Le sujet du Génocide
des Arméniens est trop souvent abordé sous
l’angle de l’Histoire seulement.
C’est en raison de cette conception
fondamentalement erronée du sujet que, par
exemple, à chaque fois qu’il est question de
législation en la matière, on entend
immanquablement l’objection de « Loi
Mémorielle », brandie par certains à
l’encontre des démarches législatives de
l’État.
Il est donc important que tous ceux et
celles qui sont véritablement intéressés par
ce sujet réalisent que le Génocide des
Arméniens n’est pas encore terminé. Il est
actuel, il est toujours en cours.
Voici quelques observations, indicatives et
sommaires seulement, au soutien de cette
affirmation.
Commençons par le négationnisme.
Le négationnisme, le fait de nier la
véracité factuelle d’un Génocide, cela n’est
pas un acte distinct, séparé du Génocide.
Le négationnisme fait partie intégrante du
crime même de Génocide.
Yves Ternon définit bien cette notion sous
cet angle, comme suit : « La négation d’un
génocide est une composante du crime. Elle
est tissée avec le crime. (…). La négation
est à la fois un instrument du meurtre -
elle fait disparaître le cadavre - et une
réaction de défense contre une accusation de
meurtre » (La problématique du
négationnisme, Revue L’Arche, mai 2003).
En conséquence, étant donné que la Turquie
actuelle pratique systématiquement le
négationnisme à l’encontre du Génocide des
Arméniens, cette Turquie actuelle continue
donc, encore et à ce jour, ce Génocide. Il
ne s’agit pas de l’histoire ancienne, mais
de l’actualité immédiate, courante.
Au-delà même du négationnisme, quand on dit
que le Génocide des Arméniens n’est pas un
sujet qui appartient à l’Histoire, c’est
aussi en raison des réalités suivantes –
encore une fois, la liste n’est
qu’indicative - :
. Les problèmes concrets que vivent, à ce
jour, une grande partie des Arméniens de la
Diaspora sont le résultat du fait... qu’ils
se trouvent en Diaspora.
Or, cela ne serait pas le cas, s’il n’y
avait pas eu le Génocide.
Sans parler encore de troubles identitaires
complexes, ni même d’un profond préjudice
psychologique, transmissible à tout jamais,
sans parler encore de difficultés
économiques, causées par la dépossession
d’actifs familiaux, de la perte d’un
patrimoine ancestral considérable, dans le
cadre du génocide, évoquons ici les réels
problèmes de sécurité physique, de dommages
corporels et matériels, que subissent
actuellement encore les Arméniens, dans
certains pays d’accueil (pensons par exemple
au Proche-Orient), de réels problèmes
actuels qu’ils auraient évités s’ils avaient
pu rester et vivre en paix dans leur patrie
d’origine.
. Toujours au niveau de l’actualité
immédiate du Génocide par opposition à ce
qui aurait été autrement son aspect
historique lointain : une partie essentielle
des problèmes vitaux de l’Arménie
d’aujourd’hui est directement liée à ce
sujet.
À cet égard, l’actualité du Génocide des
Arméniens s’inscrit dans l’urgence même,
devrait relever de la priorité la plus
brûlante, sur l’agenda de ce qu’on appelle
la « communauté internationale, dans le cas
spécifique de l’Artsakh... L’une des régions
les plus explosives du monde, en ce moment
même.
. Le Génocide des Arméniens, au sens strict
du terme, se poursuit continuellement, à ce
jour, non seulement dans sa phase ultime
d’effacement de la mémoire abstraite que
constitue le négationnisme, mais aussi par
une politique effective, systématique,
d’élimination physique et matérielle de la
preuve de l’existence arménienne sur les
lieux du Crime.
. Le Génocide des Arméniens a pris la forme
de massacres contemporains de masse, en
Azerbaïdjan et en Artsakh même, de 1988 à
1994.
. Le Génocide des Arméniens s’est manifesté
par une nouvelle invasion de l’Arménie,
durant la même période de 1988 à 1994 ; pas
de l’Artsakh, mais de la République
d’Arménie caucasienne même ; on oublie trop
souvent que les Azéris, donc les Turcs du
Caucase, avaient alors pénétré dans toute la
région du Nord-Est de l’Arménie ; sans une
résistance farouche, cette région aussi
aurait été perdue pour les Arméniens, après
la boucherie habituelle que l’on connaît,
dans ces cas-là.
. Le Génocide des Arméniens continue, à ce
jour, par le blocus de la Turquie contre
l’Arménie, et les positions d’offensives
militaire turques, tout au long de la
frontière du Nakhitchévan.
. Le Génocide des Arméniens est un sujet
d’actualité courante et continuelle, lorsque
l’on sait que sur les fronts de l’Artsakh,
du Nord-Est et du Sud-Ouest de l’Arménie, le
panturquisme, le pan-touranisme, loin d’être
une idéologie abstraite ou obsolète, se
manifeste aujourd’hui même, activement, sous
forme d’agression militaire.
Durant la seule semaine passée, il y aura eu
plus de 230 actes d’attaque directe de la
part des Turcs du Caucase contre les
Arméniens de l’Artsakh et de l’Arménie,
durant lesquels 2000 projectiles de
différents calibres ont été tirés par les
Turcs sur les Arméniens.
Chacun de ces 2000 tirs de projectiles, dans
la seule semaine passée, constitue la
continuation du Génocide des Arméniens. Et
c’est comme cela chaque semaine, toutes les
semaines ; et c’est encore en période de
cessez-le-feu.
1915, c’est aujourd’hui, 1915, c’est demain.
Et ainsi de suite, encore indéfiniment.
À la seule différence que les Arméniens ont
appris à se défendre.
Et au besoin, à riposter aussi.
Me
Haytoug Chamlian /
Հայդուկ Շամլեան
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