéger, mais en vain. Les troupes les ont pourchassés, les ont conduits sur la côte, embarqués dans des bateaux, ont pris le large, les ont jetés par-dessus bord et tous se sont noyés – hommes femmes et enfants. La résistance était impossible, les hommes les plus jeunes ayant été pris dans l'armée et les autres sans armes. Tout cela a été vu et est décrit par le Consul italien.
" Combien ont péri à travers tout le pays, personne ne peut le dire. Il semble que quelques uns aient pu sauver leur vie en se convertissant à l'Islam, et environ 250 000 se seraient enfuis au-delà de la frontière en territoire russe. Mais un nombre très supérieur, peut-être 500 000 ont été massacrés ou déportés, et ceux qui ont été déportés périssent rapidement du fait des mauvais traitements, des maladies ou meurent de faim, tandis que les massacres continuent.
La chrétienté, après s'être maintenue en Arménie pendant dix-sept siècles, contre les attaques d'abord des Perses adorateurs du feu, par les Sarrazins et les Turcs par la suite, est à présent complètement extirpée de ces contrées. Les routes et les collines, comme le rapporte un compte-rendu, sont parsemés de cadavres, les cadavres de paisibles paysans.
L'histoire de ces horreurs doit sûrement émouvoir le cœur de tous les Américains, quelle que soit leur origine raciale, quelles que soient leurs sympathies avec l'une ou l'autre des parties dans le conflit actuel. Aucun homme doté de pitié ne peut s'empêcher d'être concerné par ces infortunées victimes de la férocité de leur propre gouvernement. Que peut-on faire? Nous pouvons tous, évidemment, essayer d'envoyer tous ces misérables réfugiés en territoire russe. Mais qu'est ce qui peut arrêter ces massacres? Pas les puissances alliées en guerre contre la Turquie. Une seule puissance peut faire quelque chose dans ce but. C'est l'Allemagne. La voix de l'opinion publique américaine, exprimant la conscience des nations neutres, ne pourrait-elle conduire l'Allemagne à exercer son influence pour contrôler le gouvernement turc avec que son horrible besogne ne soit terminée ?

Je suis votre dévoué,
BRYCE

Esquire Aneurin Williams, Membre du Parlement
 


IL DÉFEND LA RÉPRESSION DES ARMÉNIENS
Ce n'est l'Affaire de Personne, ce que leur fait la Turquie, déclare le Comte von Reventlow
Publié le 10 Octobre 1915

  BERLIN 9 octobre, (via Londres). – Le Comte Ernst von Reventlow, rédacteur militaire pour le Tageszeitung, dans un article dans ce journal, sous le titre " L'indignation à propos des ' Atrocités Arméniennes ' commence " déclare tout simplement que la façon dont la Turquie traite les soulèvements arméniens est son affaire en propre. Son article était inspiré du rapport qu'Henry Morgenthau, l'Ambassadeur des États-Unis en Turquie, qui a fait savoir à la Turquie que ses relations avec les États-Unis seraient mises en danger si les massacres d'Arméniens n'étaient pas arrêtés.

  Le comte Von Reventlow déclare qu'il ne lui est pas possible de discuter de ce sujet comme il le voudrait, mais que la Turquie ne se laissera pas aller à avoir peur. Il poursuit :

  " Si la Turquie considère qu'il est nécessaire que les soulèvements arméniens et autres intrigues soient éliminées par tous les moyens possibles, afin que leur répétition soit devenue impossible, cela ne constitue aucunement des massacres ou des atrocités, mais simplement une mesure à caractère justifié et nécessaire, d'autant plus justifié et nécessaire que l'Empire turc mène son combat le plus difficile pour son existence, et qu'il a suffisamment d'ennemis à l'extérieur. Exiger qu'elle ait de l'affection pour un ennemi intérieur, parce que cela arrangerait les Britanniques et les Américains, c'est beaucoup demander. 

  " L'empire turc a longtemps dû supporter que les grandes puissances qui appréciaient et souhaitaient détruire, piller ou voler les Turcs,  viennent se mêler de leurs affaires. Nous devrions être à présent persuadés que ces temps sont révolus. Et ils seront réellement terminés dès lors que l'empire germanique aura décidé une fois pour toutes que ce que son allié turc fait de ses révolutionnaires arméniens est une affaire interne qui ne regarde qu'elle ".

  L'auteur a exprimé son indignation à la suite d'un rapport publié par le Frankfurter Zeitung selon lequel les consuls allemands se sont efforcés de modérer  leurs souffrances; il a déclaré  que pour lui, ce point de vue était incompréhensible et qu'il le considérait comme une erreur politique.

  " Nous autres Allemands, n'avons de compte à rendre ni à nos ennemis ni aux pays neutres de ce que les Turcs font avec les Arméniens ou de ce que disent les consuls allemands sur ce sujet, a-t-il déclaré. " La place de l'Empire Allemand et de tout individu allemand est au côté de notre allié turc, et cela, sans aucune critique ".         

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 DES LETTRES QUI FONT ÉTAT D'INDIGNATION
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Celle issue d'un Turk Se Lamente de l'Expulsion des Arméniens

" La cruauté des autorités dépasse toute description. Dans certains cas, des clous et objets divers sont enfoncés au bout des doigts; des hommes sont battus jusqu'à ce qu'ils tombent au sol sans connaissance; la plante des pieds est frappée jusqu'au sang et de l'eau bouillante est ensuite versée sur la chair à vif et sanglante ; dans d'autres cas, l'homme est roué de coups, frappé jusqu'à il soit impossible de le reconnaître, même  de ses amis proches. Toute cette torture est donnée pour détruire les personnes, pour leur faire révéler des secrets et pour informer le gouvernement de complots ou de plans, que de tels actes soient prévus contre lui ou non ".   

  Ce qui précède est un extrait d'une lettre reçue par l'American Board of Commissioners for Foreign Missions [Les Membres du Conseil Américain aux Missions Étrangères]  d'un correspondant qui avait pu se déplacer dans une partie de la Turquie, et qui dit avoir assisté aux tortures décrites au cours d'une visite à une certaine cité de l'Arménie turque.

  ' Quelques cinq cents des pires criminels des prisons ", continue la lettre, ont été libérés et envoyés à la frontière russe pour brûler les villages et détruire la vie et la propriété de l'ennemi. Nous avons rencontré plusieurs bandes de ces hommes tandis que nous nous déplacions dans le pays ".

  Une deuxième lettre raconte les déportations massives des Arméniens dans le désert et en d'autres parties lointaines de l'empire turc. Parlant d'un groupe de 150 personnes d'un village dont le nom n'est pas indiqué, l'auteur déclare que " la liste comportait des hommes éduqués et des chefs de la communauté, dont certains ont été soumis à des tortures indescriptibles et étaient incapables de marcher ".

  Une troisième lettre est issue d'un Turc, un Musulman, à son fils, qui se trouve actuellement aux États-Unis. C'est la première lettre publiée d'une source strictement turque – une parmi les plus fiables – qui confirme les histoires effroyables et la torture et la mort, adressées à ce pays par des sources non-turques.

  On lit dans une partie de cette lettre qui est présentée telle quelle dans le bulletin mensuel du Conseil  :

    Je te retourne le chèque que tu m'as envoyé; il n'est pas possible de l'encaisser ici, car il ne reste ici plus aucun Raya ( les Chrétiens). Les habitants de notre village sont à présent tous musulmans, tous nos voisins raya ayant été emmenés dans la nuit, personne ne sait où. Leurs maisons sont à présent occupées par des Kurdes et des Bachi-bouzouks tcherkesses avec chacun une ou deux filles raya esclaves.

Les temps sont difficiles mon fils.  Les Raya étaient tout pour nous, et le voleur tcherkesse ne le remplace en rien pour ce qui nous concerne. Tous les vieux du village s'en rendent bien compte, même si quelques uns sympathisent avec ce misérables personnes. Je prends juste cette occasion de lettre pour te décrire la façon dont ils ont été traités. En ces temps de récolte, il ne restait au pauvre Raya même pas une poignée de farine chez lui, et ils ne vivaient principalement que sur les légumes. S'il restait à quelques uns quelques subsistances, ils n'avaient aucune chance de les emporter avec eux. Quelques uns avaient été arrêtés au pied de leur lit sans même avoir le temps de s'habiller, en sorte que beaucoup parmi eux (principalement les vieilles femmes et les enfants) n'étaient qu'à moitié habillés et les pieds nus. Nous avons appris que beaucoup d'entre eux étaient morts dès le premier jour.

  Il n'y a plus d'activité dans les affaires dans la totalité du…. Tout est en état d'anarchie. Les meules de blé, encore dans les champs, sont constamment incendiées par les Bachi-bouzouks. Je te le dis, quand l'hiver sera là, ce sera la famine pour nous, car comme tu le sais, nous vivons tous sur la récolte du Raya.

Les lettres ci-dessus, déclare le conseil, sont publiées sans commentaires, car elles vont de soi.

Parmi les commentaires inspirés  par  l'horreur et les souffrances endurées par les Arméniens, la phrase du rédacteur militaire :

      " ce qui est le plus justifié et le plus nécessaire du fait que l'Empire turc est dans son combat le plus difficile pour son existence et a suffisamment d'ennemis "

 est particulièrement  terrible.  Ce chargé de propagande justifie tout simplement l'injustifiable : l'Empire turc menacé a le droit de faire n'importe quoi pour se défendre. Ces propos préfigurent, irrésistiblement, les discours de haine d'Hitler relayés par son successeur zélé Joseph Goebbels.
Seul aveu de sincérité, (d'humanité?) de ce personnage, il écrit qu'il n'est pas libre de ses paroles.

GB

 


" … ma colère contre les bouchers et mon immense pitié pour les victimes… une extermination unique dans les annales de l'histoire "
(Mehmet Chérif Pacha) :
L'HOMME D'ÉTAT TURC DÉNONCE LES ATROCITÉS
Cherif Pacha Dit que les Jeunes Turcs ont depuis longtemps le Projet d'Exterminer les Arméniens.
Publié le 10 Octobre 1915

Un arrêt des Jeunes Turcs, ou Comité Union et Progrès, qui pendant des années ont comploté pour exterminer le peuple arménien, est mentionné dans une récente lettre de Mehmet Cherif Pacha à l'éditeur du journal de Genève.

Cet éminent exilé a dû s'enfuir de sa terre natale, ayant fait sécession du parti actuellement au pouvoir en Turquie, et ses avis méritent d'être pris en considération. Même ses ennemis – et il est évident qu'il en a de formidables, lorsqu'on se souvient de la tentative presque réussie d'attentat à sa vie, organisée par des agents de la police turque il y a presque deux ans à Paris – doivent admettre qu'il est placé idéalement pour observer la politique des Jeunes Turcs : le régime d'Abdul Hamid une fois renversé, et après leur prise de pouvoir, il tenait une position de premier rang dans les réunions du comité. Dès qu'il fut convaincu que leurs dirigeants n'avaient aucune intention de mettre en application le programme de réformes auquel ils s'étaient engagés, il avait quitté le Comité Union et Progrès. Il est le fils de Saïd Pacha, ex conseiller en chef d'Abdul Hamid et Premier grand vizir du temps de la nouvelle Constitution.

Son épouse est la princesse Emanine, fille du prince Halim, et il est le beau-frère du prince Saïd Halim, l'actuel Grand vizir. Lui-même a été un temps Ambassadeur de Turquie en Suède.

Après avoir décrit les atrocités commises contre les Arméniens par ce présent régime, et qui dépassent selon lui la sauvagerie de Gengis Khan et de Tamerlan, Chérif Pacha continue :

" Il est certain que l'état d'esprit des Unionistes a été gardé secret envers le monde civilisé avant que le parti de l'Allemagne n'ait été pris par eux ouvertement; mais pendant plus de six ans, je les ai dénoncés dans le Mecheroutiete (son journal, publié d'abord à Constantinople puis à Paris) et dans divers journaux et revues, prévenant la France et l'Angleterre du complot, contre elles et contre certaines nationalités à l'intérieur des frontières ottomanes, notamment les Arméniens, qui était en cours de préparation.

" S'il est une race qui a été proche des Turcs par sa fidélité, par ses services au pays, par les hommes d'état et les fonctionnaires de talent qu'elle a fournis, par l'intelligence qu'elle a montré dans tous les domaines, commerce, industrie, science, et les arts – c'est certainement les Arméniens.

Cherif Pasha énumère ensuite quelques une des contributions que les Arméniens ont apporté à la civilisation turque, dont font partie l'imprimerie et le théâtre, et rend hommage à Odian Effendi, pour avoir ébauché, en collaboration avec Midhat Pacha, la Constitution ottomane, et insiste sur leurs grandes qualités d'agitateurs contre les despotismes de la Turquie et de la Perse – qualités, on le suspecte, qui ne les a pas beaucoup servis auprès des " réformateurs " autocratiques du régime Jeune Turc. Et il poursuit :

" Hélas ! à la pensée qu'un peuple aussi doué, qui a servi de terreau pour la rénovation de l'Empire ottoman, est sur le point de disparaître de l'histoire – non pas réduit à l'esclavage comme l'ont été les Juifs et les Assyriens, mais annihilés – même le cœur le plus sec doit saigner : et je veux, par l'intermédiaire de votre estimable journal, exprimer à cette race qui est assassinée ma colère contre les bouchers et mon immense pitié pour les victimes.

“ Ayant rempli ce pieux devoir, je ferais quelques exceptions se rapportant non pas à la malheureuse nation arménienne mais à individuellement à certains Arméniens et groupe propagandistes qui ont au cours des six années passées se sont si maladroitement constitués défenseurs et partisans de ce Comité Union et Progrès, l'auteur de leurs actuelles souffrances. Combien de fois les ai-je avertis de la mauvaise foi des unionistes, la perversité de ces sombres personnalités que je suis le seul à connaître aussi bien ! En outre, le massacre d'Adana, dont l'Union a donné l'ordre, aurait dû les informer de la réalité des choses. Quelques eux parmi eux, par leur mauvaise évaluation de leur intérêt, ou d'autres influencés par une alliance politique maléfique – comme ce pauvre député de Constantinople Zohrab Effendi, qui a payé ses erreurs sur l'échafaud – tous les dirigeants politiques arméniens, ou à peu près, en s'identifiant eux-mêmes aux fortunes politiques de l'Union ont compromis leur cause nationale plutôt que l'avoir servie.

" Si au lieu de s'être engagés eux-mêmes sous la bannière de cette association néfaste et traîtresse, ils s'étaient rangés ouvertement aux côtés des vrais libéraux qui avaient depuis longtemps prévenu des dangers de leur situation, souvent au péril de leur vie, ils n'auraient pas seulement été fidèles à leurs principes, mais ils auraient aussi épargné à leurs frères infortunés les persécutions qu'ils ont subies avant la guerre et à leur nation dans son ensemble la perspective d'une extermination unique dans les annales de l'histoire ".


LES LETTRES PARLENT D’ATROCITÉS

10 octobre 1915
L’une des lamentations turques sur les expulsions des Arméniens :

« La cruauté des autorités est au-delà de toute description. Dans certains cas, des clous et des objets pointus sont enfoncés jusqu’aux bouts des doigts. ; les hommes sont battus jusqu’à ce qu’ils tombent inanimés par terre. Les plantes de pieds sont pilonnés, puis de l’eau bouillante est versée sur la chair écorchée et sanglante ; dans d’autres cas, l’homme est pilonné et battu jusqu’à ce qu’il lui soit impossible de savoir qui il est, même près d’un ami intime. Toute cette torture est pratiquée pour obliger la personne à révéler des secrets et informer le gouvernement de complots et de plans qui pourraient ou non être organisés contre lui. »

« Environ cinq cents des pires criminels des prisons, continue la lettre, ont été remis en liberté et envoyés à la frontière russe pour incendier les villages et détruire les vies et les propriétés de l’ennemi. Nous avons rencontré des bandes de ces hommes lorsque nous avons traversé le pays ».
Une seconde lettre parle de la déportation en masse des Arméniens vers le désert et autres parties lointaines de l’Empire turc… D’une certaine ville non nommée, l’auteur écrit que « les premiers comprenaient les hommes éduqués et cadres de la communauté, dont certains ont été soumis à d’indescriptibles tortures et étaient incapables de marcher. »

Une troisième lettre est celle d’un Turc, un Musulman à son fils, qui est maintenant aux Etats Unis. C’est la première lettre publiée d’une source strictement turque, et la plus sûre, qui confirme les récits d’effroi, de torture et de mort, envoyés dans ce pays de différentes sources non-turques.
« Je te retourne le chèque que tu m’as envoyé, car nous ne pouvons pas l’encaisser ici, où il n’y a plus de Raya (Chrétiens). Les habitants de notre village sont tous musulmans maintenant car nos voisins Raya ont été emmenés la nuit, personne ne sait où. Leurs maisons ont été occupées par des Kurdes et des Tcherkesses Bachibouzouks, chacun avec une ou deux filles esclaves Raya.
Les temps sont durs, mon fils. Les Rayas étaient tout pour nous, et le Tcherkess voleur n’est en aucun cas un substitut. Tous les anciens du village se rendent compte de cela, bien que peu d’entre eux aient de la sympathie pour ce malheureux peuple. Je prends seulement le risque de t’écrire la manière dont ils ont été traités. C’était la saison des moissons, et le pauvre Raya n’avait même pas une poignée de blé moulu chez lui, il vivait principalement de légumes. S’il y en avait certains parmi eux qui avaient un peu de nourriture chez eux, ils n’avaient aucun chance de pouvoir l’emporter. Quelques-uns furent tirés du lit, et n’eurent même pas le temps de s’habiller, de sorte que beaucoup (principalement des femmes et des enfants) partirent à demi-nus et pieds nus. Nous avons entendu dire qu’un grand nombre d’entre eux étaient morts avant la fin du premier jour.

Il n’y a plus aucune activité commerciale dans tout………….Tout est dans un état anarchique.
Les meules de blé, toujours dans les champs sont constamment mises à feu par les . Bachibouzouks. Je te dis que quand l’hiver arrivera, nous-mêmes devrons mourir de faim, car, tu le sais, nous vivons tous des récoltes des Rayas.
 


UN ESPOIR POUR LES ARMÉNIENS
Balfour Dit que les Germano-américains Devraient User de leur Influence

Publié le 9 octobre 1915

LONDRES, 9 octobre, – Arthur J. Balfour, Premier Lord de l'Amirauté, dans une lettre exprimant ses regrets de ne pouvoir assister à la réunion organisée par le Lord Maire à Mansion House vendredi prochain pour lancer le fonds de secours aux réfugiés arméniens, dit en se référant au massacre des Arméniens :

" C'est un crime dépassant les pires actes commis par les Turcs. Les Turcs dépendant entièrement des Allemands pour les soutenir, ceux-ci pourraient certainement, s'ils le voulaient, mettre un terme à cette lamentable affaire, et j'espérerais que les Germano-américains, qui devraient vouloir sauver ce qui leur reste de réputation, useront de leur influence pour empêcher la continuation de cette barbarie insensée ".


ENVOI DE 100 000 $ POUR SECOURIR LES REFUGIÉS ARMÉNIENS
Le Comité des Atrocités les a transféré par Virement télégraphique à Morgenthau -- 300 000 Grecs Réfugiés
Publié le 9 Octobre 1915

Répondant à un appel de l'Ambassadeur Morgenthau, reçu par le Département d'État, dans lequel il disait qu'il pourrait faire le meilleur emploi de 100 000 $ pour secourir les Arméniens, et que tandis que cette somme, administrée avec soin, constituerait un bon début, elle ne suffirait pas, le Comité des Atrocités Arméniennes, en coopération avec le Committee of  Mercy  [ aux USA, Comité d'Entraide aux Orphelins et Veuves de Guerre] a transféré par câble hier à l'Ambassadeur Morgenthau un premier versement de 100 000 $. L'Ambassadeur a dit que l'argent reçu sera distribué à Konitza, Afana, Tarse et Durfa et par l'intermédiaire du Consul américain à Alep. Comme l'a déclaré l'Ambassadeur, Cette somme, même si elle sauvera beaucoup de vies en ce moment, est malheureusement insuffisante en regard des terribles besoins.  Elle servira, cependant, à endiguer la vague et sauver  finalement  la situation. Le Comité des Atrocités Arméniennes et le Committee of Mercy maintiennent leur appel au nom de l'Arménie afin que tout ce qui est possible soit entrepris pour sauver les Arméniens de l'extinction.

Mais, même si de l'argent est envoyé à l'Ambassadeur Morgenthau en quantité suffisante pour faire tout ce qui peut être fait pour sauver les vies des Arméniens en Turquie, on ne peut trouver les réfugiés qui peuvent être secourus,  en majeure partie,  que là où ils se sont enfuis, en Russie, en Égypte, en Grèce. Des milliers et des milliers d'Arméniens seraient arrivés en Russie.

Le télégramme qui suit a été reçu par Stephen Van R. Trowbridge, auparavant missionnaire à Aintab, en Turquie et actuellement au Caire :

" Six mille Arméniens des villages d'Antioche, parmi lesquels quatre congrégations de mission, sont arrivés à Port Saïd recueillis récemment par des croiseurs français après avoir défendu leur foyer pendant soixante et un jour contre des violentes attaques turques. Souffrances héroïques. Enfants nés au cours des combats. Pasteur avait hissé le drapeau de la Croix Rouge, que le croiseur avait vu depuis la mer. Survivants sont gravement affaiblis. Principalement des femmes et des enfants, beaucoup sont malades. Autorités britanniques procurent la nourriture et abris. Envoyez nous s'il vous plaît 6 000 $ pour vêtements, médicaments et personnel infirmiers. Un comité est organisé. Fonctionnaire diplomatique américain approuve ".

En réponse, le Comité des Atrocités Arméniennes a viré télégraphiquement 6 000 $ à M. Trowbridge pour venir en aide aux réfugiés arméniens en Égypte.

William H. Hamilton, Secrétaire du Committee of Mercy, dont l'entrevue avec M. Venizélos, l'ex-Premier ministre de Grèce, a été publiée dans les journaux de jeudi, a télégraphié depuis Athènes que des réfugiés arméniens ont commencé à atteindre la Grèce, en même temps que des réfugiés grecs, dont les mauvais traitements par la Turquie ont créé un besoin désespéré les besoins pour des secours en Grèce. M. Venizélos et le Général Korakas, Président de la Commission des Secours du Gouvernement, ont amélioré les plans pour prendre soin des 300 000 réfugiés qui sont arrivés à Athènes Salonique, et les îles grecques. Les dons pour le secours des réfugiés doivent être adressés à August Belmont, trésorier du Committee of Mercy, au 200 Cinquième Avenue.

Le Comité des Atrocités Arméniennes et le Committee of Mercy mettent des mesures en place pour administrer comme il convient les réfugiés arméniens qui ont pu s'échapper de Turquie, et avec le soutien de tout son cœur du public, des vies peuvent être sauvées à la mesure des fonds recueillis. Les dons pour les secours des Arméniens peuvent être adressés à Charles R. Crane, 70 Cinquième Avenue.  

Commentaire -
Un article qui souligne le rôle de l'Ambassadeur Morgenthau, pas seulement politique mais bien concret, qui montre la générosité aux USA et aussi l'accueil de réfugiés en Russie, en Égypte et surtout en Grèce, en des temps particulièrement difficile pour elle-même. L'épisode héroïque du Moussa Dag fait son apparition dans la presse des USA d'octobre 1915.
GB


POURQUOI NOUS TENONS À AIDER LES ARMÉNIENS
Reventlow Dit que c'est l'Or Anglo-français qui Nous Motive

9 Octobre 1915

LONDRES, 8 octobre, – Le Times dit ce matin :
" Il faut relever que l'article monstrueux dont le Conte Reventlow est l'auteur, et qui était cité par Lord Cromer à la Chambre des Lords mercredi soir, est la seule référence aux massacres arméniens dans la presse allemande récente. L'article était basé sur un rapport selon lequel le Gouvernement américain avait invité l'Allemagne à intervenir en faveur des Arméniens. Outre les remarques brutales précédemment publiées, le Conte Reventlow a durement critiqué toute initiative américaine.

" Après s'en être référé, sur un ton méprisant, à l'Ambassadeur américain à Constantinople, il a dit que l'Angleterre et la Russie utilisaient la question arménienne pour leur intérêt propre, avant de poursuivre :

" ' Tout le monde sait probablement que c'est devenu une habitude populaire chez les Américains, de prendre une part aussi active que possible dans les questions de ce genre, même quand les événements se produisent au sud–est de l'Europe, et dès lors que ce n'est pas la doctrine Monroe qui peut servir d'excuse. Une telle ingérence devrait particulièrement choquer en ce moment, la Turquie étant un pays belligérant qui lutte pour sa survie, et que les États-Unis passent pour un pays neutre qui veut passer pour l'être. Il ne peut y avoir de doute sur les raisons de la fraternisation Anglo-américaine : la récente transaction financière montre dès à présent ses conséquences dans ce domaine ' ". .
 


800 000 ARMÉNIENS DÉNOMBRÉS COMME VICTIMES

Le Vicomte Bryce Annonce à la Chambre des Lords ce qu'est le Nombre Probable de Victimes des Turcs
10 000 PERSONNES NOYÉES EN MÊME TEMPS
LES PAIRS MIS AU COURANT DE LA FAÇON DONT LA POPULATION ENTIÈRE DE TRÉBIZONDE A ÉTÉ ANÉANTIE

Par Câble Spécial à THE NEW YORK TIMES

LONDRES, 7 octobre, – Le correspondant parlementaire de la Chambre des Lords du Daily Chronicle déclare :

" Cette après-midi Lord Bryce a fait un récit déchirant des circonstances dans lesquelles les Arméniens sont exterminés par l'effet d'une politique absolument préméditée et poursuivie par la bande au pouvoir actuellement en Turquie. Il évalue à 800 000 le nombre d'Arméniens, hommes, femmes et enfants, qui ont été massacrés de sang-froid, depuis mai dernier, en Asie mineure.

" La Chambre des Lords est une assemblée peu encline aux sentiments, mais elle a été profondément émue au récit d'horreurs en comparaison desquelles même les atrocités d'Abdul Hamid paraissent dérisoires . Comme Lord Bryce l'a dit à juste titre, on n'a jamais connu dans l'histoire, depuis Tamerlan, un crime aussi hideux et à une telle échelle ait été enregistré. On attribue à un ex-sultan de Turquie la phrase : ' la seule façon de se débarrasser de la question arménienne est de se débarrasser des Arméniens ' ".

" Cette horrible politique a été mise en œuvre par le gouvernement turc ", a poursuivi Lord Bryce, " très au-delà de celle jamais poursuivie par Abdul Hamid. La nation arménienne n'est pas tout à fait éteinte ; des malheureux rescapés ont trouvé refuge dans les provinces caucasiennes ; quelques uns sont parvenus à atteindre l'Égypte ; quelques bandes mal armées et à demi mortes de faim se défendent bravement elles-mêmes, contre ceux qui seraient leurs assassins dans les montagnes de Sassoun et de Cilicie.

" De la part de ces survivants pathétiques d'une race attachante, Lord Bryce a lancé un puissant appel aux nations neutres. Il n'a pas mentionné explicitement l'Amérique mais il était évident que l'ancien Ambassadeur à Washington avait la grande république de l'ouest en l'esprit lorsqu'il en a appelé à la conscience des pays neutres et lorsqu'il a dit que, même commis dans les convulsions d'une grande guerre, certains crimes ne seront pas tolérés par l'opinion publique du monde.

" La question arménienne est apparue lorsque Lord Cromer avait demandé si les déclarations selon lesquelles les officiels allemands étaient au courant de ces massacres étaient fondées sur des preuves solides. Lord Cromer pense que bien qu'il n'y ait aucun preuve digne de foi démontrant la complicité du gouvernement allemand ou ses agents dans ces terribles atrocités, le Gouvernement allemand, par son influence sur Constantinople, ne peut être déchargé de sa responsabilité que s'il démontre avoir pris des mesures énergiques pour empêcher ces crimes.
' Lord Crewe, répondant pour le Gouvernement, a déclaré que les rapports consulaires britanniques confirment la thèse des massacres et révèlent des faits horribles. La situation des réfugiés dans les provinces caucasiennes est extrêmement pitoyable.

" ' A propos des allégations selon lesquelles les représentants consulaires allemands n'auraient pas seulement assisté à ces horreurs, mais les auraient peut-être dirigées, a dit Lord Crewe, ' nous n'avons pas de confirmation officielle. Des déclarations dans ce sens ont cependant été faites, librement, par les observateurs américains, et étant donné les antécédents en d'autres lieux, on ne peut plus les qualifier d'improbables depuis juillet dernier, quand nous avons informé la Porte que les individus qui avaient incité à ces massacres seraient tenus par nous personnellement responsables ; même si aucune déclaration sur ce point n'a été remise par notre Ministère des Affaires étrangères au Gouvernement turc, ils savent notre opinion ' ".

Le Daily News, commentant les massacres arméniens, écrit :

" Jusqu'à quel point Guillaume II est-il au courant ? Que pense l'Ami de l'Islam de l'annihilation par son allié turc d'un million de fidèles chrétiens du Dieu qu'il invoque en permanence? Donne-t-il son aval au jugement dépassionné du Comte Reventlow selon qui ' ce n'est pas seulement un droit, mais aussi un devoir, de prendre des mesures énergiques contre les éléments arméniens douteux, assoiffés de sang, émeutiers si les autorités turques pensent qu'il est juste de le faire? ' Pour un Allemand, ajoute-t-il, il ne peut y avoir, bien sûr , aucune ingérence.

" Pour un Allemand, évidemment, il ne peut pas y en avoir. De l'appel horrifié américain, l'allié de la Turquie n'en a cure. ' Alors Pilate pris de l'eau et se lava les mains devant la multitude, disant " je suis innocent du sang de ce juste ' ".

 


UN ALLEMAND DIRIGEAIT LES TURCS À VAN
Le Dr Yarrow Dit l'Avoir Vu à la Tête des Troupes qui Pilonnaient les Arméniens
AUCUNE PROTECTION DE LA CROIX ROUGE
Et les Drapeaux Américains sur les Immeubles de la Mission Servaient de Cibles, selon le Missionnaire de Retour
Publié le 6 octobre 1915

Seize missionnaires de Van, en Arménie turque, viennent d'arriver, hier, sur le paquebot scandinave et américain Hellig Olav. Ce sont des membres de la mission créée par l'American Board of Commissioners for Foreign Missions [Le Conseil Américain des Chargés de Mission à l'Étranger], et ils ont confirmé les informations selon lesquelles les Turcs et les Kurdes se livrent à une " guerre sainte " contre les Arméniens.

Parmi les missionnaires se trouvent le Révérend Docteur Ernest Yarrow et Mme Yarrow, le Docteur Clarence Ussher et le Docteur Georges Reynolds. Ils ont évoqué le siège de Van qui a duré depuis le 20 avril jusqu'au 17 mai, une période au cours de laquelle des milliers d'Arméniens sont morts par l'épée, le feu et les épidémies.

" Pendant vingt-sept jours, a dit le Dr Yarrow, " 1 500 Arméniens déterminés ont tenu à Van devant 5 000 Turcs et Kurdes, et pendant les trois derniers jours, ils ont été pilonnés par les obus d'une batterie servie par une compagnie turque commandée par un officier allemand; je l'ai vu moi-même diriger le tir des canons.

" Deux jours avant que les Russes n'arrivent à Van, les Turcs ont délibérément incendié les immeubles de la mission. Ces lieux étaient identifiables et il ne peut y avoir sur leurs occupants aucun doute, cinq drapeaux américains et un drapeau de la Croix-Rouge y étant placés pour les protéger. Les tirs étaient à ce point précis que les mats ont été coupés, faisant chuter les drapeaux à terre. Il pouvait y avoir à cette époque 10 000 à 15 000 Arméniens à Van et dans ses environs, et pendant le siège, ils n'avaient pas seulement à combattre les Turcs et les Kurdes, mais aussi à peu près toutes les maladies contagieuses.

Lorsqu'on l'a questionné sur les atrocités commises par les Turcs, M. Yarrow a dit que toutes les formes concevables de torture ont été infligées aux Arméniens à Van et dans ses environs. Les blessures infligées aux femmes et aux enfants sont indescriptibles.

" Les Turcs et les Kurdes ont déclaré la " guerre sainte " contre les Arméniens ", a-t-il continué, "et ils ont fait le serment de les exterminer ".

Le Dr Yarrow a ajouté que lorsque les Russes se sont retirés, les missionnaires ont décidé de partir pour Tiflis. Ils ont été attaqués deux fois par les Kurdes en cours de route. Une femme âgée qui faisait partie du groupe a été blessée à la cuisse par une balle.

Au moment du départ, la situation en Arménie était terrible; il a continué en disant que beaucoup de gens mouraient du typhus et d'autres épidémies. La moitié des missionnaires ont été touchés par le typhus et six d'entre eux en sont morts.
Les missionnaires qui accompagnaient le Dr Yarrow ont dit que les événements tels qu'ils ont été rapportés à New York ne sont pas du tout exagérés quant à la situation en Arménie, et que beaucoup reste à dire.
Le Dr J.P. Xenides, professeur de grec à l' American College de Marsovan, en Turquie asiatique, qui a débarqué hier du vapeur Vasilfs Constantinos, s'est entretenu hier soir au restaurant Kismet, à West Street, avec les membres de l'Armenian Colonial Association de New York.

" Avant que les troubles ne commencent à Marsovan ", a dit le Dr Xenides, " il y avait quelques 12 000 à 13 000 Arméniens dans cette ville, et nous comptions dans l'établissement soixante et treize enseignants et leur famille et soixante trois étudiantes. Avant mon départ, les Arméniens ont tous été tués ou chassés, y compris les enseignants et leur familles, et les soixante trois filles ont été enlevées par les Turcs et enfermées dans leurs harems.

" Le Ministre turc des Affaires étrangères avait promis à l'Ambassadeur Morgenthau que la mission américaine et les Arméniens à Marsovan seraient préservés de toute atteinte, mais il a donné au Gouverneur des ordres tout à fait contraires.

" Le 26 juin, un ordre est arrivé selon lequel tous les Arméniens devaient quitter la ville et se rendre à Mossoul, sur le Tigre, distante de vingt cinq jours de caravane. Lorsque l'ordre de départ a été donné, les hommes ont été conduits dans une direction et les femmes et les enfants dans une autre, montés sur des charrettes à bœufs. On n'a plus jamais entendu parler des hommes, et on m'a dit qu'ils avaient tous été tués ".


MORGENTHAU PORTE SECOURS
Les Consuls Américains Feront Tout ce Qu'ils peuvent pour Aider les Arméniens
Publié le 6 octobre 1915

WASHINGTON, 5 octobre. – Beaucoup d'Arméniens dans ce pays ont contacté la Croix Rouge Américaine, et le Département d'état, pour trouver des moyens de secourir leur peuple dans son pays. Ernest P. Bicknell, Directeur national de la Croix Rouge, a écrit aujourd'hui à un Arménien qui l'avait contacté depuis Boston :
" Nous sommes informés par le Département d'état que les voies les plus efficaces de porter secours aux Arméniens à présent passent par l'Ambassadeur à Constantinople, M. Morgenthau. Un comité américain de personnes en vue a été formé à New York pour recueillir les contributions pour venir en aide aux Arméniens, avec Charles R. Crane, New York, comme Trésorier. Aussitôt que ces contributions seront reçues par ce comité, elles seront transmises à l'Ambassadeur Morgenthau et distribuées comme il pensera devoir le faire.
" On pense qu'à travers les Consuls américains en Arménie, et quelques missionnaires américains qui sont encore dans ce pays, il sera possible de faire quelque chose pour secourir les Arméniens, même si tout le monde s'accorde à dire que tout ce qu'il est possible de faire n'est que très peu com^paré aux besoins ".

 

Un article déchirant, en ce mois d'octobre 1915, où s'expriment l'impuissance des Américains émus du sort des Arméniens aux USA et aussi, indirectement celle de l'exécutif américain, représenté en prmière ligne par l'Ambassadeur Morgenthau.
GB


LE GOUVERNEMENT LANCE UN APPEL POUR L’ ARMÉNIE
Publié le 4 Octobre 1915

Dire à la Turquie que la continuation des atrocités va compromettre les bonnes relations américaines.

