à la suite de la défaite ottomane, les principaux responsables du génocide s'enfuirent, surtout en Allemagne. Leur procès eut lieu en 1919 à Constantinople, organisé par les nouvelles autorités libérales turques, dont le but était de dissocier les Jeunes-Turcs, « responsables de tous les maux », et l'état turc, ainsi innocenté. Ce procès des Unionistes eut d'évidentes limites : il se tint dans la capitale alors sous contrôle des Alliés, qui d'ailleurs s'en désintéressèrent bien vite. Il condamna à mort les principaux auteurs du génocide, sans insister sur les demandes d'extradition ; certains verdicts furent annulés ultérieurement.
Il n'empêche que ce procès a existé, et qu'il fut mené à terme par un tribunal turc. Si on le récuse sous prétexte qu'il se tint sous la coupe des vainqueurs, que dire de Nuremberg où pas un Allemand ne siégeait au tribunal ! Ce procès des Unionistes fut publié dans le Journal officiel ottoman. Les nombreux témoignages conservent leur valeur et décrivent tout le processus. C'est ainsi qu'un ex-député de Trébizonde donna les détails de l'embarquement pour noyade des Arméniens dans la mer Noire et précisa « qu'ayant porté ces tragédies à la connaissance de Talaat Bey, aucune mesure ne fut prise à l'encontre du Gouverneur Général Djémal Azmi ». Une dépêche du gouverneur d'Erzeroum confirma que les bandes d'assassins et les pillards des convois de déportés ont été « organisées par Behaeddine Chakir Bey, membre du siège central duComité Union et Progrès ».
Près de Kharpout, des notables arméniens sont conduits en prison.
En juin 1915, ils seront tués dans les montagnes
Pour la ville de Yozgat, le jugement fait état d'un document qui « ne laisse aucun doute ou ambiguïté quant aux instructions données de massacrer les personnes faisant partie du convoi » ; le sous-gouverneur Kemal de Yozgat fut d'ailleurs le seul responsable effectivement exécuté. Dans le procès de Trébizonde, on lit que le gouverneur « a pris les mesures nécessaires pour le massacre et la destruction des Arméniens, selon ses directives secrètes » ; l'organisation des noyades de femmes et enfants y est minutieusement décrite. Le procès de Kharpout jugea Behaeddine Chakir et décrivit le rôle de l'Organisation spéciale.
Devant la carence des autorités, turques ou alliées, à appliquer les sentences, le parti Tachnag forma une organisation de justiciers qui prirent le relais. Furent exécutés, entre autres, Behaeddine Chakir, Djémal Azmi, Djémal Pacha et surtout Talaat, abattu à Berlin, le 15 mars 1921, par Soghomon Tehlirian. Au cours de son procès, les témoignages furent accablants pour les autorités ottomanes. Vu l'état de traumatisme de l'accusé et le désir de rupture de la république de Weimar avec l'ex-Empire allemand, Tehlirian, qui avait pourtant tué un officiel allié de l'Allemagne et réfugié sur le sol allemand, fut acquitté.