Washington – De nouvelles démarches ont été faites auprès du Gouvernement Ottoman par le Gouvernement des Etats Unis concernant les atrocités envers les Arméniens .

Le Secrétaire d’Etat Lansing a envoyé ce soir à l’Ambassadeur Morgenthau à Constantinople un message exprimant l’intérêt du peuple américain à l’égard de la situation arménienne, et insistant pour que des mesures soient prises par le Gouvernement turc pour la protection et un traitement humain des Arméniens.

Le message n’a pas pris la forme d’une protestation du Gouvernement des Etats Unis, mais a été adressé à Mr. Morgenthau pour informer le Gouvernement Ottoman que les atrocités infligées aux Chrétiens arméniens avaient suscité un très fort sentiment parmi le peuple américain et qu’une continuation de ces atrocités allait tendre à compromettre la sympathie du peuple des Etats Unis envers le peuple de Turquie.

Le Secrétaire Lansing a dit aujourd’hui qu’aucune remarque n’avait été faite à l’Allemagne concernant le traitement des Arméniens par les Turcs. Nous avons appris toutefois que l’Ambassadeur Morgenthau avait signalé que l’Ambassade d’Allemagne à Constantinople avait envoyé une protestation à ce sujet au bureau des Affaires Etrangères turques. Il y a quelque temps, un rapport du Département d’Etat avait demandé au Comte Von Bernstorff, l’Ambassadeur allemand d’ici, d’attirer l’attention du bureau des Affaires Etrangères sur ce sujet.
 



RÉCIT DES HORREURS COMMISES EN ARMÉNIE Nyt19151004
Lundi 4 octobre 1915 - Un rapport d’éminents Américains dit que ces horreurs sont inégalées depuis mille ans.
Rapport turc surpassé.
Une politique d’extermination mise en œuvre contre un peuple impuissant.
Des village entiers dispersés !
Des hommes et des enfants massacrés, des femmes et des jeunes filles vendues comme esclaves et distribuées aux Musulmans.


Le Comité des Atrocités arméniennes, un corps d’éminents américains ayant enquêté pendant des semaines sur la situation de l’Arménie turque, a diffusé hier un rapport détaillé sur cette enquête, dans lequel il est affirmé qu’en cruauté et en horreur, rien dans les mille ans passés n’a égalé les persécutions actuelles du peuple arménien par les Turcs. Le Comité ajoute que les sources d’information sont « incontestables quant à leur véracité, leur intégrité, et l’autorité des auteurs ».
Ces données sur lesquelles est basé le rapport ont été rassemblées de toutes les parties de l’Empire turc.

Le rapport parle d’enfants de moins de quinze ans jetés dans l’Euphrate pour être noyés, de femmes forcées d’aller dans le désert avec un bébé dans les bras, et abandonnées au bord des routes pour mourir, de jeunes femmes et jeunes filles que des Turcs se sont appropriées, puis jetées dans des harems, attachées, ou vendues au plus offrant, et d’hommes torturés et assassinés. Tout ce qu’un Arménien possède, même ses habits sur le dos, sont volés par ses
persécuteurs.

Le rapport dit que la bastonnade renaît, de hauts dignitaires de l’Eglise ont été pendus, des familles éparpillées aux quatre vents, des milliers et des milliers de personnes sans défense et malheureuses rassemblées comme du bétail et conduites dans les terres désertiques de l’empire, pour y mourir de faim.

Les hommes qui ont signé le rapport sont  :

. le Révérend David H. Greer, évêque épiscopal protestant du diocèse de New York
. Oscar S. Straus, ancien secrétaire du commerce et du travail et ex-Ambassadeur de Turquie
. Cleveland H. Dodge, de Phelps, Dodge & Company
. Le révérend Dr. Stephen S. Wise, rabin de la Synagogue libre de N.Y.
. Charles R. Crane de Chicago, vice-président de ‘Finance Committee of the Democratic
National Committee’ au cours de la campagne précédente.
. Arthur Curtiss James, directeur de plusieurs sociétés de chemins de fer et de la Banque nationale de Hanovre, de la United States Trust Co, et Phelps, Dodge & Co.
. Le Rév. Dr. Frank Mason North du Conseil d’administration des Missions étrangères de l’Eglise Episcopale Méthodiste.
. John R. Mott du Comité international de ‘Young Men Christian Association’.
. William W. Rockhill, ancien ambassadeur de Turquie, et ancien ambassadeur de Russie.
. William Sloane, président de W.&J. Sloane, 575 - 5ème Avenue, N.Y.
. Le Rev. Dr. Edward Lincoln Smith, du Conseil d’Administration américain des Commissaires pour les Missions étrangères.
. Le Rev. Dr. Frederick Lynch, de la New York Peace Society.
. Georges A. Plimpton, de Glinn & Co., administrateur de Constantinople College.
. Le Rev. Dr. James L.Barton, missionnaire en Turquie pendant de longues années, et aujourd’hui secrétaire du Conseil d’Administration des Commissaires pour les Missions Etrangères.
. Le rév. Dr. William J. Haven, l’un des fondateurs de la ‘Epworth League’.
. Stanley White, Président de « White Advertising Corporation ».
. Professeur Samuel P. Dutton, une autorité dans les affaires du Balkan.

Identité cachée des auteurs.

« Pour des raisons évidentes pour tous », dit le comité dans la préface de son rapport, les noms et positions des différents auteurs ne peuvent pas être révélés en ce moment.
Ils sont connus du comité qui se porte garant pour eux et leurs déclarations. Dans la plupart des cas, il sera nécessaire de cacher le lieu où ces déclarations ont été écrites, et même les noms de villes citées, afin que l’auteur ou ses cas ne puissent souffrir de maux irréparables.

Les sources d’information, ajoute-t-il, sont grecques, bulgares, américaines, turques, allemandes, britanniques et arméniennes.

Le rapport, qui contient 20 000 mots, est divisé en 25 parties.
La première, datée du 27 avril 1915, déclare qu’un « mouvement contre les Arméniens fait partie d’un mouvement concerté contre tous les éléments non-turcs, et ceux de mission et de progrès, y compris sionistes.

La seconde, datée de trois jours plus tard, parle de la persécution, des pillages et massacres à l’intérieur de la Turquie, et de « l’incroyable rigueur » contre les Arméniens de Zeytoun et de Marash.

Le 10 juillet, l’auteur affirme qu’il était évident qu’une « tentative systématique de déraciner la paisible population arménienne avait été décidée en haut lieu.
Les tortures, pillages, viols, meurtres, expulsions massives, déportations et massacres provenaient de toutes les parties de l’empire et étaient dus non pas à une demande populaire ou fanatique mais à des directives purement arbitraires de Constantinople ».
Le 16 juillet, un autre auteur écrit qu’ « une campagne d’extermination de race est en cours ».

Le chapitre VI décrit les massacres fin juillet, de femmes et d’enfants dont la plupart avaient été déportés de la région d’Erzeroum. Les massacres se sont produits près des villes de Kemakh, entre Erzeroum et Harpout.
La déportation avait commencé à Zeytoun.
Les chapitres VII et VIII forment deux des plus horribles chapitres d’horreurs, dont le rapport se divise. Ils sont séparés comme suit :

Le 20 juin. La déportation a commencé il y a six semaines par 180 familles de Zeytoun ; depuis, tous les habitants de cet endroit et des villages alentours, ont été déportés ; ainsi que presque tous les Chrétiens d’Albustan, un grand nombre de Hadjin, Sis, Kars Pazar, Hassan Beyil et Deort Yol. Leurs nombres s’élèvent à ce jour à 265 000.
Parmi eux, environ 5 000 ont été envoyés dans la région de Konya, 5 500 sont à Alep et les villes et villages environnants, et le reste est à Der Zor, Racca et différents endroits de Mésopotamie, même aussi loin que le voisinage de Bagdad. Le processus continue encore, et l’on ne sait pas jusqu’où cela va aller.

Les ordres déjà reçus vont amener ce nombre à 82 000 dans cette région, et il n’y a pas encore d’exilés d’Aintab, très peu de Marach et d’Ourfa. Il se peut que les ordres des commandants aient été raisonnablement humains, mais leur exécution a été pour la plupart d’une dureté inutile, et dans certains cas accompagnée d’une horrible brutalité envers les femmes, les enfants, les malades et les personnes âgées.
Tous les villages ont été déportés après un avis d’une heure, sans aucune opportunité de se préparer pour le voyage, pas même dans certains cas, de rassembler les membres de la famille dispersée, de sorte que de jeunes enfants sont restés derrière. A Hadjin, les gens aisés, qui avaient préparé de la nourriture et de la literie pour la route ont été obligés de les laisser dans la rue, et par la suite, ont beaucoup souffert de la faim.

Les femmes conduites sous le fouet.

Dans de nombreux cas, les hommes (ceux d’âge militaire étaient presque tous dans l’armée) étaient attachés fortement avec des cordes ou des chaînes.
Les femmes avec de jeunes enfants dans les bras, ou dans les derniers jours de grossesse, étaient menées sous le fouet comme du bétail.
Trois cas différents sont parvenus à ma connaissance, dans lesquels la délivrance d’une femme se produisit sur la route, et à cause du conducteur brutal qui la pressait le long du chemin, elle mourut d’hémorragie.
Je connais aussi un cas où le gendarme en charge était un homme humain, et accorda à la pauvre femme plusieurs heures de repos, puis lui procura une charrette pour continuer.
Certaines femmes devinrent si complètement épuisées et désespérées qu’elles laissèrent leur enfant au bord de la route.
De nombreuses femmes et jeunes filles furent violées. En un endroit, le commandant
de la gendarmerie dit ouvertement aux hommes auxquels il confiait un grande compagnie qu’ils étaient libres de faire ce qui leur plaisait avec les femmes et les jeunes filles.
Quant à la subsistance, il y avait une grande différence d’un lieu à un autre. Dans certains endroits, le gouvernement les avait nourris ; ailleurs, il avait permis à d’autres de les nourrir.
Il y a eu beaucoup de faim, soif et maladie, et quelques réels cas de famine et mort.

Ces gens étaient dispersés en petites unités, trois ou quatre familles par ci, par là, parmi une population de race et religion différentes, et parlant une langue différente. Je parle d’eux comme si c’étaient des familles, mais les quatre cinquièmes d’entre eux étaient des femmes et des enfants, et les hommes présents étaient pour la plupart vieux et incompétents.
Si aucun moyen n’est trouvé pour les aider au cours des quelques mois prochains, jusqu’à ce qu’ils soient établis dans leur nouvel environnement, les deux tiers ou les trois quarts d’entre eux vont mourir de famine et de maladie.
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Les pieds des prisonniers battus et tombés en morceaux.

J’ai été appelé un jour dans une maison où j’ai vu un drap en provenance de la prison, et qui était envoyé pour être lavé. Ce drap était couvert de sang, coulant en ruisselets. On me montra aussi des habits qui étaient trempés et excessivement sales. Je me demandais ce qu’ils avaient bien pu faire aux prisonniers, mais j’ai été au fond des choses grâce à l’aide de deux personnes de confiance qui avaient été en partie témoins : le prisonnier est placé dans une pièce (comme au temps des Romains), des gendarmes se tiennent deux par deux de chaque côté, et deux au fond de la pièce, chacun son tour donne la bastonnade jusqu’à ce qu’il n’en ait plus la force. Du temps des Romains, 40 coups étaient administrés au maximum ; mais là, cependant, 200, 300, 500, et même 800 coups étaient administrés. Le pied enfle, puis éclate sous les nombreux coups et ainsi le sang gicle. Le prisonnier est ensuite ramené en prison et mis au lit par le reste des prisonniers. Cela explique le drap ensanglanté Les prisonniers devenus inconscients après ces coups sont ranimés au moyen d’eau froide versée sur la tête, ce qui explique les habits sales. Un jeune homme a été battu à mort en l’espace de cinq minutes.
A part la bastonnade, d’autres méthodes sont employées aussi, telles que la pose de fers rougis sur la poitrine.
Un forgeron qui était soupçonné d’avoir forgé des obus, fut libéré après avoir eu les orteils brûlés avec de l’acide sulfurique (appelé kérab).

Le Consul allemand d’Alep estime à 30 000 le nombre de déportés. 5000 personnes ont été déportées au lieu malsain de Sultani, dans la région de Konya. Les premiers jours, le gouvernement a donné un peu de pain. Quand il n’y eut plus de pain, ils ne reçurent plus rien.
La misère était déchirante.

Au chapitre 9, l’auteur décrit un autre règne de terreur, pendant lequel la terrible bastonnade était en usage, avec la torture du feu en plus. Il avait entendu des cas de brûlures des yeux des pauvres victimes.

Dans un autre cas, de vieilles bombes trouvées dans un cimetière et enfouies là probablement sous le règne d’Abdul Hamid, servirent de prétextes pour torturer et tuer des centaines de personnes accusées de les avoir cachées pour les utiliser contre les Turcs.

Le 26 juin des Arméniens d’une certaine ville reçurent l’ordre de partir. Sans exception. Jeunes et vieux, riches et pauvres, malades et bien-portants, tous devaient partir. Si elle était gravement malade, la victime était tirée de son lit jusque dans les rues. On leur prenait leurs chaussures et leurs vêtements. Ils étaient jetés en prison, puis envoyés au loin, par groupes de trente ou plus. Certains groupes étaient enchaînés. Un homme qui était en contact avec le gouvernement turc affirma plus tard qu’ils avaient été tués.

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Les femmes des soldats du Sultan déportées.

Après la déportation des hommes, les femmes et les enfants reçurent l’ordre d’être prêts à partir. On leur disait d’être prêts à partir le mercredi, et voilà ce qui arrivait : le mardi, à environ 15h30, des chars à bœufs apparaissaient aux portes du premier quartier a être évacué, et on odonnait aux gens de partir immédiatement. Certains étaient tirés de leur lit sans même un habit suffisant. Durant toute la matinée les chars à bœufs claquaient en sortant de la ville, chargés de femmes et d’enfants, et ça et là, un homme qui avait échappé aux déportations précédentes.
Dans de nombreux cas, les maris et les frères de ces femmes, étaient loin dans l’armée, combattant pour le gouvernement turc.

La panique dans la ville était terrible. Les gens se doutaient que le gouvernement était décidé à exterminer la race arménienne, et ils étaient impuissants à résister. Les gens étaient sûrs que les hommes avaient été tués, et les femmes kidnappées.

De nombreux condamnés de la prison avaient été relâchés, et les montagnes environnantes de …….étaient pleines de bandes de hors-la-loi. On craignait que les femmes et les enfants soient enlevés de la ville et laissés à la merci de ces hommes.

Cependant il est probable que des enlèvements de jeunes filles attrayantes se soient produits par des officiels turcs de………….

Un Musulman rapporta qu’un gendarme lui avait offert de lui vendre deux filles pour 1 medjdié (4 dollars). Les femmes pensaient qu’elles allaient subir un sort pire que la mort, et plusieurs transportaient du poison dans leurs poches pour l’utiliser si nécessaire. Quelques-uns transportaient des pioches et des bêches pour enterrer sur le côté de la route ceux qui allaient sûrement mourir.

Pendant ce règne de terreur, on remarqua qu’il était facile de s’échapper ; que quiconque acceptait l’Islam aurait la permission de rester tranquillement chez lui. Les bureaux des avocats qui enregistraient les demandes étaient remplis de gens désireux de devenir Mahométans. Beaucoup le firent pour l’amour de leur femme et enfants, sentant que ce serait l’affaire de quelques semaines avant la délivrance.

La déportation continuait à intervalles d’environ deux semaines. On estime que sur 12 000 Arméniens de…………..il en restait à peine une centaine. Même ceux qui avaient proposé d’accepter l’Islam furent déportés. Au moment de mettre tout cela par écrit, aucun mot précis n’avait été entendu par l’un de ces groupes…

Un autre chapitre dit qu’au sujet de ces 12 000 Arméniens déportés, de toutes classes et de tous âges, « toute la population mahométane savait que ces gens allaient devenir leur proie
dès le début, et qu’ils seraient traités comme des criminels ». La route de ces malheureux
était jonchée de cadavres.

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La tête des enfants fendue sur les rochers, voilà ce qui est arrivé dans un village
où vivaient alors de nombreux Arméniens.

………………, un village à environ deux heures de ……………….. est habité par des Arméniens grégoriens et catholiques. Un Arménien, riche et influent, et ses deux fils, furent placés l’un derrière l’autre, selon un témoin de confiance, et tirés en un seul coup.

Quarante cinq hommes et femmes furent emmenés à une courte distance du village, dans une vallée. Les femmes furent d’abord violées par les officiers de gendarmerie, puis remises aux
gendarmes pour en disposer.
Selon ce témoin, un enfant a été tué en ayant sa tête frappée contre un rocher.
Les hommes ont tous été tués et personne n’a survécu de ce groupe de 45 personnes.

Voici, en partie, l’histoire d’une autre malheureuse ville arménienne. Dans la journée, les policiers fouillèrent les maisons des Arméniens, à la recherche d’armes, et n’en ayant pas trouvé, ils emmenèrent les meilleurs et les plus honorables des habitants et les emprisonnèrent.
Certains d’entre eux furent exilés, et les autres furent torturés avec des fers chauffés à blanc pour qu’ils révèlent les armes soi-disant cachées.

Le Bureau de la Gendarmerie semble avoir le contrôle total de l’affaire, et le Mutessarif les soutient.
Ils détiennent maintenant environ une centaine des meilleurs citoyens de la ville en prison, et aujourd’hui le chef de la gendarmerie a appelé l’évêque arménien et lui a dit que si les Arméniens ne livrent pas leurs armes, et les révolutionnaires parmi eux, qu’il a des ordres pour exiler la totalité de la population arménienne de …………. comme ils l’ont fait à ceux de
…………………….
Nous savons comment ces derniers ont été traités, car une centaine d’entre eux ont été traînés à travers ……………………… sur leur chemin vers le désert où ils ont été exilés.
Ces pauvres exilés étaient principalement des femmes, des enfants et des vieillards, ils étaient frappés à coups de gourdin, et battus, et fouettés comme s’ils avaient été des bêtes sauvages, et les femmes et les filles étaient tous les jours criminellement violées, à la fois par leurs gardes et les ruffians de chaque village qu’ils traversaient.

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Une femme décrit une horrible épreuve

Un autre document entre les mains du Comité américain prouve que « le Gouvernement Jeune-Turc poursuit incessamment, et chaque jour avec une plus grand violence, la guerre comme si elle était déclarée contre ses sujets arméniens. »

Une lettre d’une femme en Turquie, d’une intégrité indubitable, relate en partie ce qui suit :

« Notre groupe partit le 1er juin (ancienne date) avec 15 gendarmes nous accompagnant.
Le groupe comprenait 400 à 500 personnes. Nous étions à peine à deux heures de chez nous, lorsque des bandes de villageois et des crapules en grand nombre, avec des carabines, des fusils, des haches, nous entourèrent sur la route et dérobèrent tout ce que nous avions.
Les gendarmes prirent mes trois chevaux et les vendirent aux mouhadjirs turcs , empochant l’argent. Ils prirent mon argent et celui du cou de ma fille, et aussi toute notre nourriture.

Après cela, ils séparèrent les hommes, un par un, et les tuèrent tous dans les 6 ou 7 jours, tous ceux qui avaient plus de 15 ans.
A côté de moi deux prêtres furent tués, l’un d’entre eux avait plus de 90 ans.
Ces crapules prirent toutes les belles femmes et les emmenèrent sur leurs chevaux.
De très nombreuses femmes et jeunes filles furent ainsi transportées dans les montagnes, parmi elles ma sœur, dont ils jetèrent le bébé d’un an ; un Turc le ramassa et le transporta je ne sais où.
Ma mère marcha jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus aller plus loin, et tomba au bord de la route, au sommet d’une montagne.

Nous avons trouvé sur la route un grand nombre de ceux qui avaient fait partie des départs précédents, de………………….. ; les uns étaient parmi les morts, avec leur mari et leurs fils.

Nous avons aussi rencontré des personnes âgées et de jeunes enfants encore vivants, mais dans une situation pitoyable, à force d’avoir crié.

Nous n’avions pas la permission de dormir la nuit dans les villages, nous devions nous allonger en dehors.
Sous le couvert de la nuit, d’indescriptibles actes ont été commis par les gendarmes, les crapules et les villageois.
Un grand nombre d’entre nous sont morts de faim ou frappés d’apoplexie. D’autres sont restés au bord de la route, trop faibles pour continuer.

Un matin, nous avons vu 50 à 60 chariots, avec environ 30 veuves turques, dont les maris avaient été tués pendant la guerre ; elles allaient à Constantinople. L’une de ces femmes fit un signe à l’un des gendarmes, de tuer un certain Arménien qu’elle désigna. Les gendarmes lui demandèrent si elle ne souhaitait pas le tuer elle-même, elle répondit : « Pourquoi pas ? »
Et tirant un revolver de sa poche, elle tira et le tua.

Chacune de ces hanums turques avait avec elle, cinq ou six fillettes arméniennes de moins de dix ans.
Les Turcs ne voulaient jamais prendre de garçons, ils les tuaient tous, de n’importe quel âge.

Ces femmes voulurent prendre aussi ma fille, mais elle ne voulait pas se séparer de moi.
Finalement, nous sommes montées toutes les deux dans leur char, sur notre promesse de devenir Musulmanes. A peine montées dans la voiture, elles se mirent à nous enseigner comment devenir Musulmanes, elles changèrent nos noms, m’appelant ……………. et ma
fille……………….
Les pires horreurs et les plus inimaginables étaient réservées pour nous sur les rives de l’Euphrate et dans la plaine d’Erzingan. Les corps mutilés de femmes, de petites filles et de jeunes enfants faisaient frissonner tout le monde.

Les crapules faisaient toutes sortes d’actes ignobles aux femmes et aux fillettes qui étaient avec nous, et dont les cris montaient jusqu’au ciel.

Dans l’Euphrate, les crapules et les gendarmes jetèrent dans le fleuve le reste des enfants au-dessous de 15 ans. Ceux qui ne pouvaient pas nager étaient abattus alors qu’ils se débattaient dans l’eau.
Sept jours plus tard, nous atteignîmes ………………Là, il ne restait plus un seul Arménien vivant.
Les femmes turques nous emmenèrent au bain, ma fille et moi, et nous montrèrent
toutes les autres femmes et fillettes qui avaient accepté l’Islam.


Les criminels musulmans relâchés pour le pillage

Extraits de divers témoignages inclus dans le rapport d’hier :

2 août. Environ 800 femmes d’âge moyen et âgées, et d’enfants de moins de dix ans, arrivèrent à pied de Diarbékir, après 45 jours en route, dans la plus pitoyable condition imaginable.
Elles dirent que les Kurdes avaient pris les jeunes femmes et les jeunes filles,
pillé même la moindre somme qu’elles avaient et autres biens, les privant de nourriture et autres besoins, et les laissant dans une misère indescriptible.
Dans toute la campagne, les dirigeants arméniens avaient été tués ou pendus.
Les commerçants étaient devenus mendiants et exilés.

Trente mille criminels mahométans avaient été relâchés des prisons, et formaient des bandes sous une stricte discipline militaire. L’une des obligations de ces bandes était de piller les villages, de cambrioler et d’assassiner les exilés.

Les patriarches grec et Arménien avaient demandé audience aux ministres du gouvernement turc, mais cela leur avait été refusé.

Les Ambassadeurs étrangers, parmi lesquels se trouvait celui des Etats Unis, avaient été repoussés, et avertis que les souhaits du Gouvernement Impérial ne les regardaient pas.

Les Ministres turcs et autres officiels avaient constamment avoué l’intention d’écraser les nationalités chrétiennes, et de mettre ainsi un terme à la Question arménienne.

Les importantes institutions américaines, religieuses et éducatives de cette région sont en train de perdre leurs professeurs, leurs enseignants, leurs assistants et leur étudiants ; et même les orphelinats ont été vidés de centaines d’enfants qui s’y trouvaient, ce qui ruine les fruits de cinquante années d’infatigables efforts dans ce domaine.

Les officiels du gouvernement, en se moquant, demandent ce que les Américains vont faire de ces établissements maintenant que les Arméniens ont été chassés.

La situation devient chaque jour plus critique car on ne peut pas dire où cela va finir.

Les Allemands sont blâmés de tous côtés, car s’ils n’ont pas directement ordonné ce crime global (car ce n’est rien d’autre que l’extermination de la race arménienne) ils l’ont au moins excusé.

L’histoire d’une visite à l’un des camps dans le désert où les Arméniens ont été exilés, est racontée vers la fin de ce rapport. Elle décrit les vieillards, les femmes et les enfants, réduits au pire état de misère par leurs persécuteurs.
Il n’y a que très peu d’hommes dans le camp, dit le rapport « car la plupart d’entre eux ont été tués en route ». De même, beaucoup de femmes et d’enfants ont été tués.

« La condition de ces gens » dit le rapport, « indique clairement le sort qui leur est réservé, et qu’ils vont être abandonnés ici ».
Le système qui est prévu est d’avoir des bandes de Kurdes qui les attendent sur la route pour tuer spécialement les hommes, et incidemment certains des autres.
Tout le mouvement semble être le massacre le plus complètement organisé et efficace que ce pays n’ait jamais connu ».

Les Turcs contrecarrent les efforts des missionnaires

Les Missionnaires américains ont commencé à envisager des plans pour aider les femmes et les enfants qui allaient rester ici sans aucun moyen de soutien.
On a pensé que peut-être un orphelinat pourrait être ouvert pour prendre soin de quelques-uns des enfants, et spécialement ceux qui étaient nés en Amérique et ramenés ensuite ici par leurs parents, et aussi ceux dont les parents avaient été de quelque façon en contact avec la mission américaine et les écoles.

Il y aurait de nombreuses opportunités, bien qu’avec des moyens insuffisants, de prendre soin des enfants qui arrivaient ici avec des exilés d’autres vilayets et dont les parents étaient morts en route.

J’ai été voir hier le Vali à ce propos, et reçus un refus catégorique.
Il dit que nous pourrions aider ces gens si nous le désirions, mais le gouvernement était en train d’installer des orphelinats pour ces enfants, et nous ne pouvions entreprendre aucun travail de cette nature.

Une heure après avoir quitté le Vali, une annonce fut faite que tous les Arméniens restant ici, y compris les femmes et les enfants, devaient être partis le 13 juillet.

« En réponse à l’appel urgent de l’Ambassadeur Morgenthau, concluait le rapport, « le Comité des Atrocités Arméniennes, en coopération avec le Comité de Grâce, ont décidé de lancer un large appel de fonds. Plusieurs messieurs ont déjà promis de larges contributions, mais le besoin est très grand, et nous espérons recevoir un bon nombre de petits cadeaux.
« Les crimes perpétrés actuellement envers le peuple arménien dépassent en horreur et en cruauté tout ce que l’histoire a rapporté au cours des mille ans passés. Les gens éduqués et les ignorants, les riches et les pauvres, tous sont soumis à toutes les formes de barbarie et d’outrages.

Nous comprenons toutefois qu’un très grand nombre de Turcs soient opposés à cette politique de persécution. ».

« On espère qu’une prompte action va permettre de sauver de nombreuses vies, et rapatrier au moins une partie de ceux qui ont été chassés de chez eux ».

« Les fonds seront envoyés à l’Ambassadeur aussitôt que reçus. Les dons doivent être adressés au Trésorier Charles R. Crane, 70, Fifth Avenue, New York. »

(Cet article du NYT n’est qu’un des 200 articles environ du New York Times, parus dans un livre appelé : « Le Génocide arménien » - Nouveaux compte-rendu de l’American Press : 1915-1922 ») Sont inclus également plus de 60 longs articles de l’American Journal de l’époque, y compris l’histoire de l’Ambassadeur Morgenthau, et autres documents importants.
Ce livre est disponible à « l’Armenian Genocide Resource Center »,
5400 McBryde Avenue, Richmond, CA 94805. Prix :30 $ - (+ 5 $ pour courrier 1st class).


DES TURCS REPRENNENT LES ATTAQUES CONTRE DES CHRÉTIENS
Des Bandes d'Irréguliers Opèrent dans la Zone qui Vient d'Être cédée à la Bulgarie
Publié le 4 Octobre 1915

Londres, lundi 4 octobre. – Une nouvelle série d'agressions turques contre les Chrétiens est signalée, qui se serait déroulée dans la zone que la Turquie vient récemment de céder à la Bulgarie, et que les troupes régulières évacuent actuellement. Une dépêche issue d'Athènes à Reuters Telegram Company dit :


" Des bandes d'irréguliers turcs ont organisé le pillage ciblé de commerces et d'habitations chrétiennes. Toutes les femmes ont été maltraitées. Quatre villages chrétiens extérieurs à la zone cédée ont été évacuées de force pour laisser la place aux Turcs qui ne souhaitent pas rester sous l'autorité bulgare ".

 

Commentaire -
Cet article est relatif à un épisode particulier de la Grande Guerre. Probablement contre l'entrée en guerre de la Bulgarie, aux cotés de la Triplice Allemagne, Autriche, Turquie, cette dernière lui avait cédé un petit territoire de la Thrace
(Convention de rectification de la frontière bulgaro-turque du 24 août – 6 septembre 1915* ). En dépit de ce traité entre les deux états concernés, les troupes turques irrégulières appliquent ici une méthode inaugurée au cours de la Première guerre balkanique : vider les maisons habitées par les Chrétiens en chassant leurs propriétaires ou en les massacrant pour y loger des Musulmans que la guerre avait chassés. Comme l'a relevé Taner Akçam dans son livre paru en octobre 2012** , ce qui constitue la trame politique du Génocide des Arméniens et des Assyro-Chaldéens de 1915, c'est l'application généralisée de ce processus à l'ensemble de la Turquie.
GB

* voir http://www.promacedonia.org/en/dr/dr_30-40_fr.htm mais aussi http://www.imprescriptible.fr/documents/morgenthau/chapitre21.htm

** En conséquence de la guerre des Balkans de 1912-1913, par centaines de milliers, les Musulmans émigrèrent d'Europe vers les terres ottomanes et furent transférées dans la région à majorité chrétienne d'Anatolie, patrie des Arméniens " [The Young Turks' Crime against Humanity : The Armenian Genocide and Ethnic Cleansing in the Ottoman Empire [Le Crime des Jeunes Turcs contre l'Humanité : Le Génocide des Arméniens et le Nettoyage Ethnique dans l'Empire Ottoman]]


DEMANDER L'AIDE DE BERNSTORFF POUR EMPÊCHER LES MASSACRES
Le Département d'État Fait une Demande Informelle à l'Ambassadeur au Nom des Arméniens
Publié le 1 Octobre 1915

     WASHINGTON, 30 septembre. – Le Département d'état a fait une demande informelle auprès du Comte von Bernstorff, l'Ambassadeur allemand, afin qu'il use de son influence au sein du Gouvernement allemand pour intercéder en faveur des Arméniens en Turquie.

     La demande, a-t-on appris aujourd'hui, a été faite il y a quelque temps, et n'a pour l'instant reçu aucune réponse de l'Ambassadeur, en dehors du texte d'une dépêche consulaire allemande, qui déclarait que le sort des Arméniens avait été exagéré. Les officiels pensent ici qu'aucune note diplomatique formelle n'a été remise au ministère des Affaires étrangères à Berlin, et qu'aucune action en ce sens n'est envisagée par le Gouvernement.

     Les notes écrites du  Département d'état ont montré que, tandis que jusqu'à présent, aucune atteinte aux droits américains n'ayant été faite qui pourraient fonder une protestation formelle, les preuves venues de sources non officielles indiquent que des vies américaines et des biens ont été menacés.

     L'Ambassadeur Morgenthau à Constantinople  a adressé aujourd'hui un télégramme au Conseil Américain des Missionnaires à l'Étranger, insistant pour que les contributions au fonds d'aide pour le Secours des Arméniens soient augmentées.

Pendant que les derniers Arméniens sont massacrés, meurent de faim, de soif ou de maladie, on se soucie aux USA de la nuance diplomatique qu'il y a entre une démarche officielle et une demande formelle. Un comportement qui près d'un siècle plus tard, les Clinton, Bush et autres Obama imiteront. À leur manière. Une façon de communiquer, de parler, sans rien faire.
GB

  

FONCTIONNAIRES ARMÉNIENS MASSACRÉS PAR LES TURCS
Publié le 30 Septembre 1915

30 septembre 1915
Confirmation du Caire des atrocités massives que Von Bernstorff sous-estime.

Londres, 29 septembre. Le correspondant du Caire au Times, dans une dépêche datée 27 septembre rapporte :

Confirmation a été reçue hier des rapports des atrocités arméniennes de caractère écœurant, et lançant un appel. Il ne fait aucun doute que, comme de précédentes occasions, ces atrocités aient été ordonnées par Istanbul (Constantinople). Nous avons des raisons de croire que l’attaque envers les Arméniens a été décidée lors du retour d’Enver Pacha après avoir été repoussé du Caucase, quand il se montra furieux contre les Arméniens qui avaient grandement aidé les Russes.

Talaat Bey, évidemment, a saisi cette occasion pour se venger sur les colonies sans défense d’Asie Mineure. La formule adoptée comme couverture fut un ordre d’expulsion des Arméniens et leur déportation dans des centres de l’intérieur. La résistance, ou le retard d’application de cet ordre, devint une excuse pour les meurtres, les viols et autres sauvageries.

Un exemple des circonstances dans lesquelles furent impliqués des Arméniens montre le sort qui attendait ceux qui obéissaient aux ordres. Vartkès Effendi et Zohrab Effendi, deux membres éminents du Parlement ; Aghnuni, l’un des chefs Dashnak ; Haladjian Effendi, ex-ministre des Travaux Publics et de l’Agriculture, furent montés dans une voiture à Urfa en direction de Diarbekir, puis furent assassinés en route, leur escorte relatant que les meurtres étaient l’œuvre de brigands. Vartkès avait pourtant reçu récemment des marques d’amitié de Talaat Bey.

Des réfugiés de Suède actuellement à Port Saïd semblent avoir combattu plus vaillamment.
Lorsque l’ordre de déportation est arrivé, 4800 d’entre eux montèrent dans les collines, d’où ils résistèrent pendant sept semaines, l’une des attaques des Turcs ayant duré continuellement pendant vingt six heures. On pense que des Arméniens d’autres lieux résistent, mais le cas des colons de l’intérieur est presque sans espoir.

La nature et l’étendue des atrocités éclipse tout ce qui a été perpétré en Belgique et sous Abdul Hamid, dont les exploits dans ce domaine prennent maintenant un aspect de modération, comparés à ceux des dirigeants actuels de Turquie. Talaat Bey, lorsqu’il a ordonné les déportations, a dit :
« Après cela, pour cinquante ans, il n’y aura pas de question arménienne. »
 


600 000 ARMÉNIENS DÉPORTÉS EN EXIL
Le Dr. Gabriel dit que plus de 450 000 ont été tués lors des récents massacres
IL DIT QUE L’EXTINCTION MENACE L’ ARMÉNIE
Les puissances neutres interviennent en vain, dit Noubar Pacha, presque tout le peuple est perdu.
Publié le 25 Septembre 1915

25 septembre 1915,

Le Dr. Simbad Gabriel, Président de "l’Armenian General Progressive Association" aux USA, a dit au reporter du Times, hier soir, qu’aucun Américain ne pouvait concevoir les atrocités que les Turcs ont perpétrées envers les Chrétiens Arméniens. Il a dit que selon la correspondance reçue de Noubar Pacha, représentant diplomatique à Paris du Catholicos, le nombre d’Arméniens mis à mort s’élève à plus de 450 000 et 600 000 autres sont chassées de leurs maisons pour errer parmi les villages d’Asie Mineure, tous membres d’une population de 1 500 000 personnes.

" Nous, en Amérique, ne pouvons pas commencer à réaliser l’étendue du règne de la terreur " dit le Dr. Gabriel, car les Arméniens en Turquie ne sont pas autorisés à écrire, ni même à parler entre eux de ce qui est en train de se passer entre les mains des Turcs. " Noubar Pacha écrit qu’il a été informé par le Catholicos et aussi par d' éminents Arméniens de Constantinople qui lui ont fait jurer solennellement de ne pas révéler les actes perpétrés par les Musulmans sur les Arméniens.

" J’ai parlé à une Arménienne il y a deux ou trois jours, continua-t-il, elle était venue de Constantinople le mois dernier avec ses trois enfants, elle me supplia de ne pas révéler son nom, car une vengeance fatale serait exercée sur son mari qui est toujours à Constantinople. "

'Elle me raconta des horreurs qui m’ont glacé le sang. Un matin, vingt de leurs amis ont été délogés par les Turcs et pendus de sans froid, pour la simple raison qu’ils étaient suspects d’être peu sympathiques envers la cause turque. Ce n’est là qu’un exemple de ce que les Arméniens de Turquie qui n’ont pas été exilés craignent tous les matins au réveil.'

Le docteur dit que la cupidité, la religion et la politique sont combinées pour inciter les Turcs à massacrer les Arméniens. Le gouvernement est toujours derrière chaque massacre, et les gens agissent sous les ordres.

Quand le clairon sonne le matin, dit-il, les Turcs se précipitent férocement à la tâche de tuer les Chrétiens et de s’emparer de leurs richesses. Quand cela s’arrête le soir, ou deux ou trois jours plus tard, les fusillades et coups de couteaux s’arrêtent aussi soudainement qu’ils ont commencé. Le peuple obéit aux ordre comme des soldats.

" Les morts sont vraiment les plus heureux " continua-t-il. Les vivants sont forcés de quitter leur maison et de marcher dans un pays étranger parmi une population hostile.

Le Gouvernement leur alloue une ration de nourriture d’une demi-livre de céréales par jour.

Les plus jeunes et plus forts des hommes sont forcés d’entrer à l’armée, mais pas pour combattre. Ils ne sont pas armés, et sont contraints de creuser des tranchées et de transporter les fournitures pour les soldats turcs. Peut-on les blâmer de ne pas soutenir la cause de leur pays ?

Noubar Pacha, en envoyant la correspondance reçue par le Dr. Gabriel, a écrit que les massacres du Sultan Abdul Hamid en 1895, auxquels 300 000 Arméniens avaient succombé, semblaient insignifiants comparés à la boucherie de 1915.

" Ce qui est arrivé au cours de ces derniers mois en Cilicie et en Arménie est incroyable, écrit-il. Ce n’est ni plus ni moins que l’extermination de tout un peuple. "

Une lettre de Constantinople dit que les Arméniens de toutes les villes et tous les villages de Cilicie ont été exilés dans les régions désertiques au sud d’Alep. ‘Ils n’ont pas le droit d’emporter leurs biens avec eux,’ poursuit la lettre, 'et des Musulmans occupent les terres et les maisons laissées vacantes. Les jeunes gens sont requis pour le service militaire et il n’y a que les faibles et les vieillards qui sont déportés.'

‘Les cours martiales fonctionnent partout’ , dit une autre lettre. 'De nombreux Arméniens ont été pendus, et beaucoup d’autres ont été condamnés à dix ou quinze ans de prison. Nombreux sont ceux qui ont été battus à mort, parmi eux les prêtres du village de Kurk. Les églises et les couvents ont été pillés et détruits, et presque tous les évêques ont été arrêtés pour être remis aux cours martiales.'

" Les villages des vilayets de Van et de Bitlis ont été pillés, et la population passée par l’épée.

Nous à Constantinople vivons à présent isolés, comme dans une forteresse, et n’avons aucun moyen de correspondance, ni par courrier, ni par télégramme. A aucun moment, le martyre des Chrétiens n’a atteint de telles proportions, et si les puissances neutres, particulièrement les Etats Unis d’Amérique, n’intercèdent pas, il n’y aura que très peu de survivants du million et demi de Chrétiens arméniens dans l’empire turc. "

Le Dr. Gabriel dit que l’Association Progressiste Arménienne fut d’abord organisée en 1909 après que les ‘Jeunes Turcs’ eurent massacré 30 000 Arméniens de Cilicie. Il dit que l’association a essayé de différentes manières de promouvoir une meilleure compréhension entre les deux races, mais ressent maintenant que de tels efforts sont vains.

Noubar Pacha, qui vit en Egypte, selon le Dr. Gabriel, a été appelé une fois par le Catholicos, avant la fin des guerres des Balkans, pour tenter d’arranger avec les puissances européennes, quelque accord concernant les droits des Arméniens.
 


DES FEMMES ARMÉNIENNES MISES AUX ENCHÈRES
Des Réfugiés décrivent le sort de ceux qui sont entre les mains des Turcs
VON BERNSTORFF A DONNÉ SA REPONSE
La lettre de l'Ambassadeur Allemand : " De Pures Inventions " à l'égard des atrocités, provoque l'Indignation
Publié le 29 Septembre 1915

La déclaration faite par le Comte von Bernstorff, l'Ambassadeur allemand, dans sa lettre à Miran Sevastly de Boston, et dans laquelle il qualifie les rapports concernant les atrocités turques faites contre les Arméniens de " pures inventions " recevra dans peu de jours les réponses d'Américains bien connus qui connaissent la situation réelle en Turquie, et qui, a-t-on dit, produiront des éléments absolument fiables et crédibles et des données authentiques pour prouver, comme l'un d'entre eux l'a décrit hier, que " l'Arménie entière baigne dans le sang des atrocités ".

La lettre de l'ambassadeur allemand à M. Sevasly a été publiée dans le Times d'hier, et les déclarations faites par le Comte von Bernstorff n'ont rien apporté qui puisse atténuer l'indignation des missionnaires et de ceux qui dans d'autres cercles, pensent que la situation arménienne pose un problème vital.

" Pour l'instant, autant que l'ambassadeur allemand soit concerné, tout ce qui m'importe de dire tout de suite ", disait hier le Professeur Samuel T. Dutton, Secrétaire du Comité sur les Atrocités Arméniennes, " c'est qu'à l'évidence, il a été mal informé. Je suis tout à fait sûr qu'il sera très surpris lorsqu'il verra les éléments concrets, qui sont tous entièrement authentifiés, concernant les événements d'Arménie, et qui sont en possession de ce comité. "

Dans une déclaration préliminaire faite dimanche dernier, le comité avait déclaré que si ces atrocités continuait, les Américains ne manqueront pas, étant donnée la grande influence qu'ont l'Allemagne et l'Autriche sur les affaires turques, de tenir les alliés teutoniques " moralement responsables ".

Parlant hier, ayant examiné les données authentifiées en sa possession, le Professeur Dutton a dit ne pas croire que quelque chose se soit passé depuis de nombreux siècles "d'aussi terrible que les actes calculés et systématiques de cette coterie politique en Turquie – les Jeunes Turcs, dirigés par Enver Pacha – et destinée à exterminer une race entière de gens. Tout le plan consiste à faire disparaître les Arméniens ".

" Il y a seulement un jour ou deux, " a ajouté le Professeur Dutton, " une jeune fille qui avait quitté la Turquie le 18 août m'a appelé pour passer me voir. Elle m'a parlé du sort de 100 filles qui suivaient les cours de l'école d'une mission de Turquie. Ces filles, qui étaient bien sûr, arméniennes, ont été divisées en groupes, et celles qui étaient les plus belles selon l'avis des officiers turcs furent mises à la disposition des officiers. Celles considérées comme un peu moins belles ont été abandonnées aux soldats tandis que celles qui étaient moins séduisantes ont été mises en vente au plus offrant ".

Plusieurs Américains qui ont passé en Turquie plusieurs années viennent récemment d'arriver ici. Ils attestent tous de la vérité des rapports qui nous viennent de Turquie et qui concernent le traitement des Arméniens, mais dans beaucoup de cas, ils nous prient de ne pas donner leur nom, par crainte des représailles des Turcs contre leurs parents ou leurs amis restés en Turquie.

Les copies de deux lettres, dans lesquelles leurs auteurs témoignent du sort qui est fait aux Arméniens, ont été remises au New York Times hier par un homme concerné de près par la situation des Arméniens.

Dans l'une d'elle, l'auteur dit entre autres choses :
" Vers la fin du mois de juillet, la situation militaire, sur le front transcaucasien a pris un tour malheureux pour les forces russo-arméniennes. Apparemment encouragés par les revers russes en Pologne, les Turcs ont envoyé des gros renforts, quelques 40 000 hommes de troupe régulière sur le front arménien pour engager une forte offensive.
Avant cela, la circonscription isolée, sur la rive orientale du Lac de Van, avait été progressivement vidée des Turcs et des Kurdes. Dans la dernière semaine de juillet, Tadvan et les versants des monts Nimrud et Kerjur ont été pris par les volontaires arméniens après des violents combats.

" A Urtab, Tukh et dans la vingtaine de villages arméniens situés autour du lac, on a constaté que la population entière avait été massacrée par les Turcs – pas une seule âme qui vive n'a été trouvée dans ces villages, livrés aux hurlements des chiens, tandis que de nombreux cadavres étaient rejetés par le lac et les rivières.

" Ces cadavres, qui se sont tous révélés être ceux de personnes de sexe masculin, étaient terriblement mutilés; par contre, rien ne restait de ce qui pourrait rappeler la présence de femmes et d'enfants. Dans la soirée du 20 juillet, les Arméniens se sont emparés des hauteurs de Kerkur. Lorsqu'ils sont parvenus au sommet, la ville de Bitlis leur est apparue en flammes, à leur grande peine, et ils ont compris que le pire s'était produit. Quelques femmes refugiées, qui étaient parvenues à échapper aux gardes Turcs, ont depuis relaté l'histoire de massacres monstrueux dans la ville et la déportation systématique des femmes et des enfants.

Adressée à un Ministre bien connu de l'Eglise arménienne, arrivée de Turquie par quelque voie mystérieuse tenue secrète, une lettre qui est qualifiée de " fiable sans aucun doute ", explique :

" ' Une Arménie sans Arméniens ' – tel est le plan du Gouvernement ottoman, qui a déjà commencé l'installation de familles musulmanes dans les maisons et les biens des Arméniens. Il est inutile de préciser que les déportés ne sont pas autorisés par le Gouvernement, de ne prendre aucun de leurs biens avec eux, et comme il n'y a de toutes façons aucun moyen de transport, réservés à l'usage militaire, ils sont contraints de couvrir à pied le trajet de deux ou trois mois qui les séparait des déserts destinée à devenir leur sépulture ".


CONFIRMATION DES RÉCITS D'HORREURS ARMÉNIENNES
Selon le Comité sur les Atrocités, 500 000 Victimes les ont d'ores et déjà subies
PRESSIONS POUR UNE PROTESTATION OFFICIELLE
Suggestion que l'Allemagne et l'Autriche soient Tenues Responsables – Les Américains sont Indignés.
Publié le 27 Septembre 1915

Le Professeur Samuel Train Dutton, secrétaire du Comité sur les Atrocités Arméniennes, a rendu public hier une déclaration préliminaire du Comité soulignant le résultat de son enquête sur la terrible situation des Arméniens. Le Comité dit que les rapports concernant le massacre, la torture, et d'autres mauvais traitements d'Arméniens de tous âges sont abondamment confirmés par son enquête.

Les autres membres du Comité, aux côtés du Professeur Dutton, sont Cleveland H. Dodge, Arthur Curtiss James, Rabbi Stephen S. Wise, John R. Mott, Franck Mason North, James L. Barton, William Slonne, D. Stuart Dodge, et d'autres.

La déclaration faite hier par le Comité est la suivante:
" Un sous comité a fait une enquête approfondie sur les indices et vient de rendre son rapport au Comité confirmant en tous points la déclaration faite récemment par le Vicomte Bryce sur l'arrestation, la torture, l'assassinat, le massacre et l'exil dans les déserts du nord de l'Arabie d'Arméniens innocents et sans défense, y compris d'hommes femmes et enfants à bout de forces, et leur conversion forcée à l'Islam.

" Des témoignages écrits de témoins oculaires dont les noms sont connus au sein du Comité, mais qui ne peuvent évidemment pas être rendus publics, ont été examinés avec le plus grand soin. Ce témoignage couvre des centaines de pages; le caractère et la position de ses auteurs, et l'esprit positif qui se dégage de leur énonciation emporte une conviction absolue.
" Les témoignages étudiés sont ceux d'Arméniens, Grecs, Bulgares, Italiens, Allemands, Turcs, Britanniques, Américains, hommes d'affaires, voyageurs, et employés de fonctions et de rangs très divers. Pas une seule attestation ne peut être mise en doute quand aux faits auxquels elles se rapportent. Elles sont toutes en accord dans les déclarations recueillies depuis Smyrne à l'ouest jusqu'à la Perse, et depuis la Mer Noire jusqu'à l'Arabie: une propagande pour l'extermination des non-musulmans est développée en ce moment, répandue par le Gouvernement turc, surpassant de très loin en férocité et dépassant en destruction tout ce qu'Abdul Hamid avait fait dans sa longue carrière de massacre et d'extermination.

" Les déclarations examinées, dont beaucoup sont en possession du Comité, couvrent des centaines de villes et cités dans lesquelles en beaucoup de circonstances, tous les Arméniens ont été tués jusqu'au dernier, souvent après d'horribles tortures, ou envoyés dans le désert pour y mourir de faim. Et cela aussi, avec une cruauté diabolique. L'apparente déportation d'hommes, de femmes et d'enfants vers la Mésopotamie n'est qu'une marche forcée pour ces réfugiés mourant de faim, démunis, souvent dénudés, vers la montagne pour y être outragés et suppliciés, quelquefois par leurs gardes, quelquefois par les Kurdes qui coopèrent volontiers au travail de destruction.

" Figurent parmi ces réfugiés et ces victimes, des élèves et diplômés des écoles et universités américaines, des enseignants et des professionnels titulaires de diplômes d'universités européennes, des hommes et des femmes qui représentaient les cerveaux et l'initiative d'entreprendre du pays, pour une génération ou plus.

" Le plan de ce processus, qui est le même où que l'on se trouve dans le pays, semble viser à la complète élimination de toutes les races non-musulmanes de la Turquie asiatique, et déjà, ce plan est en bonne voie d'accomplissement pour ce qui concerne les Arméniens.

" En plusieurs lieux, les biens américains ont été saisis, les Américains recherchés, emprisonnés et expulsés du pays, leurs lettres et télégrammes, mêmes issus des bureaux consulaires des Etats-Unis, interceptés et leurs vies menacées. Cela n'a cependant qu'une importance triviale, comparé au travail de destruction des Arméniens en cours.

" Des indications semblent prouver que probablement 500 000 Arméniens ont déjà été tués ou conduits de force dans le désert, où seule la mort les attend, à moins d'être rapidement secourus. Et tout cela s'est passé depuis mars, et se situe à présent au plus haut de cette épouvantable furie.

" Le Comité a bon espoir que si la presse du pays pouvait, avec insistance et autorité, exprimer sa protestation et appeler le Gouvernement turc à arrêter ce crime contre l'humanité et permettre le retour dans leurs maisons des exilés qui pourraient être encore en vie, il serait impensable que cela puisse n'avoir aucun effet.

" Etant donnée la grande influence que l'Allemagne et l'Autriche exercent sur leur allié, le peuple américain ne peut manquer de les tenir moralement responsables si ces atrocités devaient se poursuivre.




C'EST LA FAUTE DES ARMÉNIENS EUX-MEMES, DIT A PRÉSENT BERNSTORFF
Ils Ont Provoqué Les Représailles sur Eux-Mêmes en Essayant d'Organiser la Rébellion contre la Turquie
Publié le 27 Septembre 1915

Spécial au New York Times

WASHINGTON, 28 septembre. – La lettre du comte von Bernstorff à Miran Savasly de Boston, dans laquelle il disait que, "  selon les récents rapports officiels et authentiques reçus par le Gouvernement allemand et transmis par cette ambassade au Gouvernement des Etats-Unis, les atrocités alléguées commises dans l'Empire ottoman se révèlent être une pure invention ", laisse perplexe le Département d'Etat.

L'Ambassadeur allemand a adressé aujourd'hui une communication au département disant que les rapports faisant état d'atrocités turques contre les Arméniens étaient " très exagérées " et défendant en partie l'action des Turcs, comme ayant été provoquée.
(*)

Tandis que dans la lettre de l'Ambassadeur il n'est pas nié que des peines extrêmes aient été imposées aux Arméniens par les Turcs, on y affirme que s'efforcer de mater la rébellion et la révolte et les actes de trahison fait de la " Politique arménienne " une mesure nécessaire en temps de guerre.

Le Département d'Etat a reçu aujourd'hui du consul américain de Trébizonde, un rapport montrant que la " population arménienne " de cette grande province arménienne a été expulsée. Les propriétés de ces Arméniens expulsés ont été saisies par les fonctionnaires du Gouvernement turc, qui établissent des réquisitions contre les propriétaires expulsés. Le Consul rapporte que de nombreux négociants arméniens qui avaient résidé dans la province étaient en rapports d'affaires avec les Européens. Peu d'Américains en seront affectés, pensait-il, mais si quelque Américain a des créances envers un Arménien de la province de Trébizonde, il peur être payé en envoyant au Consul une déclaration sous serment endossée par un consul turc.

Dans la mesure où la Turquie a fait savoir qu'aucune ingérence étrangère dans la politique arménienne ne sera tolérée, les Etats-Unis éviteront probablement d'émettre toute note de protestation formelle vis-à-vis de ce genre d'événement, à moins que les Etats-Unis n'y soient impliqués.

(*)BOSTON, 27 septembre. – L'Ambassadeur allemand, le comte von Bernstorff, dans une lettre rendue publique ici hier, a déclaré que les rapports concernant les atrocités alléguées dans l'Empire ottoman étaient des " Pures inventions ". La lettre de l'Ambassadeur, datée du 23 septembre et adressée à Miran Sevasly citoyen de cette ville, Président du Comité Exécutif de l'Union de Défense Nationale d'Amérique, qui avait demandé une déclaration précise, était libellée comme il suit :

En réponse à votre lettre, je vous prie de noter que selon rapports officiels et authentiques reçus par le Gouvernement allemand et transmis par cette ambassade au Gouvernement des Etats-Unis, les atrocités alléguées commises dans l'Empire ottoman apparaissent comme de pures inventions.
Sans mettre en doute la bonne foi du Catholicos, je me permets toutefois d'attirer votre attention sur le fait que sa Sainteté écrit sous la pression de la censure de la Russie.

Très réellement Vôtre. J. Bernstorff.

La référence au Catholicos, Primat de l'Eglise arménienne, concernait un rapport récemment publié, dans lequel il déclarait que l'extermination de la race arménienne sur le territoire de la Turquie était entreprise sous direction officielle par un système organisé de pillage, déportations, exécutions systématiques et massacres.
 


LE DÉPEUPLEMENT DE L'ARMÉNIE
The Independent - 19150927

27 Septembre 1915
Les bouleversantes nouvelles des massacres, de la torture et de la déportation des Chrétiens Arméniens sont autant d’appels à la sympathie et à l’aide américaine. D’après des sources nombreuses et fiables en Turquie, il paraît évident qu’il ne s’agit pas de troubles locaux ou d’oppression insignifiante, mais d’un effort systématique pour déraciner la race arménienne. Des milliers de familles ont été arrachées à leurs maisons pour mourir sur les routes. Les villes et les villages ont été privés de leurs habitants. Beaucoup sont torturés pour les forcer à renoncer à leur foi chrétienne. Les femmes sont enfermées dans les harems et les enfants sont vendus comme esclaves.

La nécessité militaire ne saurait servir à excuser ces outrages dans la mesure où les régions dévastées sont dans certains cas hors de portée d’une possible invasion russe et dans la mesure où les Arméniens n’ont montré aucune disposition à la révolte à part là où, comme à Van, ils ont été contraints à l’auto-défense. Il semble que les Turcs, perdant l’espoir de maintenir leur suprématie, aient résolu de détruire les Arméniens de façon à anticiper l’établissement d’une Arménie autonome au cas où les alliés conquerraient la Turquie.

Mais il s’agit d’une chose à laquelle nous portons un intérêt sincère car de l’argent américain et des vies américaines ont été dépensés pour le soutien des peuples opprimés de l’Empire Ottoman. Le bureau Américain des délégués des missions étrangères travaille depuis près d’un siècle et a investi environ vingt millions de dollars. Il reste dans l’Empire Ottoman aujourd’hui dix collèges américains ; le Robert College de Constantinople, Le Collège de Constantinople pour filles, Le Collège Protestant Syrien à Beirut, Le Collège international à Smyrne, l’Anatolia College à Marsovan, l’Euphrate College à Harpout, Le Collège d’Aintab, le Central Turkey College à Marash, le Collège Saint Paul à Tarse, et le Teachers College à Sivas. Dans ces institutions et dans d’autres écoles il y a plus de quarante mille élèves, dont une large part est arménienne.

Des milliers d’Arméniens ont fui la tyrannie turque et ont trouvé refuge en Amérique où ils sont devenus de bons citoyens des Etats-Unis. La détresse présente et le danger imminent encouru par les Arméniens en Asie Mineure provoqueront un vrai intérêt dans tous les Etats-Unis.





PAS DE SECOURS POUR LES ARMÉNIENS
Seul notre Gouvernement Peut lui Venir en Aide , dit Mgr. Dolci.
Publié le 27 Septembre 1915

ROME, 26 septembre (via Paris) – Le Délégué Apostolique à Constantinople, Mgr Dolci, a envoyé au Vatican un rapport décrivant le massacre des Arméniens. Il dit que dans la situationn présente, les puisances européennes d'Allemagne et d'Autriche ne peuvent intervenir dans la mesure où elles sont alliées de la Turquie, tandis que les autres ne peuvent le faire parce qu'elles sont en guerre avec la Turquie.
La seule assistance possible, ajoute Mgr Dolci, ne peut venir que de l'Amérique, dont l'Ambassadeur fait beaucoup d' efforts pour soulager et protégéer les Arméniens persécutés; mais " les besoins sont plus grands que les moyens pour parvenir à imposer les principes humanitaires qu'il représente ".


UN APPEL DU CONSEIL DES MISSIONS ETRANGÈRES
D'AMÉRIQUE
Il sollicitera des Fonds auprès des Américains pour venir en Aide Aux Arméniens Victimes des Turcs

Publié le 25 septembre 1915

WASHINGTON, 24 septembre – Un appel au peuple américain pour des dons au profit des Arméniens qui en Turquie ont été bannis dans des villes isolées à cause de leur prétendue hostilité au Gouvernement turc, sera émis sous peu depuis New-York par les Membres du Conseil Américain des Missions Étrangères. L'appel fait suite à un rapport de l'Ambassadeur Morgenthau adressé au Conseil.

Des représentants du Conseil ont tenu une conférence avec des officiels du Département d'État au sujet du projet d'assistance aux Arméniens. Le Gouvernement américain, cependant, ne prendra officiellement aucune part au projet, dans la mesure où la Turquie a indiqué qu'elle ne tolérera, sur sa politique, aucune interférence d'une puissance étrangère.

La protestation du Gouvernement américain, par son Ambassadeur Morgenthau, auprès de la Turquie, sur les mauvais traitements qui selon les rapports sont subis par les Arméniens, n'a été suivie que de concessions mineures, mais ce Gouvernement n'a pris aucune autre mesure. Les officiels turcs ont prétendu que les mesures à l'encontre des Arméniens étaient nécessaires en tant que mesures de guerre pour prévenir des actes de rébellion et des complots contre le Gouvernement. Les officiels du Département d'État ont dit qu'aucune autre action n'était envisagée pour l'instant compte tenu de la réponse turque à la protestation américaine. La réponse n'a pas été rendue publique pour l'instant.

L'Ambassadeur Morgenthau a reçu l'instruction aujourd'hui d'enquêter sur les rumeurs selon lesquelles des missionnaires américains avaient été tués dans des récentes opérations militaires turques contre les Arméniens.

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L'AIDE D'UNE MISSIONNAIRE ALLEMANDE
Elle Soigne les Exilés Arméniens et Décrit Leurs Souffrances
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Le Sonnenaufgang, (Lever du Soleil) un journal allemand de missionnaire, organe du Deutscher Hülfsbund für christliches Lienerswerk im Orient, dans son numéro du 14 juillet, a publié une lettre d'une femme de nationalité allemande – apparemment une missionnaire – disant avoir rencontré en Asie Mineure de nombreux convois d'Arméniens déportés. Voici des extraits de la lettre :
" Pour ces montagnards, le climat du désert est terrible. Je suis arrivée hier dans un grand camp arménien fait de tentes en peaux de chèvre du type kurde. Pour leur plus grande part (les exilés) étaient étendus sous le soleil brûlant sur le sable tout aussi brûlant. Les Turcs leur avait accordé une journée de repos étant donné le grand nombre de cas de maladie. On pouvait voir à leurs vêtements que ces infortunés personnes avaient été des gens riches. Ils étaient de Geben, un autre village près de Zeitoun, et avaient été chassés en même temps que leur prêtre. Cinq ou six mouraient chaque jour, enfants ou adultes. Ils venaient tout juste d'enterrer une jeune femme, mère d'une fillette âgée de neuf ans, qu'ils m'ont suppliée d'emmener avec moi.
" Le jour d'après, j'ai visité un autre camp d'exilés de Zeitoun, et j'ai entendu les mêmes histoires d'indicibles souffrances. ' Pourquoi ne nous tuent-ils pas tout de suite? Nous n'avons pas d'eau depuis des jours; nos enfants pleurent parce qu'ils ont soif. A la nuit, les Arabes sont venus, ils ont volé nos couches et nos vêtements, se sont emparés de nos jeunes filles et outragé nos femmes. Si nous ne pouvons marcher, les soldats nous frappent. Quelques femmes se sont volontairement noyées, avec leurs enfants, pour se soustraire aux outrages '. "
Écrivant depuis Van, la même voyageuse raconte :
" Dans les villages avoisinants, les églises et les écoles ont été détruites, des maisons également, et absolument tout a été pillé. "
Et depuis Marash :
" Nous venons tout juste de recevoir quinze bébés. Trois sont déjà morts. Ils étaient effroyablement maigres et malades lorsque nous les avons trouvés. Ah, si seulement nous pouvions écrire tout ce que nous voyons ! "


 L'ARMÉNIE MENACÉE D'EXTINCTION
Le Dr Gabriel Dit que Plus de 450 000 ont été tués lors de Massacres Récents
600 000 SONT FORCÉS À L'EXIL
Sans l'Intervention des Puissances Neutres, Dit Nubar Pacha, la Presque Totalité de la Population est Condamnée

Publié le 25 septembre 1915

Le Dr Simbad Gabriel, président de L'Armenian General Progressive Association (Association Progressiste Arménienne) a dit hier soir à un journaliste du TIMES qu'aucun Américain ne pourrait concevoir les atrocités que les Turcs font subir aux Arméniens chrétiens. Il a dit être informé par une correspondance reçue de Nubar Pacha, le représentant diplomatique à Paris du Catholicos, le chef de l'Eglise arménienne, que le nombre d'Arméniens mis à mort dépasse 450 000, tandis que 600 000 autres ont été forcé de quitter leur maison pour errer à travers les villages d'Asie Mineure, tout cela sur une population de 1 500 000.

" Nous, en Amérique, ne pouvons réaliser même le commencement d'un tel règne de la terreur ", a dit le Dr Gabriel, " parce que les Arméniens de Turquie ne sont pas autorisés à écrire, ni même de converser entre eux sur ce que leur font subir les Turcs. Nubar Pacha écrit qu'il a été informé par le Catholicos et également par des personnalités arméniennes importantes de Constantinople, qui lui ont fait jurer de la façon la plus solennelle de ne pas révéler leur nom, de quelques uns des actes les plus horribles que les Musulmans aient fait subir aux Arméniens.

" J'étais en conversation avec une femme arménienne il y a deux ou trois jours, " a-t-il poursuivi, " arrivée le mois passé à Constantinople, avec ses trois enfants. M'implorant de ne pas donner son nom, par crainte de vengeance contre son époux qui se trouve encore à Constantinople, elle m'a parlé d'horreurs qui m'ont glacé le sang. Un matin, vingt de ses amis ont été tirés de chez eux par les Turcs et pendus de sang froid, simplement sur des soupçons d'hostilité envers la cause turque. Cela n'est qu'un exemple de la " peur " qui saisit, dès leur réveil, les Arméniens de Turquie qui n'ont pas été exilés.

Le docteur a dit que c'était une combinaison d'avidité, de religion et de politique qui poussait les Turcs à massacrer les Arméniens. Le Gouvernement était toujours derrière chaque massacre, et les gens agissaient sous les ordres.

" Lorsque le clairon retentit le matin, " dit-il, " les Turcs se remettent férocement à la tâche, tuant les chrétiens et pillant leurs biens. Lorsque cela s'arrête le soir, ou après deux ou trois jours, les tirs d'armes à feu et les coups de poignards cessent aussi soudainement qu'ils ont commencé. Le peuple obéit à leurs ordres comme des soldats.

" Les plus heureux sont réellement ceux qui sont morts, " poursuivit-il. " Les vivants sont forcés de partir de leur maison et à errer dans un pays étranger, entourés d'une population hostile. La ration de nourriture que leur accorde le gouvernement est uniquement une demi livre de céréale par jour. Les hommes les plus jeunes et les plus robustes sont enrôlés de force dans l'armée, mais pas pour combattre. Ils ne sont pas armés; ils sont affectés au creusement des tranchées et au transport de matériel pour les soldats turcs. Peut-on les blâmer de ne pas être favorables à la cause de leur pays ? "

Nubar Pacha, par l'envoi de sa correspondance qu'il a reçue du Dr Gabriel, a écrit que les massacres du sultan Abdul Hamid en 1895, dans lesquels 300 000 Arméniens sont tombés , semblent insignifiants en comparaison avec la boucherie de 1915.

" Ce qui s'est passé au cours des quelques derniers mois en Cilicie et en Arménie est incroyable, " écrit-il.  " Ce n'est ni plus ni moins que l'annihilation d'un peuple entier ".

Une lettre de Constantinople dit que des Arméniens de toutes les villes et villages de Cilicie ont été exilés dans les déserts des régions au sud d'Alep. Ils n'ont pas été autorisés à prendre avec eux aucune de leurs affaires, poursuit la lettre, et les Musulmans occupent les terres et les maisons laissées vacantes. Les jeunes hommes sont retenus pour le service militaire, et ce ne sont que les faibles et les personnes âgées qui sont déportés.

" Les cours martiales fonctionnent partout, " dit une autre lettre. " De nombreux Arméniens ont été pendus, et beaucoup d'autres condamnés à dix ou quinze ans de prison. Beaucoup ont été battus à mort, les prêtres du village de Kurk en font partie. Les églises et les couvents ont été pillés et détruits, et presque tous les évêques ont été arrêtés pour passer en cour martiale.

" Les villages des vilayets de Van et de Bitlis ont été pillés et la population passée à l'épée. Nous autres, à Constantinople, vivons à présent isolés, comme en forteresse, et avons aucun moyen pour correspondre, que ce soit par courrier ou par télégramme. Le martyre chrétien n'a jamais atteint des proportions aussi colossales, et si les puissances neutres, spécialement les États-Unis d'Amérique, n'intercèdent pas, il ne restera que très peu du million et demi d'Arméniens dans l'Empire turc ".

Le Dr Gabriel dit que l'Association Arménienne pour le Progrès a été créée en 1909 après que les Jeunes turcs aient massacré 30 000 des Arméniens de Cilicie. Il dit que l'association a essayé de diverses façons de promouvoir une meilleure entente entre les deux races, mais il pense aujourd'hui que de tels efforts ne servent à rien. Selon le Dr Gabriel, Nubar Pacha, qui vit en Égypte, a déjà été appelé une fois par le Catholicos, à la fin de la guerre des Balkans, pour essayer de trouver avec les puissances européennes quelques engagements concernant le droit des Arméniens.

Des Arméniens tirés de chez eux et pendus sur des soupçons d'hostilité envers la cause de la Turquie, le gouvernement toujours derrière les massacres, les clairons donnant le signal des assassinats, les conscrits arméniens désarmés, les villages arméniens autour de Van et de Bitlis pillés et les Arméniens pssés au fil de l'épée. On parle bien ici de " put to death ", c'est- à- dire mis à mort, exécutés; on ne parle pas de morts de faim, d'épuisement, de maladie… Quatre cent cinquante mille personnes… Encore sont-ils plus heureux que les centaines de milliers d'autres, éxilés dans de terribles conditions. GB


500 000 ARMÉNIENS AURAIENT PÉRI
Washington a Demandé d'Arrêter le Massacre des Chrétiens par les Turcs et les Kurdes
Spécial au New York Times
Publié le 24 septembre 1915

WASHINGTON, 23 septembre. – Charles R. Crane, de Chicago, un directeur de Roberts College, Constantinople, et James L. Burton, de Boston, Secrétaire pour l'Étranger du Bureau Américain des Membres de Missions à l'Étranger, a rendu visite au Département d'État aujourd'hui et discuté avec le Secrétaire d'État adjoint Polk et d'autres officiels sur le massacre des Arméniens par les Turcs et les Kurdes en Asie Mineure. Ils assisteront à la réunion d'une commission générale, prévue pour être tenue à New York sous quelques jours, afin de dresser un plan d'appel au peuple américain pour verser des fonds et apporter de l'aide à autant d'infortunés Arméniens que possible.

On a appris, à la suite des conférences tenues ici ce jour, que des doléances générales ont été faites de temps à autres au Gouvernement ottoman par l'ambassadeur Morgenthau pour traiter les Arméniens de façon humaine. En dépit de ces doléances, le massacre des Arméniens s'est poursuivi.

Les dossiers du Département d'État sont pleins de rapports détaillés issus d'officiers consulaires américains, qui donnent des récits atroces sur le traitement des Chrétiens arméniens par les Turcs et les Kurdes. Ces rapports n'ont pas été rendus publics. Ils indiquent que le Turc a entrepris une guerre d'extermination des Arméniens, spécialement ceux qui appartiennent à l'Eglise Grégorienne à laquelle appartiennent près de 90 pourcent des Arméniens. Le Gouvernement turc a ordonné à l'origine la déportation de tous les Arméniens, mais il y a quelques temps, après les doléances faites par l'Ambassadeur Morgenthau, le Gouvernement ottoman a donné des assurances que l'ordre serait modifié en telle sorte qu'il ne concerne pas les Arméniens catholiques et protestants.

Des rapports parvenus à Washington indiquent qu'autour de 500 000 Arméniens ont été massacrés ou ont perdu la vie en conséquence de l'ordre de déportation turc et la guerre d'extermination qui y fait suite. Les autorités turques ont fait sortir les Arméniens grégoriens hors de leur maison, leur ont donné l'ordre de se diriger vers des villes éloignées en direction de Bagdad, villes qui ne pourraient être atteintes qu'en franchissant de vastes étendues de désert. Au cours de leur exode à travers les déserts, ces Arméniens ont été attaqués par des Kurdes et massacrés, mais quelques unes des femmes et des filles arméniennes, en nombres considérables, ont été emportées en captivité par les Kurdes. Les rapports ont été envoyés au Département d'État par ses agents en Asie Mineure confirment entièrement ces déclarations faites dans l'appel du vicomte Bryce, ancien Ambassadeur britannique aux États-Unis, pour essayer d'arrêter le massacre des Arméniens. Le vicomte Bryce a déclaré que les horreurs que les Arméniens ont subies n'ont aucun précédent dans les temps modernes.

Le département d'état recevant de très nombreux rapports détaillés, de rapports évaluant au nombre de victimes en centaines de milliers, et qui font état d'une guerre d'extermination…
Il ne s'agit pas ici de témoignages, mais bien de rapports d'officiers consulaires, membres d'un pays neutre, qui confirment en outre les déclarations de Lord Bryce dans le Livre Bleu. GB

 



SAUVETAGE DE 5 000 ARMÉNIENS
Des Navires de Guerre Français les ont transportés de Syrie en Égypte.
Publié le 23 septembre 1915

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PARIS, 22 septembre. – Le sauvetage par des navires de guerre français de milliers d'Arméniens poursuivis par les Turcs est relaté dans une déclaration rendue publique hier soir par le Ministère de la Marine.
" Poursuivis par les Turcs ", dit la déclaration, " 5 000 Arméniens, dont 3 000 sont des femmes, des enfants et des vieillards, s'étaient réfugiés dans les montagnes du Djebel Moussa à la fin du mois de juillet. Ils ont réussi à contenir leurs assaillants jusqu'au début du mois de septembre.
" Les munitions et les provisions s'étaient alors épuisées, et ils auraient inévitablement succombé s'ils n'étaient parvenus à informer de leur grave situation un croiseur français. Immédiatement, des croiseurs de l'escadre du blocus de la côte syrienne sont allés à leur aide et les ont tous emmenés à Port Saïd, où ils ont été installés dans un camp provisoire. "

Épilogue avant la lettre du roman de Franz Werfel, les Quarante Jours du Moussa Dagh GB


BRYCE NOUS DEMANDE D'AIDER L'ARMÉNIE
Les Chrétiens de Trébizonde, au nombre de 10 000, auraient tous été noyés

DES FEMMES ENLEVÉES POUR LES HAREMS
La seule Puissance qui Pourrait Arrêter les Massacres est l'Allemagne, et nous devons la Persuader qu'elle doit Agir
Publié le 21 Septembre 1915

LONDRES, 20 septembre.- Le Vicomte Bryce, précédemment Ambassadeur aux États-Unis, a communiqué à Associated Press le texte d'une demande à l'Amérique pour qu'elle essaie d'arrêter le massacre des Arméniens. Il dit :
" Le monde civilisé, l'Amérique en particulier, doit être informé des horreurs qui se sont déroulées en Turquie d'Asie au cours des quelques mois qui viennent de s'écouler, parce que si quelque chose peut arrêter la main destructrice du Gouvernement turc, ce ne peut être que l'expression de l'opinion de nations neutres, et d'abord celle de l'humaine Amérique.
" Peu de temps après que la guerre ait éclaté entre la Turquie et les Alliés, le Gouvernement turc a conçu, puis mis en œuvre, avec cruauté et acharnement, un plan pour extirper la Chrétienté en tuant tous les Chrétiens de la race arménienne. Les récits de diverses sources s'accordent pour expliquer que sur la totalité des territoires de l'Asie Mineure du Nord et de l'Est et de l'Arménie, la population chrétienne est délibérément exterminée, les hommes en âge d'être mobilisés étant abattus et les femmes les plus jeunes livrées aux harems turcs, forcées de se convertir à l'Islam, et gardées, avec les enfants, virtuellement en esclavage. Le reste des habitants, les vieux, hommes et femmes, et les enfants, ont été dirigés de force par des soldats turcs vers les régions insalubres d'Asie Mineure, pour certains dans les déserts qui se trouvent entre la Syrie et l'Euphrate. Beaucoup meurent ou sont tués en route, ou périront tôt ou tard.
" A Trébizonde, où le nombre d'Arméniens s'élevait à plus de 10 000, des ordres d'arrêter tous les Arméniens sont venus de Constantinople. Des troupes les ont pourchassés, les ont dirigés vers le bord de mer, les ont embarqués puis jetés par-dessus bord et tous noyés, hommes, femmes et enfants. Ces faits ont été vus et rapportés par le Consul italien.
" Dans le pays, quelques uns n'ont pu en réchapper qu'en se convertissant à l'Islam, et un quart de million se sont enfuis derrière la frontière russe, mais jusqu'à un demi million ont été massacrés ou déportés, et ceux qui ont été déportés meurent rapidement, du fait des mauvais traitements subis, de maladie, ou de faim. Les routes et les flancs des coteaux sont parsemés de corps de paysans innocents.
" Nous pouvons tous essayer de venir en aide à ceux qui sont réfugiés en territoire russe, mais qui est en mesure de mettre fin aux massacres? Pas les puissance alliées en guerre avec la Turquie. Une seule puissance peut agir dans ce but. C'est l'Allemagne. Se pourrait-il que l'expression de l'opinion publique américaine, voix de la conscience des nations neutres, ne parvienne pas à obtenir de l'Allemagne qu'elle infléchisse le Gouvernement turc?

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LES BELGES AUX TRAVAUX FORCÉS
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Les Autorités Allemandes Puniront ceux qui Refusent -

Le travail obligatoire, dans la Belgique sous administration allemande, est annoncé dans la dépêche qui suit du semi-officiel Bureau de Télégraphe Wolff de Bruxelles publié dans le Vorwürts du 26 août:
" Le Gouverneur Général a signé un ordre par lequel est passible de peines toute personne qui refuse, sans raison suffisante, d'entreprendre ou de poursuivre des travaux d'intérêt général dans le domaine professionnel qui est le sien, lorsqu'il est demandé par les autorités allemandes.
"  De la même façon, les personnes qui par coercition, par les menaces ou la persuasion, ou tout autre moyen, pousse d'autres personnes travaillant pour les autorités allemandes ou les aide à refuser de travailler.
" En liaison avec le règlement, des mesures sont également ordonnées concernant l'aversion au travail, et il est ordonné que quiconque refuse d'accepter du travail, tandis qu'il reçoit le soutien public ou privé, ou s'il devient indigent et nécessiteux à cause de son refus de travailler, sera également passible de peines. Des raisons suffisantes en cas de refus ne seront considérées comme telles que si elles sont fondées dans le droit international.

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UN NOUVEAU BÂTIMENT DE GUERRE PRENDRA BIENTÔT LA MER
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La Grande Bretagne est sur le Point d'envoyer un Cuirassé vers les Dardanelles

Des responsables de la Cunarder Orduna ont informé hier que le super cuirassé Barham, un vaisseau jumeau du Queen Elisabeth et du Warspite, dont la quille a été mise en place en 1913, sera bientôt en service et appareillera pour les Dardanelles. Le Barham est en cours d'achèvement à Liverpool, et sera prêt, on l'espère, sous six semaines.
Parlant des activités de bateaux bien connus en temps de guerre, les responsables d'Orduna ont dit que le Cunarder Aquitania a été peint en blanc, converti en navire-hôpital, et vient juste de quitter Liverpool pour les Dardanelles pour ramener les soldats blessés chez eux, et le paquebot de grande ligne Olympic, de la White Star, qui est prêt à Belfast depuis octobre dernier, a également été converti en navire-hôpital à Southampton pour servir avec l'Aquitania. Les paquebots peuvent transporter chacun 7 000 soldats et effectuer la traversée en cinq jours. Le Cunarder Mauretania transporte des troupes aux Dardanelles.

Membre de la British Academy, ancien Ambassadeur de Grande Bretagne aux États-Unis, et ayant séjourné quelques temps en Arménie des années auparavant, le Vicomte James Bryce a été désigné par le Premier Ministre Britannique Herbert Henry Asquith pour enquêter sur le Génocide. Il réunit des témoignages et rendit compte dans le Livre Bleu de la volonté d'extermination des dirigeants turcs.

Notons le témoignage visuel du Consul italien à Trébizonde sur le massacre particulièrement horrible qui s'y est déroulé.

Il avait été chargé préalablement d'enquêter sur les atrocités allemandes en Belgique lors de la Première Guerre Mondiale; c'est probablement de ce fait qu'on lit dans le New York Times du 21 septembre cet article sur l'administration militaire allemande en Belgique particulièrement tatillonne.

Enfin, les indications contenues dans l'article du même jour sur la conversion du White Star en navire hôpital, illustre le terrible carnage des Dardanelles: une capacité de transport pour rapatrier 7 000 blessés par rotations de dix jours, soit en moyenne 700 par jours, était insuffisante. GB


LE CONSEIL DE MISSION RELATE LES HORREURS TURQUES
Des Correspondants Confirment les Rapports sur l'Annihilation des Arméniens
DISPERSÉS à TRAVERS L'EMPIRE
Les Villes Chrétiennes Cessent d'Exister comme telles et les Habitants Poussés Loin de leur Foyer
Publié le 17 septembre 1915

Sous la légende " Dans la Turquie la plus Sombre ", le Conseil Américain des Administrateurs de Missions à l'Étranger dit avoir en main " des preuves abondantes et indéniables  " confortant les articles de journaux concernant la persécution des sujets chrétiens de l'Empire ottoman.
" Ces preuves, " dit le conseil, " ne viennent pas de lettres de missionnaires; ils écrivent brièvement et sur leurs propres affaires; ils évitent de parler de questions de politique. Ils s'efforcent de s'en tenir à une attitude de neutralité dans ces temps de conflit.
" Mais d'autres sources, par des voies détournées mais absolument fiables, arrivent au Conseil des pièces entières de comptes-rendus d'événements en beaucoup d'endroits de la Turquie qui sont effroyables au-delà presque de toute crédibilité. Ils révèlent une action systématique, autorisée et terrible de la part des gouvernants turcs pour anéantir les Arméniens. "
" Apparemment, la révolte des révolutionnaires arméniens à Van, qui a ouvert la voie à l'occupation russe de cette ville sans résistance, a été prise par les Turcs comme prétexte pour une attaque générale contre les Arméniens partout. Dans certains cas par le massacre, plus souvent par la torture et l'exil, ils sont éliminés du territoire; ils sont mis là où il n'y a plus de raison de s'en soucier.
" Tout au long du trajet des armées russes sur la frontière perse, depuis Van jusqu'à Mouch et Bitlis, dans les villes de la Turquie de l'est, telles Diyarbekir, Kharpout et Mardin, et spécialement en Turquie Centrale et la région s'étendant vers le sud, cette persécution cruelle, implacable, se déroule depuis un certain temps.

Rapport d'un Résident Britannique
" Un résident britannique de Constantinople qui avait quitté cette ville et se trouvant temporairement dans un port de la Méditerranée hors d'atteinte des censeurs, écrit ce qui suit:

Vous avez probablement appris quelque chose sur le triste sort des Arméniens par les journaux, mais probablement rien n'en ressort qui puisse en quoi que ce soit décrire le sort désespéré de ces pauvres gens.
Vous pouvez avoir entendu que Zeitoun a cessé d'exister comme ville arménienne. Les habitants ont été dispersés, la ville occupée par les Turcs, même le nom en a été changé. La même chose est vraie pour Hadjin, excepté je crois, pour son nom qui n'a pas été altéré. Les Arméniens d'Erzeroum, Bitlis et Erzingen ont été, sous la torture, convertis à l'Islam. Mardin indique que les conditions de 1895 (l'année de l'infâme massacre) prévalent là-bas. Le récit est horrible au dernier degré.
Plus d'un millier de familles d'Hadjin, récemment arrivées à Alep dans un état de misère au dernier degré, et pourtant le but est situé encore beaucoup plus loin. Les maris sont séparés par force de leur femme et envoyés en des lieux très éloignés. Les enfants sont séparés de la même façon de leurs parents.
Le conseil rapporte également le récit suivant de personnes en Syrie du nord sans liens avec les cercles missionnaires, mais dont on dit que leur fiabilité est indiscutable :
" Entre 4 300 et 4 500 familles, environ 28 000 personnes - sont chassées par ordre du Gouvernement des circonscriptions de Zeitoun et de Marash vers des lieux éloignés, où se trouvent des communautés inconnues mais distinctement non-chrétiennes. Des milliers ont déjà été dirigées au nord-ouest dans les provinces de Konia, Césarée, Castiamouni, etc., tandis que d'autres ont été dirigés vers le sud-est jusqu'à Deir-el Zor, et selon certains rapports, jusqu'à Bagdad. La misère dont souffrent ces gens est terrible à imaginer. Aller dans les détails serait une perte de temps inutile, car toutes les souffrances qu'une grande communauté subirait dans ces circonstances ont déjà été éprouvées.
" Environ 300 personnes, des chefs de familles en vue, ont été emprisonnées à Marash, dont une cinquantaine sont de Zeitoun et environ cinquante d'Osmanieh. Depuis Zeitoun, environ 350 familles, soit à peu près 2 000 personnes, ont été envoyées à Marash et à partir de là vers Aintab, et on espère qu'elles seront à Alep le 15 mai, pour être dirigées ensuite vers Meskene, tandis qu'au moins 250 familles sont attendues avant le 20 mai, selon le Gouverneur d'Alep. Ces derniers sont plus chanceux que les premiers cités, car il les opinions divergent dans les cercles officiels de cette ville. Soixante et onze familles ont été envoyées à Konia vers le 25 avril.

Le soulèvement de Van est désigné ici comme une révolte révolutionnaire prise comme prétexte par les dirigeants turcs pour exterminer les Arméniens.
Comme en Vendée en 1793, où les jeunes Vendéens refusèrent la conscription pour éviter de se battre contre les troupes ennemies de la Révolution, une partie des Arméniens refusèrent de faire la guerre aux Alliés en 1914. Comme en Vendée où la Convention Républicaine envoya l'armée, le Gouvernement turc envoya Djevdet à Van pour écraser les Arméniens…
Il y a beaucoup d'autres similitudes entre le sort des Arméniens en 1915 et celui des Vendéens en 1793; mais il y a un fait, que les négationnistes Nora, Ferro, Veinstein et autres ne contestent pas, un fait que même les négationnistes Turcs de la pire espèce ne nient pas, c'est qu'il n'y avait en Arménie " ottomane ", au lendemain de la Première Guerre Mondiale, plus aucun homme, femme, enfant, vieillard qui puisse se dire Arménien; au lendemain de la Première Guerre Mondiale et encore aujourd'hui. GB


LA MORT DE L'ARMÉNIE
Son Territoire a été Dévasté et les Quelques Survivants en ont été Chassés
Publié le 17 septembre 1915

À l'Éditeur du New York Times :

Le meurtre délibéré d'une nation se déroule au cours de ce vingtième siècle. La Turquie est occupée en ce moment à assassiner l'Arménie, et elle a presque terminée le travail.
Il n'existe plus aucun Arménien de sexe masculin valide nulle part en Turquie. Ils ont soit disparu dans les rangs de l'Armée turque, dans laquelle on les a traînés, ou sont morts en prison et à la potence – les meilleurs d'entre eux de cette dernière façon. Le reste de la nation arménienne, les femmes, les enfants et les vieillards, ont été chassés de leurs foyers.; les villes et les cités ont été complètement dépeuplées de leurs habitants arméniens, se comptant dans la plupart des cas en milliers. Ils sont forcés à un voyage à pied de deux mois, à destination de l'Arabie sans autre précision. Les deux-tiers d'entre eux meurent sur la route, soit de froid soit par la main de Mahométans pilleurs et violeurs. Ces comptes-rendus sont ceux de missionnaires, de consuls, et d'infirmières de la Croix-Rouge d'autres nations.
Cette situation est le résultat de la politique ouvertement affichée du Gouvernement turc à laquelle libre cours est donné. Que doit-on faire? L'humanité en est-elle au point d'accepter qu'un assassinat soit commis? Et à une telle échelle?
On dit de l'Ambassadeur Morgenthau qu'il a fait son possible pour empêcher ces événements, mais en vain, et si l'Amérique ne peut pas tendre une main secourable, personne d'autre ne le peut en ce moment.
L'Arménie en tant que nation est morte. Son territoire est dévasté; seules les vies individuelles de ses femmes et de ses enfants peuvent être sauvées. Et le seul moyen de les secourir est de les transporter dans ce pays ou dans un autre. Des actions et des secours sont faits par diverses sources arméniennes, mais elles sont totalement insuffisantes. Le simple fait d'aller chercher une partie des Arméniens est une telle entreprise qu'elle exige les meilleurs efforts d'une nation aussi puissante que les États-Unis et la coopération active de leur gouvernement. L'Ambassadeur Morgenthau est cité pour avoir dit que les besoins atteignent le million de dollars, et probablement plus. Mais pourquoi ne pas les donner? Pourquoi ne pas fournir la force et le travail nécessaire à une telle tâche? L'occasion de rendre un tel service comme celui-là ne se présente qu'une fois dans l'histoire d'une nation.

VINCENT YARDUM.
New York, 15 septembre 1915.

L'auteur de ces lignes, à qui les rédacteurs du New York Times font une place importante dans leur journal, est un citoyen américain d'origine arménienne. On retrouve son nom dans les listes d'archives de la Sécurité sociale des USA. Âgé de vingt-cinq ans en 1915, l'année du Génocide, il a vécu à Fort Lauderdale en Floride. Il lance ici un appel déchirant à l'Amérique pour sauver ce qui peut encore l'être…
GB


RÉPONSE À MORGENTHAU PAR PENDAISON D'ARMÉNIENS
Il proteste Contre la Guerre d'Extermination Engagée Actuellement
Publié le 16 septembre 1915

Câble Spécial au New York Times :

LONDRES, jeudi, 16 septembre . – Un correspondant du Times, récemment à Salonique, dit que tous les comptes-rendus issus de Turquie s'accordent sur le caractère terrible des atrocités turques contre les Arméniens. On pense que c'est l'intention officielle que cela soit une campagne d'extermination, qui impliquera la mort de 800 000 à 1 000 0000 de personnes. Les Chrétiens peuvent échapper à la mort en embrassant le mahométanisme, auquel cas tous les membres féminins de la famille du converti en âge d'être mariés – épouse, sœurs, ou enfants – sont distribués parmi d'autres Turcs, faisant l'éventuel retour futur à la religion chrétienne pratiquement impossible.
" Le Ministre américain à Constantinople aurait protesté récemment contre le massacre, étant donné le danger que cela représente pour les missionnaires américains. La seule réponse à sa protestation a été la pendaison de vingt dirigeants Arméniens le jour suivant dans les rues de Constantinople.

Dans sa brièveté, cet article relève l'intention génocidaire du Gouvernement turc et sa sauvagerie: aux protestations, il répond par des pendaisons, à Constantinople.
La raison qui fait désigner ici Morgenthau comme Ministre à Constantinople est inexpliquée. A Constantinople, Morgenthau était officiellement Ambassadeur, ni Ministre plénipotentiaire, ni Ministre tout court. GB


UN TRIUMVIRAT AUTOCRATIQUE
Publié le 14 Septembre 1915

THE NEW YORK TIMES : Mardi 14 septembre 1915
" Selon ce communiqué, les affaires turques sont sous le contrôle d’un triumvirat avec des pouvoirs autocratiques, comprenant :
Enver Pacha, ministre de la guerre
Talaat Bey, ministre de l’Intérieur
Et Bedri Bey, Préfet de police de Constantinople.

L’information précise que les Musulmans sont mécontents, on dit que le Cheikh ul Islam est contrarié car il désapprouve les mesures prises contre les Arméniens. Le Comité ‘Union et Progrès’ aurait été virtuellement supplanté par un comité secret réceptif aux ordres du triumvirat.

L’informateur américain affirme que les Arméniens ont été embarqués vers des camps de concentration en différents lieux, emmenés à pied, ou dans des wagons à bestiaux. Il ajoute que les premiers massacres de Chrétiens en Asie Mineure se reproduisent dans le cas présent, et dans certains cas, en comparaison, une infime partie seulement des Arméniens atteignent vivants les camps de concentration.

Henry Morgenthau, Ambassadeur d’Amérique à Constantinople, a fait tous ses efforts pour protéger les Arméniens, mais apparemment ses tentatives ont été vaines. Il est précisé que les Arméniennes qui tentaient d’aller avec les déportés pour surveiller les enfants arméniens, étaient renvoyées, et qu’un certain nombre de jeunes filles arméniennes qui étaient étudiantes dans le Collège américain de Constantinople, sont tombées entre les mains des Turcs.

Etant donné l’interruption de transport par mer, il est presque impossible d’acheter du charbon à Constantinople, et le bois est utilisé pour les locomotives. Les récoltes étaient bonnes, mais il a été presque impossible de moissonner. Le pétrole coûte un dollar le gallon, et le prix du sucre a été multiplié par sept.

L’informateur américain dit que l’accord signé entre la Turquie et la Bulgarie, n’a pas encore obtenu un règlement définitif des relations, mais qu’au contraire les Turcs se hâtent de bâtir des défenses contre les Bulgares. "


DES CHRÉTIENS RETENUS À TABRIZ
Des Agents Allemands Créent l'Inquiétude en Perse du Nord
Publié le 10 septembre 1915

________

TIFLIS, Transcaucasie, via Londres, 9 septembre. – Après l'exode du Vilayet de Van,
Les Chrétiens s'étaient enfuis dans les plaines d'Ourmiah et de Salmas, sur la côte nord-ouest du Lac d'Ourmiah, en Arménie perse. Les Chrétiens se préparaient à quitter Tabriz, mais leur fuite était interdite.
La présence de nombreux agents allemands à Tabriz et en d'autres lieux de la Perse du nord provoque l'inquiétude.

La région située au nord-ouest du lac salé d'Ourmiah, qui constituait du temps du Royaume de Grande Arménie, l'une des " Trois Mers de l'Arménie  " avec le Lac Sevan et le lac de Van , était peuplée en 1914 d'une majorité relative d'Arméniens (Population arménienne en 1914, carte publiée dans Mouradian, Claire, L’ Arménie, Paris, PUF, coll. Que-sais-je ? n° 851, 2002 (3e ed.). C'est pour cette raison qu'elle est qualifiée à plusieurs reprises d' " Arménie perse ". Faisant partie de l'Empire du Shah mais sous influence russe, elle a pu constituer, pour des dizaines de milliers d'Arméniens et de Chrétiens de la région de Van, fuyant devant les Turcs en août 1915, un lieu où ils avaient pu se réfugier: la frontière Perse est à une centaine de kilomètres à l'est de Van; les forces russes étaient à Tabriz, Ourmiah et Khoï depuis 1909 et le bataillon de volontaires arméniens ainsi que le général arménien Nazarbekov depuis décembre 1914.
C'est probablement du fait de la contre-offensive turque dans le Caucase au début de l'été 1915, et du retrait des forces russes stationnées à Tabriz, que les Chrétiens voulaient s'enfuir, mais ce court article ne dit pas qui les en a empêché et pourquoi. GB


1 500 000 ARMÉNIENS MEURENT DE FAIM
Publié le 5 Septembre 1915

Dépêche du 5 septembre 1915
Le comité de secours appelle à l’aide pour les victimes des décrets turcs.

Le Comité du Fonds de Secours arméno-américain a reçu deux lettres de Constantinople décrivant les horreurs auxquels sont soumis les Chrétiens arméniens de Turquie.

Une lettre datée du 15 juin, dit en particulier :

" Le Gouvernement turc exécute aujourd’hui le plan de dispersion des Arméniens des provinces arméniennes, profitant des troubles dans les puissances européennes, et avec l’assentiment de l’Allemagne et de l’Autriche. "

" Ces gens sont expulsés sans pouvoir emporter ni provisions ni meubles, et dans des endroits où le climat ne leur convient absolument pas. On les laisse sans abri, sans nourriture, sans vêtements, dépendant seulement de quelques morceaux de pain que le Gouvernement veut bien jeter devant eux, un gouvernement qui n’est pas capable de nourrir ses propres troupes. "

" Il est impossible de lire ou d’entendre sans verser de larmes, même les plus infimes détails de ces déportations. La plupart des familles ont voyagé à pied, vieillards et enfants sont morts sur la route, des jeunes femmes sur le point d’accoucher ont été laissées dans des cols de montagne, et au moins dix morts par jour sont signalés parmi eux, de faim et de maladie, dans le lieu même où les victimes ont été exilées. Jusqu’à présent il n’a pas encore été possible d’envoyer de l’aide à Sultanieh, à cause de l’interdiction du gouvernement, malgré les efforts de l’ambassadeur américain à qui nous sommes reconnaissants pour ses tentatives philanthropiques et généreuses.


La seconde lettre datée du 12 juillet dit :

" La situation des Arméniens s’est extrêmement aggravée depuis ma dernière lettre. Ce n’est pas seulement la population arménienne de Cilicie qui a été totalement déportée et exilée dans les déserts. Les communautés arméniennes de toutes les provinces d’Arménie, d’Erzeroum, Trébizonde, Sivas, Harput, Van et Diarbekir, ainsi que de Samsun, Césarée et Urfa – une population de 1 500 000 personnes est en train de marcher aujourd’hui, le bâton de pèlerinage forcé à la main, vers les déserts Mésopotamiens, pour vivre parmi les tribus sauvages arabes et kurdes. Très peu d’entre eux vont pouvoir atteindre les lieux désignés pour leur exil, et ceux qui y arriveront vont périr de faim si un secours immédiat ne leur parvient pas. "

" C’est au nom de cette population d’1 500 000 personnes mourant de faim que des appels urgents doivent être lancés au peuple charitable d’Amérique ".


Le Comité de Secours du Fonds arménien pense que si une aide immédiate ne parvient pas, les efforts futurs seront vains.
Les trésoriers du Comité sont : Brown Brothers Co. 59 Wall Street.
 


LES TURCS MASSACRENT LES ARMÉNIENS D'ISMID
Incendient le Port d'Asie Mineure, distant de seulement 90 Kilomètres de Constantinople
Publié le 3 septembre 1915

 

LONDRES, 2 septembre.- Une dépêche de la Exchange Telegram Company d'Athènes dit :
" Des voyageurs arrivant de Constantinople annoncent que vendredi dernier, les Turcs ont incendié la ville d'Ismid et massacré un grand nombre de ses habitants arméniens. "
Ismid se trouve à l'entrée du Golfe d'Ismid en Asie Mineure, à environ quatre vingt-dix kilomètres au sud-est de Constantinople. Les résidences à la fois de l'Archevêque arménien et grec se trouvaient dans cette ville. Sa population est d'environ 25 000.

Un article qui démontre que l'argument négationniste selon lequel les massacres se produisaient dans les régions proches des combats du front russe est faux; la ville d'Izmit est située à l'autre bout de la Turquie, tout près du Bosphore, à 90 km de Constantinople.
GB




ENVER PRÉPARERAIT UN MASSACRE
La Vie de Tous les Chrétiens de Constantinople est Menacée, d'après Galli
Câble Spécial au New York Times
Publié le 30 Août 1915

PARIS, 29 Août.– Qu'Enver Pacha préparerait un massacre de tous les Chrétiens à Constantinople est une affirmation faite dans le Gaulois par Emile Galli, ex-éditeur du Levant Herald, qui vient juste de s'enfuir de la capitale turque.
Les Turcs, dit-il, se rendent compte que les Dardanelles seront inévitablement forcées, et des observateurs bien informés s'attendent au désastre plus tôt que les Alliés eux-mêmes.
A la veille du départ de Galli, qui a été organisé par des amis influents, beaucoup de dirigeants modérés de Turquie l'ont imploré d'intercéder auprès de la France, de la part des Turcs, qui pour la plupart, sont à présent hostiles aux Allemands. Il prévoit que le parti des modérés fera son possible pour organiser un coup d'état contre Enver Pacha, dont les plans antichrétiens sont considérés comme une tentative finale d'engager irrévocablement la Turquie dans la cause de l'Allemagne.




LES TURCS VIDENT LES VILLES D'ARMÉNIE
Un Voyageur Rapporte que les Chrétiens d'un Grand Territoire ont été Convoyés hors de chez Eux
600 000 MEURENT DE FAIM SUR LA ROUTE
Il ajoute que plus de 100 000 Grecs Ont été chassés de la Côte Méditerranéenne

Publié le 27 Août 1915

Un voyageur qui vient tout juste d''arriver à New York de Turquie , dont il était résident depuis longtemps, a dit hier au TIMES la situation telle qu'il la trouvée à Constantinople, et les déportations systématiques d'Arméniens des circonscriptions de l'intérieur de la Turquie asiatique. Pour des raisons valables, le narrateur ne souhaite pas que son nom soit publié, mais le TIMES peut attester de ses qualifications en tant qu'observateur , en particulier dans la province arménienne.
Quittant Sivas, où il a passé quelque temps, il s'est dirigé vers Constantinople et de là à Athènes, d'où il a embarqué pour New York. Alors qu'il se trouvait à Constantinople il y a quatre semaines, la tension y était passablement élevée. Dans les cercles officiels, on maintient que les choses se passent tout à fait bien pour les Turcs, mais il y a beaucoup d'individus qui expriment le découragement. Ceux-là n'ont plus foi dans les raisons pour l'Allemagne de venir en aide à la Turquie, et certains accusent même Enver Pasha de s'être vendu pour de l'argent.
Des médecins et des infirmières allemands lui ont dit que longtemps après le début des hostilités, l'Allemagne avait envoyé en Turquie depuis la Roumanie plus de 2 000 officiers se faisant passer pour des chirurgiens ou des agents de la Croix Rouge. Sous prétexte de soins ou sous l'étiquette d'autres denrées, des munitions et des fournitures arrivent à travers la Roumanie, et c'est également un motif de fierté. De ce qu'il a vu à Constantinople et des dépêches arrivées depuis qu'il en soit parti, il juge que les Alliés sont près d'en avoir fini à Gallipoli et sont prêts à chasser les Turcs d'Europe. Au cas où il serait nécessaire d'évacuer Constantinople, a-t-il dit, Konia deviendrait la nouvelle capitale, ce qu'il infère du fait que des archives en ont déjà été déplacées.
" Les Arméniens de l'intérieur ", a-t-il dit, " ont été déportés en direction de Mossoul. Au moment où j'ai quitté Sivas, deux-tiers d'entre eux avaient quitté la ville, y compris les Protestants, les maîtres et les élèves. Au mieux de mes connaissances et de mes opinions, à l'exception des Arméniens soldats et prisonniers, et à de très rares exceptions qui, pour diverses raisons étaient nécessaires au Gouvernement, tous les Arméniens sont partis de Sivas. Selon ce que je considère comme une autorité valable, je crois qu'il est vrai que la population entière depuis Erzeroum jusques et y compris Gemereh, près de Césarée, et depuis Samsoun jusques et y compris Harpout, a été déportée. Il y a également un mouvement central qui n'est pas encore devenu général, mais qui le deviendra sans doute, Plus de 100 000 Grecs des côtes de Marmara et de Méditerranée ont été déportés.
" Beaucoup de rumeurs de massacres circulent, mais je n'ai pas de preuves à ce sujet. A ma connaissance, aucun massacre général ne s'est produit dans le Vilayet de Sivas. Pas une seule personne n'a été tuée d'une façon ou d'une autre.
" Ce mouvement général contre les Arméniens a commencé il y a des mois par des arrestations sur des présomptions d'activité révolutionnaire ou pour rechercher des armes ou des bombes.
" Après avoir vu des milliers de personnes forcées de s'en aller, je pensais que s'il était possible de faire quoi que ce soit pour arrêter ce terrible crime qui m'impressionne dix fois plus qu'un massacre, ce ne pouvait être qu'à Constantinople. A Constantinople, j'ai compris que tout le plan de déportation était l'œuvre du Gouvernement central, et qu'aucune pression des Ambassades n'avait été capable de faire quoi que ce soit pour l'arrêter.
" Je crois qu'il y a un danger imminent pour beaucoup de ces personnes, dont j'estime le nombre, pour les vilayets de Sivas, d' Erzeroum et de Harpout, à 600 000, et qui meurent de faim sur la route. Ils ont pris de la nourriture pour quelques jours, amis n'ont pas osé prendre trop d'argent avec eux, parce que s'ils l'avaient fait, il est probable qu'ils n'auraient pu le garder. Notre Ambassadeur a promis de faire ce qu'il pourrait, et m'a donné quelque espoir que des fonds de secours pourraient être envoyés immédiatement. On peut se demander si leur venir en aide sera permis, mais il faut s'y engager tout de suite.
" Il était impossible d'emporter de Turquie une adresse ou des notes écrites d'aucune sorte. J'ai acheté un livre comptable vide et ouvert un compte nouveau de voyageur, après avoir traversé la frontière.
" J'ai croisé sur la route près de Talas les gens de deux villages. Ils étaient à pied, avec moins d'un âne pour une famille, sans nourriture, sans couvertures, presque sans hommes, beaucoup de femmes à pieds nus et portant des enfants. Un cas à Sivas qui vaut d'être relaté est celui d'une femme dont le mari travaillait dans un hôpital comme infirmier pour les soldats pendant de nombreux mois. Elle avait attrapé le typhus et fut conduite à l'hôpital. Sa mère, une femme de 60 à70 ans, se leva de son lit de malade pour soigner leur sept enfants dont l'aîné pouvait avoir 12 ans. Quelques jours avant la déportation, son mari fut emprisonné et exilé sans référence à aucune faute. Lorsque le quartier où ils vivaient fut vidé, la mère fut sortie de son lit à l'hôpital et chargée sur une charrette pour rejoindre ses enfants.




CONCESSION TURQUE AUX ARMÉNIENS
La Sublime Porte promet de ne pas déporter plus de 10 pour cent d'Entre Eux
Spécial au New York Times
Publié le 25 Août 1915

WASHINGTON, 24 Août.– L'Ambassadeur Morgenthau a notifié le Département d'Etat depuis Constantinople que le gouvernement turc l'avait informé que les ordres avaient été télégraphiés à travers la Turquie d'exempter tous les Arméniens qui sont membres des églises catholique et protestante. L'Ambassadeur a dit qu'environ 90 pourcent des Arméniens appartiennent à l'Eglise grégorienne, ou arménienne, et 10 pourcent à l'église protestante ou catholique.
Le gouvernement turc a aussi accordé une exemption pour les Arméniens employés dans les consulats américains.


Des Arméniens meurent emprisonnés dans des camps
Des centaines de milliers toujours en danger par les Turcs, Ecrit le Secrétaire du Fonds au Réfugiés.
LES ALLEMANDS NE VEULENT PAS INTERVENIR
Environ 1 000 000 de victimes déportées et 500 000 massacrées rapporte le Rév. Harold Buxton.
Publié le 21 Août 1915

Câble spécial adressé au New York Times
LONDRES, lundi 21 août 1915

Le Révérend Harold Buxton, Secrétaire du Fonds aux Réfugiés Arméniens, vient de revenir en Angleterre après avoir consacré trois mois à l’œuvre de secours aux villages dévastés. Dans une interview, le Rev. Buxton a donné des détails qui confirment entièrement les graves déclarations faites par Lord Bryce il y a quelques mois à la Chambre des Lords. Interrogé s’il avait des preuves que la déportation des Arméniens l’été dernier était due à l’instigation des Allemands, il a répondu :

" Tout ce que je peux dire est que le Gouvernement allemand n’a rien fait pour arrêter les massacres. Pendant toute cette affaire, l’influence allemande était suprême à Constantinople, et les consuls allemands étaient à leurs postes dans tous les centres principaux à travers l’Asie Mineure. En outre, les gens étaient balayés avec une minutie méthodique que l’on n’attend pas du Turc qui, laissé à lui-même, agit plutôt avec des accès soudains de fureur.

" J’ai la preuve, par un missionnaire américain, que certains des consuls allemands ont fait de leur mieux en faveur du peuple arménien. Par exemple, le consul allemand d’Erzeroun a télégraphié à l’Ambassadeur à Constantinople, protestant vigoureusement contre l’ordre de déportation. Il a reçu une réponse ainsi conçue : " Nous ne pouvons pas intervenir dans les affaires internes de la Turquie "

" Je ne pense pas qu’il y ait eu une quelconque exagération à propos de pertes publiées en Angleterre. La race arménienne s’élevait à environ 4 millions d’individus, dont 2 millions étaient des Arméniens turcs, et parmi eux un million peut-être ont été déportés et 500 000 massacrés. Seuls 200 000 se sont échappés dans les montagnes, et ainsi atteint le sol russe. Il y a quelques centaines de milliers dans des camps de concentration entre Alep et Mossoul, et dans les régions avoisinantes de Mésopotamie, où la Turquie continue à décider de leur sort.

" A cette population considérable, nous n’avons pas accès, et elle est toujours en danger. Selon les rapports qui nous sont parvenus, elle a été ravagée par la maladie, la famine, les privations de toutes sortes, les atrocités, et le meurtre, tout cela signifie une très grande mortalité parmi les victimes. "




MILLE ARMÉNIENS BRÛLÉS
Les Turcs les enferment dans une Construction en Bois et y mettent le Feu
Publié le 20 Août 1915

LONDRES, vendredi, 20 Août.– Selon une dépêche Reuter envoyée de Saint Petersbourg :
" Des détails presqu'incroyables sur les massacres d'Arméniens par les Turcs à Bitlis sont parvenus à Saint Petersbourg.
" Dans un village 1 000 hommes, femmes et enfants ont été enfermés dans une construction en bois et y ont été brûlés à mort.
" Dans un autre village, seules trente-six personnes a-t-on dit, ont échappé au massacre.
" Dans un autre cas, on a affirmé que des vingtaines d'hommes et de femmes ont été attachés ensemble et jetés dans le Lac de Van. "


LES ARMÉNIENS DÉPLACÉS DANS LES DÉSERTS POUR Y PÉRIR
Les Turcs Accusés de Planification d'Extermination de la Totalité de la Population – Les Habitants de Karahissar Massacrés.
Câble Spécial au New York Times.
18 Aoûy 1915

LONDRES, mercredi, 18 Août.– Le Daily News a reçu d'Aneurin Williams, membre du Parlement [britannique], la copie d'une lettre reçue de Constantinople, datée du 13 juillet, décrivant le sort terrible des Arméniens en Turquie. On lit dans la lettre :
" Nous savons avec certitude par une source fiable que les Arméniens de toutes les villes et villages en Cilicie ont été déportés en masse vers les déserts de la région au sud d'Alep. Les réfugiés auront dû parcourir à pied des distances nécessitant de marcher pendant un, deux ou même trois mois.
 " Nous avons appris, en outre, que les routes et les cadavres des exilés sont emportés par l'Euphrate, et ceux qui survivent sont voués à la mort, parce qu'il ne trouveront dans le désert ni abri, ni travail, ni aucune nourriture. C'est un plan pour exterminer le peuple arménien dans son entier.  
" Les cours martiales ne cessent de fonctionner partout. Douze Arméniens ont été pendus à Césarée après avoir été accusés d'avoir suivi des instructions issues d'une réunion secrète des sociétés Terochak et Hunchak à Bucarest . Beaucoup sont tombés sous les coups de gourdin. Treize Arméniens ont été tués de cette façon à Diyarbekir et six autres à Césarée. Treize autres ont été tués sur la route de Chabine-Karahissar à Sivas. Les prêtres du village de Kurk, avec leurs cinq compagnons, malgré leurs poings liés, ont subi le même sort sur la route de Sou- Chehrksivas.
" Des centaines de femmes et de jeunes filles et même des enfants gémissent en prison. Les églises et les couvents ont été pillées, profanées et détruites. Les villages autour de Van et Bitlis ont été pillés et les habitants passés au fil de l'épée.
"  Au début de ce mois, à l'exception de quelques enfants tous les habitants de Karahissar ont été massacrés sans pitié. "




DES FEMMES ARMÉNIENNES MISES AUX ENCHÈRES

Des Réfugiés décrivent le sort de ceux qui sont entre les mains des Turcs
VON BERNSTORFF A DONNE SA RÉPONSE
La lettre de l'Ambassadeur Allemand : " De Pures Inventions " à l'égard des atrocités, provoque l'Indignation
Publié le 11 Août 1915

La déclaration faite par le Comte von Bernstorff, l'Ambassadeur allemand, dans sa lettre à Miran Sevastly de Boston, et dans laquelle il qualifie les rapports concernant les atrocités turques faites contre les Arméniens de " pures inventions " recevra dans peu de jours les réponses d'Américains bien connus qui connaissent la situation réelle en Turquie, et qui, a-t-on dit, produiront des éléments absolument fiables et crédibles et des données authentiques pour prouver, comme l'un d'entre eux l'a décrit hier, que " l'Arménie entière baigne dans le sang des atrocités ".
La lettre de l'ambassadeur allemand à M. Sevasly a été publiée dans le Times d'hier, et les déclarations faites par le Comte von Bernstorff n'ont rien apporté qui puisse atténuer l'indignation des missionnaires et de ceux qui dans d'autres cercles, pensent que la situation arménienne pose un problème vital.
" Pour l'instant, autant que l'ambassadeur allemand soit concerné, tout ce qui m'importe de dire tout de suite ", disait hier le Professeur Samuel T. Dutton, Secrétaire du Comité sur les Atrocités Arméniennes, " c'est qu'à l'évidence, il a été mal informé. Je suis tout à fait sûr qu'il sera très surpris lorsqu'il verra les éléments concrets, qui sont tous entièrement authentifiés, concernant les événements d'Arménie, et qui sont en possession de ce comité. "
Dans une déclaration préliminaire faite dimanche dernier, le comité avait déclaré que si ces atrocités continuait, les Américains ne manqueront pas, étant donnée la grande influence qu'ont l'Allemagne et l'Autriche sur les affaires turques, de tenir les alliés teutoniques " moralement responsables ".
Parlant hier, ayant examiné les données authentifiées en sa possession, le Professeur Dutton a dit ne pas croire que quelque chose se soit passé depuis de nombreux siècles "d'aussi terrible que les actes calculés et systématiques de cette coterie politique en Turquie – les Jeunes Turcs, dirigés par Enver Pacha – et destinée à exterminer une race entière de gens. Tout le plan consiste à faire disparaître les Arméniens ".
" Il y a seulement un jour ou deux, " a ajouté le Professeur Dutton, " une jeune fille qui avait quitté la Turquie le 18 août m'a appelé pour passer me voir. Elle m'a parlé du sort de 100 filles qui suivaient les cours de l'école d'une mission de Turquie. Ces filles, qui étaient bien sûr, arméniennes, ont été divisées en groupes, et celles qui étaient les plus belles selon l'avis des officiers turcs furent mises à la disposition des officiers. Celles considérées comme un peu moins belles ont été abandonnées aux soldats tandis que celles qui étaient moins séduisantes ont été mises en vente au plus offrant ".
Plusieurs Américains qui ont passé en Turquie plusieurs années viennent récemment d'arriver ici. Ils attestent tous de la vérité des rapports qui nous viennent de Turquie et qui concernent le traitement des Arméniens, mais dans beaucoup de cas, ils nos prient de ne pas donner leur nom, par crainte des représailles des Turcs contre leurs parents ou leurs amis restés en Turquie.
Les copies de deux lettres, dans lesquelles leurs auteurs témoignent du sort qui est fait aux Arméniens, ont été remises au New York Times hier par un homme concerné de près par la situation des Arméniens.
Dans l'une d'elle, l'auteur dit entre autres choses :
" Vers la fin du mois de juillet, la situation militaire, sur le front transcaucasien a pris un tour malheureux pour les forces russo-arméniennes. Apparemment encouragés par les revers russes en Pologne, les Turcs ont envoyé des gros renforts, quelques 40 000 hommes de troupe régulière sur le front arménien pour engager une forte offensive.
Avant cela, la circonscription isolée, sur la rive orientale du Lac de Van, avait été progressivement vidée des Turcs et des Kurdes. Dans la dernière semaine de juillet, Tadvan et les versants des monts Nimrud et Kerjur ont été pris par les volontaires arméniens après des violents combats.
" A Urtab, Tukh et dans la vingtaine de villages arméniens situés autour du lac, on a constaté que la population entière avait été massacrée par les Turcs – pas une seule âme qui vive n'a été trouvée dans ces villages, livrés aux hurlements des chiens, tandis que de nombreux cadavres étaient rejetés par le lac et les rivières.
" Ces cadavres, qui se sont tous révélés être ceux de personnes de sexe masculin, étaient terriblement mutilés; par contre, rien ne restait de ce qui pourrait rappeler la présence de femmes et d'enfants. Dans la soirée du 20 juillet, les Arméniens se sont emparés des hauteurs de Kerkur. Lorsqu'ils sont parvenus au sommet, la ville de Bitlis leur est apparue en flammes, à leur grande peine, et ils ont compris que le pire s'était produit. Quelques femmes refugiées, qui étaient parvenues à échapper aux gardes Turcs, ont depuis relaté l'histoire de massacres monstrueux dans la ville et la déportation systématique des femmes et des enfants.
Adressée à un Ministre bien connu de l'Eglise arménienne, arrivée de Turquie par quelque voie mystérieuse tenue secrète, une lettre qui est qualifiée de " fiable sans aucun doute ", explique :
" ' Une Arménie sans Arméniens ' – tel est le plan du Gouvernement ottoman, qui a déjà commencé l'installation de familles musulmanes dans les maisons et les biens des Arméniens. Il est inutile de préciser que les déportés ne sont pas autorisés par le Gouvernement, de ne prendre aucun de leurs biens avec eux, et comme il n'y a de toutes façons aucun moyen de transport, réservés à l'usage militaire, ils sont contraints de couvrir à pied le trajet de deux ou trois mois qui les séparait des déserts destinée à devenir leur sépulture ".


60 000 ARMÉNIENS EN FUITE DEVANT LES TURCS
Le Nombre de Ceux Expulsés du Vilayet de Van
atteint probablement 100 000
RÉCITS RÉPÉTÉS DE MASSACRE
Les Kurdes auraient massacré 10 000 personnes et jeté leur corps dans le Tigre et l'Euphrate.
Publié le 11 Août 1915


TIFLIS, Transcaucasie, 10 août, (Via Saint Petersburg et Londres).- l'Evêque Arménien a reçu l'information selon laquelle 60 000 réfugiés arméniens sont arrivés à Igdir, à la limite principale du Vilayet de Van. On s'attend à ce qu'ils aient été au total 100 000 chassés de la seule ville de Van.
Un autre exode de Chrétiens de la Perse est également à craindre.
Les Kurdes auraient massacré 10 000 Arméniens dans le vilayet de Bitlis, jetant les corps des victimes dans les rivières Tigre et Euphrate.
La guerre sur ce front a atteint un degré d'intensité inconnu jusqu'ici, excepté dans la période de la victoire des Russes à Sary-Kamysh.
B. Varazdate, un membre du Comité du Parti Social Démocratique Arménien, écrivant à l'Humanité de Paris le 2 août, disait que le comité avait reçu communication que les Turcs, après avoir massacré la population de sexe masculin de Bitlis, avaient rassemblé 3 000 femmes et enfants et les avaient conduits sur les rives du Tigre, où ils les ont abattus, jetant les cors dans la rivière.
Les rapports sur les massacres d'Arméniens en divers lieux ont fréquemment été reçus au cours des quatre mois qui précèdent. Six mille auraient été massacrés à Van en mai. Les missionnaires américains de Van ont joué un rôle de premier plan dans la protection des Arméniens contre les attaques turques et kurde.





L'HORREUR GRANDIT EN ARMÉNIE
Les Massacres sont plus importants que sous Abdul Hamid, selon un reportage londonien
Câble Spécial au NEW YORK TIMES

Publié le 6 Août 1915

LONDRES, vendredi 6 août. Le Daily Chronicle dit :
" Un tragique épisode de la guerre; à l'est, est le massacre systématique des Arméniens dans les vilayets d'Asie Mineure par les Turcs et les Kurdes. A propos de l'échelle terrible de ces massacres, plus grands qu'aucun de ceux qui s'étaient produits sous Abdul Hamid, il n'y a à présent plus de place pour le doute, et les déclarations faites la semaine passée par Lord Bryce à la chambre des Lords ont été officiellement corroborées par Lord Crewe.
" Dans certains cas, les Arméniens sont parvenus à se défendre. Dans la ville de State, où Enver envoya son beau-frère avec une mission d'extermination, les victimes se sont dressées après que les massacres aient commencé; ils ont barricadé le quartier arménien et ont contenu le siège des Turcs pendant quatre semaines, jusqu'à l'arrivée du secours de l'armée russe. Mais à part ce cas particulier et quelques exceptions, ils ont été impuissants. Des dizaines et probablement des centaines de milliers ont été abattus, et en nombre encore plus grand, ils ont été déportés par la route sur des centaines de kilomètres vers l'Anatolie de l'Ouest dans des conditions qui correspondent à une extermination lente.
" Les Allemands, qui règnent en maîtres sur l'administration centrale ottomane, la honte soit sur eux pour toujours, ont non seulement permis, mais même encouragé ces horreurs. Les puissances alliées ont notifié les officiels turcs qu'ils les tiendront personnellement responsables, et à ce stade, ils ne peuvent guère faire plus. Peut-être conviendrait-il que les Américains élèvent une protestation, mais nous n'avons rien entendu jusqu'à présent ".
Le Chronicle conclut en lançant un appel à l'aide humanitaire privée britannique, citant le terrible état de ruine et de dévastation qui a suivi les massacres turcs dans l'Arménie du nord-est, décrits par télégraphe par Ayvadian, l'archevêque de Van, et Aram, le Gouverneur de Van, au secrétaire honoraire de la Croix Rouge Arménienne et au Fond de Réfugié :
"A côté de Van, les provinces de Chatakh, Moks, Spartkert, Mamertank et Khizan sont sauvées. Les autres sont en ruines et dévastées. Hommes, femmes et enfants sont massacrés. Vingt-mille personnes sont sans abri. La famine et les maladies infectieuses sont générales. Beaucoup de volontaires sont malades et blessés. Malgré l'assistance reçue du Gouvernement russe et des Arméniens du Caucase, il y a un grand besoin de médecins, de médicaments, d'ambulances et de nourriture. La situation à Bitlis, Mouch et Diarbékir est terrible. Nous demandons instamment une aide immédiate ".


COMMUNICATION SUR DES FEMMES ET DES ENFANTS ABATTUS PAR LES TURCS
Neuf Mille Arméniens Massacrés et Jetés dans le Tigre, selon une communication reçue par le Comité Socialiste
Publié le 4 Août 1915

PARIS, 3 août.- B. Varazdate, membre du Comité Exécutif du Parti Social Démocratique Arménien, écrivant à l'Humanité, le quotidien socialiste, dit que le Comité a été informé du fait que les Turcs, après avoir massacré toutes les personnes de sexe masculin de la région de Bitlis, en Arménie turque, ont rassemblé 9 000 femmes et enfants, les ont conduits sur les rives du Tigre où ils les ont abattus; ils ont ensuite envoyé leurs corps dans la rivière.
Ces informations n'ont été confirmées par aucune autre source.
La population arménienne de Cilicie, dans le vilayet turc d'Adana, a elle aussi été sujette à persécutions, selon les rapports du comité. Plus de 40 000 personnes sont déjà mortes et on craint que les Arméniens, à Moucks et Diarbekr, dans le Kurdistan, aient eux aussi été massacrées.
Vingt membres du Parti Social Démocratique, a dit M. Varzadate, ont été pendus en public à Constantinople, après avoir été accusés de souhaiter qu'une Arménie indépendante soit fondée.




MASSACRES SYSTÉMATIQUES DES ARMÉNIENS PAR LES TURCS
Lord Crewe Dénonce l'Influence des Allemands comme une "  malédiction absolue "
Publié le 29 juillet 1915

LONDRES, 28 juillet.- Le Comte de Crewe, Lord Président du Conseil, répondant aujourd'hui à la Chambre des Lords à une question du Vicomte Bryce au sujet des tueries de Chrétiens en Arménie par les Turcs, a dit que les informations reçues au Foreign Office montraient que ces crimes s'étaient récemment accrus non seulement en nombre mais par leur degré d'atrocité également. Ils se déroulent à la fois, a déclaré Lord Crewe, par le massacre et par les déportations, exécutés sous le couvert d'une évacuation forcée. Ces mêmes crimes, a-t-il ajouté, ont été commis par les Turcs à la frontière avec la Perse.
La présence des Allemands et l'influence qu'ils ont exercée ont été, a continué Lord Crewe, " une malédiction absolue et débridée à la fois pour les populations chrétiennes et musulmanes. Elles ont fait montre du plus mépris la plus cynique et le plus total pour le pays et pour le peuple qui l'habite ".
Lord Crewe a dit qu'il regrettait qu'il soit impossible dans l'immédiat de prendre des mesures pour arrêter de telles atrocités; mais que ceux qui en sont responsables devront à la fin recevoir un juste châtiment.




LES TURCS TUENT LES CHRÉTIENS
Combats Féroces à la Suite du Refus de Quitter la Côte pour l'Intérieur
Publié le 23 juillet 1915

PARIS, 22 juillet.- Une dépêche d'Havas reçue d'Athènes rapporte :
" Les autorités militaires turques, dans des avis reçus à Vurla, (un port de Smyrne, dans le Golfe de Smyrne), ont donné l'ordre aux femmes et aux enfants chrétiens de quitter la ville et d'aller à l'intérieur. Beaucoup de résidents ont refusé d'obéir à cet ordre, et un féroce combat a suivi, au cours duquel beaucoup ont été tués.
" Le Gouvernement grec n'a reçu aucune réponse de la Porte à ses plaintes officielles, relatives aux persécutions des Grecs dans les territoires turcs. Le retard est attribué aux difficultés de communications par le télégraphe.
" Quelques quotidiens pressent le gouvernement d'appliquer une politique énergique à l'égard de la Turquie. "


FORTE PRESSION SUR LES TURCS EN ARMÉNIE TURQUE
Les Russes Attaquent 30 000 [Turcs] à l'Est de Bitlis – Encore des Massacres d'Arméniens
Publié le 13 juillet 1915


TIFLIS, Transcaucasie, 5 juillet, (via Saint-Pétersbourg et Londres, 12 juillet.) – Des reportages reçus des divers fronts dans la campagne Russo-turque indiquent que de vifs combats se sont produits récemment au nord et au sud du Lac de Van, en Arménie turque, et au sud de Olti, en Transcaucasie, à quatre-vingt dix kilomètres à l'ouest de Kars. Tous ces affrontements auraient tourné à l'avantage des Russes. Selon ces reportages, une force turque de 30 000 hommes, qui était concentrés à l'est de Bitlis, près du Lac de Van, est soumise à une forte pression des Russes.
Des massacres organisés d'Arméniens à Bitlis sont interprétés comme une indication que les Turcs ont l'intention de se retirer de cette position. Les Turcs ont distribué 40 000 fusils aux Kurdes dans la vallée de Mouch pour les utiliser contre les Arméniens. Malgré les massacres et les épidémies, les Arméniens résistent courageusement. Leurs effectifs ont été renforcés par l'arrivée de 160 volontaires arméniens d'Amérique.




LES TURCS EXPULSENT LES CHRETIENS DE LEUR PROPRE PAYS
Grecs et Arméniens Chassés de leur maison et Convertis par l'Epée, Affirment des Américains
Publié le 12 juillet 1915

ATHENES, 11 juillet, (Dépêche au London Morning Post.) Des voyageurs américains arrivant de Turquie ont rendu compte de témoignages sur le traitement des populations chrétiennes qui confirment pleinement les rapports reçus ici et issus de sources locales, selon lesquels les Chrétiens dans l'Empire Ottoman n'ont jamais été soumis à de tels harcèlement et danger depuis l'invasion de l'Empire Byzantin par les Turcs.
Arméniens et Grecs ensemble, deux nations indigènes et chrétiennes de Turquie, sont systématiquement délogés de leur maison en masse et conduits sommairement à des provinces distantes, où ils sont dispersés par petits groupes dans les petits villages turcs; on leur donne le choix entre accepter immédiatement l'Islam ou mourir par l'épée ou de famine. La possession de leur maison et de leur bien est prise immédiatement par leurs voisins turcs ou par des immigrants de Macédoine.
A travers les vilayets d'Erzeroum, Van, Bitlis, Diyarbekir, Kharput, Sivas et Adana, les Arméniens ont été expulsés sans pitié par dizaines de milliers et convoyés pour mourir dans
le désert près de Konia ou de Mésopotamie Supérieure ou le désert Ibérien. Ces chiffres ne tiennent pas compte de milliers d'autres massacrés par les Kurdes ou pendus sans procès par les autorités à travers toute l'Arménie.
Ce n'est guère mieux pour les Grecs, excepté qu'ils ne sont pas massacrés. Outre les cent quatre vingt milliers qui ont été chassés de leur maison l'an passé en Thrace et dans le vilayet de Smyrne, un nombre encore plus élevé, depuis que la Turquie est entrée en guerre, ont été et sont encore arrachés de leur village à travers la Thrace et l'Asie Mineure, et déportés dans des circonscription purement turques, sans être autorisés de prendre avec eux autre chose que les vêtements qu'ils portent. Cinquante-six mille ont ainsi été expulsés de la Péninsule de Gallipoli et des littoraux des Dardanelles, quinze mille des Iles Pinkipo, quarante-deux mille de Thrace jusqu'aux faubourgs de Constantinople, dix neuf mille de la province d'Izmit, soixante mille de le vilayet de Bremussa et ce déracinement de la population indigène s'accroît en étendue et en férocité.
Les hommes valides sont enrôlés dans l'armée turque, et les autres réunis en petits groupes et distribués parmi les villages d'Asie Mineure, en prenant soin de séparer les membres d'une même famille et de séparer les femmes et les filles de leurs amis et de leurs parents. Les enfants sont kidnappés sur la route de cet exil affreux, pour être élevés comme des Musulmans, et les filles sont données en des soi-disant mariages çà des paysans turcs.
Les adultes qui restent ont le choix entre la mort ou l'apostasie.
On peut dire que si la Turquie n'est pas mise à genoux très vite, il ne restera plus aucun Chrétien dans l'Empire ottoman.


WILSON RASSURE SUR LE SORT DE L'" ARMENIAN "
Le Vapeur Etait " Engagé  dans une Mission pour l'Amirauté "Apprend le Président par l'Ambassadeur Page.
Publié le 2 juillet 1915

CORNISH, N.H., Premier juillet.- Le Président Wilson a été informé cette nuit que l'Ambassadeur Page avait transmis à Washington une information de l'Amirauté britannique selon laquelle le vapeur Armenian, coulé lundi par un sous-marin allemand, occasionnant des pertes de vies d'Américains, était " engagé dans une mission pour l'Amirauté, " l'annonce a été interprétée comme susceptible d'atténuer le risque de complications relatif à l'incident, et en conséquence, la tension ici a baissé.
Le Président s'en tient à sa politique de refus de discuter le coulage du vaisseau, mais la nouvelle de son départ immédiat pour Washington, entendue tôt dans la journée, n'était pas en ligne avec les dernières déclarations de l'Ambassadeur Page. M. Wilson a continué, cependant, de se tenir prêt à rentrer à Washington, si une quelconque urgence le rendait nécessaire.
Il a été indiqué ici ce soir que l'enquête sur le naufrage de l'Armenian serait continuée, afin d'établir tous les faits relatifs à l'autorisation du vaisseau signalée par Newport News et le statut des muletiers disparus à la suite de son torpillage. Le Président, a-t-on compris, restera attentif jusqu'àce que les faits soient clarifiés avec certitude.
M. Wilson a obtenu les informations concernant l'Armenian plus tardivement qu'il ne reçoit normalement des nouvelles officielles, parce que le courrier a été employé pour transmettre les dépêches plutôt que le télégraphe ou le téléphone. Dès demain, cependant, on attend du secrétaire Lansing qu'il l'informe complètement sur la question qui se pose: les faits rapportés concernant l'Armenian placent-ils l'incident dans la classe légitimant la protestation des Etats-Unis auprès de l'Allemagne?
Le Président n'a pas encore été fixé sur le statut des muletiers américains tués, et sur le fait qu'ils se trouvaient être ou ne pas être des employés du Gouvernement britannique. S'il est établi que le bateau a été mis en réalité au service de la Grande - Bretagne et s'il transportait du matériel de guerre en fraude, on ne peut pas le considérer comme " un navire marchant non armé " au sens employé par le Président dans sa note à Berlin.
On attend de l'Allemagne qu'elle fournisse une explication sur la raison du torpillage de l'Armenian, ainsi que sur la façon dont l'Allemagne conçoit son statut, et cette explication sera entendue en tenant compte d'autres faits avant que le Président ne se persuade de la nécessité d'adresser ou non une nouvelle protestation.
Le Président attend encore des indications sur le délai au bout duquel on peut espérer de l'Allemagne qu'elle réponde à la dernière note américaine sur les attaques sous-marines allemandes de vaisseaux marchands. Du fait du voyage à l'étranger du Dr Anton Meyer-Gerhard porteur de dépêches de l'Ambassadeur von Bernstorff, M. Wilson a compris qu'il y aurait un certain retard à la réception de la réponse, mais il espère qu'elle arrivera maintenant dans un avenir proche.
Après avoir consacré plusieurs heures aujourd'hui aux tâches de sa fonction officielle, le Président a coiffé un chapeau en caoutchouc et a longuement marché sous la pluie avec le Dr Cary T. Grayson dans les bois entourant Harlakenden House.




LES RUSSES AVANCENT AU SUD DU CAUCASE
L'Influence Turque Recule en Arménie et en Perse
– Des Fournitures Médicales sont Nécessaires
Publié le 28 juin 1915

TIFLIS, Transcaucasie, 24 juin, (via Saint-Pétersbourg et Londres, 21 juin.) – L'occupation par les Russes de Gob, une ville à quarante kilomètres au nord du Lac de Van, et un mouvement des forces russes vers Bitlis, Arménie, où les armées de deux commandants ont été concentrés, manifeste l'amélioration dans le Caucase du point de vue des Russes.
Les deux villes mentionnées sont reliées par plusieurs routes relativement en bon état. Les activités récentes ont grandement diminué en nombre les forces turques occupant cette région. Il y a eu un affaiblissement marqué de l'influence turque et allemande accompagné d'une montée du sentiment de la présence des russes au nord et au centre de la Perse; le moral qui règne au sein de certaines sectes musulmanes le confirme. Diverses tribus isolées des montagnes se rallient aux Russes par des déclarations d'allégeance.
Avec un seul médecin pour 40 000 personnes, parmi lesquelles celles qui ont désespérément besoin d'assistance médicale sont nombreuses, et tandis que la fourniture habituelle de médicaments et toute communication avec les Etats-Unis sont interrompues, le Révérend Dr Clarence D; Ussher de la station missionnaire de Van, Arménie, des Membres du Conseil Américain pour les Missions Etrangères, demande qu'une assistance immédiate soit envoyée sur place.
Du côté des femmes missionnaires à Van, Mlle Grisell McLaren, de la Mission Américaine, et Sœur Martha de la Société d'Aide Allemande pour la Charité Chrétienne en Orient, qui servaient volontairement à l'Hôpital Turc, ont suivi cette institution jusqu'à sa possible destination de Bitlis, une centaine de kilomètres à l'ouest de Van; on est sans nouvelles précises pour ce qui les concerne. Tout va bien pour les autres missionnaires de Van.
 




LES TURCS A NOUVEAU OPÉRATIONNELS DANS LE CAUCASE
Ils Ont Compensé leurs Lourdes Pertes en Hommes et en Munitions
Publié le 21 Juin 1915

TIFLIS, Transcaucasie, 19 juin, (via Saint-Pétersbourg et Londres, 20 juin.) – Les opérations dans les Dardanelles n'ont apparemment pas d'effet sur l'activité des Turcs sur le front du Caucase. Ils informent avoir remplacé dans un temps relativement court le Neuvième Corps d'Armée, qui a été capturé par les Russes à Sarikamish. Ils ont aussi reconstitué et fourni en munitions les Dixième et Onzième Corps, qui avaient été sérieusement réduits en nombre par les combats et la maladie.

La principale concentration turque se forme devant la ligne Olti, Melo et Kiskin, à l'extérieur de laquelle le Premier et le Sixième Corps et le reste de l'armée d'Halil Bey, qui avait été défaite à Dilman, sont à présent stationnées. En plus de l'objectif de s'opposer aux Russes de les déborder à Erzeroum, les Turcs entreprennent maintenant des manœuvres offensives. Les meneurs kurdes qui étaient responsables des massacres d'Arméniens dans le district de Van se sont volontairement rendus aux Russes et sont conduits vers l'arrière avec leurs subordonnés.



CITATION DE MAZZINI
Guérilla en Arménie

Publié le 18 juin 1915

A l'éditeur du NEW YORK TIMES :
C'est une règle établie du droit international que la protection n'est jamais ouverte aux individus privés qui prennent part à la guerre et aux bandes de guérilléros hostiles non vêtus de l'uniforme. " Ceux-là sont considérés comme hors-la-loi, et beaucoup peuvent être punis par un belligérant comme des voleurs ou des assassins. " (Halleck- Droit International et Lois de la Guerre, 386.)
Que les Arméniens à Hosrova ont violé les lois de la guerre en menant une guerre privée contre l'armée d'invasion turque est admis dans les déclarations faites par Elisabeth Marcara, et publiées dans le NEW YORK TIMES : " Quand les Kurdes (dans la présente guerre, ils constituent une partie des forces armées de Turquie et sont dirigés par des officiers turcs) ont ouvert le feu sur les portes du village,  " dit Mlle Macara, " nous avons pris nos fusils et sommes montés sur le toit. J'ai tiré quatre vingt cartouches. Les Kurdes ont été forcés de se retirer en dehors des murs village. Là j'en ai tué deux et David en a tué deux. Plus tard, nous en avons tué quatre de plus, parmi lesquels figurait leur chef […] le combat a duré trois heures […] et tout cela arriva après que les Russes aient évacué la place.
S'agissant du traitement qu'ils pourraient recevoir de l'armée américaine en pareille circonstance, je m'en réfère aux " Instructions pour le Gouvernement des Armées des Etats-Unis en Campagne " N° 100, sec. 82, 24 avril 1863 qui stipule : Les hommes faisant partie d'escouades ou les hommes qui commettent des actes hostiles […] alors qu'ils ne font pas partie de l'armée organisée hostile, et qui ne prennent pas part à la guerre de façon permanente […] sont des ennemis publics et par conséquent, s'ils sont capturés, ne sont pas fondés aux privilèges de prisonniers de guerre, mais seront traités sommairement comme des voleurs de grands chemins ou des pirates. " (Moore, revue de Droit International, Vol.VII., P.174.) A.S. Columbia University. New York, 8 juin 1915.



PILLAGE A CONSTANTINOPLE ?
Des Reportages à Rome disent que les Turcs Pillent les Maisons Chrétiennes
Publié le 17 juin 1915

Télégramme Spécial au NEW YORK TIMES.

ROME, 16 juin, - L'Idea Nazionale décrit la situation à Constantinople sous les couleurs les plus sombres. Il rapporte que les stocks de nourriture, de médicaments, et de munitions s'épuisent, que la fièvre typhoïde se développe, que beaucoup d'établissements ont été contraints de fermer du fait du manque de charbon, tandis que la flotte est immobilisée. Il dit que les maisons de Chrétiens, celles des Grecs en particulier, ont été méthodiquement mises à sac sans aucune tentative du Gouvernement d'arrêter le pillage, et que les Chrétiens qui essaient de quitter la ville , prenant avec eux tous leurs biens précieux qu'ils peuvent emporter, sont attaqués et volés par les soldats turcs.

Vingt cinq notables musulmans de Smyrne ont envoyé un télégramme à Talaat Bey, le suppliant dans l'intérêt suprême du pays, de conclure une paix séparée avec les Alliés.


LES ALLIES PUNIRONT LES TURCS QUI ASSASSINENT
La Porte est Notifiée que les Chefs du Gouvernement Doivent Répondre des Massacres d'Arméniens
Publié le 24 Mai 1915

LONDRES, 23 mai. – Dans une mise en garde officielle conjointe, rendue publique aujourd'hui, la Grande Bretagne, la France et la Russie, déclarent :
" Au cours du mois précédent, les populations kurde et turque de l'Arménie se sont livrées au massacre d'Arméniens avec la connivence et l'aide des autorités ottomanes. De tels massacres se sont produits vers la mi-avril à Erzeroum, Dertchun, Mouch, Zeitoun et dans toute la Cilicie.
" Les habitants de près de cent villages près de Van ont tous été assassinés. Dans la ville proprement dite, le quartier arménien est assiégé par les Kurdes. Au même moment, le Gouvernement Ottoman à Constantinople de déchaîne contre l'inoffensive population arménienne .
" Devant ces nouveaux crimes commis par la Turquie, les Gouvernements alliés annoncent publiquement à la Sublime Porte qu'ils tiendront tous les membres du Gouvernement, y-compris ceux de ses agents qui y sont impliqués, comme personnellement responsables desdits massacres. "
.

MASSACRES A GRANDE ECHELLE
Turcs et Kurdes ont tué par Milliers depuis le Début de la Guerre


L'une des premières étincelles de la guerre européenne qui a attisé les flammes en Orient a été celle de l'ancienne haine qui oppose, en Turquie d'Asie et en Perse, les Arméniens chrétiens aux Turcs et Kurdes mahométans.
Vers le milieu du mois de février, des récits du massacre des Arméniens ont commencé à arriver en Amérique, et les jours de 1895-96, lorsqu'être un Arménien chrétien était un danger permanent, sont revenus dans les mémoires.

[ Sur une version du télégramme reçu au Département d'Etat américain, et sur la mention du concept de crime contre l'humanité, voir la discussion
http://middleeast.about.com/od/turkey/qt/me090318.htm
en anglais, Ndt]
 



L'ARMEE TURQUE EN DEROUTE POURSUIVIE PAR LES RUSSES
LES RUSSES SAUVENT LES ARMENIENS
Les Troupes Arrivent à Van et Mettent Fin au Siège des Turcs
Publié le 25 mai 1915

TIFLIS, Transcaucasie 23 mai. (via Saint-Pétersbourg, 24 mai.) – Un détachement de soldats russes a occupé la ville de Van, en Turquie asiatique, prêtant main forte aux Arméniens, qui étaient assiégés ici par les Turcs. A l'arrivée des Russes, les Turcs ont fait retraite en direction de Bitlis.

Van, en Arménie turque, et Ourmiah, en Perse, ont été les cadres de persécutions et d'attaques sur les Arméniens par les Turcs et les Kurdes depuis plusieurs mois. La situation est devenue si grave que les puissances en Europe ont adressé des protestations à la Turquie, disant que les dirigeants turcs seraient tenus personnellement responsables des actes horribles commis sur les Arméniens.

HAYES EST PORTEUR DE DEPECHES
Le fils de l'Ex-Président Apporte des Messages de la Russie à Washington

Scott R. Hayes, le fils du précédent président Ruther B. Hayes, est arrivé tard la nuit passée de Copenhague sur le paquebot United-States de la ligne Scandinavie-Amérique avec des dépêches de l'Ambassadeur des USA à Saint-Pétersbourg pour le Département d'Etat à Washington.
Il était accompagné de Mme Hayes et prendra la route pour la capitale aujourd'hui.


6000 ARMÉNIENS  TUÉS
Atrocités turques et kurdes à Van – semblables à celles de 1895
Publié le 18 Mai 1915

Londres 18 mai 1915 – six mille Arméniens ont été massacrés à Van en Arménie, selon une dépêche reçue aux services administratifs à Londres aujourd’hui, du consul russe à Urmiah, Perse. Ce message est daté du 15 mai.

Il ajoute que les Arméniens se sont défendus âprement contre eux mais qu’une aide urgente est requise.





L'ARMEE TURQUE EN DEROUTE POURSUIVIE PAR LES RUSSES
Les Arméniens Tiennent Van Contre les Turcs et les Kurdes - Les massacres de Villageois Continuent
Publié le 6 mai 1915

TIFLIS, Transcaucasie 3 mai.- La poursuite de l'armée défaite turque sous le commandement de Khalil Bey, dans la région du Caucase de Khori-Dilman, continue, selon des avis fiables arrivés à Tiflis.

Ce combat qui a résulté en des pertes lourdes pour les Turcs a commencé le 29 avril à Hantahta, près d'Ourmiah. Au début, les Russes ont été arrêtés par les Turcs, mais ces derniers ayant reçu des renforts, et le 30 avril, les Russes ont abandonné Dilman et se sont retranchés à Magonzhio, le premier village en direction de Khori. Depuis cette position, ils ont pilonné les Turcs de tirs d'artillerie lourde jusqu'à l'arrivée de renforts russes.

Trois cents réfugiés de Dilman sont arrivés à Djoulfa, juste au-delà de la frontière russe, et 1 200 autres sont en route. Le Consul de Russie ici prend des mesures pour empêcher que les réfugiés d'Ourmiah et de Dilman n'entrent dans le Caucase.

Nersus, l'Evêque de Tabriz, en Perse, est arrivé ici. Il dit de la situation à Van qu'elle est désespérée. Huit cens Turcs, et un grand nombre de Kurdes sont en action là-bas, détruisant les villages arméniens. Des trois cents habitants de Rashva, trois seulement en ont réchappés. Les Arméniens, selon l'Evêque, espèrent encore une intervention diplomatique américaine et italienne.

A Van, où il y a un mois, les Arméniens ont été forcés d'organiser leur défense et ont barricadé la ville, ils tiennent tête aux Turcs et aux Kurdes depuis une semaine. Quatre régiments turcs, équipés d'artillerie, avancent vers ces Arméniens depuis Erzingan. Ils sont également menacés par des gendarmes de la frontière perse.

On craint que l'histoire de 1895 et 1896 ne se répète.

(Au cours de ces années, des réformes pour l'Arménie ont été demandées à la suite d'une série d'actes de répression de la part de la Turquie. La présentation de ces réformes par les Etats de l'Europe a été suivie de terribles massacres d'Arméniens, qui commencèrent en septembre 1895 et se poursuivirent en 1896).

Il est déclaré en Arménie que les Jeunes Turcs ont adopté la politique poursuivie par Abdul Hamid en 1905, en fait l'annihilation des Arméniens.

L'état de terreur qui existe a empêché les semailles et une famine est à craindre. Dans la ville d'Erzeroum, en Arménie turque, on compte aujourd'hui 300 cas de fièvre typhoïde.

 



DANS L'ATTENTE DE L'EXPULSION DES KURDES
Des Milliers de Chrétiens Veulent Retourner en Perse
Publié le 2 mai 1915

TIFLIS, Transcaucasie 27 mars, (correspondance d'Associated Press) – Plusieurs milliers des habitants assyriens de la région à l'ouest du lac d'Ourmiah ont dû s'enfuir avant l'arrivée des pillards kurdes. Quelques 45 000 à 50 000 de ces gens occupaient il y a quelques mois les jardins souriants des rives du lac. A présent, 12 000 sont réfugiés en Russie et quelques 15 à 17 000 ont trouvé refuge sous la protection du Dr Harry P. Packard de la Mission Presbytérienne Américaine à Ourmiah. Ses efforts réussis en leur faveur ont déjà été décrits par Télégramme. Son nom lui survivra dans les traditions assyriennes.
Les membres du Comité Central des Chrétiens Assyriens et Chaldéens n'attendent qu'une chose, le retour des Russes, pour se mettre à la tâche de la reconstruction, en une communauté en sécurité, ce qui subsiste de l'ancien Empire de Ninive. Les administrateurs se sont enfuis avec leur famille. Ils ne peuvent aujourd'hui qu'espérer que quelques uns de leurs parents pourront être libérés de l'état d'esclavage dans lequel les Kurdes les ont mis. Ceux qui n'ont pu s'enfuir, ou qui n'ont pas été pris pour être des esclaves, ont péri.
Les administrateurs parlent l'anglais, couramment; c'étaient à une époque des marchants prospères. C'était avant que leur petite tribu aient été pris dans l'engrenage de la grande guerre.
Jusqu'à ce que les missions américaines aient été établies dans le pays d'Ourmiah, les Assyriens maintenaient leurs traditions religieuses par la lecture deux fois par an d'une demi-douzaine de parchemins sacrés sur le Nouveau Testament, prenant en outre la précaution d'exiger de leurs jeunes les plus doués qu'ils mémorisent leur littérature sacrée dans sa totalité. Avec les écoles et les hôpitaux des missionnaires, le savoir et la prospérité se sont accrus. Les villages assyriens furent tout autant réputés pour la netteté et leur confort que leurs jardins l'étaient pour leur fertilité. Un supplément d'encouragement et de protection leur a été apporté par les Russes , qui sont arrivés dans le pays il y a environ neuf ans.
" Les Assyriens ont pris fait et cause avec les Russes dans cette guerre, tandis que les Mahométans se sont retournés vers les Turcs et l'Allemagne. Organisés et entraînés par les officiers russes, les Assyriens leur ont rendu des services appréciables en fortifiant quelques uns de leurs villages et en contrôlant la route des convois vers Ourmiah. Près de 250 étaient régulièrement enrôlés, le Comité Central leur fournissant les fonds. Par la suite, 2 000 à 3 000 volontaires étaient sous les armes et avaient reçu quelque formation.
Vers la fin de décembre, les Russes et les Assyriens ont défait un corps important de Kurdes, leur infligeant des pertes estimées à 500.
Fuyant avant de subir un massacre, 3 000 Assyriens se sont réunis dans un village fortifié, Geogtapa, et ont tenu cinq jours, perdant soixante et quinze hommes.




LES KURDES REPRENNENT LES MASSACRES
Les Attaques contre les Chrétiens en Arménie deviennent violents
Publié le Premier mai 1915

JULFA, Transcaucasie 29 avril, (via Petrograd et Londres, 30 avril) - Une reprise des massacres récents de Chrétiens en Arménie est en cours dans toute la circonscription du Lac de Van.

Les conflits entre les Arméniens et les Kurdes sont quotidiens et deviennent de plus en plus acharnés.
Un engagement d'une rare violence s'est produit aujourd'hui à Shatasch.



 

APPEL A LA TURQUIE D'ARRÊTER LES MASSACRES
L’Ambassadeur Mongenthau a été chargé de faire des démarches à la requête de la Russie.
Publié le 29 Avril 1915

 

Washington, 27 avril – Un appel au secours pour les Chrétiens arméniens de Turquie, suite aux massacres signalés, et menaces d’autres atrocités, a été transmis au Gouvernement turc aujourd’hui par les Etats Unis.

Agissant à la requête du Gouvernement russe, soumise par l’Ambassadeur Bakhmeteff, le Secrétaire Bryan a câblé à l’Ambassadeur Morgenthau à Constantinople de faire des démarches auprès des autorités turques leur demandant que des mesures soient prises pour la protection des Arméniens en péril, et pour empêcher la récurrence des violences religieuses.

L’Ambassadeur Bakhmeteff a appelé le Département d’Etat tard dans la journée avec une dépêche de son gouvernement, qui comportait un appel à l’aide au Président des Etats Unis, transmis par le Gouvernement russe, et lancé par le Catholicos de l’Eglise arménienne d’Etchmiadzine, au Caucase.

"La requête du chef de l’Eglise arménienne à ce gouvernement, transmise par l’Ambassadeur russe", dit le Secrétaire Bryan, est le premier avis officiel que le Service à reçu au sujet des massacres arméniens. Notre action a été prise comme mesure d’humanité."

L’Ambassade russe aujourd’hui a produit une traduction d’un discours récent du Ministre des Affaires Etrangères de la Douma, dans lequel était expliquée la présence des troupes russes en Perse. Le Ministre des Affaires Etrangères a dit :

"La présence de nos troupes dans le territoire perse ne constitue nullement une violation de la neutralité persane. Nos détachements ont été envoyés dans ce pays il y a quelques années pour le but précis d’établir et de maintenir l’ordre dans les kazas contigus à nos possessions, de très haute importance pour nous, et aussi pour empêcher la saisie de quelques-uns de ces kazas par les Turcs qui s’efforcent ouvertement de créer pour eux-mêmes, spécialement à Urumiah, une base pratique pour des opérations militaires contre le Caucase. Le gouvernement perse, n’ayant pas le pouvoir de maintenir sa neutralité, a répondu aux violations turques de cette dernière par des protestations, qui, cependant, n’ont eu aucun effet".
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La Turquie interdit la Croix Rouge
La Turquie ne permettra pas à l’Amérique d’aider les victimes arméniennes.


Le 29 avril 1915
 

Le gouvernement turc a informé le Département d’Etat à Washington que la Croix Rouge ne sera pas autorisée à envoyer des chirurgiens et des infirmières au secours du peuple arménien de l’empire turc. Ce sont non seulement les chirurgiens, les infirmières et leurs assistants, qui sont interdits en Turquie, mais aussi tous les autres étrangers, étrangers dans ce cas signifiant sans aucun doute les ressortissants des pays neutres.

Le Département d’Etat a informé Ernest T. Bicknell et Miss Mabel Boardman, Directrice du personnel administratif de la Croix Rouge Américaine, de la décision de la Turquie, et Miss Boardman a communiqué l’information au Docteur
M. Simbad Gabriel, du 410 West Twenty-third Street, de notre ville, Président de l’Association Générale Générale Arménienne Progressiste de notre pays.

Il y a quelques semaines, le Docteur Gabriel avait écrit à Miss Boardman au sujet des atrocités commises envers les Arméniens par les Turcs. Il avait demandé à la Croix Rouge Américaine d’envoyer des médecins et des infirmières en Turquie pour venir en aide aux victimes. Dans sa lettre, le Dr. Gabriel disait :

« Une centaine d’infirmières et médecins de la Croix Rouge Américaine peuvent opérer des miracles là-bas, non seulement grâce au pain et aux médicaments qu’ils vont donner, mais en vertu de leur présence personnelle ». Il suggérait également que les Arméniens de notre pays puissent rassembler 50 000 dollars pour les frais de la Croix Rouge.

Informant le Dr. Gabriel de l’impossibilité d’envoyer l’aide de la Croix Rouge, Miss Boardman, écrivant de Washington en date du 16 octobre, disait :

« Votre lettre du 21 septembre est arrivée durant mon absence de Washington.
A mon retour j’ai fait des enquêtes concernant la possibilité pour la Croix Rouge Américaine d’envoyer des chirurgiens et des infirmières pour l’aide aux Arméniens si les Arméniens d’Amérique collectaient des fonds pour ce but. Mr. Bicknell soumit l’affaire au Département d’Etat, et après enquête nous avons appris que le gouvernement turc avait refusé d’autoriser tout personnel étranger à entreprendre ce
travail. En conséquence, il nous serait impossible de le faire, à notre grand regret, même si l’argent était rassemblé.

Nous trouvons aussi difficile actuellement, presque impossible en fait, d’envoyer des provisions en Turquie, tout est dans une situation épouvantable en Europe. Nous avons notifié à ceux qui le désirent d’envoyer leurs contributions pour la Croix Rouge arménienne à la Croix Rouge américaine qui les transmettra par l’intermédaire de notre Ambassadeur américain à Constantinople, car il semble que ce soit la seule méthode à présent d’aider la population arménienne. Nous pouvons seulement espérer que cette situation prenne fin sous peu. Elle empire tellement de jour en jour qu’il semble qu’elle ne puisse pas durer longtemps.

« La lettre de Miss Boardman », a dit hier le docteur Gabriel, « parle d’elle-même, et je pense qu’aux yeux de toutes les personnes ayant des préjugés, elle va apporter une preuve convaincante de la réalité des histoires terribles qui arrivent de Turquie
en ce qui concerne la persécution, le meurtre et la torture exercés sur le peuple arménien. Peut-être que le Président pourrait adresser une requête personnelle aux autorités de Constantinople, afin que la Croix Rouge américaine soit autorisée à entreprendre cette mission charitable à l’égard du peuple arménien qui est victime de la plus grande et plus systématique série de massacres rapportés par l’histoire. »
 


LES TURCS DERRIERE LES RECENTS MASSACRES KURDES
La Troupe a Laissé les Kurdes Tuer des Gens par Centaines, Rapporte la Mission Américaine
LA RUSSIE EST LE SEUL ESPOIR
Seule l'Occupation de la Perse Peut Rétablir la Situation, écrit un missionnaire
Publié le 29 avril 1915

Plus de 800 Chrétiens de la population originaire de la région ont été massacré par les Kurdes, et pas moins de 2 000 sont morts de maladie à Ourmiah, en Perse, selon l'information reçue hier du Conseil Presbytérien de Foreign Missions. Les soldats turcs sont accusés de prendre part aux massacres ou de les permettre. Deux lettres ont été reçues, envoyées par le Dr W.S. Vanneman, chef de l'Hopital de la Mission Presbytérienne de Tabriz,, qui est le président du comité d'aide constitué par le Consul d'Amérique. Du fait d'une censure rigoureuse, c'est à sa femme qui se trouve à Salem, New Jersey, que le Dr Vanneman a écrit, plutôt qu'au conseil lui-même. Sa lettre a été transmise au conseil par Mme Vanneman, Dans une lettre du 14 mars, le Dr Vanneman écrivait:
" Il y a a environ dix jours, les Kurdes, à Salmas, avec la permission des troupes turques, ont groupés tous les Nestoriens et Arméniens de sexe masculin qui étaient encore là; o évalue leur nombre à 800 environ,. Quatre cents ont été emmenés à Khosrova et quatre cents à Haft Dewan, où on leur a fait croire qu'ils recevraient du pain. Ils se sont tenus là quelques jours puis ensuite ont tous été torturés et massacrés. Beaucoup de femmes et d'enfants ont été emmenés et soumis à des mauvais traitements. Cela s'est passé un jour ou deux avant que l'armée russe ait pris Salmas dans son avancée.

" Nous sommes très inquiets pour le sort d'Ourmiah, Une lettre datée du Premier Mars envoyée par le Dr Shedd ( Le Révérend Dr W.A. Shedd, de Marietta, Ohio) a été apportée par un messager il y a deux jours. On y lit que les choses deviennent pire. Gulpashan, qui jusqu'à présent n'avait pas été exposée aux attaques de Kurdes, parce qu'on ne les avait pas combattus, a été pillée et mise en ruines. Je pense que c'était le dernier village intact qui restait. Cinquante et un des hommes les plus en vue de ce village ont été emmenés au cimetière à la nuit et abattus. Les femmes et les filles qui n'ont pu s'échapper ont été violées. Ces faits sont ceux des soldats turcs.

' Quarante hommes ont été enlevés de la Mission Catholique Romaine d'Ourmiah-ville, gardés prisonniers quelques jours, puis emmenés à la nuit hors de la ville et abattus.
" Le Dr Shedd a demandé au Consul Américain de Tabriz de se rendre à Ourmiah, mais après consultation avec trois autres Consuls ici, il a été décidé qu'il serait impossible d'y parvenir. M. Paddock a télégraphié à tous les destinataires possibles pour obtenir de l'aide. Nous ne pouvons rien faire de plus.

" Nous avons entendu, mais nous ne savons pas s'il est exact que la mission à Ourmiah a été forcée de payer 40 000 dollars de rançon pour les réfugiés, et nous craignons que cela soit vrai. Le Dr Shedd écrit que pas moins de 800 personnes ont été assassinées à Ourmiah et que pas moins de 2 000 sont mortes de maladie. Cela ne concerne uniquement que les Chrétiens. Cela représente un pourcentage très important: plus de la moitié des Chrétiens se sont enfuis en Russie. "

' Dans une lettre datée du 21 mars, le Dr Vanneman a écrit:

" Nous sommes plus inquiets que jamais pour ce qui concerne Ourmiah. Le 17, les troupes turques ont attaqué notre mission et la Mission Catholique Romaine; ils ont emmené cinq prêtres d'origine russe et leur ont fait subir des mauvais traitements. Nous ne savons toujours pas s'ils ont été tués. M. Allen a été lui aussi soumis à des mauvais traitements parce qu'il avait dépêché trois messagers. Les portails de la Mission Catholique ont été incendiés et tous ont été en grand danger. Nous avons reçu une lettre de l'Ambassadeur Morgenthau qui nous dit que des ordres ont été donnés à Ourmiah pour que les Chrétiens soient protégés, mais l'ordre n'est arrivé que trop tard. Nous nous efforçons d'éloigner d'Ourmiah tous les Chrétiens.

" Quelques uns des prêtres chrétiens originaires d'Ourmiah ont été crucifiés et d'autres brûlés, mais ces derniers étaient membres d'autres confessions.

" Si les troupes russes devaient être à nouveau retirées, tous les Chrétiens devront quitter Tabriz. Nous avons reçu un secours de 86 000 dont nous avons déjà dépensé au moins 15 000 dollars. Si les personnes doivent être déplacées d'Ourmiah, et ensuite alimentées, vous pouvez imaginer ce que cela coûtera.

" Je ne pense pas que la situation réelle soit comprise en Amérique. C'est pratiquement l'extermination des Syriens (Nestoriens); et pour les Arméniens, cela va également très mal.

Le seul espoir, c'est l'occupation par la Russie. "



INTERVENTION DE MORGENTHAU
L'Ambassadeur Exprime de Vives Inquiétudes sur le Sort des Arméniens

Exclusivité du New York Times
Publié le 29 avril 1915

WASHINGTON, 18 avril .- L'Ambassadeur Morgenthau à Constantinople a informé aujourd'hui le Secrétaire d'Etat Bryan qu'avec d'autres membres du corps diplomatique de la capitale turque, il avait transmis au Gouvernement ottoman les protestations du Catholicos, chef de l'Eglise Arménienne grecque d'Etchmiadzin, au nom des Chrétiens arméniens qui ont été massacrés par les Turcs et les Kurdes dans la région transcaucasienne. George Bakhmeteff, Ambassadeur de Russie aux USA, a pris contact hier avec le Secrétaire Bryan et lui a remis le message que le Catholicos avait envoyé en Russie et que le Gouvernement russe a demandé au Gouvernement des Etats-Unis de présenter au Gouvernement turc.

Le Secrétaire Bryan a déclaré aujourd'hui qu'il apparaissait que le message qu'il avait envoyé hier à l'Ambassadeur Morgenthau s'était croisé avec le message que l'Ambassadeur Morgenthau avait envoyé, montrant qu'il avait déjà abordé ce sujet auprès de l'autorité qui convient. Le câble-gramme de l'Ambassadeur Morgenthau expliquait que le sort des Arméniens inspire une vive inquiétude au Proche-Orient. Le message ne mentionnait pas explicitement les massacres tels qu'ils sont rapportés et ne comportait aucun détail, mais il assurait au Secrétaire Bryan que la question était prise avec vigueur auprès des autorités ottomanes.



LES KURDES MASSACRENT ENCORE PLUS D'ARMENIENS
Tous les Habitants de Dix Villages Près de Van Auraient été Tués
UN APPEL EST ENVOYE AU PRESIDENT WILSON
Par le Chef de l'Eglise – Preuves d'Outrages Effrayants Vus dans les Camps Désertés
HISTOIRE D'UN GRAND EXODE
Fuite de Perse Pleine de Souffrances pour des Milliers de Personnes qui ont Echappé à l'Epée
Publié le 26 avril 1915

TIFLIS, Transcaucasie, 24 avril, (via Petrograd et Londres, 25 avril.).- Des réfugiés qui sont parvenus à atteindre la ligne de front russe rapportent que le massacre des Arméniens par les Mahométans se poursuit à une échelle même encore plus grande.. Ils disent que tous les habitants de dix villages près de Van, en Arménie, en Turquie asiatique, ont été mis à mort.
Informé des massacres à Erzeroum, Berjan et Zeitoun, ainsi que la situation à Van, le Catholicos, chef de l'Eglise Arménienne, à Etchmiadzin, près d'Erevan, a envoyé au Président Wilson un télégramme contenant un appel au peuple des Etats-Unis au nom des Arméniens.

Robert M. Labaree, un missionnaire américain à Ourmiah, en Perse, qui a visité les villages serbes et qui a recueilli les réfugiés, dit avoir trouvé en eux une humanité aussi large que leurs moyens sont limités. Les chefs de village et les représentants des organisations caritatives ont distribué huit livres de farine pour chaque réfugié en six semaines.

Associated Press a reçu des rapports sur le massacre de 800 des villageois d'Urza et de 720 de ceux de Salmas. La crainte douloureuse qui concernait les 15 000 survivants d'Urza s'est confirmée au cours d'un voyage passant par Salmas. Trois semaines n'ont pas suffi à oblitérer les signes du carnage. Des mares de sang marquaient encore l'emplacement des exécutions à Haftevan. Les couvre-chef de trente-six victimes sont visibles là où un mur de briques d'argile a été renversé sur eux. Un jeune homme nommé Hackatur a raconté l'histoire de sa fuite hors du puits où les corps des tués avaient été jetés. Il était tombé avec d'autres et on l'avait jeté dans le puits, mais il parvint à se dégager des corps gisant au-dessus de lui et il s'était enfui à la tombée de la nuit.

Tous les Chrétiens n'ont pas manqué du courage ou des moyens de se défendre. A la mission catholique dévastée de Hosrova, où quarante-huit victimes du massacre ont été enterrées, Elizabeth Marcara, une jeune-fille arménienne a raconté comment elle-même et le jeune David Ishmu avaient combattu les Kurdes. Son histoire a été plus tard amplement confirmée.

" Lorsque les Kurdes ont mis le feu aux portes du village ", nous dit Mlle Marcara, " nous avons pris nos fusils et sommes montés sur le toit. J'ai tiré huit cartouches. Les Kurdes furent forcés de se retirer en dehors du mur du village. Là, j'en ai tué quatre de plus, au nombre desquels se trouvait leur chef. Les Kurdes ont abandonné leur pillage et ont emporté leurs morts.
" Le combat a duré trois heures. La mort de leur chef a forcé les Kurdes à s'enfuir. Nous sommes descendus du toit et avons récupéré les choses que les Kurdes avaient abandonnées derrière eux. Réconfortée, je me suis enfuie avec ma famille, Nous avons vus les Kurdes occupés au pillage d'Hafgvan et avons tiré sur eux, mais ils se sont enfuis avec leur butin.
" Près de Dilman, quinze Kurdes nous attaquèrent, et j'en en tué un. Après que les Russes aient vaincu les Kurdes et les Turcs près de Khoi, un soldat raconta mon histoire au Gouverneur perse, et il envoya quelqu'un pour me chercher et m'offrit de commander un régiment de Turcs si j'acceptais de combattre les Russes. "




LES KURDES DÉGOUTENT LES TURCS
Ces Derniers Protestent contre les Atrocités des Premiers

Publié le 18 avril 1915

TABRIZ, 16 avril, (via Petrograd, 17 avril) – Des combats entre Arméniens et Kurdes sont fréquents dans les environs de Van, en Arménie turque, selon une information fiable parvenue à Tabriz, et un massacre général se prépare dans la province de Bashkala. Les Arméniens de Van s'efforcent de lever des volontaires dans la province d'Azerbaïdjan, en Perse, pour les aider contre les Turcs et les Kurdes.
Après plusieurs combats acharnés entre les Russes et les Turcs, au nord de Dilman, en Perse, les Turcs ont fait retraite au sud de Dilman. Selon une information venue de la circonscription de la rivière Tchoruk, ayant échoué dans la défense de Khopa, les Turcs ont battu en retraite au-delà d'Archava, où ils tiennent des hauteurs fortifiées et d'où ils pourront faire des sorties.
Il est question d'hostilité croissante entre les Turcs et les Kurdes, les premiers n'appréciant pas l'inhumanité des seconds. Dans les circonstances où Turcs et Kurdes servent ensemble, cette désaffection a dans certains cas approché le stade de la mutinerie. Des officiers turcs protestent contre le laisser-faire des officiers turcs de rang plus élevé, des outrages commis par les Kurdes. Il y a plusieurs cas de soldats turcs lynchant des Kurdes coupables d'atrocités peu communes.



NOUVELLES PROMESSES DE LA TURQUIE
La Protection de la Population d'Ourmiah, en Perse, doit être Assurée
Publié le 31 mars 1915

WASHINGTON, 30 mars .- Les assurances renouvelées sur la protection de tous les habitants d'Ourmiah, en Perse, où des attaques d'Américains et d'autres étrangers et dirigées contre des Chrétiens autochtones ont été rapportées, ont été remises à l'Ambassadeur Morgenthau à Constantinople par le gouvernement turc.
Dans un message au Département d'Etat, aujourd'hui, M. Morgenthau disait que les autorités ottomanes ont promis que non seulement les étrangers, mais également les populations autochtones, seraient protégées par les troupes régulières turques, à partir de samedi à Ourmiah.

Apparemment aucun avis n'a été reçu à Constantinople venant d'Ourmiah, après que l'armée régulière ne soit arrivée sur place, et d'ailleurs aucune information n'a été reçue sur leur arrivée.

Dans ses commentaires sur les rapports arrivés de Perse, le Secrétaire Bryan a rappelé les bruits circulant aujourd'hui.. Des récits relayés par de nombreux messagers, a-t-il dit, ont certainement été déformées par rapport au message d' origine, un peu comme dans le jeu auquel s'adonnent les enfants. D'autres fonctionnaires étaient eux aussi enclins à penser que les histoires d'Ourmiah étaient exagérées.

UN MEDECIN D' OURMIAH
Le Dr Yuseff Raconte les Horreurs de la Fuite Hors de la Ville

Le Dr A.D. Yuseff, qui était attaché comme médecin à la Mission Américaine d'Ourmiah en Perse, et qui se trouve à présent à New York, a parlé hier des conditions qui ont prévalu depuis la déclaration de la Guerre sainte mahométane, et le début des campagnes des Kurdes depuis les montagnes.
Selon le Dr Yuseff, la première incursion des tribus kurdes des montagnes du sud d'Ourmiah a eu lieu en octobre. Les populations des villages avoisinants ont trouvé refuge à l'intérieur des murs de la ville, dont la garnison était composée d'environ 3 000 Cosaques, qui s'y trouvaient de garde pendant les trois années de l'occupation russe de la circonscription.
Bien avant leur première attaque, le Cheikh de la tribu la plus puissante des Kurdes avait fait de fréquentes visites dans la ville, la nuit, déguisé en femme musulmane et il avait recueilli des informations détaillées sur les forces et les faiblesses de la garnison.
Forts de plus de 3 000 hommes, vers la fin du mois d'octobre, les bandits ont dévalé des montagnes, montés sur des poneys de montagne et armés seulement de haches et de longs couteaux.

Les attaques ont duré deux jours et deux nuits. La sécurité de la ville ne reposait que sur un petit nombre de fusils russes en position sur les plus hautes constructions et les murs. Au cours des combats, les Kurdes sont parvenus à s'approcher à moins de trois miles des murs. Six grands villages ont été pillés, et beaucoup des habitants qui n'avaient pu s'enfuir à Ourmiah ont été massacrés.

Après que les Kurdes aient été repoussés, le Dr Yuseff s'aperçu que beaucoup des corps de Mahométans qui étaient bien connus dans la ville, et qui avaient prêté main forte aux Kurdes pendant la bataille, avaient été enterrés à la hâte pour cacher le fait qu'ils avaient pris le parti de l'ennemi, tandis que les corps des autres Kurdes morts avaient été laissés là où ils étaient tombés.

Dans l'engagement, le Dr Yuseff a vu pour la première fois le drapeau de la Guerre sainte que les Mahométans portaient devant eux. C'était une main rouge sur un fond vert, dans lequel le rouge symbolisait le pouvoir de la force, et le vert, le pouvoir de la foi.
A 11:30 H, dans la nuit du 2 janvier, les habitants d'Ourmiah ont été réveillés et prévenus de se rendre au nord pour se mettre sous la protection des Cosaques, qui se retiraient pour aller servir en Russie.

Ne prenant que le pain qu'ils pouvaient trouver dans leur maison, le Dr Yuseff et sa femme s'en sont allés à dos d'un unique cheval, et avec un groupe d'environ 5 000 Chrétiens, ont commencé leur fuite vers la sécurité. Du fait de la neige et du froid intense, le voyage à Djoulfa leur prit dix jours.

Beaucoup d'enfants et de personnes âgées moururent sur la route, et tous les réfugiés ont souffert des rigueurs du froid et de la faim. Pendant des jours, leur seule boisson était de l'eau saumâtre. Tout au long de la route, ils voyaient les traces du ravage des Kurdes. Dans un village, plusieurs petits enfants avaient été tués et leur corps jeté sur le bord de la route.
Une large proportion des habitants d'Ourmiah, cependant, avaient choisi de rester dans la ville, avec parmi eux, l'essentiel de l'effectif de la Mission américaine. C'est pour la sécurité de ces personnes, qui ne reposait que sur la protection du drapeau américain, que leurs amis ici sont inquiets. Selon le Dr Yuseff, au moment de la fuite d'Ourmiah, tout le monde savait dans la ville que le chef kurde avaient annoncé qu'il épargnerait la Mission américaine à tout prix.

Deux jours après que les réfugiés aient quitté Ourmiah, les Kurdes ont fondu sur la ville, et comme premier exploit guerrier, soixante et quinze Chrétiens, parmi eux un évêque, furent pendus.

Le Dr Yuseff et son épouse ont gagné la Russie sous la protection d'un passeport provisoire qui leur fut remis par le Consul de Russie à Khoï, en Perse, puis finalement la Norvège.


L'ARMEE TURQUE MAINTENANT ATTENDUE A OURMIAH
Les Troupes Auraient dû y Arriver Samedi Passé, Déclare Constantinople.
Publié le 30 mars 1915

WASHINGTON, 29 mars .- Les troupes régulières turques devraient être arrivées samedi dernier à Ourmiah, au nord de la Perse, où des Américains et d'autres Chrétiens ont été attaqués par des bandits kurdes, selon des déclarations officielles faites à l'Ambassadeur Morgenthau à Constantinople par le Grand Vizir Turc.
L'Ambassadeur a rapporté aujourd'hui sa conversation au Département d'Etat, ajoutant que le Bureau de la Guerre turc l'avait informé qu' " aucun acte de violence n'avait été commis à Ourmiah. "

Les officiels du Département d'Etat ont noté que les affirmations du Grand Vizir et du Bureau de la Guerre turc ne correspondaient pas à d'autres rapports sur la situation à Ourmiah. Le Grand Vizir a dit que les atrocités rapportées étaient " grossièrement exagérées, " tandis que le Bureau de la Guerre a nié que de quelconques désordres se soient jamais produits.
Les rapports sur des attaques contre des étrangers sont virtuellement tous issus de Tiflis, qui est éloigné d'Ourmiah, et la communication entre ces deux villes est difficile au point que des erreurs sont à craindre.

On comprend que le Chargé d'Affaires perse là-bas s'est efforcé d'obtenir des informations claires sans y parvenir. Cependant, dans la mesure où le Grand Vizir turc a assuré à M. Morgenthau que des instructions avaient été envoyées aux autorités pour interdire toute manifestation antichrétienne, et parce que les troupes régulières turques doivent faire respecter ces instructions, les personnels du cabinet et diplomatique ici pensent qu'il y peu de risques que de nouvelles attaques aient lieu, quoiqu'il ait pu se passer avant l'arrivée des troupes régulières.

M. Morgenthau a également rapporté que les institutions éducatives étrangères en Turquie avaient reçu un délai supplémentaire, jusqu'en septembre, avant que ne soient mises en application les instructions nouvelles du Gouvernement turc relatives au retrait des Capitulations qui garantissent les droits extra- territoriaux. Le Gouvernement américain a protesté en temps utile contre cette décision, parce qu'elle affecte les écoles et les lycées des missions. M. Morgenthau a dit que les directeurs des écoles des missions étrangères avaient salué ce délai comme une victoire et se satisfaisaient de cette situation.

En faisant cette concession, le Gouvernement turc avait demandé que les noms des directeurs des diverses institutions soient déclarés à l'autorité de l'instruction publique, et M. Morgenthau a dit que cette condition avait été remplie.

D'après les fonctionnaires, ici, la mise en application de la nouvelle disposition devrait virtuellement mettre fin à l'utilité des écoles de missions, car elle les place directement sous le contrôle turc



LA PLAINE ENTIERE PARSEMEE DE CORPS D'ARMENIENS
Des Turcs et des Kurdes Auraient Massacré Hommes, Femmes et Enfants

Publié le 20 mars 1915

LONDRES, 19 mars.- Des terribles nouvelles de la situation en Arménie sont parvenues aux dirigeants du Fonds de la Croix-Rouge pour l'Arménie et ont été rendues publiques par eux-mêmes.
Le dernier récit est celui d'un docteur Arménien du nom de Derderian, qui dit que la plaine d'Alashgerd est virtuellement couverte de corps d'hommes, de femmes et d'enfants.
Lorsque les forces russes ont battu en retraite dans cette circonscription, les Kurdes se sont rués sur les gens sans défense et les ont enfermés dans des mosquées. Les hommes ont été assassinés et les femmes emportées dans les montagnes.
Selon les organisateurs du Fonds de la Croix-Rouge il y a à présent dans le Caucase 120 000 Arméniens dans le dénuement.


LA RUSSIE AVANCE EN ASIE
A Poussé les Turcs Hors de Transcaucasie – Tient la Mer Noire.
Publié le 2 mars 1915

Par Câble Spécial au NEW YOTK TIMES

PETROGRAD, Premier mars, (Dépêche au London Morning Post.) - Les troupes russes ont repris leur marche en avant sur le front asiatique, ayant repoussé les Turcs de la région de Transcaucasie. Les Russes ont à présent effectué plusieurs marches en avant, balayant, détruisant et capturant des détachements qui ont renoncé à opposer toute résistance. Ils approchent maintenant Olti Chaï le long

Suite en Page 3.
LES TURCS SE REGROUPENT SUR LES DARDANELLES
Suite de la Page 1.

de l'une des grandes routes en direction d'Erzeroum venant de l'ouest. De l'est également, une certaine activité se manifeste, les Russes ayant pris quelques canons aux Turcs dans un accrochage dans les cols en direction du sud d'Alashkort. Les deux forces à égale distance de l'objectif, s'en approchent simultanément,
On n'a rien appris de plus sur l'incursion des Turcs en Perse, qui s'est terminée de façon désastreuse à Tabriz.
D'après tous les récits qui nous parviennent, les Turcs sont vraiment malades de l'aventure dans laquelle ils ont été forcés de s'engager par le Goeben1 pour le compte de l'Allemagne
L'Amiral Bernhardt, commandant la Flotte Russe de la Mer Noire, a annoncé récemment que les Russes avaient le contrôle de la Mer Noire, dans la mesure où
le Goeben est désormais incapable de menacer les navires russes du fait de sa puissance supérieure.
La reprise de l'activité sur terre en Asie coïncide avec l'opération navale des alliés de la Russie dans les Dardanelles, les assurant une fois encore de la parfaite concertation des plans qui guident les opérations alliées tout au long de la guerre.

Le Goeben est ce croiseur allemand qui sous pavillon turc, traversa le Bosphore pour aller bombarder le 29 octobre 1914 les ports russes de la mer Noire, ce qui marqua l'entrée de la Turquie dans la Première Guerre Mondiale.



100 000 ARMÉNIENS DANS LE BESOIN
Le Commission du Centre de Secours de Tiflis Appelle à l'Aide
Publié le 21 janvier 1915

BOSTON, 20 janvier.- La situation de 100 000 Arméniens, qui ont émigré du territoire turc vers la Transcaucasie russe, est qualifiée de déplorable dans un télégramme de la Commission du Centre de Secours pour l'Arménie, à Tiflis, reçu aujourd'hui par Miran Sevasly, président de la Commission Nationale Arménienne de Défense. Le message avait été approuvé par le Catholicos Seuranian, Primat de l'Eglise Arménienne, et porte la signature de l'Evêque Mesrop. On y lit:
" Du fait de la guerre avec la Turquie, près de 100 000 Arméniens sont venus dans le Caucase pour sauver leur vie. Leur situation est extrêmement précaire. Beaucoup meurent de froid et de faim. Pour éviter à notre peuple une catastrophe, nous avons besoin de beaucoup d'aide. Au nom de ces martyrs, nous vous prions d'organiser une collecte d'argent. Adressez les dons à Thourinoff, Directeur de la Bank of Currency, Tiflis. "



LES RÉFUGIÉS ARMÉNIENS SE COMPTENT PAR MILLIERS
8 000 Ont Déjà Passé la Frontière Russe – Dans une Situation Pitoyable
Publié le 15 janvier 1914

PARIS, 14 janvier.- Une dépêche adressée à l'Agence Havas de Tiflis, capitale de Transcaucasie, dit que le nombre d'Arméniens qui ont fui et passé la frontière s'élève déjà à 8 000.
Ils sont dans un état pitoyable, d'après le correspondant.
 


LES RUSSES VAINQUEURS EN ARMENIE
Les Turcs Abandonnent des Equipements – Le Bruit des Révoltes du Soudan Arrive à Constantinople

Publié le 22 décembre 1914

PETROGRAD, 21 décembre - Le communiqué officiel qui suit était issu la nuit précédente du Quartier Général de l'Armée du Caucase:
" Dans la direction de Van le 20 décembre, des engagements se sont produits qui ont abouti à la défaite des Turcs, parmi lesquels se trouvent des blessés en grand nombre. Au cours de la poursuite de l'ennemi, nous avons capturé une pièce d'artillerie de montagne avec 500 autres armes et matériels.
" Dans la direction de Sarikamish (une circonscription transcaspienne) il y a eu plusieurs engagements de moindre importance. ".


DÉROUTE DES TURCS EN ARMÉNIE
Les Russes Menacent Sérieusement les Ottomans dans le Caucase
Publié le 17 mars 1915

LONDRES, 18 mars.- Un télégramme Reuter de Petrograd dit que les Turcs, qui ont perdu récemment des points importants dans la région de la rivière Tchorouk, en Arménie turque, ont complètement abandonné leurs positions aux Russes.
Ces derniers menacent sérieusement les Turcs dans la circonscription d'Olti en Transcaucasie.


VENUS D'AMERIQUE POUR COMBATTRE
Un Détachement d'Arméniens Accueilli dans l'Enthousiasme à Tiflis
Publié le 8 janvier 1915

LONDRES, 7 janvier. – Le correspondant de Reuters à Petrograd transmet un message depuis Tiflis informant qu'un détachement de volontaires arméniens venus d'Amérique y était arrivé. Les volontaires ont reçu un accueil enthousiaste.

Les volontaires arméniens sont évidemment ici pour servir dans l'Armée Russe dans la campagne contre la Turquie, dont les troupes progressaient en direction de Tiflis, avant, comme en informait Petrograd il y a deux jours, d'être défaits de façon désastreuse. Tiflis est une ville russe de la région de Transcaucasie [Transcaucasie, car le terme est issu de Russie, NdT] .

Le territoire reconnu sous le nom d'Arménie qui n'est pas une entité politique, comporte une partie de la Transcaucasie.



DES CHRÉTIENS PENDUS DANS LA RUE
La Situation des Arméniens à Erzeroum est très précaire
Publié le 14 Décembre 1914

LONDRES, lundi 14 décembre - Une dépêche de Petrograd au The Times dit :

" Des notes reçues du front à Erzeroum, en Arménie turque, décrivent la situation de 20 000 Chrétiens là-bas come précaire à cause de leurs sympathies russes.
" Trois cent mille hommes de troupe turques sont mobilisés à Erzeroum. Des centaines d'Arméniens ont été emprisonnés et beaucoup pendus dans les villes, sans procès, comme exemples. "



ARRIVÉE D'UNE RÉFUGIÉE AGÉE DE 100 ANS
Elle fuit l'Arménie avec sa fille âgée de 80 ans
Publié le 21 novembre 1914

Madame Tokany Stephain, âgée de 100 ans, et sa fille, Madame Hiranes Paklaïan, âgée de 80 ans, sont arrivées hier sur le paquebot Roma de la compagnie Fabre, au terme de leur longue fuite de la guerre en Arménie turque. C'est la première fois de leur vie qu'elles se sont éloignées de plus de 30 km du petit village arménien où elles sont nées. Les deux femmes ont bien supporté leur voyage, même s'il a fallu aider la mère à emprunter la passerelle pour rejoindre le quai. Elles ont été accueillies par leurs parents qui les ont emmenées chez eux, à Trenton, dans le New Jersey.

G. dos Santos Almeida, un Brésilien planteur de café, est lui aussi arrivé sur le navire, après un tour du monde. Il a déclaré que lors de son séjour à Lisbonne au Portugal, il a pu assister à plusieurs manifestation par les troupes en faveur des Alliés.


LES RUSSES VAINQUEURS EN ARMENIE PERSE
Les Kurdes reculent devant eux, mais selon certaines sources, ils se regrouperaient

COMBATS PRES D'OURMIAH
Siège de l'Activité Missionnaire Américaine
Accrochages sur la Frontière de Batoum
Publié le 20 novembre 1914

PARIS; 19 novembre – Une dépêche de l'Agence Havas d'Ourmiah, en Perse, dit :

" Les Kurdes; partout, cèdent devant l'avancée des troupes russes, contre lesquelles ils ne se risquent plus qu'à des attaques sporadiques.

" Ces éléments des forces kurdes, précédemment défaits par les Russes à Tergeven se replient à Schalibinan où ils se regroupent. "


LES RUSSES METTENT LES KURDES EN DÉROUTE
Combat de Cavalerie en Arménie
Les Turcs continuent d'annoncer des Victoires
Publié le 15 novembre 1914


 

PETROGRAD, 14 novembre – Une communication officielle reçue du Quartier Général de l'armée du Caucase dit:

" Il n'y a rien eu de nouveau dans la journée du 13 novembre. Le 12 novembre, plusieurs détachements de cavalerie Kurdes ont fait leur apparition au sud de Karakilissé et Alashkerd et se sont affrontés à notre cavalerie.

" Submergés par la force de nos cavaliers, les Kurdes ont été mis en déroute.

Une autre déclaration issue de l'Etat-major de l'armée russe du Caucase dit:

" Le combat dans la région autour de Koprukeui se poursuit. Il n'y a pas eu d'engagements dans la province de Zatchorokh, dans les vallées du Bayazid et de l'Alashkerd, ou sur la côte de la Mer Noire. "


LA TURQUIE NIE AVOIR BATTU EN RETRAITE
Déclaration de l'Etat-major à Propos des Opérations en Arménie
Publié le 1 décembre 1914
 

BERLIN, 30 novembre (par télégraphie sans fil à Sayville, Long Island) -
L'Etat-major turc, apprend-on à Constantinople, nie que l'armée turque engagée contre les Russes ait battu en retraite à Erzeroum.
 


IMPATIENTS DE COMBATTRE LES TURCS
Les Arméniens et les Caucasiens Engagés dans une Force de Volontaires
Télégramme spécial au NEW YORK TIMES

Publié le 31 octobre 1914

PETROGRAD, 30 Octobre – (Dépêche pour la Chronique Quotidienne de Londres) – L'Ambassadeur turc n'a pas encore quitté Petrograd et l'Ambassadeur russe n'a pas quitté Constantinople.
L'impression dominante ici est que l'Allemagne a forcé le conflit contre la volonté de la majorité des membres du gouvernement turc.
La Russie est bien préparée à la situation nouvelle créée par la Turquie. La flotte de la Mer Noire est prête depuis longtemps, et en plus des troupes régulières du Caucase, un corps de volontaires a été organisé parmi les Arméniens, les Géorgiens et les Mahométans. Les Arméniens en particulier, apprécient intensément la perspective de combattre leur ennemi héréditaire, et des riches marchands arméniens contribuent largement pour donner aux forces de volontaires l'équipement nécessaire.
Les montagnards du Caucase s'enrôlent eux aussi, avec le plus grand empressement, La plupart d'entre eux sont des Mahométans, mais leur sympathie ne va pas vers la Turquie, et combattre est pour eux un souffle de vie. Ils ne demandent aucun autre privilège que de pouvoir utiliser lerus chevaux et leurs fusils contre les ennemis de la Russie.
La population tartare installée dans le Caucase, qui a été soumise plus directement aux influences ottomanes, a fourni d'innombrables preuves de sa loyauté envers la Russie.
Les journaux de Petrograd expriment des préoccupations à propos de l'attotude de la Bulgarie, mais la plupart d'entre eux refusent d'admettre qu'elle se joigne à la Turquie contre l'empire qui l'a libérée du joug ottoman.
 




Un Mouilleur de Mine Torpillé
L'Avance Ottomane en Arménie Contrôlée

Publié le 27 novembre 1914

PARIS, 27 novembre – Une dépêche de l'Agence Havas d'Athènes informe que des avis reçus dans la capitale grecque de l'île de Mytilène font état d'un mouilleur de mine turc torpillé et coulé dans le Bosphore.


DEFAITE DES TURCS EN ARMENIE
Les Russes les Poursuivent – Combats en Territoire Perse
Publié le 25 novembre 1914

PETROGRAD, 24 novembre – La déclaration suivante de l'Etat-major de l'armée russe dans le Caucase a été rendue publique hier soir:
" Dans la région de la rivière Tchorouk (Arménie russe), les combats se sont accrus en intensité hier.
" Dans la direction d'Erzeroum, nous avons repoussé les Turcs sur la totalité du front et les avons forcés à battre en retraire. Nos troupes continuent énergiquement à les presser.
" Il n' y aucun changement dans les autres régions. "
Une communication de l'Etat-major du Caucase faite plus tôt et rendue publique aujourd'hui, et datée du 22 novembre, informe que:
" Dans la direction d'Erzeroum l'avant - garde de l'armée russe continue à repousser l'ennemi, après avoir mis en déroute une colonne turque, un dépôt et un train de munitions ayant été capturés.
" Depuis Karakilissé jusqu'à la vallée d'Alashkerd des accrochages ont eu lieu, qui ont tourné en notre faveur.
" Dans la province perse d'Azerbaïdjan, les Turcs ont été défaits dans la région du Col de Khanasur, et aussi dans les cols joignant Dilman à la route de Katur. Dans ces engagements, les troupes russes ont capturé quelques pièces d'artillerie turques.


MITRAILLEUSES TURQUES AU SOMMET DES COLLINES
L'Avance Russe en Arménie Ralentie – Villages désertés
Publié le 22 novembre 1914

PETROGRAD, 21 novembre, (via Londres) – Des reportages reçus du Caucase font état d'une avance russe dans le Caucase exempte de toute opposition sérieuse, même si les forces d'invasion sont sous le feu de l'artillerie légère turque, postée sur les sommets des collines, pratiquement en permanence.
Il n'y a presque pas de routes dans la région de la frontière russo-turque, et les Russes doivent passer les cols en tirant leurs chariots de munitions et leurs canons à la force des bras.
Les villages turcs à travers lesquels sont passés les Russes sont désertés et vidés de toutes provisions. Ce n'est que dans les villages arméniens que des approvisionnements ont pu être trouvés.


DESORDRES EN TURQUIE
Chrétiens et Kurdes Résistent à la Mobilisation – Conflit avec les Arméniens.

Publié le 4 septembre 1914

PETROGRAD, (Saint Petersbourg) 8 sept. – La mobilisation turque sur la frontière avec la Perse est lente. Beaucoup de Chrétiens et de Kurdes ont refusé de se joindre au mouvement. Les Turcs enrôlent de force toute personne d'âge militaire.

Il y a eu de sérieux conflits entre Turcs et Arméniens à Bitlis, en Arménie Turque.
 


LES TURCS CONTINUENT DE MASSACRER A OURMIAH
Ils Entrent de Force dans la Mission Américaine et Massacrent des Chrétiens

UN APPEL EST ENVOY
É A LA RUSSIE
Mais la Turquie A Aussi Maintenant Promis de "Protéger" les Etrangers, et un Affrontement Pourrait Se Produire
Publié le 27 mars 1915

TIFLIS, jeudi 25 mars (via Petrograd, 26 mars.)—Les troupes turques ont commis de nouveaux actes de violence, à la Mission Américaine à Ourmiah, en Perse du Nord, selon un message du Vice-roi local reçu de Gordon Paddock, le consul américain à Tabriz.

M. Paddock transmet un message de Robert M. Labaree, un missionnaire à Ourmiah, informant que le consul turc à Ourmiah est entré de force dans l'enceinte de la mission avec un certain nombre d'hommes de troupe régulières et emmené quelques réfugiés Assyriens chrétiens, qui ont été ensuite massacrés.

Les Turcs ont aussi frappé et insulté les missionnaires américains.


POLOGNE, SERBIE, ARMENIE
Publié le 25 mars 1915

Pire encore que le cas de la Belgique est celui de la Pologne. Les hommes de Belgique n'ont pas été enrôlés dans des armées hostiles pour s'entre-tuer. Ce qui reste de l'héroïque armée belge et de son gouvernement est sous la protection des Alliés, et la nation belge est approvisionnée par des peuples amis. Les vagues dévastatrices de la guerre, à la suite de la première invasion, n'ont pas balayé la Belgique, causant de terribles malheurs à la population. La Pologne, elle, a été exposée aux impitoyables brutalités de la guerre sans pouvoir bénéficier de cette relative modération.

La Serbie, déchirée par trois guerres consécutives, est dans une situation pire que celle de la Pologne. En dépit de son aversion viscérale pour les Autrichiens, à la fin de l'hiver, la petite nation gît sans assistance en face d'une armée vengeresse et soumise aux horreurs d'une épidémie qui revêt des formes diverses.

Les plaines d'Arménie sont envahies de fugitifs fuyant les Turcs. Tous les hommes valides d'Arménie ont été traînés dans les champs de bataille des Turcs, tandis que dans les hautes terres enneigées et les vallées, les femmes, les enfants et les vieux meurent de faim par milliers.
La Belgique souffre encore. Toutes les organisations de secours sur cette terre malheureuse ne disposent pas suffisamment de ressources, mais elles sont bien connues. Il est par contre moins connu que le siège de l'Armenian Relief Fund [Fonds de Secours Arménien], est au 354 de la Quatrième Avenue, et que celui du Polish Relief Fund est au 265 Central Park Ouest. La Société de la Croix-Rouge, dont le siège national est à Washington, fait tout ce qu'elle peut en faveur de ces pays durement atteints, mais aussi pour la Serbie, avec des experts sanitaires qui seront dépêchés pour contenir les épidémies sous les auspices de la Croix-Rouge et de la Fondation Rockefeller. Pour la Serbie, la Pologne et l'Arménie, il faut d'urgence plus d'argent.

 


LES TURCS RENOUVELLENT LES MASSACRES
Soixante Familles Chrétiennes Massacrées dans un Village au Nord de Smyrne
Câble Spécial au NEW YORK TIMES
Publié le 22 mars 1915

ATHENES, 22 mars, (Dépêche au London Daily News).-
Des nouveaux massacres de Chrétiens sont signalés dans les environs de Aivali, sur le côte anatolienne au Nord de Smyrne.
Soixante familles dans le village de Kimeril ont été massacrées.

 


LA PLAINE ENTIERE PARSEMEE DE CORPS D'ARMENIENS
Des Turcs et des Kurdes Auraient Massacré Hommes, Femmes et Enfants
Publié le 20 mars 1915

LONDRES, 19 mars.- Des terribles nouvelles de la situation en Arménie sont parvenues aux dirigeants du Fonds de la Croix-Rouge pour l'Arménie et ont été rendues publiques par eux-mêmes.

Le dernier récit est celui d'un docteur Arménien du nom de Derderian, qui dit que la plaine d'Alashgerd est virtuellement couverte de corps d'hommes, de femmes et d'enfants.

Lorsque les forces russes ont battu en retraite dans cette circonscription, les Kurdes se sont rués sur les gens sans défense et les ont enfermés dans des mosquées. Les hommes ont été assassinés et les femmes emportées dans les montagnes.

Selon les organisateurs du Fonds de la Croix-Rouge il y a à présent dans le Caucase 120 000 Arméniens dans le dénuement.


MASSACRES PAR LES TURCS DANS LES VILLES DU CAUCASE
Les Arméniens Entraînés dans les Rues et Abattus ou Noyés - Même les Amis de Longue Date ne sont pas Epargnés
Par Câble Spécial au NEW YORK TIMES
Publié le 23 février 1915

PETROGRAD, 22 fév., (Dépêche au London Times.) – Des détails viennent seulement d'être révélés sur les horreurs commises par les Turcs pendant leur occupation d'Ardanuten, en Transcaucasie, près de la frontière arménienne.

Le correspondant à Tiflis de Russkoe Slovo informe que dans un premier temps, les Turcs se sont contentés de pillages et n'ont tué qu'une quinzaine de civils; mais ayant appris, après le 30 décembre, que les Russes occupaient Ardahan, les Musulmans de l'endroit ont jeté le masque et ont organisé le soir même un massacre systématique.

Cent cinquante Arméniens ont été entraînés hors de chez eux et ont été abattus ou égorgés dans les rues.. De vieux résidents turcs, qui vivaient pendant des années en bons termes avec les Arméniens, ont massacré de sang froid ces anciens voisins, comptant méticuleusement les cadavres pour s'assurer que les familles avaient été entièrement anéanties.

Cinquante Arméniens ont été sortis des prisons, et après les avoir dévêtus, forcés de se jeter dans le gouffre de Jenemdere, le " Trou du Diable ", jusqu'au moment ou l'un d'entre eux ayant entraîné un Turc avec lui, ils abattirent les suivants.

Deux cent cinquante ont été massacrés Tamvot, et les femmes emportées en captivité.

Les Turcs n'ont pas permis l'enterrement des corps ; ils ont été abandonnés aux chiens qui les ont dévorés avant que les Russes n'arrivent.


COMMENT L'EMPIRE TURC DEVRAIT ETRE RECONSTITUE APRES LA GUERRE
Écrit pour le NEW YORK TIMES par un SPECIALISTE DES AFFAIRES TURQUES
Publié le 24 janvier 1915

"Un spécialiste des affaires turques" dont le nom n'est pas indiqué a écrit cette analyse en 1915.
Au-delà de généralisations qui auraient du mal à passer de nos jours, en particulier lorsqu'elles s'appliquent à un ethnie et de façon à ce point schématique, on peut trouver dans cet article beaucoup d'indications intéressantes. Les six siècles de présence turque en Asie mineure y sont décrits en termes très éloignés de l'idée de tolérance que certains essaient de faire passer.
Notons la liste impressionnante des peuples qui ont subi la domination des Turcs et les massacres qui l'ont accompagnée, "source perpétuelle depuis des siècles de complications internationales et de souffrances humaines interminables".
Notons également l'idée que les six vilayets arméniens devraient être attribués non pas à l'Arménie la Turquie une fois vaincue, mais à la Russie.
Cette même idée reviendra cinq ans plus tard à la conférence de la Paix à Paris en 1920, exprimée par Lloyd Georges, parce que la population arménienne, réduite dans les conditions que l'on sait, lui paraissait trop faible au regard de l'étendue du territoire envisagé.
Notons aussi que la contrée appelée à l'époque Syrie était peuplée majoritairement en 1915 d'Arabes chrétiens. Il y a moins de un siècle.
Enfin, nos amis Juifs seront contents de voir confirmée déjà en 1915, l'idée de création d'un Judée indépendante. Un an avant les accords Sykes-Picot : on peut penser que l'auteur de l'article est de nationalité britannique.  GB

La Turquie est le second responsable du déclenchement de la guerre, parce que la guerre des Balkans est née de son incroyable système de domination et de la controverse austro-serbe qui en a résulté. Son incapacité permanente et fatale à gouverner ses territoires immenses a excité l'appétit et les ambitions des puissances et en a fait une pomme de discorde entre elles. C'est un fait bien connu que le maintien de l'entité politique turque dans les 200 ans qui précèdent n'a été possible que grâce à la rivalité des Grandes Puissances entre elles. L'histoire du Turc est marquée en permanence par le sang, le feu et la destruction. Dès le début même de sa naissance, il était voué à l'échec. A la suite du désordre et de l'anarchie nés largement des dissensions religieuses, des croisades, des bouleversements politiques auxquels l'Orient a été livré au Moyen-âge, il a émergé des confins de l'Asie Centrale, barbare primitif, et ayant été converti à la foi, il a porté, partout où il est allé, l'étendard vert de l'Islam. Rejetant tout compromis et défiant tous les canons de la décence, il a conquis, dans sa marche irrésistible et balayant tout sur son passage, une douzaine de principautés. Sa puissance en Asie, en Afrique et en Europe reposait sur la force cruelle de son épée. N'étant pas en mesure de comprendre la civilisation des races assujetties, il les abandonnait, séparément et distincts entre eux à l'administration de leur église et de leur système d'enseignement. Mais dès l'instant même où il voyait les signes d'un progrès dans les activités de ses sujets et la survivance de leurs aspirations, il recourait au langage du fer et de la poudre. Une fois arrivé au sommet de sa puissance et dès lors que sa domination semblait à l'abri des agressions extérieures, il revenait à sa vie naturelle de luxure et de sensualité. Dénué totalement du sens de la justice et du sens de l'administration, la domination qu'il a mise en place a toujours été caractérisée par une indolence et une incompétence officielle, les pots-de vin honteux et la corruption. Toujours minoritaire, sans aucun système social propre, sa religion en conflit permanent avec celles des races sujettes, sensuel, dans la luxure, indolent, menteur, et incorrigible, il était destiné à l'échec depuis le début.

Sans remonter trop en arrière, si nous nous penchons sur la nature de l'existence des Turcs au cours du vingtième siècle, nous pouvons aisément en savoir suffisamment sur son caractère. De la nature intolérable de sa domination sont nées les insurrections serbes de 1804 et 1817, les massacres grecs de 1821, et la guerre russo-turque de 1828, quand la Grèce, misérable province turque, se libéra de la domination turque et la Serbie devinrent autonome; les massacres de Chrétiens maronites en 1860; les massacres des Chrétiens en Bulgarie, en Bosnie-Herzégovine en 1877; les massacres des Arméniens en 1894 et 1896; la guerre Gréco-turque de 1898; les massacres en Macédoine en 1903; encore les massacres des Arméniens en 1909 en Cilicie, sous le pouvoir Jeune Turc, qui en disent suffisamment sur l'image horrible de ce qu'a été le Turc. Il a non seulement étouffé les sources économiques et intellectuelles de l'Orient, mais est devenu une barrière infranchissable entre l'Orient et l'Occident. A l'humiliation de la Chrétienté, il faut dire que la nuisance turque aurait été impossible sans la diplomatie cruelle des Grandes Puissances en Europe, dont la diplomatie a été influencée non par des considérations humanistes, mais par des considérations d'intérêt national et de prestige. Et cela en dépit du fait que le caractère insensé de cette sorte de diplomatie a été démontrée en de nombreuses instances, parce qu'aucune puissance ne peut maintenir un pouvoir à longue échéance à Constantinople sans être trahi au pire moment en faveur d'une autre puissance.

Tout récemment, au cours d'une conversation avec un membre dirigeant du cabinet turc, j'ai exprimé des sérieux doutes sur la possibilité que l'Empire turc soit réformé par la seule volonté de l'élément turc. Il faut noter que sur une population de l'Empire turc de 20 millions, pas plus de 6 à 7 millions ne sont des Turcs. En Turquie européenne et en Anatolie, où doit se trouver la plupart de l'élément turc, les Turcs sont en minorité. Il est admis que les Grecs et les Arméniens, qui ensemble sont près de cinq millions, en nombre égal, sont supérieurs moralement et intellectuellement. Ce sont des marchands et des banquiers consommés. Le Juif et l'Arabe chrétien, connus sous le nom du Syrien, sont les égaux du Grec et de l'Arménien. Le Grec et l'Arménien représentent à peu près 25% de la population de Turquie. Ils contrôlent à peu près 70% de son commerce, tandis que le Turc qui représente à peu près 30% de la population contrôle 10% de son commerce. Dans le domaine de l'éducation, il est incomparablement loin derrière le Grec et l'Arménien. Comme mahométan, il ne se s'insère pas socialement avec les races chrétiennes, et par conséquent, il ne peut assumer la place qui lui incombe dans la direction du système social.

Il est difficile de voir comment le fier Empire allemand peut engager sérieusement des relations avec ces aventuriers, arrivistes, malhonnêtes, astucieux visionnaires qui en l'espace de sept ans, ont entraîné leur pays dans quatre guerres étrangères, deux guerres civiles et perdu un quart de leurs possessions, et qui donne actuellement une excellente promesse de réduire l'ancien Empire turc géant en une minuscule principauté.
 
Un pays avec une grande responsabilité dans la survenance de ce conflit capital, source perpétuelle depuis des siècles de complications internationales et de souffrances humaines interminables, l'Empire turc devrait être répartit entre les principaux peuples qui y vivent, lesquelles, par leur tradition historique et leur propre velléité à se gouverner elles-mêmes, sont fondées à être reconnues par les Grandes Puissances qui, au cours des siècles, ont fixé des zones d'influence pour elles-mêmes et par consentement mutuel. A savoir :

TURQUIE

 

km²

Ismid
Bigha
Brousse
Castamuni
Ankara Ouest, Kizil Irmak Ouest
Konia Ouest
Smyrne Est
Total

8 029
6 734
64 750
51 800
31 080
55 685
15 540
233 618

GRECE

Smyrne Ouest

38 850

ARMENIE

Kharpout
Sivas
Ankara Est,
Kizil Irmak Est
Konia Est
Alep Nord, Aïntab nord inclus
Adana
Total

32 375
63 455
40 016
7 915
9 583
40 145
233 489

SYRIE, PROTECTORAT Français

Alep sud de Beilan à l'est inclus,
et sud de Urfan à l'ouest inclus
Beyrouth, sauf la partie de la Palestine
Syrie, nord de Damas inclus
Liban
Zor, ouest de l'Euphrate
Total


58 275
8 288
38 850
3 004
28 490
136 907

JUDEE

 

km²


Beyrouth, sud du Liban
Syrie, sud de Damas
Jerusalem, sauf la ville et ses faubourgs
Total

20 720
56 980
11 655
89 355

COMMISSION INTERNATIONALE

Jerusalem et faubourgs

5 180

ANGLETERRE

Bagdad
Bassora
Hejaz
Yemen
Zor, ou Mésopotamie, ouest de l'Euphrate
Mossoul , sud de Zab mineure
Total

110 075
139 860
251 230
194 250
51 800
38 850
786 065

RUSSIE

Trebizonde
Erzeroum
Van
Bitlis
Diarbekir
Mossoul, nord de Zab mineure, à partir de l'est du Tigre
Une bande commençant au coin ouest de Diarbekir et limité au nord par l'Euphrate et au sud par une ligne au nord d'Ourfa puis tracée vers l'ouest jusqu'à Alexandrette
Total

32 375
49 987
38 850
27 195
38 850
51 800


12 950
252 007

DARDANELLES

Le détroit des Dardanelles devrait être exempte de fortifications; elles ne devraient être employées comme base navale par aucune puissance, quelle qu'elle soit, ni en temps de paix, ni entretemps de guerre; les navires de commerce et de guerre de toutes les nations devraient avoir des droits envers les Dardanelles sur une base équitable

Je vais à présent fournir des explications brèves sur les raisons de la répartition des territoires proposée ci-dessus.

La partie de la Turquie d'Europe allouée à la Bulgarie, et les dispositions proposées pour la partie restante de la Turquie en Europe, Constantinople y comprise, n'a besoin d' aucune explication .

De même pour les territoires à affecter à une Turquie indépendante, les raisons suivantes devraient suffire :

Plus de cinquante pour cent de l'élément turc de l'Empire turc doivent se trouver à l'intérieur des frontières attribuées à la Turquie. Les deux premières capitales des Turcs doivent se trouver à l'intérieur de ses frontières. Pour des raisons commerciales, ces territoires sont sans égaux, en ce qu'ils contrôlent l'accès à la Mer Noire et à la Méditerranée. Le sol de chaque pied carré de la terre attribuée à la Turquie est excellent pour l'agriculture et le climat du pays est tempéré et sain. Si les Turcs avaient une quelconque capacité à gouverner, sa taille est assez grande pour accueillir une population double de sa population actuelle qui se trouve sur l'ensemble de l'Empire turc.

La Grèce devrait avoir Smyrne, pour la raison qu'elle est dans sa langue et dans sa civilisation une province grecque.

Une Arménie indépendante devrait être créée, parce que les Arméniens sont tout aussi prêts à se gouverner que ne le sont les Grecs, les Roumains, les Bulgares et les Serbes, et à fortiori parce que la question arménienne ne pourra être résolue sans que les Arméniens aient une possibilité d'indépendance et de développement propre. La partie principale de la Grande Arménie est adjacente à l'Arménie russe. Tandis que d'un point de vue sentimental, cette partie devrait être intégrée à l'Arménie, des considérations politiques et économiques suggèrent le contraire. Une Arménie indépendante allant jusque là serait sur la route de la Russie et ne saurait conserver longtemps ses chances d'indépendance politique à long terme. D'un point de vue géographique, elle serait entourée de grandes puissances et ne devrait pas avoir d'ouverture sur la mer, et en conséquence, souffrirait économiquement de la même façon que la Serbie a souffert depuis qu'elle est redevenue indépendante. Les provinces de Kharpout et de Sivas affectées à l'Arménie telle qu'elle est proposée sont des régions qui faisaient partie de la Grande Arménie. Elles sont essentiellement de langue et de civilisation arméniennes. L'est d'Ankara, tout comme l'est de Konia, lient la Grande Arménie à la Petite Arménie et comprennent une vigoureuse et croissante population arménienne qui, pour le commerce et l'éducation, l'emporte sur ses voisins turcs. La partie nord d'Alep et d'Adana constituent la Petite Arménie, qui devint la dernière forteresse du Royaume Arménien de Cilicie. Le deuxième plus grand monastère arménien dot se trouver en Cilicie. C'est en Cilicie qu'en 1909 les Jeunes Turcs perpétrèrent le massacre de 30 000 Arméniens, hommes, femmes et enfants.

Le pays désigné sous le nom de Syrie est arabe dans son expression et sa culture. L'Arabe de cette région est en majorité chrétien. L'influence française là a été affirmée et reconnue parmi les Grandes Puissances.

Dans le réajustement des territoires de la Turquie, le Juif occupe un droit légitime de reconnaissance. La création d'une Judée indépendante n'est pas seulement la reconnaissance d'un juste droit national juif, mais devrait aussi être utile à résoudre en partie le problème juif dans d'autres terres.

Jérusalem ville et ses environs devraient recevoir un statut de neutralité sous l'autorité d'une commission mixte internationale .

Le droit de l'Angleterre sur les territoires qui lui sont attribués est bien reconnu et, par conséquent, d'autres commentaires sont ici inutiles.
Russophiles et russophobes sont unanimes : la Russie est fondée à vouloir un accès à l'océan, qu'elle n'a pas actuellement. La proposition satisfait à cette impérieuse aspiration nationale.


DES CHRÉTIENS EN GRAND PÉRIL
Talaat Bey Déclare qu'il n'y a de Place en Turquie que pour Les Turcs
Câble Spécial au New York Times

Publié le 13 janvier 1915

ATHENES, 12 jan. 1915, (Dépêche adressée au London Daily Telegraph.)— On affirme dans les milieux bien informés que les Turcs ont pour l'instant abandonné leur avance sur l'Egypte.
A Constantinople, la grande inquiétude vis-à-vis d'un passage en force des Dardanelles persiste.
Il est évident que la situation des Chrétiens est extrêmement précaire, même dans les grandes villes, et Talaat Bey, le ministre de l'intérieur, a déclaré au conseiller du Patriarcat grec qu'il n'y aura désormais en Turquie de la place que pour les Turcs. Bien qu'il ait renouvelé les assurances auprès du ministre grec sur la cessation des persécutions anti-grecques, aucune réelle amélioration de la situation n'est perceptible.
Les Turcs ont repris le renforcement des lignes de Tchataldja.


LES TURCS AURAIENT CONSEILLE AUX CHRETIENS DE FUIR
Menaces de Massacre Général à Constantinople si la Flotte Alliée Passe les Dardanelles
11Janvier 1915

ATHENES, 9 jan. 1915, (Dépêche adressée au London Daily Telegraph.)—Une personne arrivée de Constantinople, dont la situation permet de connaître l'évolution des faits, m'a donné beaucoup d'informations concernant l'état actuel des affaires dans la capitale turque. Selon lui, le gouvernement turc ne craint nullement une révolution que la situation internationale pourrait provoquer, et les mesures prises contre les ennemis du Comité des Jeunes Turcs sont à ce point radicales qu'aucun mouvement de leur part n'est possible.

L'attention et l'anxiété du gouvernement sont entièrement mobilisées par la possibilité d'un passage en force des Dardanelles par la flotte alliée. Il semble aussi que cette crainte soit partagée par son mentor allemand, dans la mesure où le baron von Wangenheim, l'ambassadeur allemand, a averti le ministre d'un état balkanique à Constantinople que dans l'éventualité d'un passage en force de la flotte alliée dans les détroits, les Turcs déchargeraient leur colère par un massacre de la population chrétienne. A Constantinople, dans les ministères, on ne fait désormais plus aucun mystère de ses sentiments vis-à-vis des sujets chrétiens.

Au Patriarcat grec, qui lui avait adressé des remontrances à la suite des excès commis par les organes de son ministère, Talaat Pacha a répondu sans équivoque qu'il n'y a pas de place pour les Chrétiens en Turquie, et que ce que le Patriarcat pourrait faire de mieux pour ses fidèles serait de leur conseiller de disparaître et de laisser les lieux aux réfugiés musulmans.
 


A ERZEROUM LES FANATIQUES TUENT LES CHRÉTIENS
La Proclamation de la Guerre Sainte précède la Destruction d'Immeubles Appartenant à des Arméniens
VIOLENT COMBAT DANS LE CAUCASE
Selon certaines informations, Izzet Pacha , avec une armée forte de 76 000 hommes,
marcherait sur le Canal de Suez--Enver se dirigerait vers l'Egypte.
29 Novembre 1914

PETROGRAD. 28 nov.---Un télégramme reçu ici adressé depuis Odessa décrit une explosion de violences à Erzeroum. Des dépêches reçues à Odessa de cette ville turque indique qu'à la suite de l'affichage d'une proclamation appelant les Mahométans à la guerre sainte, tous les clubs, églises et écoles arméniennes ont été détruits par la foule. Quatre Arméniens, dont une femme, ont été tués dans les rues.


DES ARMÉNIENS TURCS EN REVOLTE ARMÉE,
prêts à se joindre aux envahisseurs russes, s'étant exercés et ayant rassemblé des armes,
EN VUE DU JOUR DE LA DELIVRANCE
Un Journal National Écrit Qu'ils Sont Préparés au Sacrifice et Refusent de Rejoindre l'Armée Turque.
Publié le 13 Novembre 1914

PETROGRAD, 12 nov. 1914 – Des reportages arrivant dans la capitale russe et issus de la frontière turque attachent une importance grandissante au rôle que les Arméniens jouent dans la guerre russo-turque.
Dans plusieurs villes occupées par les Russes, les étudiants arméniens se sont montrés prêts à se joindre à l'armée d'invasion, expliquant s'être préparés pendant l'approche des Russes en s'entraînant et en rassemblant secrètement des armes. Tout au long du front de marche, selon ces dépêches, les paysans arméniens accueillent les troupes russes avec enthousiasme et leur donnent des provisions gratuitement.
Un journal arménien, à propos de cette crise de l'histoire d'Arménie, publie ce qui suit :
"Le jour de la délivrance attendu depuis si longtemps est proche, et les Arméniens sont prêts à tout sacrifice rendu nécessaire par leur devoir évident."
De cette région frontalière, d'autres reportages sont parvenus à Petrograd faisant état de conflits armés résultant du refus des Arméniens de devenir des conscrits turcs et de remettre leurs armes.
On dit à présent que l'importante ville de Van est aujourd'hui assiégée par des bandes de guérilleros arméniens nombreuses. A Feitun [Zeitoun], les insurgés seraient plus de 20 000 et ils auraient défait les troupes turques envoyées contre eux, leur causant de nombreuses pertes.

Voir aussi :


LE SORT DES TURCS EST SCELLÉ,
DIT LLOYD GEORGE
Les ravageurs de l'Arménie sont faits pour s'entendre avec les pillards des Flandres, affirme-t-il
Télégramme spécial au NEW YORK TIMES
publié le 11 Novembre 1914
 

LONDRES, 10 novembre – Le Chancelier David Lloyd George a fait un nouveau vigoureux discours sur la guerre devant les membres de l'Eglise Libre ce soir à Londres, niant que la Grande Bretagne soit responsable de la guerre. Il a dit en particulier :
" Nous n'étions pas équipés pour un conflit continental, mais nous avons levé la plus grande armée de volontaires que le monde ait jamais vue. Dans quelques mois, nous l'aurons doublée.
 " Nous n'avions aucun projet contre l'Allemagne; nous ne cherchions aucune querelle à l'Allemagne: Dieu m'est témoin, nous n'avons engagé aucune conspiration contre l'Allemagne. Nous sommes dans cette guerre pour des raisons de pure générosité, pour défendre le faible. "
Parlant de la Belgique, le Chancelier a dit: " Les Allemands ont volé leurs vivres aux Belges pour les besoins de leur armée. Ils s'adressent à présent à l'Amérique en disant ' Nourrissez les '. Ce n'est pas l'Amérique qui a dévasté leur pays.
" Nous sommes à présent assaillis par une autre puissance ancienne: la Turquie. Nous avons fait tout notre possible pour éviter un conflit. Personne ne peut avoir montré autant de patience devant autant d'insolences et de vexations que la Grande Bretagne face au traitement qu'elle a reçu de ce misérable, ce méprisable empire sur le Bosphore.
" Je suis heureux que le Turc soit appelé à remettre ses comptes définitifs. Les ravageurs de l'Arménie et les pillards des Flandres sont faits pour s'entendre. Les Turcs de l'est et les turcs de l'ouest sont tous deux des empires militaires brutaux avec un seul dieu, la violence ".
Le Chancelier a poursuivi en déclarant:
" Dans les quelques jours qui ont précédé, j'ai eu le privilège de rencontrer l'un des plus grands généraux de l'Armée Française et de parler avec lui de son expérience dans la guerre et de ce dont il a été témoin – le carnage, l'épuisement, la terreur – et il m'a dit, ' l'homme qui est responsable de cette guerre a l'âme d'un démon. '
" Cela venait du cœur de l'un des plus grands stratèges de cette Armée Française, qui est au combat depuis trois mois. "


LES MUSULMANS MENACENT DE FAIRE LA GUERRE AUX CHRETIENS
Manifestations à Damas
Craintes d'Invasion de l'Egypte

31 octobre, 1914 -


Par Transmission Sans Fil Marconi au New York Times.

CONSTANTINOPLE, 30 oct.,-- Sir Louis Mallet , l'Ambassadeur Britannique, a attiré l'attention du Grand Vizir sur les informations relatives à une intrusion des Bédouins en territoire égyptien. Il a averti le Vizir qu'une telle intrusion serait considérée comme un acte hostile de la part de la Turquie envers le Gouvernement Britannique.

LONDRES, samedi, 31 oct., -- D'importantes manifestations ont eu lieu à Damas en Turquie Asiatique, en faveur d'une guerre contre les Chrétiens, et spécialement contre la Grande Bretagne, selon une dépêche de la Compagnie d'Echanges Télégraphiques d'Athènes. La concentration de Bédouins le long de la frontière égyptienne continue, ajoute la dépêche. De fortes divisions de cavalerie turques seraient arrivées dans le voisinage du Golfe d'Akaba sur la Mer Rouge à près de 200 miles au sud du Canal de Suez. Cette nouvelle est contenue dans une dépêche émise depuis Le Caire reçue à Vienne, et transmise à Londres par le correspondant à Amsterdam de la Central News Agency


Le Désordre Jeune Turc en Arménie
THE LITERARY DIGEST
source :
Armeniamedia.org
5 juillet 1913

[note du traducteur]Où on voit qu'en 1913, même si dans cet article sa population est sous-évaluée, l'Arménie est encore considérée comme un pays à part entière. Pas comme une contrée, pas comme une région au sens géographique, comme un pays. Où il est manifeste, en 1913, que l'extermination des Arméniens par le massacre, la dépossession et la déportations se poursuit. Notons l'appel pathétique et désespéré du Père Shumavonian essayant de décider les Jeunes Turcs à changer de politique.

"Nos navires ne peuvent sauter par-dessus les montagnes d'Arménie", telle est la brutale remarque qu'avait faite Lord Salisbury, le Premier Ministre d'Angleterre de l'époque, lorsqu'on lui avait demandé de s'interposer pour défendre les Arméniens dont les maisons et les fermes étaient détruites par les Turcs et les Kurdes, dans le sang et les massacres. Cela se passait en 1896, sous Abdul Hamid, mais à présent, les pires atrocités et les mêmes injustices sont commises sous la responsabilité des Jeunes Turcs. Ce gouvernement révolutionnaire, à Constantinople vise à la centralisation. Toute volonté de séparatisme ou particularité nationales doivent être effacées. La langue arménienne, dans laquelle les écrits hébreu et grec ont été traduits dans les premiers siècles de la foi, doit être abolie. Charles Vellay donne dans la Revue de Paris la liste suivante des griefs qui sont au cœur de la Question Arménienne.

 

"En empêchant par tant de persécutions le développement de la race arménienne, le gouvernement ottoman actuel refuse à l'Arménie l'usage de son propre langage et de ses coutumes traditionnelles, et lui dénie ainsi les droits dont même Abdul Hamid n'avait  jamais osé remettre en cause la réalité et la légitimité. A son époque, la nation arménienne avait sa propre administration civile et religieuse. Elle disposait d'une assemblée nationale et des services usuels dans toute administration. Elle disposait d'un budget annuel financé par des taxes spéciales. Comment les Jeunes Turcs pourraient-ils forcer le pays à renoncer à l'usage de sa propre langue, à ses coutumes nationales, et à tous les privilèges que le régime précédent lui avait reconnus ? Le parti, à Constantinople, pourrait-il ne pas voir que ses politiques d'unification et de centralisation deviendraient inévitablement un instrument d'oppression une fois appliquées dans les provinces caucasiennes ?" Les Arméniens, au nombre de 500 000 contre près de 2 millions de Musulmans, ont rapidement compris. Ils se sont retrouvés entre le diable et la mer profonde. Les Kurdes, bandits rapaces et cruels par profession, descendants de ces Karduches dont le férocité et la sauvagerie impitoyable furent un fléau pour Xénophon lors de la retraite des Dix Mille, sévissent du côté du meurtre et du pillage, tandis que de l'autre, le Turc conduit les fidèles de Grégoire l'Illuminateur et les Protestants évangélistes modernes là où ils seront abattus par centaines;  les brigands kurdes pourront alors prendre possession de leurs fermes. L'auteur que nous citons déclare que la Turquie vise actuellement à l'extermination des Arméniens.  

 

"Ainsi, par un singulier paradoxe, le gouvernement Constitutionnel Ottoman à été très vite perçu comme l'incarnation du despotisme le plus brutal par les Arméniens .
 

Les erreurs judiciaires devinrent plus fréquents que jamais. Rien n'était changé dans les méthodes violentes ou sournoises du pouvoir central. Tandis que les Turcs massacraient les Arméniens, les Kurdes s'appropriaient les terres que les possesseurs enfuis au-delà des frontières  avaient laissées.

 

Lorsqu'il est arrivé que les propriétaires soient retournés chez eux pour réoccuper les lieux qui leur appartenaient en droit et reprendre possession de leurs biens, le Conseil de l'état turc décidait contre eux. Comme la population arménienne est avant tout une population rurale, ces persécutions remettent en cause son existence même. Les immigrants musulmans qui sont  introduits par les Turcs depuis le Caucase ou le Turkestan sont installés dans les fermes volées. Ces fermes sont confisquées sous des milliers de prétextes; parfois par signature d'une convention d'échange illégale ou un acte irrégulier, quelquefois par des actes fabriqués, des faux-témoignages, quelquefois parce que les taxes n'ont prétendument pas été payées, ou dette restée impayée. Ce n'est que récemment que l'Archevêque Arménien de Constantinople a soumis au Grand Vizir son rapport sur les fermes et les champs, au nombre de 7 000, qui ont été pris aux Arméniens par les Turcs. "Les Puissances Européennes ont été interpellées pour leur indifférence ou leur incapacité à mettre un terme à ces scandales. La Guerre des Balkans, par laquelle la Turquie a finalement été repoussée hors d'Europe, attire l'attention sur la détresse de l'Arménie. La presse européenne dans son ensemble demande aux Puissances d'intervenir.  Pour les citer :

 

"L'extermination délibérée de la race arménienne se continue, aujourd'hui comme hier par diverses méthodes,  massacres, assassinats, émigration forcée. La Question Arménienne est à présent exposée au regard de l'Europe, et comme l'Empire Ottoman se montre incapable de la résoudre, il faut absolument qu'une solution vienne de l'extérieur."  Selon monsieur Vellay, les intérêts propres de la Russie, de l'Angleterre et de l'Allemagne leur interdit d'intervenir. Lorsque l'Angleterre parle d'autonomie, la Russie lui dit de se taire, car elle ne veut pas d'une autre Bulgarie à ses frontières asiatiques. L'Angleterre et l'Allemagne souhaitent que l'Arménie reste un état-tampon turc pour s'opposer à l'expansion russe vers le sud. Comme le dit cet auteur :

 

"Dans toutes ces discussions diplomatiques, les intérêts et la sécurité des Arméniens pour eux-mêmes ne compte pratiquement pour rien.  Le regard des Puissances ne porte guère plus loin que leurs propres intérêts économiques et politiques." Un journal d'opinion arménien publié à Constantinople, l'Avedaper, publiait il y a peu l'analyse de la situation d'un ecclésiastique arménien, le Révérend A.B. Shumavonian, dans lequel il déplore le "grands cris, peu de laine" […dit le diable en tondant ses cochons, NdT] de l'agitation de la presse arménienne. "Cela n'a que trop duré à présent" s'exclame-t-il avec indignation. "The Times, Le Temps, le Novere Vremya, et le Tageblatt berlinois, n'ont rien à dire de nouveau, et en particulier parce que nos blessures ne sont pas de celles que l'encre peut cicatriser." Il conclut avec un avertissement à la Turquie, la Russie pouvant faire de l'Arménie, un marchepied pour intégrer une partie du domaine asiatique de l'Islam. La Russie a déjà en le nord de la Perse une " sphère d'influence." Que faire si elle consolidait sa position ici et en renforçait la voie d'accès en absorbant les Vilayets turques au sud de la chaîne du Caucase? Pour citer un peu plus cette Arménie patriote et bien informée :

 

"Pas un seul gouvernement ne souhaite ou n'est capable de défendre l'intégrité de la Turquie si la nation turque ne se hâte pas de renforcer sa position par des réformes intérieures…" La Turquie a perdu Chypre sans compensation permanente ou réelle. Les Cosaques Russes peuvent peut-être franchir ces montagnes au sommet desquels les navires anglais ne peuvent grimper, et quand la Turquie demande de l'aide à l'Occident, Sir Edward Grey pourrait bien être tenté de reprendre la remarque de Lord Salisbury et dire, "Nos navires ne peuvent pas gravir les montagnes de l'Arménie'.   Traduction faite pour The Literary Digest.
 


 

LES ARMÉNIENS EN SITUATION CRITIQUE
Lady Frederick Cavendish Appelle à l'Aide en leur Nom
Publié le 26 Mars 1913

 

A l'éditeur du New York Times
Puis je faire dans vos colonnes un appel en faveur d'un peuple qui, pendant toutes ses années de peines, n'a jamais souffert plus qu'en ce moment? Je veux dire les Arméniens sujets chrétiens de la Porte. La guerre entre la Turquie et les États alliés des Balkans ont pris les maris et les frères pour combattre contre des hommes qu'ils considèrent comme des frères; ils sont morts sur les champs de bataille de Thrace, ou sont tombés victimes du choléra, ajoutant plus de veuves et d'orphelins à celles qui sont déjà dans le besoin. Acheter l'exemption de la conscription coûte 40 £, et ces pauvres âmes n'ont pas quarante centimes; ceux qui avaient véhicules et bétail en ont été dépossédés du fait de l'état de guerre.
La guerre avec l'Italie a ruiné les échanges avec les ports méditerranéens, les sauterelles ont détruit les récoltes de l'année, et le peuple souffre encore des effets du terrible hiver 1910-1911, au cours duquel, dans certaines parties de l'empire, 95 pour cent du bétail et la totalité des arbres fruitiers étaient détruits. Le prix des denrées s'était énormément accrus, et la condition du peuple est désespérée. De Brousse, nous avons appris que dans un village voisin, cinq ou six personnes meurent de faim chaque jour.
Les missionnaires implorent, le cœur gros, pour extraire les petits enfants, au moins, de leur misérable taudis, où ils n'ont aucune chance de recevoir toute éducation ou développement de l'esprit. Nous savons que des enfants bien formés, bien éduqués et bien nourris sont le meilleur capital pour un pays, et ceux qui ont déjà été secourus se sont rapidement développés physiquement, moralement et mentalement, grâce à une alimentation, à des soins et à une formation convenables. Ils représentent la future population chrétienne de ce pays.
Le peuple fortuné et généreux d'Amérique n'entendra-t-il pas le récit de cette souffrance non-méritée et ne viendra-t-il pas en aide à leurs propres missionnaires dans leur démarche de samaritain?
Les dons peuvent être envoyés au Révérend Dr Barton, Conseil des Missions Étrangères, Beacon Street, Boston, ou aux " Amis de l'Arménie " 47, Victoria Street, Londres, S.W. England. Un reçu leur sera envoyé avec gratitude.

LUCY F. CAVENDISH
Présidente Amis de l'Arménie
EDITH FRASER
Vice-présidente
E.W. Brooks
Trésorier honoraire
RADSTOCK
J.HEREFORD;
BASIL WILBERFORCE,
F.B. MEYER,
RENDELL HARRIS,
MARY HICKSON,
Secrétaire Honoraire
Westminster, S.W. England,

14 mars 1913

 


L'ARMÉNIE EN DANGER
 Janvier 1913

Traduction d'un article de la nièce du premier ministre UK Gladstone,
plein de remarques alarmistes et prémonitoires.


http://www.armeniapedia.org/index.php?title=The_Peril_Of_Armenia_-la191301

Dans la péninsule balkanique, les événements dramatiques qui se succèdent sont sur le point d'avoir réalisé en un mois, ce qui, il y a un an, n'était qu'un rêve diffus et lointain. Nous avons vu dans les Balkans les armées de l'Alliance avancer et balayer les grandes armées de la Turquie, comme le vent balaye la poussière. Tandis que la puissance ottomane, qui prend ses dernières positions derrière les lignes de Chataija, brille en ce moment de ses derniers feux, il ne reste que peu de chose de la Turquie en Europe à part Constantinople et la bande de littoral qui lui est adjacente. L'Europe a été tirée de son profond sommeil; les diplomates tiennent des conseils, et des efforts sont faits – que nous voulons croire bien réels et fructueux - par les Grandes Puissances, pour "voir les choses menées à leur terme," conformément aux projets des courageux Alliés, et sans se laisser aller aux errements que pourraient dicter les seuls intérêts propres de chacun, habituels en temps de guerre. Dieu aurait voulu qu'une telle "Alliance de l'Europe", réelle, ait été réalisée il y a de nombreuses années, afin de parvenir aux buts légitimes auxquelles il a bien fallu que nous arrivions à présent, au prix de tant de sang et de misère, de tant de terres dévastées et de maisons en ruines.
"Si face à son devoir l'homme mou reste les bras ballants, le grand Vengeur aura tôt fait de l'en dessaisir."

Il se peut très bien aussi que la Turquie ait elle aussi laissé passer une occasion. Pas seulement en Europe mais également en Asie. Si tout démontre qu'au cours des massacres qui ont eu lieu, il aurait suffi au Padicha [terme superlatif de Pacha NdT] de commander qu'il soit mis fin au carnage pour qu'il cesse immédiatement, désormais, lorsqu'un nouveau massacre aura lieu, il se pourrait que le Gouvernement Central s'avère incapable de contrôler les démons qu'il a réveillés.

Finalement, l'Europe, sait à quoi s'en tenir. Mais peut-être ne faut-il pas s'étonner que trop absorbée par le sort de la Turquie en Europe, elle ne veuille pas se tracasser des conséquences de la guerre sur la Turquie en Asie ; les Puissances ne peuvent pas échapper à leur responsabilité, ayant signé le Traité de Berlin (1878), qui imposait que des réformes soient appliquées dans les Provinces Arméniennes ; des réformes qui, elles le savent bien, n'ont jamais été appliquées. Il est sûr, par une cruelle ironie, que les massacres ont eu lieu dans les provinces "protégées". L'Angleterre, par la Convention de Chypre, s'est chargée elle-même du protectorat des Chrétiens dans les provinces asiatiques de la Turquie, c'est-à-dire, dans "toutes les terres habitées par la race et la religion arménienne." Et les Anglais peuvent bien tirer toute la bonne conscience qu'ils veulent : par les voix de leur ambassadeur et de leur consul, de temps à autres, l'Angleterre a fait des remontrances à la Porte, et imposé le renvoi des fonctionnaires les pires qui soient (décorés avec empressement et promus par Abdul Hamid). Une chose s'est jusqu'à présent vérifiée : sans garanties, aucune réforme n'a jamais été et ne sera jamais traduite dans les actes.

Que peut espérer l'Arménie de la guerre extraordinaire qui a libéré les états des Balkans ? Elle tourne son regard vers l'Angleterre avec des tremblements d'appréhension, car à moins d'une intervention, les coups qui libèrent la Macédoine ne feront que serrer un peu plus les chaînes qui enserrent l'Arménie.

Pour la première fois, dans cette guerre, les Chrétiens ont été admis dans l'armée. Pendant des générations, une taxe leur était prélevée en échange du service militaire ; depuis l'octroi de la Constitution, ils partagent la conscription et ce n'est qu'aux familles riches qu'il est possible de racheter la conscription de leur fils, tant le prix en est ruineux.

Dans un premier temps, les soutiens de famille étaient exemptés du service, mais ils sont à présent enrôlés eux aussi. Pour beaucoup d'entre eux, les conscrits chrétiens sont habitués aux métiers sédentaires ; les manœuvres de l'armée leur sont étrangères ; ils ont été coupés soudainement de leur foyer tout simple, et forcés de marcher six heures par jour dans la boue et la neige sans même les chaussures, les vêtements et la nourriture qui conviennent, leurs compagnons de troupe les traitant comme des chiens.

Comme le cœur de ces jeunes hommes a dû être retourné lorsqu'ils ont entendu la proclamation bulgare ! Les Alliés sont leurs frères, combattants pour les causes qui sont chères à eux aussi : la religion, le foyer, l'honneur de leur épouse, la sécurité de leurs enfants. Mais le devoir de ces malheureux garçons est de combattre pour la race qui les a oppressés et harcelés, et qui a fait de leur vie une charge pour eux pendant cinq cent ans. Leur enrôlement dans l'armée avait été pour certains un espoir que les futurs massacres et outrages en Arménie deviendraient impossibles, mais dans cette guerre, en Arménie, l'espoir a laissé la place à la tragédie. Dans les marchés et dans les cafés des principautés turques, les bas-côtés des routes, la rumeur s'est répandue. "C'étaient les Chrétiens". "Voilà ce qui arrive lorsqu'on rompt avec les bonnes vieilles habitudes." [Lucy Cavendish relève donc, en 1913, le grief qui sera encore fait deux ans plus tard à la suite de la déroute de l'armée turque d'Enver en janvier 1915 : c'est la faute des Arméniens ! NdT] Et si eux ne risquent plus rien, gisant sur le versant de la colline ou au fond d'une vallée neigeuse qui leur sert de tombe, ils ont laissé en otages leur mère, leur frère, leur sœur et des petits enfants.

Bientôt, l'armée défaite des Musulmans déambulera à travers l'Anatolie. Ils ont été affectés n'importe où, sans ravitaillement, et que va-t-il advenir d'eux ? Le passé nous le dit. A la fin du dix-huitième siècle, des armées entières indisciplinées ont détruit des villes et laissé les terres dans la désolation ; il semble tout à fait probable que cette expérience se reproduise ; des leçons de Sassoun, Marache, Ayntab, Kharpout, Ourfa et Adana – qu'avons-nous gardé ? A Ourfa se trouve encore un grand édifice au toit écroulé dont les murs épais de pierre sont en ruines : le même incendie qui les a détruits a dévoré entre deux et trois mille Arméniens qui s'y trouvaient morts ou vifs, comme dans un grand sacrifice, en ce terrible jour de dimanche 29 décembre 1895. Il y a un étroit passage près de la ruine de l'école Agbarian à Adana où les troupes Constitutionnelles ont abattu les Arméniens qui tentaient de fuir les flammes, jusqu'à ce qu'ils forment un tas plus haut qu'un homme puisse atteindre. C'est là que la foi arménienne dans la révolution est enterrée. Il se pourrait que les prochains massacres ne soient pas aussi parfaitement organisés, commençant au son d'une trompette et finissant lorsque l'autorité en donne le signal, comme à Ourfa ; mais ils n'en seront pas moins meurtriers, étant le fait de soldats furieux et démoralisés.

Que onze Kurdes, de retour de l'armée, aient osé attaquer Miss Matheison et ses orphelins, (1912) sur la route très fréquentée entre Hadjin et Everek, montre à quel point la situation dans le pays est alarmante. Grâce aux Capitulations, les étrangers sont en général respectés et du fait de sa présence, les filles ont été épargnées ; s'il y a des victimes, leur Etat reçoit des indemnités mais il n'est pas toujours possible de sauver les Arméniens qu'ils accompagnent. C'est ainsi qu'il a été vain que le Docteur Christie entoure un jeune Arménien de ses bras lorsque la meute les a assaillis. Il n'a entendu qu'un cri étouffé lorsque le couteau dentelé fut plongé et retiré de sa poitrine (avril 1909).

On dit des Capitulations, qui protègent les étrangers en leur donnant une autonomie, qu'elles sont une survivance du droit romain ; elles sont nécessaires lorsque les codes moraux et religieux sont inférieurs à ceux des résidents qui s'y trouvent. "Mon Dieu, regardez-les," disait Gallio, le Gouverneur romain, lorsqu'il dirigeait les débats entre plaideurs depuis son siège de juge. Il leur revient, pensait-il, de régler eux-mêmes les affaires de leur millet, ou communauté ; il ne supportait pas d'être importuné.

On ignore en général que le principe est le même pour le statut actuel des Arméniens. Ainsi Mehmet II créa-t-l un précédent lorsqu'ayant fait la conquête de la Turquie : il donna aux Chrétiens de Turquie leurs propres tribunaux, faisant du Patriarche, leur chef politique, son interlocuteur désigné, avec le rang de Vizir, le seul responsable devant le sultan, et faisant des évêques des responsables devant le Patriarche.

Cela eut pour résultat, avec la cession de fonctions, de dégrader le sacerdoce et l'Eglise. Par la suite, en 1862, tous les pouvoirs réels passèrent entre les mains de conseils cléricaux et laïcs élus par l'Assemblée des Représentants Arméniens au nombre de 140. Cette Assemblée était conçue comme un corps civil, chargé des affaires de la communauté arménienne. On l'appelle de nos jours Assemblée Nationale, mais il faut se rappeler que les Turcs constituent la communauté dominante, considéraient les Chrétiens comme les rayas (sujets tributaires). Les réunions de cette Assemblée ont été ces derniers temps très orageuses, le Patriarche s'étant retrouvé le dos au mur. C'est en vain qu'il manifeste et proteste contre les ministres turcs. Le gouvernement turc permet aux bourreaux de son peuple de rester impunis, les gouverneurs locaux dissimulent les faits et sont complices des assassins, et aussi longtemps que les Arméniens ne seront pas autorisés à détenir des armes pour se défendre eux-mêmes contre les Kurdes, leur position restera intenable. Les Patriarches ont donc présenté toues ensemble leur démission. Il faut noter qu'à ce stade, l'Archevêque de Pétra a dit que le seul remède était de demander l'application de l'article 61 du traité de Berlin.

Il faut rappeler cet article contient l'engagement, non seulement de procéder à des réformes, mais aussi d'assurer la protection des Chrétiens contre les Kurdes. La seule possibilité que l'Europe leur ait laissée pour réclamer cette sécurité était de protester auprès du Sultan Abdul Hamid, qui pour toute réponse, a armé les Kurdes et les a organisés en une cavalerie irrégulière baptisée de son nom, Hamidié. En même temps, il a refusé que les Chrétiens se procurent des armes, et son refus a été confirmé par le gouvernement turc, en dépit de la promesse de la constitution "Jeune Turque." Et pourtant, à lire l'évaluation de la Constitution que notre propre gouvernement avait faite dans son Livre Blanc (Turkey, N°1, 1909), en tous les lieux où cette Constitution est applicable, c'est la terreur qui est promise à ceux qui y contreviendraient.

Ne s'agirait-il que d'une belle promesse non tenue ? Il semblerait que ce soit le cas, étant donné que le viol et le meurtre sont aujourd'hui si communs qu'aucun Arménien n'ose plus se déplacer seul. Chaque jour apporte son lot de nouveaux vols de moutons et de bétail. Dans une seule circonscription, 5 000 moutons ont été pris. L'inspecteur de l'école du Siège d'Aghtamar, avec son accompagnateur, a été assassiné à Karkar et cruellement mutilé. Les rapports arrivent, non d'une seule région, mais de lieux aussi vastes que Van et Adana, Bitlis et Hadjin. Vis-à-vis de tous ces événements, le gouvernement turc fait preuve d'une indifférence suprême, et c'est en vain que le Patriarche interpelle les ministres et proteste avec force.

Au regard de ces désordres et de l'indifférence du gouvernement, Noradourian Effendi, le ministre des affaires étrangères de Turquie, a remis sa démission le 28 septembre 1912. Il lui avait été demandé de concevoir un nouveau statut pour l'Anatolie de l'Est. Mais il y en a assez. Il n'y a aucune volonté, et il n'y a jamais eu de volonté, d'intention de mettre ces écrits dans les faits.

L'année 1913 s'ouvre donc d'une manière sinistre pour l'Arménie.
Du fait de la guerre, l'activité a stagné et le prix des produits alimentaires a subi l'inflation ; en plus de celui volé par les Kurdes, le bétail a été saisi pour le transport, et les jeunes actifs ont été envoyés à la guerre. Si leurs voisins musulmans étaient poussés au fanatisme, et si on leur faisait croire que les calamités de la guerre sont dues aux Arméniens, ces derniers se retrouveraient particulièrement exposés. Ce serait une version nouvelle des Chrétiens et de l'incendie de Rome. Les Turcs et les Kurdes ont tellement envié les Arméniens, tellement regardé leurs vaches au pis plein de lait et qu'ils pourraient traire impunément, qu'il apparaît impossible qu'une armée vaincue retournant en Anatolie, sans nourriture, mais en armes, le cœur plein de rancune pour les souffrances cruelles et leur piteuse retraite, puisse tranquillement se reposer.

Le fait que le Sheikh-ul-Islam ait écrit à tous les Muftis des provinces troublées, une encyclique condamnant le fanatisme religieux et leur ordonnant de prêcher contre ses excès est une lueur d'espoir. Il relève que la charia, la loi sacrée en usage dans les tribunaux impose la sécurité des non-Musulmans tout autant que celle des Musulmans. Mais que oui ou non le Djihad qu'il a proclamé dans sa fatwa, c'est-à-dire la guerre sainte, déclenche un bain de sang en Turquie asiatique dépend de l'usage qui en sera fait en les prêches musulmans. En 1908, une réponse des plus efficaces et bénéfiques avaient été faite de ces prêches comme le montre le Livre Blanc de notre gouvernement (Turquie n°1, 1909, section n°65).

A l'occasion de la récente fête de Baïram, le Mufti de Silvan a prêché contre les Chrétiens, les Arméniens en particulier, et cette circonscription a été en conséquence très agitée, tout comme avant, au cours des grands massacres de 1894-1897 et de 1909, les fanatiques de la population avaient été rameutés par les prêches donnés dans ce but. Ainsi celui du jeudi avant le massacre d'Antioche, quand un haut personnage, se disant chef de la Société des Musulmans, qui avait fait le vœu de se dévouer à sa religion et à son pays jusqu'à la mort, est venu haranguer les Turcs, et la formation aux armes et à leur acquisition continua jusqu'au lundi premier avril 1909. Dans l'après-midi, tandis que les chefs mahométans proclamaient en réalité 'Paix, Liberté et Fraternité,' le massacre commença et se prolongea l'arrivée du navire de guerre dont le Vice-consul avait demandé l'intervention. Dans toute cette ville, il ne restait pratiquement plus aucun Arménien vivant.
[Un paragraphe issu d'un document officiel anglais, qui prouve que les déclarations du premier ministre turc sont fausses : un Musulman peut très bien appeler à commettre des actes de génocide NdT].

Des membres de cette société sont envoyés dans les lignes de Chataija, et c'est avec cet esprit que les Oulémas s'efforcent de redonner confiance aux troupes. Quelqu'un devrait demander :'les navires de guerre sont-ils prêts ?' Il y en aura besoin pour aider le gouvernement turc à maintenir l'ordre, pas seulement à Constantinople, mais sur la côte de la Mer Noire et le long du littoral de Cilicie.

Le gentilhomme turc bien élevé semble avoir une fascination pour un certain esprit britannique. Mais souvent, il a été l'organisateur "des événements" [les guillemets sont dans le texte NdT]. En outre, les massacres ont été rendus sans aucun doute encore plus hideux par le laisser aller de la sauvagerie qu'on trouve dans les couches inférieures de toutes les populations. En Turquie, cependant, la soldatesque s'est invariablement rangée aux côtés de ces individus.

Et pourtant, le paysan turc administré par un bon gouverneur est souvent tranquille, sensé, disant en général des Arméniens qu'ils sont "l'élément industrieux, énergique, respectueux de sa personne, de l'Empire Ottoman," et il faut rappeler que la liste est logue des généraux illustres russes qui étaient des Arméniens.


Que les Arméniens aient dû préserver leur mode de vie, à travers tous ces siècles d'oppression, exposés et inquiets en permanence de se voir leurs femmes et leurs filles enlevées, démontre qu'il doit y avoir dans cette race un courage moral. Leur dévotion à tout prix à cette église qui est restée, pendant tout ce temps, ce lien unique de leur unité nationale, leur guide et leur consolatrice, doit émouvoir tous ceux qui ont du respect pour la religion et le patriotisme.

Hommes de jugement reconnu et capables, en Turquie depuis longtemps, ils témoignent que toutes les nationalités peuvent vivre ensemble et heureuses, pourvu seulement que le gouverneur local soit juste.

Nous lisons qu'en ce moment, les gouverneurs des provinces où les outrages sont les plus fréquents qu'ils ne punissent ni arrêtent les criminels, mais passent leur temps à rechercher les armes dans les maisons arméniennes. "C'est le même âne" […mais avec une selle. Dans sa version afghane, cette expression imagée décrit une personne nouvellement placée dans une position élevée NdT] comme dit le proverbe oriental. C'est de cette façon qu'ils ont volé leurs armes aux Arméniens d'Ourfa avant de las massacrer en 1895.

Un gouverneur mahométan peut, s'il le souhaite, protéger ses sujets contre le vol et l'outrage et faire que la vie vaille d'être vécue, mais il est impossible à un gouverneur mahométan de traiter les Mahométans et les Chrétiens qu'il administre à égalité, c'est contraire à sa religion. Le Coran interdit de s'en prendre aux sujets des autres races s'ils paient leurs taxes, mais introduit le dogme selon lequel "les infidèles" ne doivent être que des serviteurs des "vrais croyants." Les conquérir par l'épée et les maintenir en sujétion est le devoir de tout vrai Musulman. Toutes les réformes qui promettent l'égalité des droits sont des mensonges destinées à aveugler l'Europe, parce que les vues éclairées du Sheikh-ul-Islam et de quelques autres dirigeants turcs n'ont pas jusqu'à présent atteint la masse du peuple.

L'injustice de l'oppression subie par les Arméniens est d'autant plus flagrante que le parti Jeune Turc a une dette de reconnaissance envers eux. Il n'est pas exagéré de dire que, sans le soutien loyal des Arméniens, les Jeunes Turcs n'aurait jamais été en mesure de renverser le Palace Camarilla [le groupe qui en 1933 avait convaincu Hindenburg de nommer Adolf Hitler chancelier NdT] qui régentait la vie du pays. Il y a bien sur ceux qui affirment que c'est un cerveau arménien qui avait préparé le coup d'état du 24 juillet 1908 qui avait été couronné de succès.

Après la promulgation de la Constitution le 28 juillet 1908, il semblait pendant quelques mois que l'Age d'or était arrivé. Tous les nationalistes fraternisèrent, et dans le futur, il n'y aura plus ni Arméniens, ni Grecs, ni Turcs, ni Albanais, mais tous étaient des Osmanli (des Ottomans). Tous les prisonniers politiques ont été libérés, les exilés sont revenus et les princes royaux de sang autorisés à sortir de leur isolement ; libéré des mensonges et des espions, le pays commença à respirer plus librement ; et les hommes ont commencé à penser que le Comité Union et Progrès avait transposé ans la réalité, la Constitution de Midhat de 1876.

Au sein du Parti Jeune Turc, il y avait des hommes qui s'étaient élevés au niveau de l'enseignement de leur prophète et voulaient l'égalité pour tous. Avec eux, certaines choses étaient faites, en nommant de meilleurs gouverneurs, et cela évita à Aïtab, Malatia et Kharpout le sort subi par Adana. Et pourtant, aujourd'hui, les Arméniens ne sont pas libres, tandis que les tribunaux ne refusent plus d'entendre le témoignage de Chrétiens, la décision rendue est fondée sur le témoignage des Musulmans. Il faut qu'ils aient peur à présent plus seulement du retour de l'armée, mais aussi des Turcs des Balkans qui retournent à pied en Asie et auront besoin de fermes. Ceux-ci traversent Constantinople avec leur famille et les affaires de leur famille, leur bétail, et leur char à bœuf, beaucoup, comparé à ce qu'ils avaient apporté en Europe cinq cents ans plus tôt. Ils affirment que leur maison avait été brûlée par l'armée turque en retraite, pas par les Bulgares ; ces derniers font la guerre de façon civilisée.

Il y a vingt cinq ans M. Freeman avait prédit que, sauf si les deux points suivants sont examinés avec insistance à la Conférence de Berlin à venir, tout le travail devrait être recommencé. Devant la situation actuelle il serait bon de s'en souvenir :
Premièrement. Quelle que soit la forme de gouvernement de l'une de ces terres, il ne faut pas laisser au Turc le choix des gouverneurs. Deuxièmement. Aucun lopin d'aucune des terres qui doivent être libérées ne doit recevoir en garnison des soldats turcs.
Cet avertissement sera-t-il négligé une fois encore ?

En conclusion, nous voudrions faire les suggestions qui suivent, en plus de celles nombreuses qui ont déjà été faites pour l'amélioration de la condition des Arméniens ; elles nous semblent faisables et modérées toutes les trois.
(1) Une augmentation du nombre des consuls étrangers. Mais le recours aux consuls civils beaucoup régressé depuis que la Turquie s'est rendue compte qu'aucune action ne serait entreprise sur la base de leurs rapports. (2) La substitution de l'effectif des consuls civils par des consuls militaires. Le Turc respecte la chose militaire et il est sûr, d'après les occurrences précédentes, que le consul militaire est plus efficace, et cela équilibrerait certainement le surcroît de coût. (3) La nomination de gouverneurs chrétiens dans les six Vilayets. Les différences introduites par ces trois actions seraient en résumé : (1) les consuls civils
Peuvent faire un rapport sur un massacre, par exemple le Vice-consul Fitzmaurice à Urfa, mars 1896. (2) Les consuls militaires peuvent arrêter un massacre, par exemple le Major Doughty-Wylie à Adana en avril 1909. (3) Les gouverneurs peuvent prévenir un massacre et rétablir l'ordre, par exemple Daoud Pacha [Garabed Artin, un Arménien né à Beyrouth NdT], Gouverneur du Liban qui fut installé le 14 juillet 1861, et qui fit cesser les incendies qui ravageaient le Liban depuis des mois.

Ce dernier était un Arménien catholique, et en dépit des prophéties souvent répétées de la Porte, selon lesquelles la nomination d'un gouverneur chrétien ferait se soulever la population musulmane en nouvelles explosions de fanatisme et se traduiraient par des massacres pires que jamais, il restaura au Liban la prospérité tranquille. Et aujourd'hui, les voyageurs disent que même les champs savent où finit le désordre turc et où commence le règne de la constitution. Mais il faut garder en l'esprit que Dahoud Pacha avait été désigné pour trois ans et ne pouvait être démis à la discrétion du Sultan. (L'effet désastreux du changement de gouverneur, quand leur gestion pour les améliorations vient juste de commencer, se voit à Adana aujourd'hui. Djemal Bey a été envoyé à Bagdad, et l'orphelinat est toujours inachevé, la reconstruction et les subventions aux orphelins impayés).

En outre, Dahoud n'était pas tenu de faire appel aux troupes turques pour maintenir l'ordre, il aurait échoué dans le cas contraire. Il était d'abord soutenu par les troupes françaises, qui ne sont parties en août, alors que les escadrilles françaises et anglaises croisaient encore près des côtes ; et ainsi protégé, il a préparé une force militaire avec les habitants du Liban, ce qui rendit la présence de soldats turcs inutile. C'est ce qui est souhaitable aujourd'hui dans les six vilayets arméniens et la fraction musulmane de la population ne serait que peu désavantagée par rapport aux Arméniens. S'agissant des Kurdes, s'ils se modéraient et si la justice était instaurée, le flot de prospérité qui coulerait sur ces provinces fertiles bénéficierait à tous les habitants et s'ouvrirait au commerce européen. Les prédictions alarmistes du gouvernement turc se sont avérées fausses pour le cas du Liban ; si la même constitution était donnée aux Arméniens, même si la Porte poussait au fanatisme pour que ses prédictions se vérifient, il est plus que probable que l'histoire se répétera.

Quand les six puissances auront décidé, tout aussi résolument que les Alliés l'avaient fait pour les Balkans, que le désordre turc doit prendre fin, il cessera tout net ; c'est un bon sujet pour le Turc, et son fatalisme en fait un esclave du fait accompli. Laissons-le réaliser que son Sort, sous la forme d'une Europe Unie, est trop fort pour lui, et il se croisera les bras et dira "C'est le destin, c'était écrit."

Lucy C.F. Cavendish